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Conflit en Ukraine : la pilule passe mal à l’Est

Publié le 12 mars 2022
Par Magali Clausener
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Plusieurs représentants de laboratoires pharmaceutiques et fabricants de dispositifs médicaux en Europe et aux Etats-Unis alertent sur les difficultés d’approvisionnement des produits de santé en Russie et en Ukraine, liées à l’impact des sanctions internationales prises depuis le début de la guerre. Qu’en est-il pour la France ?

Pour l’exportation, la Russie est le 18e client en valeur de l’industrie pharmaceutique française. Ce qui représente 345 millions d’euros. Nous exportons aussi vers l’Ukraine pour environ 86 millions d’euros », explique Philippe Lamoureux, directeur général du Leem (Les entreprises du médicament). Si l’embargo à l’encontre de la Russie ne concerne pas les médicaments, les laboratoires pharmaceutiques sont cependant confrontés à des difficultés d’acheminement déjà signalées par certains laboratoires pharmaceutiques et fabricants de dispositifs médicaux en Europe et aux Etats-Unis. Le trafic aérien vers la Fédération de Russie est en effet suspendu. Ainsi que le fret routier en raison d’une pénurie de chauffeurs routiers européens prêts à s’y rendre. « Les exportations sont donc assez pénalisées », observe Philippe Lamoureux. Sachant que l’impact peut être plus ou moins important selon le chiffre d’affaires réalisé par chaque laboratoire présent dans le pays.

Autre conséquence plus méconnue : les essais cliniques. « Plusieurs essais sont menés avec des patients russes. Le recrutement a été stoppé », souligne le directeur général du Leem. A ces problèmes s’ajoute la situation des collaborateurs des laboratoires qui travaillent en Ukraine et en Russie. « Il a fallu les sécuriser ou les rapatrier, notamment de l’Ukraine », précise Philippe Lamoureux, alors que le 3 mars dernier la France recommandait à ses ressortissants « dont la présence et celle de leur famille n’est pas essentielle » de quitter la Russie. Enfin, dernier élément qui peut inquiéter : l’exclusion des banques russes du système de paiement international Swift. Selon Philippe Lamoureux, il est encore difficile d’évaluer l’impact de cette sanction, mais cela « pourrait ralentir les paiements avec les autres pays ».

L’économie russe en berne

Les cosmétiques sont des biens de consommation, ils ne sont pas non plus touchés par les sanctions. « La France est peu exposée car les exportations vers la Russie représentent 300 millions d’euros sur un total de 16 milliards, soit moins de 2 % de nos exportations », déclare d’emblée Emmanuel Guichard, délégué général de la Fédération des entreprises de la beauté (Febea). Pas d’inquiétude donc, d’autant que le marché russe est en déclin. « Alors qu’en 2021 nous avons enregistré une forte croissance des marchés par rapport à 2019, celui de la Russie est en régression de – 20 % en raison de ses difficultés économiques. C’est la plus forte décroissance parmi les trois pays – Brésil, Dubai, Russie – concernés par une diminution des ventes », détaille Emmanuel Guichard.

En revanche, une hausse du coût de l’énergie pourrait avoir des répercussions pour les entreprises cosmétiques et pharmaceutiques si la crise durait. D’où leur vigilance sur ce point.

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LES CHIFFRES DES EXPORTATIONS VERS LA RUSSIE

L’Union européenne a fourni 6,5 milliards d’euros de produits pharmaceutiques à la Russie en 2020, soit environ 8,4 % des exportations totales de la région vers la Russie, selon les données d’Eurostat.

En 2021, elle a envoyé environ 1,6 milliard d’euros de dispositifs médicaux (DM) dans le pays, selon MedTech Europe, une association européenne des professionnels du DM.