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Paxlovid : « T’en veux ? »
L’antiviral indiqué dans le traitement du Covid-19 Paxlovid fait l’objet de trafics, notamment vers la Chine, impliquant des pharmaciens d’officine. Le ministère de la Santé suspecte une « escroquerie en bande organisée ». Les autorités de santé ont lancé des inspections en pharmacie.
Ce sont les répartiteurs qui ont sonné l’alerte auprès des autorités sanitaires. Alors que les pharmacies commandent habituellement au fil de l’eau à leur grossiste une boîte de Paxlovid (nirmatrelvir/ ritonavir), ils ont constaté – depuis une quinzaine de jours, selon Alliance Healthcare Répartition – des achats conséquents, de l’ordre de 100 à 200 boîtes, par certains pharmaciens d’Ile-de-France, de Provence-Alpes-Côte d’Azur et du Grand-Est (notamment au niveau frontalier). Des besoins incohérents avec l’évolution de l’épidémie de Covid-19 dans l’Hexagone. « Nous avons eu connaissance d’une agence en Ile-de-France à laquelle une pharmacie de Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis) a commandé 1 000 boîtes et une autre dont les stocks ont été mis à zéro en raison de commandes également importantes », rapporte Emmanuel Déchin, délégué général de la Chambre syndicale de la répartition pharmaceutique (CSRP). « Ce ne sont que quelques cas isolés », complète Alliance Healthcare Répartition.
Ordonnances en chinois
« Il y a une forte demande de la communauté asiatique sur Paris et Marseille, et plusieurs pharmacies se sont fait livrer des cartons entiers de Paxlovid, confirme Laurent Filoche, président de l’Union des groupements de pharmaciens d’officine (UDGPO). Certains patients présentent de fausses ordonnances avec de faux tests RT-PCR. D’autres possèdent de vraies prescriptions ou essayent de proposer de l’argent directement aux pharmacies » et parviennent aussi au comptoir « des ordonnances en chinois pour lesquelles la délivrance est en principe interdite ».
Face à la récente explosion des cas de Covid-19 en Chine, et alors que Pékin tente de négocier avec Pfizer une licence permettant à des producteurs nationaux de fabriquer et de distribuer une version générique de l’antiviral, les trafiquants sont prêts à payer 200 € la boîte qu’ils envoient ensuite en Chine en la revendant à prix d’or, selon Marie-Josée Augé-Caumon, conseillère de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO). D’après les médias locaux, les boîtes de Paxlovid se négocient actuellement sur le marché chinois jusqu’à 50 000 yuans (6 900 €), alors qu’il est pris en charge en France à 3,57 €, hors honoraires de dispensation.
Distribution sous surveillance
Ces commandes atypiques ont fait immédiatement l’objet d’une information transmise de façon nominative à Santé publique France auprès de qui les répartiteurs se fournissent. « Conformément à leurs bonnes pratiques de distribution, les répartiteurs sont tenus de surveiller les ventes en quantités anormales et de les déclarer tous les mois à l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et à Santé publique France (pour les médicaments issus du stock de l’Etat). Ainsi, les pharmaciens se livrant à des trafics ne peuvent pas agir en toute impunité », explique Lilia Bulteel, directrice générale en charge du commerce chez Phoenix Pharma.
« La Direction générale de la santé (DGS) va se saisir de cette affaire de trafic et les pharmacies vont faire l’objet de contrôles », prévient Pierre-Olivier Variot, président de l’USPO, ajoutant qu’un contingentement à 20 boîtes par officine est déjà instauré. Il appelle les pharmaciens à la vigilance face à ces demandes illicites et à se montrer attentifs aux prescriptions présentées. Les pharmaciens ne peuvent pas exporter de médicaments et ne peuvent faire de la vente au détail que pour leur patientèle, rappelle-t-il.
En ce début d’enquête, le ministère de la Santé et de la prévention avance prudemment le chiffre de 3 000 commandes suspectes « mais cela pourrait être moins ou plus ». Et « n’exclut pas » des actions au pénal. Les peines encourrues sont lourdes : emprisonnement, sanctions financières et ordinales.
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