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Dispensation à l’unité de médicaments : les deux pharmaciens sanctionnés ne comptent pas en rester là
Le 30 avril 2025, le Conseil régional de l’Ordre des pharmaciens de Nouvelle-Aquitaine a prononcé une interdiction d’exercer de six mois, dont quatre avec sursis, à l’encontre d’Eliza Castagné et Antoine Prioux, pour avoir pratiqué la dispensation à l’unité (DAU) de certains médicaments, en dehors du cadre réglementaire. Dans une lettre ouverte diffusée le 12 mai, les deux professionnels annoncent faire appel et dénoncent une sanction qu’ils jugent injuste, disproportionnée et contraire aux enjeux actuels de santé publique. « Des pharmaciens condamnés pour avoir agi contre les pénuries, le gaspillage, l’antibiorésistance et les accidents, en dispensant des médicaments à l’unité. »
Une réponse locale à des tensions systémiques
La DAU a été mise en œuvre dès 2019 dans leur officine, en réponse à une pénurie de corticoïdes. S’en est suivie une extension progressive à d’autres classes thérapeutiques à risque : antibiotiques, benzodiazépines, opioïdes. Cette démarche s’est inscrite dans un travail coopératif pluridisciplinaire au sein d’une Maison de santé pluriprofessionnelle universitaire.
Les médicaments non délivrés étaient séparés, conservés et redistribués sans surfacturation, selon des modalités rigoureuses. Pour les deux pharmaciens, cette initiative visait à préserver l’accès aux traitements dans un territoire fragile, en évitant le gaspillage et les ruptures.
Une légitimité croissante, mais une légalité absente
Les auteurs dénoncent une sanction fondée uniquement sur un article de presse, sans plainte de patients ni signalement d’incident. Ils estiment que cette décision ne tient pas compte des évolutions réglementaires en cours, ni de la légitimité croissante de la DAU à l’international. « Le véritable danger ne réside pas dans la DAU, mais dans les dérives qu’elle cherche à prévenir. »
Une critique politique du modèle économique de la pharmacie
Dans leur lettre, les deux pharmaciens pointent un paradoxe économique structurel : « Plus la santé publique est dégradée, plus la santé financière des pharmacies prospère. » Ils y voient une source de perte de sens, alimentant démotivation, reconversions et crise d’attractivité. Leur position : refuser le statu quo, au nom d’un exercice pharmaceutique aligné sur les priorités écologiques, sociales et sanitaires contemporaines.
Coopérative pharmaceutique, pharmacie clinique, numérique responsable
Au sein du pôle de santé MilleSoins, ils mènent plusieurs projets innovants : coopérative pharmaceutique territoriale, accès sécurisé aux dossiers médicaux, intégration de la pharmacie clinique dans les parcours, développement d’un outil de répartition locale des médicaments, participation aux travaux de AVECsanté, du Shift Project et de l’Alliance Santé Planétaire. « Nous assumons pleinement notre responsabilité : œuvrer à la bifurcation du système de santé vers une économie solidaire, écologique et au service des plus vulnérables. »
Une pétition ouverte sur Change.org
Les deux pharmaciens appellent à un large soutien de la profession et du public. Une pétition est en ligne sur Change.org. Ils concluent leur missive en citant Edgar Morin : « Toute innovation transformatrice est d’abord une déviance. »
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