Je voudrais soulager ma poussée d’arthrose

1 Je questionne

Préciser la demande

« Pouvez-vous me montrer votre articulation ? » et « Est-elle gonflée ? » estiment l’importance de l’inflammation et la présence d’un épanchement (œdème). « Avez-vous pris quelque chose pour vous soulager, topique, antalgique/anti-inflammatoire… ? » évalue l’automédication.

Rechercher certains critères

« À quand remonte votre dernière consultation chez le médecin pour votre arthrose ? », « Les poussées sont-elles fréquentes ? » et « Hors poussées, la douleur persiste-t-elle ? » évaluent le suivi et l’évolution de la pathologie. « Le médecin a-t-il instauré un traitement de fond, tel un anti-arthrosique symptomatique d’action lente, ou prescrit une orthèse ou canne de marche ? » précise la prise en charge. « Êtes-vous suivi pour une autre pathologie (cœur, tension…) ? » évalue le terrain et les éventuelles contre-indications.

2 J’évalue

Si la poussée d’arthrose est légère, le conseil officinal, avec la prise des traitements prescrits lors d’une ancienne poussée ou l’automédication, suffit parfois en attendant un avis médical.

Une consultation s’impose rapidement dès qu’il existe un épanchement traduisant une inflammation importante, délétère pour le cartilage, ou que la douleur est plus forte qu’une précédente poussée et non soulagée par les traitements qui avaient été prescrits.

3 Je passe en revue

Antalgiques anti-inflammatoires

En l’absence d’œdème et si la douleur est peu intense, le paracétamol peut soulager. S’il ne suffit pas, si la douleur est importante ou qu’il existe un épanchement, un anti-inflammatoire non stéroïdien (AINS) est indiqué : ibuprofène ou autre de l’armoire à pharmacie anciennement prescrit pour cette indication, et après avoir vérifié l’absence de contre-indications.

Topiques AINS

Jugés contraignants et/ou peu efficaces, ils sont souvent délaissés. Or, « ils ont un effet prouvé dans l’arthrose des articulations superficielles - main, genou, cheville -, à condition de les appliquer deux à trois fois par jour durant cinq à sept jours au moins pour constater un bénéfice », explique le Pr Sellam, rhumatologue, président de la section arthrose de la Société française de rhumatologie (SFR). Tous les AINS topiques peuvent être proposés, dont l’ibuprofène en conseil dans Advilmed, Cliptol…, mais le diclofénac est le seul à avoir une AMM dans l’arthrose : en gel à 1 % (VoltarenSpé…) ou en emplâtre (Flector Tissugel EP 1 %…). Ce dernier limite le nombre d’applications à deux par jour, avec diffusion régulière et continue de l’actif. Précautions : utilisables dans presque toutes les contre-indications des AINS per os, sauf grossesse à partir du sixième mois et antécédents d’asthme, d’angiœdème ou d’urticaire liés à un AINS ou à l’aspirine.

Thermothérapie

« Elle peut bien fonctionner mais son effet est de courte durée », relève le Pr Sellam. S’il y a un gonflement, le froid est le plus souvent bénéfique. Exemples : packs chaud/froid, sprays ou gels de cryothérapie - Biofreeze gel, Urgo Spray froid… -, présence de menthol à effet froid dans Cliptol… « La chaleur peut mieux soulager des poussées d’arthrose des mains, sans gonflement », note le Dr Grange, rhumatologue, ex-président de l’Association française de lutte anti-rhumatismale (Aflar).

Orthèses et aides à la marche

Il s’agit de limiter les contraintes sur l’articulation pour ne pas aggraver la douleur.

• Pour le pouce, « des orthèses ont prouvé leur efficacité », indique le Dr Grange. Il s’agit des orthèses thermomoulées sur mesure et des orthèses d’immobilisation à porter la nuit, voire de jour (lire « La rhizarthose », Porphyre n° 592, novembre 2022, et rubrique Matériel n° 586, mai 2022). Exemples : Epitact Orthèse pouce rigide de repos, RhizoImmo, Manugib Rhizarthrose Fonction, RhizoLoc, Neo Rhizo Confort… Des orthèses souples ou moins immobilisatrices peuvent convenir si la douleur est plus légère. Exemples : Epitact Orthèse pouce souple d’activité, Orthèse poignet-pouce de maintien Gibaud…

• En cas d’arthrose du genou, une canne, utilisée du côté opposé au genou atteint, aide à « décharger » l’articulation, au moins au plus fort de la douleur. Les orthèses stabilisatrices « articulées » ou « de décharge » dotées de renforts rigides soulagent mais sont souvent mal acceptées. Exemples : GenuTrain OA, OA Defiance ou FullForce, Genu Control… « Je préfère prescrire une genouillère souple, peut-être moins efficace, mais qui sera portée, note le Dr Grange . Elle rassure, stabilise l’articulation et facilite la reprise de la marche ». Exemples : GenuTrain A3, Genugib Arthrose, GenuPro Comfort, Ligaction Pro Expert, ClimaFlex OA, Action Reliever… En pratique : encourager le port.

Phytothérapie

La racine de curcuma renferme des polyphénols appelés curcuminoïdes, dont la curcumine, aux propriétés anti-inflammatoires largement démontrées en laboratoire. Les études cliniques dans l’arthrose sont très nombreuses, avec des résultats contradictoires. « Le curcuma est toutefois le complément alimentaire qui a le plus de preuves d’efficacité sur la douleur arthrosique », tranche le Pr Sellam, mais « impossible de recommander une dose efficace tant les types et quantités d’extraits utilisés dans les études sont disparates ». Le curcuma ne soulage pas une poussée mais il peut être utile après la phase aiguë, en relais des antalgiques/anti-inflammatoires et/ou pour aider à en diminuer les doses. Précautions : pas d’utilisation en cas d’atteinte des voies biliaires, risque d’interactions avec les anticoagulants ou antiagrégants plaquettaires notamment. En raison d’hépatites, les autorités de santé recommandent que les compléments alimentaires ne dépassent pas 153 mg par jour de curcumine pour un adulte de 60 kg. Cette dose peut éventuellement s’ajouter à un apport alimentaire au maximum à 27 mg, soit au total 180 mg par jour. Éviter les formes biodisponibles (ajout de poivre, encapsulation dans une matrice lipophile, tels liposomes, phytosomes…), qui augmentent l’absorption digestive du curcuma, et donc ses effets indésirables. Exemples de curcuma non biodisponible : Léro Curcuma, Phytostandard Curcuma, Curcuma Solgar, Curcuma bio Nutrimea…

4 Je choisis

Selon la douleur

• Légère à modérée : topique AINS + thermothérapie + paracétamol ; AINS si échec +/- orthèse +/- curcuma.

• Modérée à importante : paracétamol ou AINS si pas de contre-indications + topique AINS + orthèse +/- thermothérapie.

• Si fond douloureux chronique : orthèse +/- curcuma.

Selon le patient

• Pathologie biliaire : pas de curcuma.

• Sous anticoagulant ou antiagrégant : curcuma à éviter.

• Antécédent d’ulcère ou d’hémorragie à un AINS, insuffisances cardiaque, rénale ou hépatique sévères : pas d’AINS per os.

• Antécédent d’allergie à un AINS ou aspirine : pas d’AINS per os, ni topique.

• Facteurs de risque cardio-vasculaire (hypertension artérielle, insuffisance cardiaque, diabète, hyperlipidémie…) : AINS sur avis médical.

5 J’explique

« Le repos de l’articulation est nécessaire, mais immobiliser de façon prolongée est contre-productif, d’où la nécessité de soulager vite. Il ne sert à rien de retarder la prise d’un AINS ou une injection intra-articulaire de corticoïde s’il existe notamment un épanchement », indique le Dr Grange. Même si la poussée est légère et passe rapidement, un avis médical ou rhumatologique est nécessaire pour rappeler les conseils d’hygiène de vie, l’intérêt des orthèses et de la kinésithérapie, et instaurer ou adapter le cas échéant le traitement de fond.

6 Je conseille

Modalités de prise

• Paracétamol/AINS. Si besoin, ibuprofène et paracétamol peuvent être combinés mais vérifier l’absence de cumul. L’AINS s’utilise sur la durée la plus courte possible, ainsi que le paracétamol, souvent poursuivi sous prédiv d’une bonne tolérance. Or, des troubles hépatiques, digestifs et cardio-vasculaires sont rapportés lors de prises au long cours(1).

• AINS en topique. « Ils peuvent être débutés en même temps que l’antidouleur, puis poursuivis seuls plusieurs jours », indique le Pr Sellam. Les emplâtres de diclofénac ne sont indiqués que dans l’arthrose du genou mais nos experts les prescrivent, après les avoir découpés, dans l’arthrose des doigts. Durée du traitement limitée à quatorze jours, sauf avis médical contraire. Se laver les mains après les applications, sauf pour l’arthrose des mains ! Pas d’exposition au soleil.

• Thermothérapie : à proposer en alternance avec un topique ou sur un emplâtre.

• Orthèses : celles pour rhizarthrose en particulier sont efficaces sur la douleur et, au long cours, limitent l’enraidissement de l’articulation.

Hygiène de vie

• L’activité physique, sur prescription au besoin, est efficace sur la douleur chronique et préserve la mobilité de l’articulation. « Au moins 6 000 pas par jour aident à préserver l’articulation du genou selon une étude », conseille le Dr Grange.

• Une perte de poids améliore la pathologie, atténue les douleurs chroniques et protège l’articulation en cas d’atteinte du genou et des autres articulations arthrosiques.