Thess bientôt testé en officine - Porphyre n° 591 du 23/09/2022 - Revues
 
Porphyre n° 591 du 23/09/2022
 

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Auteur(s) : Christine Julien

La pharmacie Cantonale de Truchtersheim, en Alsace, sera la première officine à tester Thess, un pilulier mobile connecté associé à un logiciel de télésanté. Ce dispositif unique au monde, fabriqué en France, combine observance, sécurisation et bon usage du médicament. L’expérience débute le 17 octobre.

Thess a la taille « d’une petite bouteille d’eau » pour Xavier Schneider, titulaire à Truchtersheim (67), ou « d’un broc de café, comme disent les Américains » pour Roland Sicard, président de Thess Corporate (voir encadré p. 7). Thess, pour Therapy smart system, est plus qu’un pilulier connecté. C’est une solution qui allie distribution sécurisée de médicaments et télésurveillance, via un pilulier de dispensation « intelligent » et un logiciel de télésanté. Déjà utilisé dans des hôpitaux français et américains, dont la prestigieuse Mayo Clinic, ce dispositif médical va être testé à la pharmacie Cantonale de Truchtersheim. Sécuriser les prises médicamenteuses et améliorer l’observance sont en ligne de mire.

Décomplexifier les prises

« Les premiers dispositifs arrivent courant octobre. Nous sommes la première officine pilote pour Thess. L’équipe a accueilli positivement cette expérience et ce nouveau service aux patients », s’enthousiasme Xavier Schneider, co-titulaire de la pharmacie Cantonale. Ce féru de santé connectée a découvert Thess au salon Pharmagora 2022 : « Ce produit a un beau potentiel d’évolution dans le cadre du télésuivi pharmaceutique, du travail en exercice coordonné avec les médecins, voire les infirmières, et du bon usage et de la sécurisation du circuit du médicament ». Son équipe a été formée. Reste à recevoir les quatre dispositifs, deux seront en démonstration et deux autres « offerts en location en échange d’un retour d’expérience des patients lors de cette phase test », précise Xavier Schneider. Reste à désigner ces deux patients candidats, « une situation pour laquelle l’adhésion thérapeutique est difficile et le risque d’erreur important : schéma de prises complexe, problèmes de mémorisation, charge mentale importante… »

Au début était la chimio orale…

L’histoire commence à l’institut de cancérologie Sainte-Catherine (ISC) d’Avignon (84). Conçue pour piloter, sécuriser et adapter à distance la prise de chimiothérapies orales à la maison, la solution Thess s’est élargie à d’autres situations, telle l’algologie, et à d’autres lieux. Elle s’est invitée en officine à la demande de patients ayant eu vent de son existence. « Nous n’avions pas vocation à vendre en direct à la place du pharmacien, explique Roland Sicard, également président de l’ISC. Aller vers la ville permet de répondre à des besoins spécifiques auxquels les autres piluliers ne répondent pas. On met à disposition quelques dispositifs pour voir les cas d’usage en officine ». L’offre Thess comprend une partie télédispensation avec le pilulier et une partie télésurveillance avec le logiciel.

La bonne dose du bon médicament

Nul besoin de Wi-Fi ou de Bluetooth. Le dispositif de délivrance est connecté via une carte SIM 4G comme un téléphone. Ce boîtier gris (voir ci-contre) comporte un système d’authentification par empreinte digitale. Patients ou aidants, « sept personnes différentes peuvent être habilitées », précise Roland Sicard. À l’intérieur, une mini-caméra filme et compte le nombre d’unités qui tombent dans le réceptacle transparent. « Ce procédé est l’unique système automatique au monde assurant qu’une seule forme enregistrée tombe. Pas deux, ni trois ». Dans cette partie fixe, le patient ou l’aidant emboîte un conteneur blanc rempli d’un même médicament par la pharmacie, et identifié par une lettre. « Il y en a autant que de médicaments différents à prendre ». Antalgique dans le conteneur A, hormonothérapie dans le B… Sont utilisées les gélules et les comprimés oblongs (= plus longs que larges). Les formes rondes de comprimés, en palets, ne sont pas gérées pour l’instant car Thess utilise la gravité. Et les palets tendent à s’empiler les uns sur les autres et leurrent la caméra, « mais nous sommes en train d’affiner le système », explique Roland Sicard. Toute nouvelle forme galénique est testée.

La bonne personne, le bon moment

Le pilulier s’éclaire et/ou s’allume quand le moment de la prise arrive. Il indique quel conteneur introduire. Impossible de se tromper, l’appareil refuserait ! Puis, le patient s’identifie avec son empreinte. Le nombre d’unités à faire tomber est indiqué sur un écran. Le patient appuie sur le conteneur pour délivrer une unité, et réitère si besoin. Quand le nombre adéquat est atteint, l’écran devient vert, l’appareil se verrouille. Impossible d’en prendre plus. En revanche, en prendre moins est possible. « Nous avons laissé la possibilité au patient de se sous-doser, par exemple en cas d’intolérance à un traitement ».

Chacun sa plage

Comme pour tout pilulier connecté, le plan de prises est à renseigner dans Thess. C’est la pharmacie qui le programme : plan simple, complexe, prises à la demande « si besoin ». « Nous pouvons faire des ajustements et des limitations de dose selon des algorithmes qui plafonnent la dose à ne pas dépasser dans une plage horaire définie. C’est très utile pour les antalgiques ». Et l’équipe sait ce que fait le patient en temps réel. « Trois minutes avant l’heure de prise, la carte SIM interroge le serveur. La prise est-elle toujours paramétrée ? Le plan a-t-il changé ? Si c’est le cas, elle met à jour la posologie. Elle fait aussi remonter l’info en cas de prise partielle ou de sous-dosage, au pharmacien et au prescripteur ». Cette télédispensation contrôlée, avec observance tracée, est gérée par le pharmacien sur ordinateur. Le patient peut voir son plan sur une web application et « inviter son équipe de santé de proximité à échanger des informations, précise Xavier Schneider. Le pharmacien peut, avec l’accord du médecin, revoir la posologie. »

Une télésurveillance rassurante

Outre le pilulier, le dispositif Thess propose un logiciel de télésurveillance qui trace l’observance, avec deux grandes fonctionnalités : des questionnaires de suivi à remplir par le patient, et la déclaration d’événements indésirables et leur gradation afin de générer une alerte auprès de l’équipe soignante. Connecté en permanence, le patient n’est pas livré à lui-même. Il est rassuré.

La télésurveillance n’est pas à l’ordre du jour en officine, ni rémunérée. Thess peut être utilisé sans le logiciel, mais Xavier Schneider testera l’ensemble jusqu’en mars 2023. En revanche, « si nous avons une forte sollicitation des patients, nous demanderons à passer plus tôt à une phase avec un modèle économique payant. Nous proposerons ce service autour de 39,90 € par mois pour un médicament, avec 10 € de plus par traitement ». Cette expérimentation « nous permettra de voir comment additionner la force de ce dispositif, et les côtés humain et scientifique du préparateur et du pharmacien. C’est à nous de former au bon usage du médicament ». Proposer Thess après un bilan partagé de médication ou un entretien, travailler sur les causes d’inobservance, le pharmacien a beaucoup d’idées. De quoi intéresser nombre d’officines… et de patients !

Le coût de Thess

Pour l’instant, Thess est fabriqué en impression 3D, en petite série. Une dizaine de dispositifs sont en service. Trente de plus seront produits en octobre. Thess coûte « à peu près le prix d’un smartphone pour le contenant. La cartouche de médicament, rechargeable, vaut autour de 100 €. Quand nous serons en moules injectés, en grande série, on sera à 3 € », précise Roland Sicard, son président.

Thess s’exporte

Thess (Therapy smart system) est un dispositif médical breveté proposé par Thess Corporate, filiale de La Valériane, une entreprise montpelliéraine qui développe des services numériques santé. À sa tête, Roland Sicard, président de l’institut Sainte-Catherine (ISC) de cancérologie à Avignon (84). Thess a été mis au point par les ingénieurs de La Valériane et SGH Healthcaring, plasturgiste dans l’Isère. L’électronique est fournie par Asica, à Saint-Malo (35). Le pilulier est enregistré comme dispositif médical de classe 1 et le logiciel de télésurveillance devrait être de classe 2. Thess est utilisé par une vingtaine de patients, au CHU de Nîmes, à l’ISC d’Avignon. Et le sera aux CH de Cannes et CHU de La Réunion en octobre. Thess est testé par les Mayo Clinic de Rochester et de Jacksonville, le CHU de Montréal et par le New York Pain Management Center.

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