La sécheresse vaginale - Porphyre n° 581 du 26/11/2021 - Revues
 
Porphyre n° 581 du 26/11/2021
 

Savoir

Le point sur…

Auteur(s) : Nathalie Belin

Plus fréquente à la ménopause, la sécheresse vaginale peut concerner toutes les femmes à différentes périodes de leur vie. Il existe des solutions, avec en première intention les lubrifiants « soins ».

De quoi parle-t-on ?

• Il n’existe pas de sécrétion vaginale ! La lubrification du vagin résulte d’une transsudation du plasma depuis les vaisseaux sanguins, qui vient perler au niveau de la partie superficielle de la muqueuse vaginale.

• Cette humidification naturelle, qui garantit la souplesse des muqueuses intimes, est sous l’influence des estrogènes et du système nerveux central. Sous l’effet du désir sexuel, les sécrétions s’accroissent, ce qui facilite la pénétration et aide à l’excitation sexuelle, facteur clé de la lubrification. Le maintien d’une activité sexuelle régulière augmente la vascularisation du vagin et permet un apport de prostaglandines et d’acides gras, ce qui entretient la souplesse des tissus.

• Toute modification hormonale peut notamment favoriser une sécheresse vaginale, même légère, ce qui modifie les sensations éprouvées lors d’un acte sexuel, le rendant parfois inconfortable : variation du cycle menstruel, grossesse, post-partum, allaitement, ménopause, contraception hormonale, traitement hormonal anticancéreux…

• La réduction de la production d’estrogènes lors de la ménopause est à l’origine d’un amincissement des muqueuses vaginales et de l’appareil urinaire, responsable du « syndrome génito-urinaire ». Il débute par une diminution de la lubrification vulvo-vaginale et des douleurs lors des rapports sexuels, et s’aggrave avec le temps en l’absence de prise en charge, avec l’apparition d’une gêne en dehors des rapports : sensation de sécheresse vaginale, d’irritation, de brûlure, plus ou moins associée à des symptômes urinaires (voir La patho p. 49).

• Un manque de désir, une abstinence sexuelle prolongée, une dépression, l’appréhension du rapport sexuel, le stress, la fatigue jouent sur la lubrification (voir encadré p. 64).

• Une prise en charge précoce est recommandée afin de préserver la trophicité de la muqueuse.

• Facteurs aggravants. Tabac, savon trop « décapant », douche vaginale…, déodorants ou protège-slips, tampons hygiéniques non adaptés au flux menstruel… peuvent entraîner ou aggraver une sécheresse vulvo-vaginale.

Lubrifiants hydratants d’abord

• Généralités. Une référence avec un pH situé entre 4 et 5,5 environ est recommandée afin de maintenir une acidité propice à l’équilibre de la flore vaginale et limiter la prolifération de germes pathogènes. Mieux vaut éviter les parabens au long cours. Les extraits de plantes sont parfois à l’origine d’irritations ou d’allergies.

• Les gels lubrifiants s’utilisent lors d’un rapport sexuel, par jeu ou par nécessité en cas d’inconfort ou d’irritation passagère, pour rendre l’acte confortable, ou systématiquement pour pallier le risque de rupture d’un préservatif.

→ Composants. Les produits à base d’eau et de glycérine, les plus répandus, se déclinent en textures plus ou moins fluides, différents arômes et conviennent aux rapports oraux, ce qui est mentionné sur l’emballage, ou sensations avec effet frisson, ou chaleur grâce notamment au propylène glycol ou à un composant type L-arginine favorisant une vasodilatation locale. Tous se nettoient facilement à l’eau. Ceux à base de silicone sont plus glissants et agissent plus longtemps car ils sèchent moins vite. Ils sont appréciés pour les rapports dans l’eau car ils ne s’y dissolvent pas. Ils sont plus difficiles à éliminer. Les formules enrichies en aloe vera, aux propriétés hydratantes et apaisantes, ou en acide hyaluronique (voir plus loin) procurent un meilleur confort que les formules classiques.

→ Utilisation. À la demande, juste avant ou pendant un rapport. Tous sont compatibles avec les préservatifs, à l’inverse des produits huileux, comme la vaseline ou les huiles végétales de coco, par exemple, parfois proposées comme alternative naturelle. Ceux à effet chaud/froid ou aromatisés peuvent être irritants ou allergisants ; les rincer au moindre signe d’intolérance

• Les lubrifiants hydratants ou « lubrifiants soins » exercent une action lubrifiante, hydratante et réparatrice. Ils s’emploient en cas d’irritations intimes ou de sécheresse vaginale, lors des rapports et en dehors, en entretien, pour hydrater et réparer les muqueuses.

→ Composants. L’acide hyaluronique, présent dans la peau et la plupart des tissus de l’organisme, dont la muqueuse vaginale, se comporte comme un piège à eau aux propriétés mucoadhésives. Il maintient les molécules d’eau au niveau de la muqueuse et restaure ainsi son hydratation et son élasticité. Il a également une efficacité dans la cicatrisation. Il est présent en concentration importante dans ces formules.

Les polymères tels que l’hydroxycellulose, les carbomères… agissent de façon similaire en formant un film bioadhésif sur la muqueuse et en maintenant son humidification. Des plantes aux propriétés apaisantes et cicatrisantes sont parfois présentes : aloe vera, Centella asiatica

→ Formulations. Certaines formules sont d’action brève, d’autres prolongée du fait d’actifs (gommes, molécules bioadhésives…) ou d’une galénique appropriés.

→ Utilisation. Ceux à action prolongée conviennent aux sécheresses vaginales sévères et/ou chroniques. Ces formules sont disponibles en gel avec applicateur pour une utilisation interne en plus d’une application vulvaire, ou en ovules pour un usage interne. Ils s’appliquent en entretien tous les deux ou trois jours, voire moins, et, pour les gels, si besoin au moment d’un rapport jusqu’à plusieurs heures avant. Ceux à action brève s’emploient en appoint des lubrifiants d’action prolongée, en plus d’ovules par exemple, lors des rapports sexuels et/ou pour la sécheresse intime légère à modérée, post-partum, allaitement…

Attention ! Les composants gras ne sont pas compatibles avec l’utilisation de préservatifs : Ménophytea Hydratation intime Crème de soin, Cicatridine et Premeno Duo ovules…

Estrogènes locaux

Insuffisants contre les bouffées de chaleur, les estrogènes constituent en revanche un traitement de deuxième intention efficace sur le syndrome uro-génital : sécheresse vaginale, irritations vulvaires, cystites récidivantes, envies pressantes d’uriner…, en l’absence de contre-indications.

Injections d’acide hyaluronique

• Indications. Les injections d’acide hyaluronique s’adressent aux femmes qui se lassent des lubrifiants hydratants, avec une sécheresse vaginale peu profonde, et ne souhaitant pas ou ne pouvant pas bénéficier des estrogènes locaux. Une étude observationnelle sur vingt patientes a rapporté une amélioration significative des symptômes et de la sexualité(1).

• En pratique. Pratiquées sous anesthésie locale au cabinet gynécologique, elles s’effectuent à l’entrée du vagin, au niveau du vestibule. Plusieurs petites injections sont réalisées lors d’une unique séance d’une quinzaine de minutes. Outre une action hydratante et assouplissante, elles redonnent du volume à la muqueuse. Le résultat est perceptible dans les jours qui suivent et se maintient environ six à douze mois. Le coût d’une séance démarre à partir de 200 à 300 €.

Laser

• Indications. Utilisé depuis plusieurs années en gynécologie, le laser fait l’objet de nombreuses publications attestant son efficacité dans les sécheresses vaginales sévères, mais les essais contrôlés randomisés sont peu nombreux. Ce manque de recul et les complications parfois rapportées dans certaines études (brûlures, cicatrices douloureuses, douleurs) expliquent qu’il soit réservé aux échecs des lubrifiants hydratants et des estrogènes locaux, ou aux contre-indications à ces derniers, notamment en cas de cancer hormonodépendant(2).

• Mode d’action. Deux technologies font référence, avec des résultats similaires : le laser CO2, le plus utilisé, et le laser Erbium Yag. L’énergie du laser est absorbée par les cellules et élève la température des tissus. Cet effet thermique crée des microlésions superficielles le long de la muqueuse vaginale, l’incitant à se régénérer via la synthèse de fibres de collagène, d’élastine et d’acide hyaluronique (voir Porphyre n° 579, octobre 2021, Parlons cancéro).

• En pratique. Deux à trois séances au cabinet gynécologique de 10 à 15 minutes sont nécessaires, à quatre ou six semaines d’intervalle. Non douloureuses, elles sont à l’origine de picotements et d’inconfort lorsque le laser se rapproche en fin de séance de la vulve richement innervée. Une amélioration peut survenir dès la première séance mais les bénéfices sont plus nets après les suivantes. L’élasticité et la lubrification du vagin et les troubles mictionnels sont améliorés pour une durée d’environ un an. Il est possible de refaire ponctuellement une séance en entretien. Il faut compter de 250 à 600 € la séance, non remboursée.

Quels conseils donner ?

• L’arrêt du tabac, qui diminue le flux sanguin, est recommandé.

• Une toilette intime vulvaire, donc externe, quotidienne à biquotidienne mais pas plus, à l’aide d’un produit sans parfum et respectant le pH vaginal, voire enrichi en agents surgras : Crème lavante Sécheresse Hydralin, Soin toilette intime Sécheresse Rogé Cavaillès, Soin lavant ultra hydratant Saforelle…

• Des probiotiques qui restaurent la flore vaginale et diminuent le pH peuvent être utiles en plus en cas d’infections vaginales ou urinaires à répétition.

(1) Efficacy of injecting platelet concentrate combined with hyaluronic acid for the treatment of vulvovaginal atrophy in postmenopausal women with history of breast cancer : a phase 2 pilot study, Menopause, 2018.

(2) Recommandations 2021 pour la pratique clinique sur la ménopause élaborées par le Groupe d’étude sur la ménopause et le vieillissement hormonal (Gemvi), en collaboration avec le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF).

Info +

→ En cas de rétrécissement du vagin (= sténose vulvaire), parfois lié à une radiothérapie, une hormonothérapie ou une chimiothérapie, le recours à un dilatateur vaginal (Gyneas…) de taille progressive, introduit avec un lubrifiant, peut être proposé.

→ Pour approfondir : La Bible du vagin, du Dr Jen Gunter, préface de Martin Winckler, First Éditions, mars 2021.

→ Pour en savoir plus sur les techniques de restauration vaginale (voir Porphyre n° 579), consulter le site du Groupe de recherche et d’innovations en restauration génitale : grirg.org

Côté naturel

→ Certaines femmes se tournent vers des huiles végétales nourrissantes et anti-inflammatoires, appliquées sur la vulve et dans le vagin pour maintenir la souplesse des muqueuses et limiter brûlures et tiraillements.

→ Le Dr Bérengère Arnal, gynécologue-obstétricienne spécialisée en phytothérapie, recommande l’huile de millepertuis, également cicatrisante et anti-infectieuse. Si sa couleur rouge incommode, elle suggère les huiles de noyau d’abricot, de jojoba, de macadamia ou de coco. Restaurer et maintenir la trophicité vaginale nécessite des soins biquotidiens, avec toilette et application d’une huile végétale nourrissante.

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