L’andropause - Porphyre n° 579 du 24/09/2021 - Revues
 
Porphyre n° 579 du 24/09/2021
 

Savoir

Le point sur

Auteur(s) : Anne-Gaëlle Harlaut

Elle n’est ni le pendant masculin de la ménopause, ni constante chez l’homme qui vieillit. L’andropause fait toutefois l’objet de recommandations françaises(1). Elle peut justifi er un traitement substitutif par la testostérone.

Qu’est-ce que c’est ?

• L’andropause est un syndrome (ensemble de symptômes) associé à l’avancée en âge chez certains hommes. Elle associe des signes cliniques évocateurs d’un déficit en androgènes (voir Dico+) et une baisse biologique constante et avérée du taux de testostérone sérique.

• Elle diffère du vieillissement physiologique. L’andropause altère la qualité de vie et/ou le fonctionnement de certains organes, contrairement au vieillissement naturel. Une diminution progressive des androgènes avec l’âge est physiologique, variable selon les hommes, mais sans détériorer de façon notable la vie et le fonctionnement organique.(1, 2 et 3)

• Elle n’équivaut pas à la ménopause. Celle-ci concerne toutes les femmes et signe l’arrêt complet et définitif des fonctions ovariennes, donc des règles et de la fertilité. Au contraire, l’andropause est inconstante. Sa prévalence, qui augmente avec l’âge, varie de 2 à 18 % selon les études, l’âge et les populations.(1) Son apparition est par ailleurs progressive et non systématiquement synonyme de diminution de la fertilité.

• Mal nommé. Le terme grand public andropause, qui vient du grec « andros » (homme) et de « pausis » (cessation), est inapproprié. On préfère parler de déficit en testostérone plutôt que d’andropause.

Rappels de physiologie

• La testostérone est sécrétée à 95 % par les cellules de Leydig dans les testicules, avant d’être libérée dans le sang. La testostérone totale circule sous forme libre (TL), forme réellement active, environ 2 %, ou liée à des protéines de transport telles que la SHBG (sex hormon binding globulin) ou l’albumine, facilement mobilisable. La testostérone biodisponible (TBD), représentative des fractions actives mobilisables, est la somme de la testostérone libre et de la testostérone liée à l’albumine.

• Son taux plasmatique diminue en moyenne de 1 % par an dès 40 ans mais de façon très variable selon les individus. La testostéronémie est « normale » quand la testostérone totale est > 3,5 ng/mL ou 12 nmol/mL (seuil bas pour l’adulte jeune)(1). Ce taux est régulé par l’axe hypothalamo-hypophysaire (voir schéma).

Quelles sont les causes ?

• Plusieurs mécanismes, plus ou moins associés, peuvent expliquer le déficit en testostérone (DT), notamment une baisse du nombre de cellules de Leydig et une altération de la sécrétion des hormones de l’axe hypothalamo-hypophysaire. Physiologiques avec l’avancée en âge, ces mécanismes seraient plus marqués en cas de DT.

• Facteurs de risque. Hormis l’âge, des situations sont reconnues à risque de DT, parmi lesquelles traitements anti-androgéniques du cancer de la prostate, stéroïdes anabolisants, antipsychotiques, antirétroviraux, pathologies chroniques telles que diabète de type 2, apnées du sommeil, BPCO, alcoolisme, cardiopathies, VIH, obésité…, troubles anxiodépressifs…

Quels sont les signes ?

Inconstants, non spécifiques, plus ou moins associés et sévères, les signes de l’andropause (1 et 3) sont similaires à ceux de la ménopause sur certains points.

• Les troubles sexuels sont souvent mais pas systématiquement le signe d’appel : dysfonction érectile, dont la disparition des érections spontanées matinales et nocturnes, baisse de la libido, du volume de sperme, altération de qualité des orgasmes, diminution de la pilosité avec rasages moins fréquents, gynécomastie (voir Dico+)

• Autres manifestations : fatigue, perte de la masse et de la force musculaires, bouffées de chaleur, sudation excessive…, hausse de l’indice de masse corporelle (IMC), dyslipidémies, obésité abdominale, insulinorésistance ou diabète de type 2…, anxiété, troubles de l’humeur, de l’attention, de la mémoire, dépression, sensation de mal-être, ainsi que diminution de la densité minérale osseuse.

Comment la diagnostiquer ?

• Clinique. Les signes, peu spécifiques, orientent le diagnostic. Ils peuvent être évalués à l’aide de scores (voir encadré score ADAM).

• Biologique. Des dosages sériques sont requis devant une symptomatologie évocatrice.

→ Ils se font entre 7 et 10 heures du matin, quand le déficit est le plus net, hors pathologie aiguë. La testostérone totale (TT) est la plus facile à doser en pratique. Le seuil minimal de 3,5 ng/mL ou 12 nmol/mL est utilisé comme valeur de référence. Néanmoins, la TT n’étant pas assez représentative de la fraction réellement active, il est recommandé de doser plutôt la TBD ou la TL, pour lesquels aucuns seuils clairs ne sont à ce jour officiellement donnés, faute de preuves. À titre indicatif, une TBD inférieure à 0,7 ng/ml est en faveur d’un déficit.

→ Dans tous les cas, si les taux sont bas ou douteux, le diagnostic nécessite un deuxième dosage anormal après deux à quatre semaines. Ce dosage est associé à celui des hormones hypophysaires FSH et surtout LH pour caractériser l’origine testiculaire et/ou centrale de l’hypogonadisme et de la prolactine pour éliminer un adénome hypophysaire à prolactine.

Quelle prise en charge ?

• Traitement médicamenteux. Lorsque le DT est relié à une affection précise, un traitement étiologique optimal doit être mis en place. Dans les autres cas, quand le patient est symptomatique, demandeur d’une prise en charge, et que le diagnostic est confirmé biologiquement, une substitution androgénique peut être proposée.

→ Il consiste à administrer de la testostérone ou l’un de ses esters pour retrouver un taux de testostérone proche d’un taux physiologique « normal » en vue d’améliorer les symptômes.

→ Parmi les molécules utilisées dans cette indication : l’énanthate de testostérone à longue durée d’action par voie intra-musculaire (Androtardyl), l’undécanoate de testostérone par voie orale (Pantestone) ou injectable à longue durée d’action (Nebido, non remboursé), la testostérone naturelle en gel transdermique d’utilisation quotidienne (Androgel, Fortigel, non remboursés). La dihydrotestostérone (DHT) est aussi employée en gel dermique (Andractim, médicament d’exception, prise en charge en cas de gynécomastie).

→ Ces traitements nécessitent d’écarter les contre-indications, notamment désir de paternité (perturbation de la spermatogénèse), cancer de la prostate actuel ou du sein, polyglobulie avec taux d’hématocrite > 54 %, syndrome d’apnées du sommeil sévère, événement cardio-vasculaire lors des trois à six derniers mois, maladie cardio-vasculaire non contrôlée.

→ Une surveillance à 3, 6 et 12 mois, puis annuellement est nécessaire : dosages de la testostéronémie, examen de la prostate par toucher rectal, palpation mammaire. L’efficacité du traitement est jugée sur le bien-être général, l’activité sexuelle et l’humeur du patient.

À noter : la déhydroépiandrostérone (DHEA), parfois prescrite, n’est pas recommandée(3) car aucune étude n’a montré son efficacité, de même que la dihydrotestostérone (Andractim).

• Règles hygiéno-diététiques. Elles doivent accompagner la prescription médicamenteuse même si, à elles seules, elles n’ont pas montré une amélioration suffisante des symptômes. Il s’agit en particulier d’une perte de poids et d’une modification du mode de vie : équilibrer au mieux l’alimentation, réduire l’alcool et le tabac, pratiquer une activité physique régulière, limiter le stress et la fatigue…

(1) Recommandations pratiques pour la prise en charge du déficit en testostérone, Société francophone de médecine sexuelle (SFMS), et Comité d’andrologie et de médecine sexuelle (CAMS) de l’Association française d’urologie (AFU), Progrès en urologie 31 (2021) 458-476.

(2) Recommandations pour la prise en charge du déficit androgénique lié à l’âge, Association française d’urologie (AFU), 2004.

(3) Recommandations officielles de l’International Society for the Study of the Aging Male (Issam), 2003.

Dico +

→ Androgènes : hormones stéroïdes intervenant dans le développement des fonctions et caractères sexuels masculins (pilosité, masse musculaire, spermatogénèse, érection…), en majorité représentées par la testostérone, produite de façon quasi exclusive dans les testicules.

→ Gynécomastie : prolifération bénigne de la glande mammaire masculine.

Avec l’aimable collaboration du Dr Antoine Faix, chirurgien urologue, trésorier et administrateur de l’Association française d’urologie (AFU), administrateur de l’European Society for Sexual Medicine (ESSM), membre de la Société francophone de médecine sexuelle (SFMS).

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