Le cancer de la vessie - Porphyre n° 575 du 25/05/2021 - Revues
 
Porphyre n° 575 du 25/05/2021
 

Savoir

La patho

Auteur(s) : Florence Dijon-Leandro

Peu médiatisé, le cancer de la vessie est le deuxième cancer urologique le plus fréquent après celui de la prostate. La prise en charge est essentiellement hospitalière. Elle se poursuit à l’officine, notamment avec les soins de stomie après ablation de la vessie.

La maladie

Rappels

• L’appareil urinaire comprend les organes qui fabriquent puis évacuent l’urine : les reins, les uretères, la vessie et l’urètre (voir infographie).

• La vessie est une poche musculeuse dans laquelle l’urine produite par les reins s’accumule puis s’évacue via l’urètre au cours de la miction.

• La paroi vésicale est constituée, de l’intérieur vers l’extérieur, d’une couche muqueuse appelée urothélium ou épithélium urothélial, d’une couche musculaire appelée détrusor et d’une couche séreuse appelée péritoine. L’urothélium tapisse l’ensemble des voies urinaires.

Définition

• Le cancer de la vessie est une tumeur maligne qui prend naissance dans la vessie mais qui peut se propager aux organes voisins ou à d’autres parties du corps. Dans ces cas, elle prend le nom de métastase.

• Le cancer de la vessie représente environ 90 % des cancers des voies urinaires. Les 10 % restants concernent les voies excrétrices : uretères et urètre.

• Le plus souvent, les cancers de la vessie et des voies excrétrices sont des carcinomes, c’est-à-dire des cancers qui se développent dans les tissus épithéliaux, ici l’urothélium, d’où le terme de carcinomes urothéliaux. L’urothélium vésical est le siège principal des tumeurs en raison de sa surface importante et du temps de contact prolongé avec les carcinogènes urinaires.

Différents types de cancers

Les cancers de la vessie se distinguent essentiellement par leur stade évolutif.

• Stade local : 50 à 70 % des cas. Ces tumeurs sont superficielles et n’infiltrent pas le muscle. Elles sont dites TVNIM (tumeurs de la vessie non infiltrant le muscle). Néanmoins, certaines, en l’absence de traitement, présentent un risque d’envahissement de la paroi vésicale jusqu’au muscle.

• Stade localement avancé : 30 % des cas. Ce sont des tumeurs vésicales infiltrant le muscle (TVIM). Elles peuvent être associées à un envahissement ganglionnaire ou être d’emblée métastatiques.

• Stade métastatique : 5 à 10 % des cas. Le cancer de la vessie est alors une maladie chronique incurable. Les cancers métastasés sont des cancers qui se sont propagés par voie lymphatique ou sanguine à d’autres parties du corps, notamment les ganglions, le foie, les poumons ou les os.

Étiologies

• Âge et sexe. Le cancer de la vessie touche surtout le sujet âgé, avec un ratio d’environ quatre hommes pour une femme. Le tabagisme, l’exposition à certains métiers (voir ci-dessous), l’anatomie du système urinaire pourraient expliquer ce ratio.

• Tabagisme actif. C’est le premier facteur de risque modifiable. Environ 60 % des cancers de la vessie y sont liés. Les substances irritantes et toxiques de la fumée du tabac se retrouvent dans les urines et endommagent les cellules vésicales.

Fumer du cannabis serait également dommageable : « Actuellement, la substance active du cannabis, le tétrahydrocannabinol (THC), n’est pas classée comme agent cancérogène par le Centre international de recherche sur le cancer (Circ), explique le Dr Yohann Loriot, oncologue médical à l’Institut Gustave-Roussy, à Villejuif (94). Cependant, les produits liés à la combustion du cannabis sont carcinogènes, comme pour le tabac. La fumée produite par un joint contient beaucoup plus de monoxyde de carbone et de goudrons. Il est donc possible que nous observions une recrudescence de cas de cancers dans le futur mais il est peut-être un peu tôt pour le dire ».

• Des expositions professionnelles et environnementales. Environ 15 % des cancers de la vessie sont liés à certains secteurs d’activité : l’industrie de la chimie, de l’aluminium, du caoutchouc, du textile… Ils prennent alors le statut de maladie professionnelle.

• Des infections. Environ 15 % des cancers de la vessie sont dus à des infections, en particulier la bilharziose, infection parasitaire tropicale due à un ver hématophage du genre Schistosoma. La forme urogénitale de la maladie, due à Schistosoma haematobium, entraîne un état d’irritation vésicale et d’infection urinaire chronique, sources de mutations génétiques et de cancérogenèse.

• Des traitements. Environ 10 % des cancers de la vessie sont d’origine iatrogène : radiothérapie pelvienne, cyclophosphamide…

• 5 % des cancers de la vessie sont d’origine génétique.

Signes cliniques

• Dans 80 % des cas, du sang est retrouvé dans les urines. Cette hématurie est en général macroscopique, c’est-à-dire visible à l’œil nu, puisqu’elle va colorer les urines de façon plus ou moins intense et alerter le patient.

• D’autres symptômes locaux sont présents dans 20 % des cas : dysurie (difficulté à uriner), pollakiurie (envies fréquentes d’uriner), douleurs, spasmes ou brûlures urinaires.

• Au stade métastatique, le patient présente de la fatigue, un amaigrissement, des douleurs lombaires ou osseuses.

Diagnostic

Interrogatoire et examens

• Les signes cliniques ci-dessus, et en particulier l’hématurie, sont des signes d’alerte et doivent conduire à une consultation médicale. L’infection urinaire est une cause très fréquente d’hématurie et constitue le principal diagnostic différentiel à ce stade. La réalisation d’une bandelette urinaire au cabinet du médecin et/ou d’un examen cytobactériologique des urines (ECBU) au laboratoire d’analyses éliminent ce diagnostic et font poursuivre les investigations à la recherche d’une tumeur vésicale. « Tout saignement dans les urines chez un patient de plus de 50 ans et a fortiori fumeur doit conduire à confirmer ou infirmer la possibilité d’un cancer de la vessie. Les personnes ne doivent pas hésiter à consulter leur médecin traitant. Celui-ci les orientera au besoin vers un urologue afin de réaliser rapidement les examens nécessaires. À titre d’exemple, nous proposons à Gustave-Roussy un accueil en un jour pour la prise en charge diagnostique », explique le Dr Loriot.

• L’interrogatoire relève les antécédents médicaux et d’éventuels facteurs de risque

• L’examen clinique comprend notamment une palpation abdominale et la réalisation de touchers pelviens. La plupart du temps, une échographie de l’arbre urinaire est prescrite par le médecin traitant, pouvant révéler la masse tumorale.

• Le bilan diagnostique comprend :

→ une cytologie urinaire, à la recherche de cellules cancéreuses dans les urines ;

→ une cystoscopie, qui consiste à explorer la paroi vésicale en passant par l’urètre, à effectuer des prélèvements ou biopsie, et dans certains cas à enlever la tumeur. Cette ablation, appelée résection transurétrale de vessie (RTUV), est le premier traitement des tumeurs non infiltrantes (voir plus loin).

Comme dans la plupart des cancers, le diagnostic est histologique. L’analyse des prélèvements par un anatomopathologiste confirmera le cancer.

• Un bilan d’extension comprend au cas par cas : uroscanner, scanner thoraco-abdominopelvien, scintigraphie osseuse.

Classification

La tumeur est hiérarchisée selon la classification internationale TNM, signifiant T = taille, N = ganglions, ou « nodes » en anglais, M = métastases. N0 = absence d’atteinte ganglionnaire. N1, N2 ou N3 = différents niveaux d’atteinte ganglionnaire. M0 = absence de métastase et M1 = présence de métastases.

• Les tumeurs superficielles (TVNIM) sont notées Ta (tumeur papillaire non invasive), Tis (carcinome in situ, tumeur plane) ou T1 (tumeur envahissant la sous-muqueuse, également appelée chorion).

• Les tumeurs infiltrantes (TVIM) sont notées T2, T3, T4 selon le degré d’envahissement du muscle vésical, des tissus périvésicaux, voire des organes voisins : prostate, utérus, vagin…

• Il existe une autre classification. Après analyse de la tumeur, on distingue les tumeurs de bas grade et de haut grade selon leur degré d’agressivité, c’est-à-dire leur capacité à se développer rapidement. Ce degré d’agressivité associé au degré de pénétration vésicale conduit à trois niveaux de risque de progression et de récidive : faible, intermédiaire ou élevé.

Pronostic

Les principaux facteurs pronostiques sont l’état général du patient et le niveau d’atteinte vésicale, voire extravésicale. Après diagnostic et traitement, le taux de survie à cinq ans est supérieur à 80 % pour une tumeur superficielle, et d’un peu moins de 50 % pour une TVIM.

Le cancer de la vessie récidive fréquemment. Par exemple, plus de la moitié des TVNIM récidivent, parfois directement sous forme de TVIM.

Suivi

Le médecin traitant demande le classement en affection de longue durée ALD 30, il participe au suivi quotidien et à la gestion des effets indésirables des traitements.

Le suivi post-cancer s’envisage souvent à vie et permet, entre autres, de détecter rapidement une récidive ou un autre cancer. Le rythme des examens cliniques et paracliniques dépend du type de tumeur. Si des symptômes apparaissent, le patient doit consulter rapidement.

Les traitements

Objectifs

Le traitement vise à supprimer la tumeur et limiter le risque de récidive. Il dépend de l’étendue de la tumeur, de son agressivité et du type de tumeur. En cas de maladie métastatique, l’objectif est palliatif afin de ralentir le développement des métastases et de soulager les symptômes.

Stratégie thérapeutique

Dans la mesure du possible, le patient est encouragé à stopper son exposition à des agents carcinogènes, et notamment le tabac (voir Conseils aux patients).

Tumeurs superficielles (TVNIM)

• Le traitement consiste en une résection transurétrale de la vessie (RTUV), autrement dit une résection de la tumeur par les voies naturelles permettant une préservation vésicale. Seule la tumeur est enlevée, et non la vessie entière.

• La prévention des rechutes et de la progression se fait via des instillations intravésicales. Il s’agit d’administrer un médicament de chimiothérapie ou d’immunothérapie au moyen d’une sonde insérée dans l’urètre jusqu’à la vessie. Le médicament se retrouve au contact de l’urothélium, pour une action ciblée et des effets secondaires essentiellement locaux. Les protocoles d’instillations sont réalisés à l’hôpital ou en clinique et varient en fonction du risque de récidive.

→ Risque faible : une seule instillation de mitomycine (un cytotoxique, voir ci-dessous) dans les 24 heures suivant la résection, on parle d’instillation post-opératoire précoce.

→ Risque intermédiaire : éventuellement instillation de mitomycine en post-opératoire, puis de mitomycine ou de BCG (une immunothérapie non spécifique, voir ci-dessous) en situation adjuvante, c’est-à-dire en général quatre semaines minimum après la résection. Les injections se font selon un rythme hebdomadaire sur une durée de huit semaines en général pour la mitomycine et de six semaines pour le BCG. Le protocole à base de BCG comprend également une phase d’entretien d’un à trois ans.

→ Risque élevé : instillations de BCG en situation adjuvante comme décrit précédemment.

En cas de tumeurs infiltrantes (TVIM)

• Le traitement de référence est chirurgical.

→ Cystoprostatectomie totale chez l’homme : on lui enlève la vessie, la prostate et les vésicules séminales.

→ Pelvectomie antérieure chez la femme : on enlève la vessie, l’utérus, l’urètre, une partie du vagin, parfois les ovaires.

• Une chimiothérapie néo-adjuvante, c’est-à-dire réalisée avant l’intervention chirurgicale, à base de sels de platine est généralement effectuée. Une chimiothérapie adjuvante peut également être recommandée après la chirurgie.

• Une autre option préservant la vessie et les organes environnants consiste à associer radiothérapie et chimiothérapie après une résection transurétrale de la vessie. Cette option est réservée en cas de contre-indication ou de refus de la chirurgie.

Cancer métastatique

Le traitement de référence est médicamenteux, à base de molécules de chimiothérapie et/ou d’immunothérapie spécifique. Une chirurgie ou une radiothérapie des métastases est proposée au cas par cas.

Chirurgie de la vessie

Résection transurétrale de la vessie

• C’est quoi ? La résection transurétrale de la vessie (RTUV) est l’intervention chirurgicale de référence des tumeurs non infiltrantes (TVNIM), à la fois à visée diagnostique et à visée thérapeutique.

• Comment ? L’opération se fait sous anesthésie loco-régionale ou générale selon le cas, et dure environ une heure. Le patient est prévenu des éventuels effets secondaires post-opératoires : difficultés et/ou douleurs pour uriner, sang dans les urines. Si ces symptômes persistent au-delà de quelques jours, il faut consulter.

Cystectomie

• C’est quoi ? La cystectomie, associée à l’ablation des principaux organes environnants, est l’intervention chirurgicale de référence des tumeurs infiltrantes (TVIM).

• Comment ? L’opération se fait sous anesthésie générale et dure entre quatre et huit heures. Le chirurgien enlève la vessie et effectue un curage ganglionnaire.

Les ganglions lymphatiques situés à proximité de la vessie sont enlevés. Chez les hommes, le chirurgien retire la prostate et les vésicules séminales, parfois l’urètre. Chez les femmes, il ôte l’utérus, une partie du vagin, l’urètre, voire les ovaires.

Rétablissement urinaire après cystectomie

Il existe deux grandes options de reconstruction et de rétablissement urinaire après une cystectomie.

• La néovessie, ou entérocystoplastie, consiste à reformer une vessie à partir d’un morceau d’intestin grêle. Cette intervention est possible si l’urètre a pu être conservé. La néovessie, ou vessie de remplacement, est rattachée aux uretères d’une part et à l’urètre d’autre part. L’arbre urinaire est alors reformé dans sa totalité et l’urine continue de s’évacuer par les voies naturelles.

• La dérivation urinaire externe consiste à diriger les urines à l’extérieur du corps grâce à une ouverture au niveau du ventre appelée stomie. Il n’y a alors plus d’évacuation de l’urine par les voies naturelles. Plusieurs techniques d’urostomie sont utilisées (voir encadré p. 49).

Médicaments

Chimiothérapie cytotoxique

Les chimiothérapies cytotoxiques agissent sur toutes les cellules, et notamment sur celles à renouvellement rapide. En général, l’administration se fait en intraveineux en milieu hospitalier, lors de cures courtes et répétées, avec des posologies exprimées en mg/m2 de surface corporelle.

• Dans le cas d’un cancer de la vessie infiltrant mais non métastatique, le protocole le plus utilisé s’appelle M-VAC : méthotrexate, vinblastine, adriamycine (ou doxorubicine), cisplatine.

• Dans le cas d’un cancer de la vessie métastatique, le traitement de première ligne repose sur une bithérapie cisplatine + gemcitabine ou carboplatine + gemcitabine.

• Les effets indésirables. Ils sont communs, à des degrés divers, à la plupart des cytotoxiques : myélotoxicité pouvant toucher toutes les lignées sanguines, d’où des effets variés à types d’infections, d’anémies, de saignements… ; nausées, vomissements, diarrhées, inflammations et ulcérations buccales appelées mucites ; alopécie ; fatigue ; reprotoxicité… S’y ajoutent une neurotoxicité pour la vinblastine, avec neuropathies périphériques principalement, cardiotoxicité pour la doxorubicine, néphrotoxicité et ototoxicité pour le cisplatine.

Immunothérapie spécifique

• L’immunothérapie consiste à stimuler le système immunitaire pour lui permettre de détruire la tumeur. On distingue l’immunothérapie non spécifique, comme la BCG-thérapie administrée par voie intravésicale (voir plus loin), et l’immunothérapie spécifique, avec les anticorps monoclonaux, indiquée dans les cancers de la vessie métastatique et administrée par voie parentérale. Ils sont disponibles en milieu hospitalier.

Le pembrolizumab (Keytruda) et l’atézolizumab (Tecentriq) sont utilisés en deuxième ligne après l’échec d’une chimiothérapie à base de sels de platine, tandis que l’avélumab (Bavencio) est proposé en traitement de maintenance à des patients chez qui la chimiothérapie de première ligne a permis le contrôle de la maladie.

• Mode d’action : les anticorps monoclonaux perturbent la liaison PD-1/PD-L1 (voir Info+).

• Effets indésirables : fatigue, réaction liée à l’injection intraveineuse, diarrhées… Le patient est étroitement surveillé sur les plans clinique et biologique car la stimulation du système immunitaire peut générer des effets indésirables auto-immuns parfois graves : pneumopathies interstitielles, endocrinopathies, atteinte hépatique ou rénale…

Pour instillations intravésicales

L’instillation intravésicale se fait lors d’une consultation « classique » et ne nécessite pas d’anesthésie. Un médicament est injecté dans la vessie grâce à une fine sonde urinaire insérée dans l’urètre. Ces médicaments ne sont pas disponibles en ville.

Mitomycine C (MMC)

La spécialité, hospitalière et à prescription restreinte, est Mitomycine MDC ou SSP.

• Classe thérapeutique : chimiothérapie cytotoxique de la famille des alkylants.

• Mode d’action : inhibition de la réplication par la formation de liaisons covalentes avec l’ADN.

• Effets indésirables : surtout locaux, inflammation de la vessie ou allergie cutanée.

Bacille de Calmette et Guérin (BCG)

La spécialité, à prescription restreinte et hospitalière, est BCG-Medac.

• Classe thérapeutique : immunothérapie non spécifique. Plus précisément, il s’agit d’une souche bactérienne vivante mais peu virulente obtenue à partir de Mycobacterium bovis, l’espèce bactérienne qui permet également d’obtenir le vaccin contre la tuberculose.

• Mode d’action : action antitumorale via la stimulation du système immunitaire.

• Effet indésirable : recommandée en cas de tumeur non infiltrante à haut risque, l’immunothérapie par instillation vésicale du BCG expose à une complication infectieuse appelée BCGite. La BCGite vésicale mime une infection urinaire : « Les signes peuvent être des envies fréquentes d’uriner (pollakiurie), du sang dans les urines (hématurie), une difficulté à évacuer complètement les urines de la vessie, des fuites urinaires, ou encore des douleurs dans le bas-ventre ou dans le bas du dos », détaille le Dr Loriot. La BCGite vésicale nécessite un arrêt temporaire voire définitif des instillations. La BCGite généralisée « ressemble à un état grippal, avec fièvre, courbatures, fatigue intense », continue le Dr Loriot. Elle empêche la poursuite du traitement. Le patient est alors mis sous antibiotiques antituberculeux. Dans certains cas, la BCGite généralisée apparaît des années après les instillations. Les patients doivent donc prévenir les professionnels de santé qu’ils ont bénéficié d’un tel traitement, et leur présenter une carte patient (ANSM, juillet 2020).

Radiothérapie

La radiothérapie externe vise à irradier la tumeur avec des rayons ionisants fabriqués par un accélérateur de particules. Les effets secondaires possibles varient selon la zone irradiée. Dans le cas du cancer de la vessie, ce sont essentiellement des troubles cutanés, urinaires, digestifs et sexuels.

Dispositifs médicaux

Une stomie urinaire nécessite des dispositifs médicaux afin de recueillir les urines qui sortent de la stomie. Il s’agit de poches d’urostomies appliquées sur la peau autour de la stomie, que le patient apprend à manipuler avec un infirmier spécialisé appelé stomathérapeute. Les poches, de contenance de 100 à 550 mL, permettent une autonomie de l’ordre de deux à trois heures avant de devoir être vidangées au-dessus d’une cuvette ou d’un lavabo, voire à l’extérieur ! Pour une plus grande autonomie, la poche peut être reliée à une poche à urines (ou collecteur d’urines), ambulatoire ou de nuit (voir photos 3 et 4 ).

Poches d’urostomies

Une poche d’urétérostomie est vidangeable grâce à un petit tuyau obturable par un robinet ou un bouchon, elle est munie d’une valve anti-reflux et raccordable à un collecteur d’urines. L’appareillage pour urétérostomie est constitué de deux types de systèmes.

• Le système 1 pièce (1P) : ici, la poche de recueil est soudée au système de fixation (voir photos 1 et 2).

• Le système 2 pièces (2P) se compose d’une poche de recueil indépendante du système de fixation (support), le maintien entre les deux se faisant par emboîtement (voir photos 5, 6 et 7).

• Le système adhésif qui fixe l’appareillage à la peau (poche dans le cas des 1P ou support dans les 2P) possède une ouverture prédécoupée ou à découper sur mesure dans le cas d’une stomie irrégulière. L’adéquation du diamètre du système de fixation évite le contact des effluents avec la peau (ouverture trop grande) ou de blesser la stomie en cas de diamètre trop petit.

• Le rythme moyen de changement du support, en raison de la possibilité de vidanger les poches et en l’absence d’irritation, est de deux à trois jours pour un système 2P et de un jour pour le renouvellement de la poche. Pour le système 1P, le changement se fait tous les jours, voire tous les deux jours.

À savoir : la sonde d’une urostomie directe doit rester dans la partie supérieure de la poche, sans dépasser le dispositif anti-reflux de la poche.

Systèmes collecteurs ou poches à urines

Pour une plus grande autonomie, la poche peut être reliée à une poche à urines ambulatoire (300 à 900 mL), maintenue à la cuisse ou au mollet par des attaches. Pour la nuit, on conseille de brancher la poche à un sac collecteur, ou « poche de nuit » (de 1,5 à 2 L, voir photos 3 et 4 ), afin d’éviter les levers intempestifs et de faciliter le drainage des urines. La jonction entre le robinet de la poche et le tuyau de la poche de nuit est sécurisée grâce à un tuyau en silicone souvent présent dans les boîtes de poches de nuit. Pour les urostomies directes avec deux stomies, on utilise un raccord en Y pour brancher les deux poches sur une même poche de nuit suspendue au lit. En raison du volume conséquent de la collecte des urines nocturnes, la poche de nuit peut être disposée à plat dans un bac en plastique pour plus de sûreté.

Dans tous les cas, la poche de nuit, si elle est vidangeable, est réutilisable plusieurs semaines (entre trois et cinq) à la condition d’être nettoyée à la Javel.

Les conseils aux patients

Observance

Sous chimio ou radiothérapie

Prendre le temps de bien expliquer les co-prescriptions visant à prendre en charge les effets indésirables et détailler les mesures hygiénodiététiques les limitant. En voici des exemples.

• Risque infectieux : être à jour de ses vaccinations, se laver régulièrement les mains, prendre sa température quand on se sent fiévreux, en cas de maux de gorge, et alerter l’équipe de soins selon les consignes données.

• Mucites : avoir une bonne hygiène dentaire, privilégier une brosse ultra-souple et bannir les aliments acides (agrumes, vinaigre…) ou irritants (chips, fruits secs…). Jamais de bains de bouche alcoolisés, mais faire des bains de bouche avec une cuillère à café de bicarbonate de sodium dans un verre d’eau.

• Diarrhées : hydratation suffisante, éviter le café et les aliments riches en fibres.

• Atteintes cutanées : protéger systématiquement la peau du soleil.

Utiliser des produits d’hygiène doux sans savon ni parfum et appliquer un émollient quotidiennement. Boire régulièrement en cas de radiothérapie afin de limiter l’inflammation vésicale. En cas de sécheresse vulvaire et vaginale, ne pas hésiter à combiner des hydratants intimes à action immédiate et prolongée : Hydralin, Monasens, Mucogyne, Hyalidra, Ainara…

• Fatigue : omniprésente, elle nécessite d’alléger ses tâches quotidiennes mais de maintenir une activité physique régulière modérée, qui réduit la perception de la fatigue, prévient la fonte musculaire et améliore globalement la qualité de vie.

Instillations vésicales

• Avant : limiter les boissons la veille de l’instillation, afin de diminuer la diurèse et de conserver une haute concentration vésicale du produit instillé.

• Après : ne pas uriner et ne pas boire dans les deux heures qui suivent l’instillation afin d’optimiser le temps de contact entre le médicament et la vessie.

• Repérer les signes d’alerte de la BCGite localisée : envies fréquentes d’uriner, brûlures mictionnelles, douleurs, fuites urinaires doivent être signalées au médecin. La carte patient met en garde contre les principaux symptômes d’une BCGite généralisée, qui peuvent apparaître plusieurs années après la fin du traitement et nécessitent une prise en charge en urgence : fièvre, fatigue, douleurs musculaires ou articulaires, éruptions cutanées… Contacter de toute urgence l’équipe médicale.

Avec néovessie

• Après l’opération, le patient bénéficie d’une rééducation spécifique pour muscler le périnée et lui apprendre à contrôler ses mictions car il ne ressent plus le besoin d’uriner. Les mictions doivent être régulières et rapprochées, maximum quatre-cinq heures entre chaque.

• Boire entre 1,5 et 2 litres d’eau par jour pour éviter une infection, un calcul ou un bouchon de mucus.

• Les fuites urinaires sont très courantes, surtout au cours des premières semaines qui suivent l’opération. La plupart du temps, une prise en charge par des protections absorbantes ou des étuis péniens suffit, le temps que la rééducation porte ses fruits. Si le patient se plaint de fuites trop abondantes et/ou invalidantes au-delà de six mois, en parler à l’urologue.

Avec stomie

Émises sous forme de suintements permanents, les urines sont très irritantes pour la peau. Outre le risque de macération et d’irritation, les décollements de l’appareillage sont possibles.

• Des urines trop alcalines (pH supérieur à 9) peuvent favoriser le dépôt de cristaux de phosphate, responsables d’une peau grisâtre et douloureuse. Ce phénomène est accentué en cas d’infection urinaire. Pour dissoudre ces dépôts de cristaux, appliquer des compresses imbibées d’un mélange à part égale d’eau et de vinaigre blanc.

• La toilette de la peau péristomiale se fait à l’eau et au savon. Bannir les antiseptiques. Sécher en tamponnant avec un mouchoir en papier ou une serviette. Jamais de rasage, ni de crème dépilatoire pour les poils péristomiaux, à couper avec des ciseaux. Attention : les soins d’hygiène doivent être très « propres » en raison de la fréquence des infections urinaires. Conseillez une solution hydroalcoolique, voire un lavage antiseptique des mains si le risque est important.

• Boire au moins 2 litres d’eau par jour et 3 en été, de préférence faiblement minéralisée (du robinet, Volvic, Évian…).

• Pour acidifier les urines et prévenir les infections urinaires et les irritations cutanées, conseiller un régime protéiné et l’absorption d’acidifiants (fruits rouges, pruneaux, rhubarbe…). Mieux, un jus d’airelles ou de fruits rouges par jour.

• Limiter les alcalinisants (agrumes, lait, eaux de Vichy et de Badoit…) à trois portions par jour.

• Pour éviter les lithiases, complication possible des stomies urinaires, limiter chocolat, thé fort, légumes secs, poivre, moutarde et betterave (risque de cristaux d’oxalates), ainsi que les abats et les poissons gras (risque de calculs d’acide urique). En pratique, aucun aliment n’est à exclure. Si le pH urinaire peut être contrôlé avec du papier pH, trois points de surveillance sont cruciaux : vérifier la limpidité des urines grâce à la transparence des poches (attention : avec un « Bricker », les urines sont troubles en raison d’un simple excès de mucus), la présence d’une infection urinaire (pH alcalin et température) et d’un écoulement permanent de la stomie (la sonde peut se boucher). Au moindre problème, orienter vers le chirurgien, le médecin ou la stomathérapeute.

Automédication

De façon générale, sous chimiothérapie, déconseiller l’automédication allopathique et/ou naturelle sans avis de l’oncologue. Ne pas utiliser de probiotiques ou de levures en cas de chambre implantable, car il existe un risque de bactériémie et de fongémie.

Vie quotidienne

Consulter sans tarder

Les symptômes du cancer de la vessie sont totalement aspécifiques et peuvent dans un premier temps faire penser à une infection urinaire.

Arrêter de fumer

L’arrêt du tabac présente un intérêt thérapeutique majeur. Fumer augmente le risque de complications post-chirurgicales et de récidive, et peut diminuer l’efficacité des traitements.

Amener le patient à prendre conscience de l’importance d’arrêter de fumer, y compris lorsque le cancer est déjà présent, et l’encourager à se faire aider si besoin. Si un arrêt complet n’est pas envisageable, expliquer que diminuer sa consommation est déjà bénéfique.

Vie intime

Les différents traitements peuvent entraîner une sécheresse vaginale ou un rétrécissement du vagin chez la femme, des dysfonctions érectiles chez l’homme, ainsi qu’une baisse de la libido. Les patients stomisés peuvent avoir des difficultés à accepter leur nouveau corps.

Dans tous les cas, il peut être utile d’en parler à son médecin, à un spécialiste du sujet, psychologue ou sexologue, ou encore à une association de patients (voir En savoir+).

Info +

→ Une stomie, du grec « stoma » = bouche, est l’abouchement chirurgical d’un organe creux à la paroi abdominale antérieure en vue de la collection de son contenu, avec pour conséquence la perte du contrôle de l’exonération. Il peut s’agir du côlon ou de l’iléon (colostomie ou iléostomie) ou des voies urinaires (urostomie ou urétérostomie si on précise que ce sont les uretères qui sont abouchées à la peau).

Info +

→ Pour éviter que les sondes sortent de la stomie urinaire directe, un fil est noué autour d’elles, les deux extrémités du fil sont orientées vers le haut et fixées à la peau avec un adhésif microporeux.

Témoignage

« Le temps d’acceptation peut être très long »

Sabrina Fouquet, infirmière stomathérapeute à Vitrolles (13)

« La stomie urinaire est un changement radical et définitif dans la vie du patient. La prise en charge initiale hospitalière est une étape cruciale, mais il y a rarement un stomathérapeute sur place, de sorte qu’on se retrouve à la sortie avec des problèmes d’appareillage et de fuites qui sont dégradants pour le patient. À domicile, il faut s’adapter au rythme du patient, le temps d’acceptation peut être très long. Il faut privilégier l’autonomie pour la nuit, les vacances, les déplacements, et savoir changer sa poche en cas d’urgence. »

Témoignage

« Tout le monde peut être concerné »

Frédérick Merlier, président de l’association Cancer Vessie France- Les Zuros (voir En savoir+ p. 52)

« Nous souhaitons faire connaître ce cancer au grand public, mais aussi aux professionnels de santé, pour ne pas passer à côté du diagnostic. Le sang dans les urines est un symptôme qui devrait systématiquement conduire à une consultation médicale et des investigations complémentaires. Notre action englobe également la lutte contre les idées reçues. J’ai été diagnostiqué à 41 ans et je suis non fumeur. Il y a également beaucoup de femmes atteintes. Tout le monde peut être concerné. »

Info +

→ Le BCG intravésical fait régulièrement l’objet de difficultés d’approvisionnement depuis 2012. BCGMedac est la seule spécialité actuellement disponible.

Info +

→ 10 000 personnes environ sont urostomisées en France, selon l’Institut national du cancer. Le matériel usagé se jette dans un sacpoubelle, puis avec les ordures ménagères.

→ Laboratoires fournissant des dispositifs médicaux pour les urostomisés : B. Braun Medical, Coloplast, ConvaTec et Hollister.

→ Délivrance des poches d’urostomies à la pharmacie : pour les systèmes 2P, vérifier la compatibilité des poches et supports, qui doivent être de la même marque. Ne jamais substituer un modèle par un autre.

Info +

→ Le récepteur PD-1 est présent à la surface des lymphocytes T. Les cellules tumorales peuvent exprimer une protéine PD-L1 qui se lie au récepteur PD-1 et « inactivent » ainsi les lymphocytes T. Les anticorps anti- PD-1 comme le pembrolizumab et les anti-PD-L1 comme l’atézolizumab et l’avélumab empêchent la liaison PD-L1/PD-1 et rétablissent ainsi la réponse anti-tumorale des lymphocytes T.

Les urostomies

L’urostomie est l’abouchement chirurgical des voies urinaires à la peau. Le plus souvent, il s’agit d’une urétérostomie, autrement dit l’abouchement chirurgical des uretères à la peau.

→ L’urétérostomie de Bricker est la technique la plus pratiquée. Un segment d’intestin grêle est prélevé et sert de conduit. Les deux uretères s’y déversent, ce qui permet d’acheminer les urines jusqu’à un orifice unique au niveau de la peau. L’urine est collectée dans une poche vidangeable.

→ L’urétérostomie cutanée directe.

Plus rare, elle consiste à aboucher chirurgicalement les uretères directement à la peau. Elle est unilatérale lorsque les deux uretères s’anastomosent et forment un « Y », permettant un seul abouchement à la peau. Elle est bilatérale si chaque uretère abouche à la peau. Pour éviter une sténose naturelle, le chirurgien met en place des sondes d’urétérostomie remontant jusqu’au bassinet rénal. Destinées à calibrer la stomie urinaire, elles drainent les urines produites par le rein jusqu’à la poche collectrice. Ces sondes sont changées toutes les six semaines par l’urologue, voire par le patient ou la stomathérapeute, à cause du dépôt laissé par l’urine sur les parois et qui risque d’obstruer la sonde.

En savoir +

→ Association Cancer Vessie France- Les Zuros.

Créée en 2017, elle accompagne patients et familles, soutient la recherche et anime sur Facebook, via Les Zuros, un groupe de soutien aux patients « Combattre le cancer de la vessie : ensemble ! ». leszuros.fr

→ Société française de radiothérapie oncologique (SFRO).

Elle propose un livret d’information sur le cancer de la vessie, sa prise en charge, et les effets indésirables des traitements. sfro.fr

→ Haute Autorité de santé/Institut national du cancer.

Pour le document Cancer de la vessie, de mai 2010. has-sante.fr

→ Association française d’urologie (AFU).

Elle propose des recommandations, des fiches patients sur les stomies, les ablations de vessie… urofrance.org

→ Tabac info service.

Site Internet, ligne téléphonique (39 89) et application mobile pour arrêter de fumer. tabac-info-service.fr

À RETENIR

SUR LA MALADIE

→ Le cancer de la vessie est le second cancer urologique le plus fréquent après celui de la prostate.

→ On distingue les tumeurs superficielles, infiltrantes et métastatiques.

→ Les principaux facteurs de risque sont l’âge avancé, le sexe masculin et le tabagisme. Le principal symptôme est la présence de sang dans les urines, qui doit faire consulter rapidement.

SUR LES TRAITEMENTS

→ Les tumeurs superficielles bénéficient d’un traitement local comprenant une chirurgie, qui préserve la vessie, et des instillations intravésicales de chimiothérapie ou d’immunothérapie.

→ Les tumeurs infiltrantes font l’objet d’une chirurgie plus radicale entraînant une ablation de la vessie, ou cystectomie. Les cancers métastatiques reçoivent des médicaments.

SUR LES CONSEILS

→ L’arrêt du tabac est vivement recommandé avant, pendant ou après le cancer en fonction des possibilités de chacun.

→ La mise en place d’une néovessie ou d’une stomie bouscule le quotidien de nombreux patients. Professionnels de santé, urologues, stomathérapeutes, psychologues, sexologues, et associations de patients sont une aide.

Avec l’aimable participation du Dr Yohann Loriot, oncologue médical à l’Institut Gustave-Roussy, à Villejuif (94), de Sabrina Fouquet, in rmière stomathérapeute, à Vitrolles (13), et de Frédérick Merlier, président de l’association Cancer Vessie France-Les Zuros.

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