“J’ai mal à la tête” - Porphyre n° 563 du 27/05/2020 - Revues
 
Porphyre n° 563 du 27/05/2020
 

Exercer

Au comptoir

Auteur(s) : Anne-Gaëlle Harlaut

1 Je questionne

Préciser la demande

« Depuis quand ? », « Avez-vous déjà eu ce type de mal de tête ? À quelle fréquence ? » sondent le caractère primaire ou secondaire de la céphalée (voir Le condiv).

Rechercher certains critères

« La douleur est-elle intense ? Est-elle apparue brutalement ? », « S’accompagnet-elle d’autres signes, de vomissements, de vertiges… ? » indiquent le niveau de gravité. « A-t-elle été déclenchée par un événement comme un choc, un effort, une activité, un médicament ? », « Est-elle associée à des signes de rhume ? Avez-vous de la fièvre…? » recherchent une circonstance d’apparition.

Évaluer la prise en charge

« Souffrez-vous d’une pathologie chronique et êtes vous traité pour ? », « Avez-vous pris un antalgique pour vous soulager ? Avec quel résultat ? » et « Avez-vous des allergies ? » orientent le conseil.

2 J’évalue

Seules les céphalées sans signes de gravité, habituelles ou survenues lors d’une infection bénigne ORL sont prises en charge à l’officine. L’association céphalée récurrente, photophobie, nausées/vomissements oriente vers une migraine, qui doit être diagnostiquée avant toute automédication. Diriger vers un médecin : en cas d’apparition récente et inhabituelle, même chez une personne sujette aux céphalées qui se plaint d’une douleur modifiée ; en cas de douleur qui ne cède pas ou s’aggrave sous antalgiques habituels et/ou devient chronique (voir Le condiv). Consulter en urgence en cas de nausées et vomissements hors migraine, de traumatisme récent, d’apparition brutale, intense, en cas de troubles neurologiques (convulsions, confusion…), de la parole (signe possible d’AVC), de la vision, d’engourdissements, d’une raideur de la nuque et de fièvre (signe possible de méningite). Tout patient immunodéprimé doit être vu en urgence. À noter : l’officinal a aussi un rôle dans la prévention et le dépistage des céphalées par abus médicamenteux en rappelant le bon usage des antalgiques et en surveillant le risque de mésusage.

3 Je passe en revue

Antalgiques classiques

• Paracétamol. Antalgique de palier 1 d’actions périphérique et centrale en curatif de la crise. Exemples : DolipraneTabs, EfferalganMed, Paracétamol Conseil… En pratique. 60 mg/kg par jour chez l’enfant et l’adulte de moins de 50 kg ou 500 mg à 1 g par prise à partir de 50 kg, jusqu’à 3 g par 24 heures, voire 4 g en l’absence d’insuffisance hépatique modérée, déshydratation, alcoolisme, plus de 75 ans… Commencer par 500 mg par prise chez l’adulte, espacer les prises de quatre heures au moins et de six heures chez l’enfant. La durée de traitement est la plus courte possible, au maximum cinq jours, ou trois jours si fièvre associée. Contre-indications : allergie à la molécule et insuffisance hépatique sévère. Effets indésirables : risque de toxicité hépatique, en cas de surdosage et/ou facteurs de risque tels qu’atteinte hépatique, alcoolisme…

• Ibuprofène. Cet anti-inflammatoire non stéroïdien (AINS) qui inhibe la synthèse des prostaglandines est indiqué en curatif de la crise. Exemples : Ibupradoll, Advil, Upfen, Ibuprofène Conseil… En pratique. De préférence au cours d’un repas, à la dose minimale efficace, avec les mêmes précautions de durée que pour le paracétamol. De 3 mois à 12 ans (environ 30 kg) : 20 à 30 mg/kg par jour en suspension buvable en 3 à 4 prises espacées de six heures au moins, sans dépasser 30 mg/kg par jour. Dès 30 kg : 200 à 400 mg par prise, à renouveler si besoin après six heures au moins, sans dépasser 1 200 mg par jour. Ne pas administrer en cas de varicelle et à éviter s’il y a des signes d’autres d’infections en cours, y compris ORL ou dentaires, en raison d’un risque de complications infectieuses : fasciite nécrosante, abcès, pneumonie… Contre-indications : grossesse dès la fin du cinquième mois (et déconseillé durant les mois précédents), antécédents d’hémorragie ou de perforation digestive, ulcère peptique évolutif, antécédents d’asthme sous AINS, insuffisance hépatique, rénale ou cardiaque sévère. Effets indésirables : troubles digestifs, y compris ulcérations et hémorragies, réactions cutanées, risque d’atteintes rénales et augmentation du risque cardiovasculaire chez les patients âgés, déshydratés ou sous diurétiques, IEC…

• Aspirine (acide acétylsalicylique). AINS salicylé dont le profil est similaire à celui de l’ibuprofène mais avec un risque d’effets indésirables supérieur, d’où son utilisation réservée en automédication.

• Association avec la caféine. La caféine a un rôle d’adjuvant qui potentialiserait l’action des antalgiques classiques. Dès 15 ans et à éviter durant la grossesse. Exemples : avec paracétamol dans Prontadol, Algodol Caféine, Cefaline Hauth ou avec ibuprofène dans Ipraféine. L’ajout de caféine à une dose standard d’antalgique accroît de 5 à 10 % le nombre de personnes réellement soulagées (1) mais la Société française d’études des migraines et céphalées (SFEMC) ne la recommande pas dans la migraine en raison du risque d’abus médicamenteux.(2)

• Associations d’antalgiques : paracétamol + aspirine + caféine dans Actron, paracétamol + aspirine + acide ascorbique dans Isofébril… Attention au cumul des effets indésirables de chaque principe actif. Préférer une monothérapie.

• Cryothérapie. L’application de froid, vasoconstricteur, peut soulager la douleur située au niveau du front ou des tempes. En pratique. Poche à glace, gel chaud/ froid de forme adaptée (bandeaux Cryomig, Cryochrono, Nexcare Masque…) ou coussin d’argile (Argicalm) placés au congélateur, en intercalant un pochon ou un linge pour éviter la brûlure cutanée.

Phytothérapie antalgique

• La grande camomille (ou partenelle), Tanacetum parthenium L., a montré une efficacité pour espacer les crises (1) en préventif et en curatif. En pratique. Seule dans Elusanes grande camomille : 1 gélule matin et soir chez l’adulte. En association : Antemig (+ vitamine B6 + magnésium + Co Enzyme Q10) : 1 par jour ; Céfacalm (+ sept plantes, dont saule blanc et gingembre, vitamine C, magnésium) : 3 par jour en 1 prise chez l’adulte durant la crise et 1 par jour en préventif. Vitamines et magnésium joueraient sur la composante stress.

• La reine-des-prés, ou ulmaire (Spiraea ulmaria), contient des dérivés salicylés. Elle est traditionnellement utilisée en curatif. En pratique. En infusion : 1 cuillère à soupe dans 250 ml d’eau chaude, en boire 3 tasses par jour. En gélule chez l’adulte : 1 matin et soir d’Elusanes Reine des près. Précautions : ne pas utiliser en cas d’allergie aux salicylés, sous anticoagulant, de grossesse et d’allaitement.

• Des huiles essentielles à visée antalgique ou anti-inflammatoire, tels menthe poivrée, eucalyptus, basilic, gaulthérie…, ou relaxantes, telle la lavande, sont traditionnellement recommandées contre les céphalées, notamment de tension. Le menthol, extrait de l’huile essentielle de menthe, procure un effet froid décongestionnant. En pratique. En unitaire : 1 à 3 gouttes d’huile essentielle diluées dans une huile végétale, en massage circulaire sur les zones de tension 3 fois par jour, à distance des yeux. En association : Roll’On Olioseptil Maux de tête, Roller Puressentiel Maux de tête… Menthol en crayon ou en macaron antimigraine : en application locale 1 minute au plus, à renouveler si besoin. Précautions : nécessite un avis médical chez l’enfant, la femme enceinte et allaitante.

4 Je choisis

• En première intention : paracétamol pour sa bonne tolérance, même si les AINS sont utilisés en premier dans les migraines. La phyto/aromathérapie et la cryothérapie peuvent se conseiller seules ou associées aux antalgiques classiques.

• Si signes d’infection associés : pas d’ AINS.

• En prévention : phytothérapie avec la grande camomille, voire aromathérapie.

5 J’explique

Respecter les posologies et le délai entre les prises. Augmenter les doses expose à un risque d’intoxication potentiellement grave et les multiplier peut conduire à une accoutumance aux antalgiques génératrice de céphalées. Toute persistance de la douleur, aggravation, hausse de la consommation d’antalgiques ou signe inhabituel doivent amener à consulter.

6 Je conseille

• Tenir un agenda. Si les céphalées sont récurrentes, noter sur un calendrier le nombre et la durée des crises, les traitements pris avec nom, dose, fréquence et effet. Consulter un médecin si la consommation d’antalgiques se répète au moins une fois par semaine sur trois mois.

• Repérer et éviter les facteurs déclenchants : activité physique intense, froid, alcool, stress… Veiller à la régularité des repas, du sommeil, se relaxer, maintenir une activité physique régulière.

• Prendre l’antalgique dès l’apparition des douleurs. Ne pas les associer, au risque de potentialiser les effets indésirables.

• Se reposer, au calme, dans un endroit peu éclairé, éviter les écrans.

(1) www.cochrane.org.

(2) Prise en charge diagnostique et thérapeutique de la migraine chez l’adulte et chez l’enfant, SFEMC, 2012.

Le condiv

Les céphalées, ou maux de tête, désignent toute douleur localisée au niveau de la boîte crânienne. Elles diffèrent selon leur survenue (brutale ou progressive, déclenchée par une circonstance…), la localisation (unilatérale ou bilatérale), le type (pulsatile, diffuse…), l’intensité, le caractère aigu ou chronique (au moins quatre heures par jour, plus de quinze jours par mois depuis au moins trois mois) et d’éventuels signes associés (nausées, vomissements, fièvre…).

→ Selon leur étiologie, trois types de céphalées sont distingués.

Les « primaires », dues à l’activation des nerfs nociceptifs crâniens sans pathologie sous-jacente : les céphalées de tension de type pression ou serrement modéré non pulsatile, les migraines et les algies vasculaires de la face. Elles sont en général reconnues par le patient comme habituelles.

Les « secondaires », liées à une pathologie sous-jacente infectieuse, vasculaire, neurologique, ORL, traumatique… Elles sont perçues comme récentes, brutales ou progressives, et inhabituelles. Parmi les causes, certaines, dont l’hémorragie cérébrale et la méningite, sont des urgences.

Les névralgies crâniennes, d’origine neuropathique.

→ Des contraceptifs hormonaux, la digoxine, les inhibiteurs calciques… peuvent entraîner des céphalées. Les céphalées par abus médicamenteux d’antalgiques et/ou antimigraineux, chroniques, concerneraient environ 3 % de la population.

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