Un futur se dessine pour le préparatoire - Porphyre n° 560 du 19/02/2020 - Revues
 
Porphyre n° 560 du 19/02/2020
 

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Actus

Auteur(s) : Christine Julien

La 2e édition des Assises de la préparation magistrale à Paris a mis l’accent sur les bonnes pratiques en cours de révision, la place du préparatoire dans les ruptures de spécialités et la nécessité de le reconnaître comme une spécialité de la pharmacie. Le texte devrait sortir avant la fin de l’année 2020.

Quoi de plus pertinent que l’ancienne apothicairerie de l’Institution nationale des Invalides de Paris pour accueillir les IIe Assises de la préparation magistrale ? Le 30 janvier dernier, pharmaciens et institutionnels ont échangé sur les futures bonnes pratiques de préparation (BPP), attendues avant la fin de l’année. Les ruptures de spécialités et la nécessité de spécialiser l’activité du préparatoire ont également été discutées.

Le succès de l’enquête publique

Comme lors des premières Assises, en 2018, le duo qui a travaillé à la révision des BPP à l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) était présent : Valérie Salomon, pharmacienne hospitalière et responsable des médicaments génériques, homéopathiques, à base de plantes et des préparations de l’ANSM, et Pascal Vaconsin, préparateur hospitalier spécialisé en pharmacotechnie. Valérie Salomon a souligné que les BPP s’appliqueront « aux officines et pharmacies à usage intérieur dont les besoins peuvent assez différer. Pour autant, il faut que les exigences puissent s’adapter et que la lecture soit aisée pour les différents acteurs ». Les chapitres 1 à 9 du futur div, travaillé avec un comité d’experts (voir encadré), ont été soumis à l’enquête publique.

Du rangement et du changement

612 personnes se sont inscrites à l’enquête publique sur le site de l’ANSM. « Nous sommes en train d’analyser les commentaires », a informé la pharmacienne. Elle a présenté les grandes lignes revisitées du div de 2007 dont « l’ossature est désormais calquée sur les bonnes pratiques de fabrication (BPF) de l’industrie ». Outre la clarté, « ce plan permet une comparaison transversale avec les BPF, et peut ainsi améliorer la communication avec les instances politiques », a précisé Pascal Vaconsin. Tout ce qui a trait aux locaux, au personnel, aux contrôles, à la documentation, etc., est enfin rangé dans un chapitre dédié.

La catégorisation des préparations et le dossier de préparation ont été réécrits. « Nous avons voulu être très pédagogues, mais on a senti un moment de crispation », a regretté Valérie Salomon. Beaucoup y ont vu de la lourdeur administrative et des contraintes supplémentaires, alors que l’intention était de donner des outils pour expliciter le div de 2007. « On a la même exigence de qualité, mais les moyens pour y parvenir sont différents. La PUI qui fabrique 2 500 lots par an n’a pas le même système documentaire, ni les mêmes approches qualité que l’officine qui fait de la préparation ciblée sur un patient », a souligné Pascal Vaconsin. Le préparateur, qui a porté ce projet pendant quatre ans, a voulu dédramatiser les craintes.

Que suis-je capable de faire ?

Trois catégories de préparations sont explicitées selon leur risque, évalué en fonction de la substance active, de la voie d’administration, de la forme, des opérations et du nombre de patients potentiels. La catégorie 1, c’est la préparation qui utilise des spécialités, c’est le mélange de deux tubes de Diprosone et autres pour un usage cutané. « On a remis la spécialité pharmaceutique dans le corps du div, comme elle est utilisée dans la vraie vie », a pointé Pascal Vaconsin. Dès la catégorie 2, le risque augmente avec le recours à des matières premières à usage pharmaceutique (MPUP) qu’il va falloir stocker, contrôler, avec des formes et des opérations plus complexes et la réalisation de séries. La catégorie 3 concerne « clairement les préps nécessitant une autorisation de l’Agence régionale de santé (ARS) » pour substances dangereuses ou destinées à la pédiatrie. Un agrément que les BPP n’indiqueront pas, « car si le type d’autorisation changeait, il faudrait changer tout le div », a expliqué le préparateur.

Un dossier de préparation indispensable

Le dossier de préparation permet l’obtention de toutes les informations pertinentes pour réaliser et contrôler une préparation. Il comporte la validité technico-réglementaire de la demande « qui permet de savoir si je peux réaliser la préparation », a expliqué la directrice. Cette check-list abrite une analyse pharmaceutique de la prescription, « obligatoire mais qu’il n’est pas obligé de tracer. Sa rédaction va être clarifiée », a promis Pascal Vaconsin. Tout le reste est indispensable. « C’est ce que vous avez mis en place pour vous assurer que la MPUP correspond bien à celle que vous vouliez prendre. Le dossier de préparation est à réaliser pour toutes les préps, mais pas à chaque fois. » Une fois écrite, une procédure de gélule sera à adapter à la matière première, par exemple…

Un lot, un local, des zones

La taille du lot reste limitée à 250 patients, mais plus à 300 unités comme en 2007. « Les unités doivent être homogènes les unes par rapport aux autres… et c’est ça qui forme un lot », a souligné le préparateur. Autre point réglé, la notion de zones : « Un local, c’est quatre murs et une porte. Une zone, c’est un endroit dans un local. Et il peut y avoir plusieurs zones dans un local. » Quant à la soustraitance, « nous avons précisé les responsabilités. La pharmacie qui dispense est responsable de la dispensation, et celle qui fabrique a la responsabilité de la libération pharmaceutique de sa préparation. D’où la nécessité de fournir un certificat de libération ». Un « je soussigné X, pharmacien, libère le lot » peut suffire…

Une solution aux ruptures

Le Syndicat national de la préparation pharmaceutique (SN2P) souhaite positionner la préparation « comme une solution fiable et reconnue, une potentielle alternative à la gestion des ruptures de spécialités », a avancé Éric Myon, son trésorier. « Tous les pharmaciens peuvent en faire, ça reste même un prérequis pour être maître de stage, mais est-ce que tout le monde suit les BPP de 2007 ? Et les prochaines ? Quel niveau de qualité proposer ? Quid des formations ? », s’est-il interrogé. Pointant le rôle de la préparation dans les dernières ruptures de cortisone, il a évoqué le plan du SN2P remis au ministère fin janvier. Ses propositions ? Enlever l’obligation légale d’avoir un préparatoire dans le Code de la santé publique, poser le préparatoire comme une spécialité comme la vaccination ou la PDA. Auto-enregistrer cette activité auprès des ARS avec création d’un fichier national de pharmacies aptes à réaliser les préparations et consolider la formation. Tout ceci rassurerait les autorités sur les compétences des préparatoires. Est-ce que cela ne risque pas de tuer le savoir-faire de la préparation si elle devient facultative ? « Je rêverais que 22 000 officines fassent de la préparation déjà conforme aux BPP de 2007. Ce n’est pas le cas », observe Fabien Bruno, soustraitant à Paris et président du SN2P. Ce qui dessert la reconnaissance et la pérennité de cette activité par les autorités. « Avec 2 000 officines qui préparent et 22 000 qui délivrent, on est crédible pour pallier les ruptures de stock, ou s’occuper prochainement des préparations de cannabis. On veut bien avoir des préparatoires aux normes, mais en contrepartie, le pharmacien d’officine doit pouvoir faire des préparations officinales. » Étoffer le Formulaire national et autoriser le conseil de préparations, par exemple…

Les chapitres des futures BPP

Le div se découpe ainsi :

Chap. 1 : Management du système qualité pharmaceutique

Chap. 2 : Personnel

Chap. 3 : Locaux et matériel

Chap. 4 : Documentation

Chap. 5 : Opérations conduisant à la réalisation d’une préparation

Chap. 6 : Contrôle de la qualité pharmaceutique

Chap. 7 : Activités externalisées, activités de sous-traitance

Chap. 8 : Réclamations et rappels de préparations

Lignes directrices 1 : Préparation des médicaments stériles

Lignes directrices 2 : Préparation des médicaments toxiques

Lignes directrices 3 : Radiopharmaceutiques

Lignes directrices 4 : Médicaments à des fins de recherche biomédicale.

BPP 2007 à 2020

→ 21 novembre 2007, les premières bonnes pratiques de préparation (BPP) entrent en vigueur. L’objectif est de garantir la qualité et la sécurité des préparations.

→ 2016, mise en place par l’ANSM d’un comité scientifique spécialisé temporaire (CSST) d’experts pour réviser les BPP. Il s’appuie notamment sur un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales(1) de 2015 après des décès de nouveau-nés à Chambéry en réanimationnéonatalogie. Des poches de nutrition entérale sont incriminées.

→ Du 24 juillet au 13 octobre 2019, consultation publique sur les futures BPP par l’ANSM.

→ 612 inscrits à l’enquête publique, dont 528 officines, 51 pharmacies à usage intérieur, 6 administrations dont ARS, 28 autres dont journaliste, vétérinaire, éditeur de logiciel, groupement, Ordre des pharmaciens, etc. 252 inscrits ont écrit près de 3 000 lignes de commentaires à analyser !

→ Printemps 2020 : prochaine enquête publique sur les lignes directrices 2 et les produits dangereux.

→ Fin 2020 : nouvelles BPP.

(1) « Évaluation des pratiques en matière de nutrition parentérale pédiatrique », Igas, janvier 2015.

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