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Auteur(s) : Christine Julien
Les mésusages, les intoxications et les décès liés aux antalgiques opioïdes sont en hausse. Sans remettre en cause leur intérêt, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) pointe la nécessité d’une meilleure information sur le risque de dépendance et d’overdose dès la prescription et tout au long du traitement. Elle vise ceux dits faibles.
« Plus que des chiffres, il faut essayer d’y voir des messages clés. » L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a publié un état des lieux de la consommation des antalgiques opioïdes en février 2019
En fait, la consommation d’antalgiques opioïdes n’a pas augmenté. « Elle a même diminué. Nous sommes passés de 19 % à 17 % de consommateurs dans la population générale », précise le Pr Nicolas Authier, psychiatre, chef du service de pharmacologie médicale et du Centre d’évaluation et de traitement de la douleur au CHU de Clermont-Ferrand (63). Certes, nous sommes passés « de 500 000 à 1 million d’usagers d’opioïdes forts en 12 ans, mais cela pèse peu au regard des 11 millions de Français qui prennent des antalgiques opioïdes faibles. En revanche, les molécules consommées sont différentes », précise le spécialiste, également directeur de l’Observatoire français des médicaments antalgiques (OFMA). « On consomme plus d’oxycodone, un peu moins de morphine. On consomme beaucoup de tramadol, un petit peu moins de codéine. » En 2017, « 5,7 millions de Français ont pris du tramadol, 4,8 de la codéine et 2,7 de la poudre d’opium. »
En 2011, lors du retrait du Di-Antalvic, association de dextropropoxyphène et paracétamol, d’autres antalgiques opioïdes faibles émergent. Ainsi que de nouvelles complications. « Le tramadol, la codéine et la poudre d’opium ont des profils de risque un peu différents du Di-Antalvic », précise le médecin.
Du jour au lendemain, les prescripteurs « passent » du Di-Antalvic au tramadol, un opioïde faible dont la consommation s’envole…
« Derrière le mot “faible”, il n’y a rien de faible », prévient Stéphane Robinet, ex-titulaire strasbourgeois, co-fondateur de Pharm’addict et pharmacien en centre de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie. « Les opioïdes faibles donnent des opioïdes forts dans l’organisme. La codéine est un anti-douleur parce qu’elle se transforme en morphine, rappelle le pharmacien. Leur risque d’overdose et d’addiction (voir encadré) est aussi important qu’avec un opioïde fort. » Beaucoup de professionnels de santé « méconnaissent la dimension opioïde du tramadol, substance numéro un des causes d’overdose », constate le Pr Authier. Et ont une fausse croyance de sécurité par rapport à la codéine », alors que le tramadol conjugue risque d’épilepsie, de syndrome sérotoninergique, d’hypoglycémie, d’hyponatrémie…
Aucune crise sanitaire n’est en vue « mais il va falloir prendre des mesures pour éviter que les choses ne s’aggravent », pointe le Pr Authier, également président de la Commission nationale des stupéfiants de l’ANSM. Mieux prescrire les antalgiques opioïdes est une nécessité. La notion de faible ou fort ou celle de palier instaurée en 1986 par l’OMS pour les douleurs cancéreuses, n’est plus pertinente. Il propose de les hiérarchiser selon leur bénéfice/risque et de mettre en place des recommandations de bon usage spécifiques aux opioïdes dits faibles.
Pour diminuer le risque d’addiction et d’overdose, le Pr Authier et Stéphane Robinet proposent de surveiller tout comportement suggérant un usage à risque grâce au questionnaire POMI (voir encadré) que l’OFMA vient de remanier. De son côté, Stéphane Robinet serait favorable
L’ANSM n’envisage pas de passer le tramadol sur la liste des stupéfiants « car il n’y a pas volonté à restreindre les prescriptions » mais « il faut que son potentiel de pharmacodépendance soit dit au patient, surveillé par le médecin ou le pharmacien ». Elle mise pour l’instant sur la formation et l’information, mais le Pr Authier souhaite une mesure « moins tarte à la crème » et concrète rapidement. Comme limiter sa prescription à 1 mois, voire 3 mois « pour inciter à la réévaluation du bénéf ice/risque sans compliquer la prescription », car « les antalgiques opioïdes sont de bons médicaments dont la légitimité ne doit pas être remise en cause ».
(1) « État des lieux de la consommation des antalgiques opioïdes et leurs usages problématiques », ANSM, février 2019.
(2) « Opioïdes et risque addictifs - Quelle est la situation en France ? Que faire pour limiter les risques ? », Dr Stéphane Robinet, Pr Alain Serrie, Dr Nolwenn Astruc, Le Flyer.
La consommation des antalgiques opioïdes
→ Environ 12 millions de Français, soit 17 % de la population générale, ont eu une prescription d’antalgique opioïde en 2017.
→ Les opioïdes faibles
→ Le plus consommé : le tramadol, suivi de la codéine + paracétamol, puis de la poudre d’opium + paracétamol.
→ Parmi les opioïdes forts
(1) Antalgiques opioïdes dits faibles : codéine, poudre d’opium (+ paracétamol), tramadol.
(2) Antalgiques opioïdes dits forts : fentanyl, morphine, oxycodone…
→ L’échelle POMI (Prescription opioid misuse index) dépiste le mésusage des antalgiques opioïdes d’un patient en cours de traitement. Elle consiste à lui poser 6 questions afin de savoir s’il prend le médicament anti-douleur en quantité plus importante ou plus souvent que la prescription, pour soulager ou supporter d’autres problèmes que la douleur, s’il a eu besoin de renouveler son ordo plus tôt, s’il a déjà eu la sensation de planer ou d’être stimulé en le prenant, et s’il a consulté plusieurs médecins pour obtenir plus d’anti-douleurs… Deux réponses positives signent la possibilité que la personne ait un usage à risque de cet antalgique… Échelle consultable et imprimable sur www.ofma.fr
→ Le mésusage est une utilisation non conforme au résumé des caractéristiques produit (RCP) ; il est le fait du patient et/ou du prescripteur.
→ L’addiction est un mode d’utilisation inadapté qui conduit à une altération du fonctionnement ou implique une souffrance cliniquement significative. Parmi les 11 critères, le craving (envie irrépressible de consommer) et la perte de contrôle sont des éléments centraux. La dépendance est l’un de ces 11 critères.
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