L’obésité de l’enfant et de l’adolescent - Porphyre n° 550 du 20/02/2019 - Revues
 
Porphyre n° 550 du 20/02/2019
 

Savoir

La patho

Auteur(s) : Florence Leandro

L’obésité pédiatrique est une maladie caractérisée par un excès de masse grasse ou d’adiposité. Enjeu majeur de santé publique en raison de ses complications possibles, elle est cependant évitable. L’officinal peut jouer un rôle majeur dans l’éducation, le soutien aux familles et la lutte contre les idées reçues.

La maladie

Rappels physiologiques

Développement d’un enfant

• Entre 0 et 18 ans, un enfant en bonne santé grandit et grossit (1). Sa masse grasse et sa corpulence évoluent de façon non linéaire mais de manière assez typique.

• À la naissance, la masse grasse correspond à environ 14 % de la masse totale, pour atteindre 25 % autour de 6-9 mois, soit un quart du poids du corps du bébé ! C’est le moment où l’enfant est souvent « dodu » sans qu’il faille s’en inquiéter car tout rentre dans l’ordre lors de la marche.

• Autour de 9-12 mois, la proportion de masse grasse diminue jusqu’à 6 ans, pour atteindre 12 à 15 %. La reprise physiologique de la masse grasse autour de 6 ans est appelée « rebond d’adiposité ».

• À partir de la puberté, la masse grasse évolue différemment. Une femme adulte a entre 20 et 25 % de graisse, un homme, entre 15 et 20 %.

La corpulence

De sa naissance à 6 ans, un enfant bénéficie de 20 examens médicaux obligatoires. Trois consultations sont prévues lors de la deuxième année, puis deux fois par an jusqu’à six ans.

• Le poids et la taille sont mesurés régulièrement afin d’évaluer sa corpulence. Pour cela, le médecin, généraliste ou pédiatre, calcule plusieurs fois par an, et au moins une fois par an à partir de l’âge de 2 ans, l’indice de masse corporelle selon la formule (IMC) = poids en kg/(taille en m)2.

• L’IMC ou indice de Quételet, du nom de son inventeur, est une valeur corrélée à la masse grasse d’un individu. Chez l’enfant, cet indice s’interprète en fonction de l’âge et du sexe, en se référant à des courbes de corpulence.

• Des courbes de référence permettent de suivre l’évolution de la corpulence au cours de la croissance. Les plus utilisées sont :

→ les courbes de corpulence françaises. Dans le carnet de santé depuis 1995, ces courbes sont établies en percentiles (voir Dico+). Lorsqu’un enfant présente une corpulence qui évolue de manière régulière à l’intérieur de la zone de corpulence normale, entre le 3e et le 97e percentile des courbes françaises, l’évolution de sa corpulence est dite normale (voir infographie) ;

→ les seuils de l’International Obesity Task Force (IOTF). L’IOTF a élaboré en 2000 une définition du surpoids et de l’obésité chez l’enfant, en utilisant des courbes de l’IMC établies à partir de données recueillies dans six pays disposant de larges échantillons représentatifs (voir définition obésité) pour les enfants et les adolescents de 2 à 18 ans. Ces courbes sont largement utilisées et reprises dans le carnet de santé.

• Le calcul de l’IMC est reporté sur les courbes de corpulence, permettant de suivre l’IMC.

Dépenses énergétiques

La dépense énergétique journalière est la somme de plusieurs dépenses : le métabolisme de base (battements du cœur, respiration…), la thermogenèse alimentaire (digestion des aliments), la croissance (dépense négligeable sauf les premiers mois de vie), la guérison, la thermorégulation (dépense négligeable surtout dans les pays industrialisés) et les activités physiques sédentaires (lire…) ou proprement dites (faire du vélo…).

L’obésité

Des définitions

Chez l’enfant comme chez l’adulte, l’obésité se caractérise par un excès de masse grasse ou d’adiposité. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) parle d’« une accumulation anormale ou excessive de tissu adipeux représentant un danger pour la santé ». Sur le plan purement énergétique, l’obésité se définit aussi comme le résultat d’un déséquilibre persistant entre les apports et les dépenses énergétiques. Ces premières définitions ne distinguent pas l’obésité du surpoids, deux situations cependant très différentes qui conduisent à des prises en charge adaptées.

Les courbes de corpulence

Chez l’enfant, le médecin se réfère aux courbes de corpulence.

• Le surpoids y est défini par un IMC au-delà de la courbe du 97e percentile selon les courbes de référence françaises.

• Selon les courbes de l’IOTF, les seuils du surpoids et de l’obésité sont constitués par les courbes de centiles atteignant respectivement les valeurs 25 et 30 kg/m2 à 18 ans, 25 et 30 étant les seuils définissant le surpoids et l’obésité chez l’adulte. On parle de surpoids - dont obésité - pour un IMC supérieur au centile IOTF-25, de surpoids non obèse entre le centile IOTF-25 et le centile IOTF-30, et d’obésité pour un IMC supérieur au centile IOTF-30. Remarque : La courbe IOTF-25 est proche de la courbe du 97e percentile des références françaises.

C’est une maladie

• L’obésité n’est plus considérée comme un facteur de risque mais comme une maladie chronique à part entière depuis 1997 par l’OMS, qui parle d’une « épidémie mondiale » ou pandémie.

• Les taux de prévalence (voir Dico +) se stabilisent mais restent préoccupants dans les pays développés. Ils augmentent dans plusieurs régions en voie de développement telles que l’Asie. En France, l’étude Esteban-2015 montre que 17 % des 6-17 ans sont en surpoids ou obèses, soit près d’1 enfant sur 5. L’obésité seule correspond à une prévalence de 3,9 %.

Classification

Il existe plusieurs catégories d’obésité pédiatrique en fonction des étiologies.

• L’obésité monogénique : due à une mutation sur un seul gène. À ce jour, une poignée de gènes ont été identifiés : gènes MC4R, POMC, LEP… Ils sont impliqués dans la régulation de la prise alimentaire, d’où une hyperphagie et une prise de poids importante et précoce.

• L’obésité syndromique n’est pas une pathologie mais fait partie d’un ensemble de symptômes dans une maladie en particulier. Elle est notamment associée à des signes dysmorphiques, des malformations, un retard, des troubles du comportement… L’un des exemples les plus connus est le syndrome de Prader-Willi (voir encadré).

• L’obésité endocrinienne. Elle est due à une anomalie endocrinienne comme un déficit en hormone de croissance, une hypothyroïdie, l’hypercorticisme ou à une tumeur cérébrale touchant les centres de régulation de l’appétit.

• L’obésité iatrogène suite à la prise au long cours de certains médicaments : corticoïdes, neuroleptiques, antiépileptiques…

• Tous les autres cas sont classés dans le cadre hétérogène de l’obésité dite commune ou polygénique, environ 95 % des cas d’obésité.

Diagnostic

• Le diagnostic est clinique, le plus souvent posé par le médecin généraliste ou le pédiatre. Il s’appuie notamment sur la courbe de corpulence de l’enfant qui dépasse la « limite supérieure », la courbe de IOTF-30.

Le Dr Marie-Laure Frelut, pédiatre et membre de l’ECOG (European Childhood Obesity Group), rappelle que « toutes les courbes de l’ IOTF et les différents seuils ont été obtenus d’après des calculs mathématiques. Ces données sont destinées aux études épidémiologiques et ont été utilisées dans le carnet de santé un peu par défaut pour souligner les seuils de surpoids et d’obésité. Ce qui compte, c’est la dynamique de la courbe de corpulence, qui montre que l’enfant est en train de devenir obèse. »

• L’annonce est un moment-clé, au cours duquel le médecin ne doit ni dramatiser la situation, ni culpabiliser le patient ou sa famille, surtout si l’obésité est « une affaire de famille ». Le praticien s’appuie sur la courbe de corpulence et peut s’adresser directement à l’enfant en âge de comprendre, vers 8-10 ans : « ta courbe montre que… »

• Lors d’une consultation dédiée et en utilisant les techniques de l’éducation thérapeutique du patient (ETP), le praticien explore les antécédents familiaux, l’histoire du surpoids ou de l’obésité chez cet enfant, le condiv familial et psychosocial, le mode de vie, un événement déclencheur… Il recherche aussi des arguments évoquant certains types d’obésité : troubles du comportement, signes dysmorphiques, hyperphagie précoce… Dans ces cas - assez rares -, des explorations plus poussées sont nécessaires et menées par des équipes spécialisées.

Étiologie

Multifactorielle

• Dans tous les cas, la prise excessive de poids est d’origine plurifactorielle : environnementale, génétique et épigénétique.

L’épigénétique s’intéresse aux mécanismes moléculaires capables de réguler l’expression des gènes sans pour autant modifier la séquence nucléotidique dont ils découlent. Les marques épigénétiques se traduisent par de simples modifications chimiques de l’ADN ou des protéines qui lui sont associées au sein de la chromatine. Ces « marques » peuvent se transmettre de génération en génération ou apparaître à des moments clés du développement, telle la période fœtale. L’épigénétique fournit au matériel génétique un moyen de réagir à l’évolution des conditions environnementales. Ainsi, un épisode de « famine » durant la grossesse pourrait influer sur le risque d’obésité des enfants à venir.

• Pour le grand public, l’obésité est avant tout une histoire de « malbouffe ». La plupart du temps, il est vrai que l’interrogatoire du patient ou de sa famille révèle une alimentation trop riche, trop grasse, trop sucrée, depuis longtemps. De plus, les parents oublient parfois que les besoins d’un enfant ne sont pas ceux d’un adulte. « Il existe un gros problème de compréhension, notamment concernant les protéines animales. Un enfant de 3 ans ne devrait pas manger un steak haché de la même taille que celui d’un adulte ! L’excès de protéines est un facteur de risque de surpoids et d’obésité », explique l’équipe du RéPPOP, réseau de prévention et de prise en charge de l’obésité pédiatrique de Midi-Pyrénées.

Facteurs prédisposants

Au-delà de la « malbouffe », la Haute autorité de santé (HAS) décrit en 2011 (2) plusieurs facteurs prédisposants.

→ Le surpoids et/ou l’obésité des parents : 40 % de risque si un parent est atteint, 80 % si ce sont les deux parents ;

→ états lors de la grossesse : obésité de la femme enceinte, prise de poids excessive, tabagisme, diabète… ;

→ les difficultés socioéconomiques ;

→ le mode d’éducation : restrictions alimentaires, négligences, abus…;

→ la sédentarité ;

→ le manque de sommeil ;

→ le handicap…

Pour le Dr Frelut, « l’excès de poids est la résultante d’un déséquilibre, mais ce n’est pas qu’une question de ratio entre l’énergie consommée et l’énergie dépensée ! Tout ce qui peut perturber un enfant peut conduire à l’obésité en modifiant ses comportements, comme le divorce des parents, une dyslexie, un état anxieux… »

Évolution

Le principal risque d’un enfant obèse est de devenir un adulte obèse. La probabilité qu’un enfant obèse le reste à l’âge adulte varie selon les études, de 20 à 50 % avant la puberté, à 50 à 70 % après la puberté.

Complications

• Les complications immédiates sont psychosociales. « Les enfants se plaignent des moqueries qu’ils subissent à l’école », souligne le RéPPOP Midi-Pyrénées. Moqueries qui peuvent tourner au harcèlement et provoquer dépression, anxiété, troubles du comportement alimentaire…

• Les complications physiques les plus fréquentes sont les atteintes cutanées telles les vergetures, des mycoses des plis du fait de la macération, la transpiration, une hyperpigmentation anormale des plis ou Acanthosis nigricans

Elles peuvent être source de gêne et de honte, de même une gynécomastie (augmentation des seins) et une verge enfouie chez le jeune garçon.

• De sérieuses complications orthopédiques avec déformations ostéoarticulaires, entorses, douleurs… et respiratoires avec asthme, déconditionnement à l’effort, apnée du sommeil… peuvent apparaître dès l’enfance.

• Sur le plan métabolique et cardiovasculaire, l’enfant obèse peut présenter une dyslipidémie, une insulinorésistance et une intolérance au glucose pouvant aller jusqu’au diabète de type 2 « même si les cas pédiatriques sont plutôt rares, comparativement à ce qui s’observe aux États-Unis », précise le RéPPOP Midi-Pyrénées.

Ces complications se développent le plus souvent à bas bruit avec des conséquences plus graves qui apparaîtront à l’âge adulte si rien n’est fait pour perdre du poids : hypertension artérielle, athérosclérose…

Son traitement

Objectifs

La plupart du temps, stabiliser le poids suffit, surtout si l’obésité débute et/ou si l’enfant est très jeune, donc est amené à grandir et à s’affiner. Dans les obésités plus sévères et/ou chez l’adolescent, une perte de poids est souvent envisagée mais elle n’a de sens que si elle s’accompagne d’un changement durable des habitudes de vie.

Dans tous les cas, l’amélioration de la qualité de vie de l’enfant et de l’adolescent sur les plans physique, psychique et social est centrale, de même que la prévention des complications.

Les objectifs fixés doivent rester raisonnables pour obtenir des résultats durables et éviter les échecs ou l’apparition de troubles du comportement alimentaire.

Stratégie thérapeutique

• La prise en charge est non médicamenteuse. Elle est individualisée pour s’adapter à l’enfant et à sa croissance. Elle prend du temps, au moins 2 ans selon la HAS, avec un suivi régulier, par exemple mensuel. Elle peut impliquer le médecin traitant, un diététicien, un psychologue, un psychomotricien, sans oublier la famille, qui doit être intégrée à toutes les étapes de la prise en charge. Rien ne changera si les professionnels de santé ne travaillent pas avec les parents…

• Elle s’attaque aussi aux éventuelles étiologies d’obésité identifiées : arrêt ou modification de traitement en cas d’obésité iatrogène, correction de l’endocrinopathie en cas d’obésité endocrinienne, administration sous-cutanée de leptine recombinante en cas de déficit congénital en leptine (gène LEP)… Cependant, « les modifications du mode de vie doivent être systématiquement proposées et elles fonctionnent quels que soient le diagnostic et le type d’obésité, car le patient souffre souvent de troubles du comportement alimentaire et d’une difficulté à gérer ses apports », précise l’équipe du RéPPOP Midi-Pyrénées.

Les niveaux de prise en charge

• La prise en charge repose sur trois niveaux de soins ou recours. L’enfant peut passer d’un recours à un autre en fonction de sa situation initiale, des comorbidités, du condiv familial plus ou moins favorable, des difficultés rencontrées et des éventuels échecs.

→ Le plus souvent, la prise en charge démarre et reste de l’ordre du premier recours, c’est-à-dire en ambulatoire et menée par le médecin traitant de l’enfant. Il peut s’appuyer sur d’autres professionnels de santé de proximité comme un diététicien.

→ La prise en charge de second recours repose sur des professionnels de santé spécialisés, en ville et/ou à l’hôpital. L’enfant peut participer à des ateliers d’éducation thérapeutique du patient (ETP), séjourner en soins de suite et de réadaptation (SSR) ou suivre une activité physique adaptée (APA, voir Dico+).

→ Les cas les plus complexes relèvent d’un troisième recours. Cette prise en charge est organisée à l’échelle régionale dans des CSO (centres spécialisés obésité) ou des CIO (centres intégrés obésité) hébergés par des centres hospitalo-universitaires (CHU). Là encore, ETP, APA et SSR peuvent s’intégrer à la prise en charge.

Dans certaines régions, l’offre de soins est structurée par un réseau de prévention et de prise en charge de l’obésité pédiatrique ou RéPPOP. Ce type d’association est financé par l’Agence régionale de santé (ARS) et s’appuie sur un réseau de professionnels libéraux formés, de nombreux partenariats avec des associations sportives, des SSR, des établissements scolaires, et une équipe coordinatrice et multidisciplinaire basée à l’hôpital.

Les interventions

La prise en charge va s’appuyer sur plusieurs types d’intervention concernant le mode de vie de l’enfant et de la famille.

Nutrition

L’enfant et/ou ses parents sont d’abord invités à renseigner dans un tableau les repas consommés sur plusieurs jours, voire une semaine. Cela permet de savoir « d’où on part » et que l’enfant et/ou ses parents pointent eux-mêmes les pistes d’amélioration possibles.

Le but est de réintroduire du bon sens dans les repas, sur les plans qualitatif et quantitatif, pour atteindre un certain équilibre alimentaire et, au final, diminuer les apports énergétiques, sans jamais parler de « régime ».

Dans le cadre d’une prise en charge plus spécialisée, elle prend la forme d’un suivi régulier par un diététicien, d’ateliers d’ETP avec courses, cours de cuisine ou repas en groupe…

L’adolescent, plus mature qu’un enfant, est dans une certaine mesure capable de participer à la prise de décision, s’impliquer dans les courses, la confection des repas. La vigilance s’impose face à certains comportements à risque comme le tabagisme démarré dans l’espoir de maigrir plus vite…

Activité physique

Pour David Thivel, maître de conférences à l’Université de Clermont-Ferrand (63) et membre de l’ECOG, « avant toute chose, il est important d’évaluer le niveau d’activité physique de l’enfant, ses possibilités locales, ses objectifs mais aussi ses éventuelles limitations physiques, comme des problèmes d’équilibre, de force musculaire ou de locomotion ». Là encore, cette première étape permet souvent de mettre en place quelques mesures simples et suffisantes pour augmenter l’activité physique au quotidien.

Passé ce stade, un enseignant en activité physique adaptée (APA) intervient et propose un programme au plus près des besoins et des possibilités de l’enfant. « Un bilan médical des fonctions musculo-squelettiques et cardio-respiratoires est réalisé avant de démarrer le programme », explique David Thivel.

Le programme d’APA associe souvent l’endurance avec utilisation des lipides, notamment en cas d’obésité viscérale, et amélioration de la capacité cardio-respiratoire, la résistance pour maintenir la capacité musculaire mais aussi tout ce qui peut améliorer la coordination, la souplesse, l’équilibre, les réflexes…

Sédentarité

« Ce n’est pas parce qu’on augmente l’activité physique qu’on va diminuer la sédentarité. Au contraire, certaines personnes vont augmenter leur sédentarité comme une manière de compenser les efforts fournis », explique David Thivel. L’évaluation de la sédentarité de l’enfant, et la recherche active de pistes visant à la faire diminuer, font partie intégrante de la prise en charge.

Psychologie

L’obésité entraîne une souffrance psychologique, tandis que la prise en charge s’accompagne de nombreuses modifications du quotidien parfois déroutantes pour le patient et/ou sa famille. Dans certains cas, un trouble psychologique est à l’origine de l’obésité et doit être traité en priorité avant d’envisager une quelconque prise en charge nutritionnelle. Même chose quand l’état psychologique du patient est trop dégradé.

Les séjours en SSR

Souvent perçu comme l’étape « de la dernière chance », le séjour en soins de suite et de réadaptation (SSR) a beaucoup évolué dans son fonctionnement. L’hospitalisation de jour et l’ETP s’ajoutent à l’hospitalisation complète pour permettre l’assimilation des repères alimentaires et des moyens de lutte contre la sédentarité par les enfants et les familles. Pour le Dr Frelut, « le séjour en SSR, c’est une mise à l’abri, une pause qui permet de prendre du recul et de tout remettre à plat dans les formes sévères, évolutives ou compliquées. L’adolescent doit avoir atteint un certain degré de maturité et être d’accord avec ce mode de prise en charge sans en souffrir. Les parents ne sont pas en reste. Ils doivent contribuer à l’analyse des difficultés, suivre l’évolution de leur enfant, recevoir une formation parallèle à la sienne, et redevenir acteurs de la prise en charge le week-end quand l’enfant revient au domicile ».

La chirurgie bariatrique

Certains adolescents peuvent être en demande de ce type de chirurgie. Selon la HAS, elle ne s’envisage qu’à partir de 13 ans, mais davantage autour de 15-16 ans, et seulement dans des situations d’obésité très sévère ou très compliquée à prendre en charge. La décision est prise par un ensemble de spécialistes en centre de référence au cours de réunions de concertation pluridisciplinaire (RCP). Le patient doit être suffisamment mature et surtout comprendre que la chirurgie entraîne des contraintes et un suivi à vie.

Sa prévention

Le dépistage du surpoids

Le dépistage de l’obésité concerne tous les enfants. La vigilance est à renforcer en cas de facteurs de risque, notamment chez ceux dont les parents ont déjà des problèmes de poids.

La surveillance

L’enfant est pesé et mesuré régulièrement en même temps 2 à 3 fois par an, et idéalement tous les trimestres, pour étudier précisément la dynamique de la prise de poids, finalement plus intéressante que la prise de poids elle-même.

Les signes d’alerte

• Un IMC supérieur au 97e percentile des courbes de référence françaises ou à l’IOTF-25 signe un enfant en surpoids.

• Si la courbe de corpulence montre que le rebond d’adiposité intervient avant l’âge de 5 ans, ce rebond est qualifié de précoce et constitue un facteur de risque de surpoids et d’obésité. Dans certains cas, le rebond d’adiposité est absent, signe d’un gain pondéral accru et continu dans les premières années de vie.

• Lorsque la courbe reste dans la zone normale mais franchit plusieurs niveaux ou « couloirs » vers le haut, au-delà de la courbe du 50e percentile notamment, on parle de « croisement des couloirs » et là encore, c’est un facteur de risque de surpoids et d’obésité. Et pourtant, à ce moment-là, l’enfant est rarement déjà obèse. Il a parfois des rondeurs mais les parents ne s’en inquiètent pas. Or, des rondeurs normales dans la petite enfance ne le sont plus après, l’enfant doit s’affiner jusqu’à l’âge de 6 ans ! (voir encadré Les signes d’alerte).

• Une ascension continue de la courbe depuis la naissance est aussi un signe d’alerte.

La notion de temps

L’enfant n’est pas devenu obèse du jour au lendemain. La prise de poids est souvent très progressive, d’où l’importance de surveiller.

Les mesures

Il faut intervenir tôt, c’est-à-dire au stade de surpoids quand la courbe de corpulence dépasse le 97e percentile ou la courbe de référence dite IOTF-25, et non d’obésité.

L’objectif n’est pas de mettre l’enfant au régime pour le faire maigrir mais d’interrompre l’évolution ascendante de la courbe d’IMC, en ralentissant pendant quelque temps la prise de poids de l’enfant, le temps que la croissance suive et revienne mettre de l’ordre dans la corpulence de l’enfant. Pour cela, le médecin cherche à faire prendre conscience du risque de voir se développer un surpoids et propose plusieurs mesures.

• Sensibiliser les parents et l’enfant à l’aide des courbes sans les choquer, ni les effrayer.

• Faire le point sur les habitudes de vie.

• Les amener à repérer ce qui a pu conduire à cette évolution de la courbe

• Définir les ajustements à apporter : limiter le grignotage, structurer les repas, démarrer une activité physique…

• Suivre ces démarches et les soutenir, et continuer à suivre l’évolution.

Au stade d’obésité, ces mesures ne suffisent plus et le phénomène est plus difficile à enrayer.

Conseils aux patients

Cibler les périodes à risque

Pendant la grossesse

Il ne s’agit pas de « manger pour deux » mais de « manger mieux ». Plus l’IMC avant la grossesse est élevé, plus la prise de poids doit rester limitée. Selon les recommandations nord-américaines largement reprises, une femme en situation d’obésité (IMC > 30) devrait idéalement prendre entre 5 et 9 kg, pas plus. « Des études récentes précisent que dans des situations d’obésité maternelle sévère, une prise de poids inférieure à 5 kg peut être bénéfique pour la mère et l’enfant à condition que le fœtus ait une croissance satisfaisante », explique le RéPPOP Midi-Pyrénées. Mais attention, il existe quand même un risque majoré d’obésité chez l’enfant par rapport à une femme enceinte sans problème de poids.

La diversification alimentaire

Quantité, qualité des aliments, les étapes de la diversification alimentaire sont à respecter (lire Interview p. 37). Des guides (voir En savoir+ p. 40) et différents outils du Plan national nutrition santé (PNNS, ci-dessous) peuvent aider les parents.

À consulter sur www.mangerbouger.fr.

Manger sain

Les professionnels de santé devraient connaître les repères du PNNS (voir encadré) pour les expliquer. « Ce sont des repères de base, à replacer dans le quotidien avec toutes les difficultés liées aux courses et à la lecture des étiquettes, au goûter, au petit déjeuner ou encore au grignotage », détaille le RéPPOP Midi-Pyrénées.

• La prise alimentaire se répartit tout au long de la journée pour limiter le grignotage : 3 repas par jour, dont un petit déjeuner complet, auxquels s’ajoute un goûter pas trop tard dans l’après-midi. L’équilibre alimentaire ne se fait pas sur un repas, mais plutôt sur une journée voire une semaine.

• Privilégier le fait maison, de meilleure qualité nutritionnelle que les plats tout prêts, et miser sur la diversité des aliments. Renouer avec le plaisir de se retrouver autour d’une table pour manger et échanger, sans télévision ni téléphone.

• Parler énergie et densité. « Compter les calories » n’est pas une solution pour lutter efficacement contre le surpoids et l’obésité, mais parler d’énergie et de densité énergétique des aliments semble indispensable. « Les calories sont un moyen parmi d’autres de faire passer des messages, notamment quand il s’agit de parler d’équivalence entre deux aliments », déclare le Dr Frelut. Par exemple, une portion de frites est 3 fois plus calorique qu’une portion de purée et 6 fois plus calorique qu’une portion de pommes de terre nature.

• Le portionnement industriel des aliments représente un danger pour le poids des enfants. C’est l’exemple du steak haché exposé plus haut, mais aussi celui des biscuits du goûter. Que l’enfant ait 3 ou 12 ans, le « sachet fraîcheur » reste le même… Sans forcément avoir une notion bien précise des quantités à donner à un enfant.

• Les servir dans des assiettes plus petites que celles des adultes. « Petit enfant, petit moteur, petite quantité de carburant », dit le Dr Frelut.

Bouger et dormir

« Il existe des recommandations en termes d’activité physique et de sédentarité chez l’enfant, mais les professionnels de santé ne doivent pas les imposer aux familles en les présentant comme des objectifs à atteindre. Chaque cas est différent et il faut procéder par étapes », expose David Thivel.

• Avant 6 ans, compter environ 3 h d’activité physique par jour, « essentiellement des jeux, permettant le développement de nombreuses facultés chez l’enfant en même temps que la dépense d’énergie », et moins d’une heure d’écran.

• Après 6 ans, compter 1 h d’activité physique modérée à intense, et moins de 2 h d’écran/j.

• Respecter le temps de sommeil : 11 à 14 h entre 0 et 5 ans, 9 à 11 h entre 6 et 11 ans, 8 h 30 à 9 h 30 à partir de 12 ans.

Accompagner les parents

Le surpoids ou l’obésité de l’enfant placent les parents dans une situation délicate, surtout si eux-mêmes souffrent de surpoids : culpabilité, remise en question de leur mode d’éducation et de leur parentalité, aveuglement et difficulté à reconnaître que l’enfant est en surpoids, fatalité, peur que le regard sur l’enfant change une fois que celui-ci aura perdu du poids… Rassurer les parents sur leur capacité à retrouver leur rôle de cadre pour leur enfant. Leur proposer des guides pour composer des repas (Voir encadré, p. 39)

(1) L’obésité de l’enfant et de l’adolescent, du Dr Marie-Laure Frelut, Éditions Odile Jacob.

(2) Surpoids et obésité de l’enfant et de l’adolescent, recommandations de bonne pratique, Haute autorité de santé, 2011.

Avec l’aimable participation du RéPPOP Midi-Pyrénées coordonnée par le Pr Maïté Tauber, le Dr Marie-Laure Frelut et David Thivel, membres de l’ECOG, le Dr Zohrah Ralaidovy, médecin coordinateur au SSR Les Oiseaux, à Sanary-sur-Mer (83), François Besnier (Prader-Willi France) et Emmanuelle Carriot (Côme et Zélie).

Dico +

→ Percentiles des IMC : en étudiant les IMC d’une population donnée, on va ranger tous les résultats du plus petit au plus grand, puis on coupe ces résultats en 100 pour créer des centiles ou percentiles.

Si un IMC correspond au rang percentile 97, alors 97 % des valeurs mesurées sont en dessous et 3 % au-dessus.

Info +

→ 49 % des adultes en France sont touchés par le surpoids ou l’obésité ; 17 % sont obèses selon l’étude Esteban-2015.

Dico +

→ Prévalence : nombre total de cas, anciens ou plus récents, d’une maladie ou de tout autre paramètre dans une population à un instant donné.

Le syndrome de Prader-Willi

→ C’est une maladie rare avec 40 nouvelles naissances par an en France, génétique mais non héréditaire. Elle est liée à un désordre sur le chromosome 15 d’origine paternelle. C’est un trouble global du développement associant hyperphagie majeure, obésité, signes dysmorphiques, retard de croissance, difficultés d’apprentissage et d’interaction…

→ Pour en savoir plus : www.prader-willi.fr

Dico +

→ L’activité physique est tout ce qui peut permettre de bouger et de se dépenser : jardiner, aller à l’école à pied…

→ L’activité physique adaptée, ou « sport santé », est appropriée aux capacités de la personne atteinte d’une maladie chronique, d’un handicap ou tout simplement d’une limitation à la pratique physique.

S’impliquer à l’officine

→ Le carnet de santé est un outil de prévention qui concerne tout professionnel de santé. Même si les officinaux n’ont pas à le remplir, ils doivent au moins comprendre son fonctionnement. En plus de recommander aux parents de peser et de mesurer régulièrement leur enfant, proposer une balance, une toise murale rigolote et colorée pour ouvrir le dialogue sur l’alimentation et la prévention du surpoids.

interview

“L’eau doit rester la seule boisson du quotidien et le lait est un aliment qui hydrate”

Dr Marie-Laure Frelut, pédiatre à Albi (81), membre de l’ECOG (European Childhood Obesity Group).

Que conseiller aux parents sur la diversification alimentaire ?

Il faut leur conseiller de démarrer la diversification alimentaire entre 4 et 6 mois, ni avant ni après. Commencer non pas par les céréales mais plutôt par les légumes, à midi avant le biberon, et sans restriction de quantité. La découverte des fruits devrait toujours se faire après celle des légumes, en général 2 à 3 semaines après. Au cours des étapes suivantes, l’enfant doit manger de tout. Les féculents, indispensables pour donner de l’énergie, ne représentent qu’une partie des repas. On ne devrait pas laisser l’enfant choisir entre des féculents ou des légumes, par exemple.

Il faut alterner les laitages. Ne pas proposer du fromage à tous les repas, et se rappeler que les crèmes dessert ne sont pas des laitages adaptés, à la différence des yaourts, par exemple. L’eau doit rester la seule boisson du quotidien, pendant les repas et en dehors. Le lait n’est pas une boisson mais un aliment qui hydrate par la même occasion. Quand l’enfant grandit, la quantité de lait liquide doit diminuer pour faire place, au déjeuner et au dîner, à un laitage. Se méfier des biberons « grand modèle » du commerce. 240 ml est le maximum, quitte à compléter par un fruit ou une tartine si besoin. Laisser les enfants manger à leur rythme, et à leurs heures, sans les « coincer » dans des repas d’adulte. Et faire preuve de patience ! Il faut parfois présenter un même aliment plus de 8 fois avant qu’il ne soit accepté (ndlr : pas 8 fois de suite mais sur plusieurs semaines). Si jamais ce n’est toujours pas le cas, l’enfant a aussi le droit de ne pas aimer un aliment !

Dico +

→ Le sport : activité physique codifiée, institutionnalisée, organisée en fédérations, en clubs…

Info +

→ L’effet protecteur de l’allaitement vis-à-vis de l’obésité semble de faible importance. Mais, l’alimentation diversifiée de la mère entraîne des variations dans la saveur du lait et semble faciliter la diversification alimentaire par la suite.

Le Plan National Nutrition Santé (PNNS)

→ Ce plan de santé publique lancé en 2001, renouvelé en 2006 et 2011, vise à améliorer la santé de la population en agissant sur la nutrition, à la fois du côté des apports et de celui des dépenses énergétiques. Certains slogans du PNNS sont bien connus : manger bouger, 5 fruits et légumes par jour… Depuis 2010, le PNNS est associé à un Plan Obésité.

→ De nombreuses brochures sont disponibles gratuitement sur www.mangerbouger.fr/pro, notamment Le guide nutrition des enfants et adolescents pour tous les parents. Il détaille en 144 pages de précieux conseils pour nourrir au mieux les enfants et combattre les idées reçues. Diversification, repas des ados… beaucoup d’exemples concrets !

En savoir +

→ https://solidaritessante.gouv.fr/IMG/pdf/carnet_de_santenum-.pdf

Pour consulter le carnet de santé.

→ http://surpoidsenfant.fr

Un Web-documentaire avec des témoignages de familles, ponctués d’avis d’experts.

→ www.cespharm.fr

Pour commander les documents du PNNS à distribuer aux patients.

→ https://ebook.ecogobesity.eu/fr/

Un e-book gratuit rédigé par les membres de l’European Childhood Obesity Group.

→ www.come-et-zelie.fr

Marque française spécialisée dans l’habillement des enfants ronds.

À RETENIR

SUR LA MALADIE

→ D’après l’OMS, l’obésité est une maladie chronique caractérisée par une accumulation anormale ou excessive de tissu adipeux représentant un danger pour la santé. Chez l’enfant, le diagnostic est le plus souvent posé à l’examen clinique et d’après l’étude de la courbe de corpulence du carnet de santé.

→ Il existe plusieurs types d’obésité pédiatrique, mais 95 % des cas relèvent de l’obésité commune, associant le plus souvent une prédisposition génétique et épigénétique, une alimentation excessive et déséquilibrée et un mode de vie sédentaire.

SUR LE TRAITEMENT

→ La prise en charge de sa forme commune est non médicamenteuse. Elle repose sur plusieurs acteurs en fonction des besoins et des possibilités locales : le médecin traitant de l’enfant, un diététicien, un psychologue, un réseau de soins, un centre spécialisé…

→ Bien souvent, le but premier n’est pas de faire maigrir l’enfant mais de stabiliser son poids en introduisant des changements durables dans son mode de vie et dans celui de sa famille.

CONSEILS AUX PATIENTS

→ La prise en charge de l’obésité pédiatrique est complexe, c’est pourquoi la prévention est indispensable. Mesurer et peser l’enfant tous les trimestres permet de repérer rapidement « quand ça dérape ».

→ À l’officine, sensibiliser les femmes enceintes et les jeunes parents.

→ Connaître les repères du PNNS c’est bien, les intégrer dans le quotidien des familles, c’est mieux.

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