Le forfait d’aide au sevrage disparaîtra fin 2018 - Porphyre n° 544 du 30/06/2018 - Revues
 
Porphyre n° 544 du 30/06/2018
 

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Auteur(s) : Thierry Pennable*, Christine Julien**

Dans le cadre de son plan Priorité prévention, le gouvernement souhaite que les substituts nicotiniques soient pris en charge sur prescription comme pour tout médicament et supprimer le forfait annuel de 150 euros. Les laboratoires ont commencé les demandes d’inscription de leurs produits au remboursement.

Éviter l’avance de frais et avoir le même tarif dans toutes les officines, voilà les arguments de l’Assurance maladie pour annoncer le remboursement progressif des traitements nicotiniques de substitution. À titre transitoire, le forfait de 150 euros par an est maintenu jusqu’au 31 décembre 2018 pour les autres substituts nicotiniques (SN) non remboursables. Jusqu’à cette date, les prescripteurs autorisés peuvent prescrire soit des SN remboursés, soit dans le cadre d’un forfait.

Les pionniers du remboursement

Les gommes à mâcher Nicotine EG (voir tableau) ont été les premiers substituts nicotiniques inscrits sur la liste des médicaments remboursables le 22 mars 2018. Suivis des patchs NicoretteSkin le 16 mai 2018. « L’inscription au remboursement de la forme patch répond à une demande des professionnels de santé. C’est la forme privilégiée par les prescripteurs », souligne Aurore Scouarnec, responsable des Affaires médicales chez Johnson & Johnson Santé Beauté France.

Une démarche progressive

Passer du forfait d’aide au sevrage tabagique instauré en 2007 à un remboursement classique des substituts nicotiniques implique une démarche des laboratoires, annonçait le plan Priorité prévention du gouvernement présenté le 26 mars 2018. C’est aux industriels « de faire la démarche de demande d’inscription de leurs produits sur la liste des médicaments remboursables par l’Assurance maladie », explique Aurore Scouarnec. Pour obtenir cette inscription, les laboratoires doivent présenter un dossier à la Commission de la Transparence de la Haute autorité de santé qui évalue, entre autres, l’intérêt thérapeutique de ces médicaments. S’ensuit alors une négociation sur les prix [avec le Comité économique des produits de santé (CEPS)], puis le remboursement est effectif quatre jours après la publication de l’inscription du médicament au Journal Officiel ». Cette démarche volontaire des laboratoires explique l’inscription progressive des SN sur la liste des médicaments remboursés.

Plusieurs prescripteurs autorisés

Comme pour le forfait, « les professionnels de santé autorisés à prescrire ces médicaments sont ceux autorisés par la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé(1), quel que soit le mode de remboursement de ces médicaments », indique la Cnamts(2). « Cette loi autorise, en sus des médecins et des sages-femmes, les médecins du travail, les chirurgiens-dentistes, les infirmières et les masseurs-kinésithérapeutes à prescrire des traitements nicotiniques de substitution. » Précisant que les infirmières et les kinés ne peuvent prescrire un SN qu’aux patients qu’ils ont en charge « et uniquement pendant la durée de la prescription médicale d’actes infirmiers, sauf indication contraire du médecin ». Les sages-femmes peuvent aussi les prescrire à l’entourage de la femme enceinte ou accouchée.

Comme un autre médicament

Le taux de prise en charge des NS inscrits au remboursement est de 65 % mais « la plupart des mutuelles vont prendre en charge le différentiel, comme pour tout médicament remboursé à ce taux », rappelle Aurore Scouarnec. Ce que confirme la Direction générale de la Santé (DGS) : « Toutes les complémentaires santé prennent en charge le ticket modérateur des médicaments à service médical rendu important dans le cadre des contrats responsables des mutuelles. » Et la DGS de préciser : « La prise en charge sera de 100 % pour les patients en ALD pour lesquels les substituts nicotiniques font partie de la liste des actes et prestations définis, et pour les bénéficiaires de la Couverture maladie universelle complémentaire. » Une mesure qui semble répondre à une attente des fumeurs, dont « 72 % estiment que le coût des SN est un frein potentiel à l’arrêt du tabac », rapporte une enquête(3). Ils sont aussi 62 % à se dire incités à l’arrêt du tabac par leur remboursement, quand 41 % estiment qu’il n’est pas possible d’arrêter de fumer sans aide médicamenteuse. Plus largement, l’annonce du remboursement des SN change la perception de leur efficacité et de leur sécurité pour près d’une personne sur trois interrogées, fumeuses ou pas.

Une prise en charge classique

Le prix de vente des SN remboursés est fixé par décret au Journal officiel. Les règles habituelles de prise en charge s’appliquent, « en l’occurrence, une durée maximale de prescription de 12 mois avec des délivrances pour une durée de 1 mois », précise la Cnamts. Ces substituts, remboursés s’ils sont prescrits, restent disponibles en vente libre, sans ordonnance, au prix fixé sur la liste des médicaments remboursés. Avec une marge sans doute moins intéressante pour les officinaux exclus de la prescription, alors qu’ils ont été les pionniers du sevrage tabagique quand les SN ont été délistés et en libre accès en 1999. Corinne Imbert, députée Les Républicains, a demandé en décembre 2015 à la ministre de la Santé si « le Gouvernement entend mener une réflexion concernant un potentiel élargissement de la prescription des substituts nicotiniques par les pharmaciens ». La réponse publiée en novembre 2016 dans le Journal du Sénat indique que « les pharmaciens ne prescrivent pas de médicaments, ils les délivrent (…). Mais, dans le cadre de la lutte contre le tabac, les services du ministère chargé de la santé étudient la possibilité que le rôle du pharmacien d’officine soit renforcé ». En attendant, les officinaux ne sont toujours pas autorisés à prescrire…

Le forfait annuel est une réussite

→ En 2018, Le seuil des 50 000 bénéficiaires mensuels du forfait des traitements de substitution nicotinique a été atteint pour la première fois.

→ En 2017 : 301 066 bénéficiaires uniques du forfait, nombre qui a doublé en trois ans, sur un total de 2 726 417 « patients traités »*.

→ 52 % des utilisateurs du forfait sont des femmes, la majorité a 26-50 ans.

→ Montant annuel moyen remboursé par bénéficiaire : 66,4 €/an.

→ Pour donner droit au forfait de 150 €, les SN sont prescrits sur une ordonnance sans autre produit, et figurent sur la liste des 127 SN pris en charge par l’Assurance maladie au 20 mai 2018. Le tiers payant est impossible, mais l’officinal peut transmettre la feuille de soins à la sécurité sociale. Le client peut échelonner ses achats sur l’année.

Sources : Direction générale de la santé et « Tabagisme et arrêt du tabac en 2017 », Aurélie Lermenier-Jeannet, OFDT, mars 2018.

*La durée moyenne de traitement est estimée à un mois, soit 60 comprimés de Champix, 30 patchs ou 300 formes orales. Un mois de traitement équivaut à un patient traité.

(1) Journal officiel du 27 janvier 2016.

(2) Caisse Nationale de l’Assurance Maladie des Travailleurs Salariés.

(3) « Impact du remboursement des substituts nicotiniques sur le sevrage tabagique », enquête du Laboratoire Johnson & Johnson Santé Beauté France avec OpinionWay mai 2018.

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