Premier lifting pour la perfusion à domicile - Porphyre n° 543 du 01/06/2018 - Revues
 
Porphyre n° 543 du 01/06/2018
 

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Auteur(s) : Thierry Pennable

Deux ans après sa mise en place, la prescription de la perfusion par forfaits est modifiée pour répondre aux difficultés rencontrées sur le terrain. Les officinaux sont de nouveau amenés à délivrer des prescriptions infirmières.

« Considérée par certains comme une usine à gaz lors de sa mise en œuvre, la nomenclature de la perfusion à domicile par forfaits a néanmoins permis de révéler certaines dérives et d’y mettre un terme », constate Fabrice Camaioni, pharmacien, président de l’Union nationale des prestataires de dispositifs médicaux (UNPDM). À l’exemple de certains examens d’imagerie « avec injection » où le radiologue facturait un set de perfusion alors qu’il ne s’agissait que d’une injection(1) ! Ce pharmacien, également président de la commission Exercice professionnel de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), reconnaît toutefois « une mise en œuvre compliquée » lors de l’entrée en vigueur des forfaits de perfusion le 1er mai 2016.

Deux ans plus tard, en réponse aux difficultés rencontrées par les professionnels du secteur, un arrêté de mars 2018(2), applicable depuis le 1er avril, apporte les premières modifications à la nomenclature de 2016, aussi appelée « nomenclature Perfadom », du nom des forfaits proposés.

Un forfait pour debrancher les diffuseurs

« Le problème du débranchement par les infirmières à domicile des diffuseurs posés à l’hôpital a rapidement été relevé par les pharmaciens et autres prestataires dès la sortie de la nomenclature en 2016, remarque André Tanti, vice-président du Comité économique des produits de santé (CEPS), section des dispositifs médicaux. Dans ce cas, la délivrance d’un set pour le débranchement du diffuseur ne pouvait pas être rattachée à une prescription de perfusion faite par l’hôpital. »

Pour pallier cette carence, un forfait Perfadom 24 est autorisé à la prescription médicale et infirmière depuis le 1er avril 2018. Il correspond à l’un des neuf types d’ensembles de consommables et d’accessoires décrits dans la nomenclature pour réaliser les soins (voir encadré p. 6). Les recommandations pour manipuler les diffuseurs sont identiques à celles des autres modes de perfusion. Et le port de gants, de surblouse à manches longues et serrées, de masque et de lunettes de protection est recommandé lors de la perfusion de cytotoxiques.(3)

D’autres prescriptions infirmières

Une autre nouveauté est liée aux problèmes soulevés par l’entretien d’une voie veineuse centrale (VVC) entre les cures de traitement lorsqu’aucun forfait d’intercure n’était prévu par la prescription initiale de la perfusion. Ici aussi, les infirmières peuvent dorénavant prescrire deux forfaits de consommables et d’accessoires jusque-là réservés à la prescription d’un médecin. Par exemple, pour l’entretien d’une voie veineuse centrale entre deux cures de chimiothérapie. Les forfaits Perfadom 21 et 22 sont indiqués pour une perfusion à domicile par VVC avec ou sans Picc-Line (voir encadré p. 7). Pour le moment, aucune règle n’est prévue pour la rédaction des prescriptions infirmières.

Concernant les médecins, « les officinaux sont souvent amenés à délivrer à partir de prescriptions “classiques” car les modèles de prescriptions complexes proposés avec la nomenclature Perfadom(4) ne sont toujours pas utilisés par tous les prescripteurs », observe Fabrice Camaioni. Et de rappeler que ces modèles de prescription « ne sont pas opposables ». De fait, le non-respect de ces modèles ne pouvant être opposé aux prescripteurs, les ordonnances « classiques » restent valables.

Des règles de cumul adaptées

La nomenclature de 2016 stipulait que les forfaits d’entretien intercure ne devaient pas être cumulés avec la prescription des forfaits Perfadom 10 à 20 dans les sept jours précédents (voir encadré p. 6). Depuis le 1er avril, quand deux prestataires et/ou pharmaciens interviennent dans le cadre d’une même perfusion ou nutrition parentérale à domicile, ces règles de non-cumul s’appliquent indépendamment pour chacun d’eux. « Il est apparu difficile de faire appliquer ces conditions de non-cumul dans le cas où, par exemple, une infirmière s’adresse à une pharmacie pour un forfait intercure alors que la perfusion est globalement prise en charge par un autre prestataire, constate André Tanti. Dorénavant, dans une telle situation, le pharmacien est dispensé d’entrer dans des règles de calcul avec les prescriptions délivrées par l’autre prestataire. Le CEPS restera néanmoins vigilant à ce que cela ne donne pas lieu à des abus, notamment par la multiplication des intervenants en vue de cumuler plus de prescriptions. » L’objectif économique de la nomenclature par forfaits demeure la réduction du nombre de consommables facturés à l’Assurance maladie par des prescriptions jugées inadaptées.

D’autres règles de cumul précisées

La nomenclature de 2016 prévoyait déjà que des perfusions simultanées d’une solution via différents systèmes d’administration vers divers sites d’injection ne donnaient pas lieu à la prise en charge de plusieurs perfusions. Les perfusions simultanées étant entendues comme celles dont le début et la fin sont simultanés. L’arrêté de mars 2018 ajoute qu’il en va de même dans le cas d’un seul mode d’administration et d’une tubulure vers plusieurs points d’injection. Exception faite pour les prises en charge des consommables correspondant au forfait Perfadom 25 relatif aux traitements par immunoglobulines (voir encadré Immunoglobulines).

Des économies jugées insuffisantes

La nomenclature par forfaits de 2016 visait une économie de 35 millions d’euros sur deux ans pour l’Assurance maladie. Pour cela, une convention signée avec les prestataires de santé à domicile et les syndicats de pharmaciens prévoyait une enveloppe maximale de 316 millions d’euros pour les remboursements de la perfusion et de la nutrition parentérale à domicile en 2016. Or, les chiffres de la CNAM-TS faisant état d’une dépense de 323 millions d’euros, le CEPS a appliqué la pénalité prévue par la convention, soit une baisse de 3,59 % des tarifs des forfaits Perfadom depuis le 1er avril 2018.

« Cette pénalité est doublement scandaleuse », s’insurge Fabrice Camaioni. D’une part, « ce dépassement est avant tout dû à une augmentation du volume des patients traités à domicile du fait de la volonté constamment réaffirmée de transférer les soins de l’hôpital vers la ville. Sans que les économies générées par ce transfert ne soient prises en compte » dans le calcul du CEPS. D’autre part, « l’enveloppe fixée spécialement pour la perfusion par gravité n’a pas été dépassée. Ce mode de perfusion étant prépondérant à l’officine, l’UNPDM a dénoncé une baisse de tarifs du même ordre de grandeur que pour les autres modes d’administration, alors que les pharmaciens se sont montrés vertueux ».

Concernant l’augmentation des volumes, André Tanti, le vice-président du CEPS, répond qu’avant la nomenclature 2016, « la CNAM-TS n’enregistrait que des remboursements de matériels nécessaires à la perfusion, comme des tubulures ou autres. Ces chiffres ne permettent pas de savoir si c’est le nombre de perfusions qui augmente ou la quantité de matériels prescrits pour un même volume de perfusion. Seule la prescription par forfaits permettra à l’avenir d’objectiver le nombre de perfusions effectuées à domicile. » Pour ce qui est de la baisse des tarifs appliquée à tous les modes de perfusion, Fabrice Camaioni suppose que « le CEPS a infligé une baisse de 3,59 % à tout le monde pour éviter des discussions sans fin avec les différents prestataires impliqués… »

(1) Les injections intraveineuses ou sous-cutanées inférieures à 15 minutes ne sont pas assimilées à des perfusions. Seules sont remboursées les perfusions par gravité, diffuseur (de 30 minutes au moins) ou système actif électrique, tels pompe et pousse-seringue (de 60 minutes au moins, sauf exception).

(2) Journal officiel du 20 mars 2018.

(3) Médicaments cytotoxiques et soignants. Manipuler avec précaution ! , Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS), décembre 2015.

(4) Formulaire de prescription de perfusion à domicile de l’arrêté consolidé du 27 avril 2016 instituant la « nomenclature Perfadom ».

Perfusions suspendues dues

En cas d’entree en Ehpad ou de deces, toute semaine de perfusion initiée est due.

En cas d’hospitalisation, la prise en charge des forfaits est suspendue du jour de l’hospitalisation à la veille du retour à domicile pour 28 jours maximum, avec :

→ hospitalisation ≤ 28 jours sans reprise de la perfusion au retour, ou décès : prise en charge complète de la semaine interrompue ;

→ hospitalisation ≤ 28 jours, avec reprise de la perfusion au retour : prise en charge jusqu’au terme de 7 jours de perfusion compte tenu des jours de perfusion précédant l’hospitalisation. Les forfaits sont adaptés si changement de perfusion ;

→ hospitalisation ≥ 29 jours : les forfaits de la semaine interrompue sont pris en charge à compter du 29e jour d’hospitalisation.

Changement de domicile ou entree en etablissement, sauf Ehpad ou hopital :

→ si le même prestataire assure la poursuite du traitement, prise en charge maintenue ;

→ si c’est un autre prestataire, les forfaits qu’il délivre sont pris en charge après la fin de la période hebdomadaire antérieure à ce changement.

Débranchement d’un diffuseur

Le forfait Perfadom 24 est indiqué pour le débranchement à domicile d’un diffuseur fourni et installé par un établissement de santé.

→ Prescription : par un médecin ou une infirmière.

→ Délivrance de tout ou partie de l’ensemble de produits intitulés « accessoires et consommables nécessaires au branchement différé des dispositifs veineux implantés, au branchement immédiat des cathéters veineux centraux, au débranchement des dispositifs veineux implantés et des cathéters veineux centraux, au rinçage de la voie d’abord ou à la dépose des lignes de perfusion sur les dispositifs veineux implantés » (nomenclature Perfadom du 12 avril 2016).

→ Prix unitaire réglementé, avec prix limite de vente (PLV, pas de dépassement possible) : 13,80 €. Perfadom 24-Debranch-Diff, code LPP : 1157318.

→ Exemple de set : MediSet Perfusion Rinçage d’Hartmann (ACL : 6013690, EAN : 4052199024646).

Forfaits d’entretien intercure

Les forfaits Perfadom 21 et 22 sont indiques pour l’entretien intercure d’une perfusion a domicile par voie veineuse centrale (VVC), hors Picc-Line (Perfadom 21) ou avec Picc-Line (Perfadom 22).

→ Prescription : par un médecin ou une infirmière.

→ Prise en charge a la LPPR assurée pour les patients bénéficiant d’une perfusion par VVC à domicile, à condition :

– de ne pas être cumulée avec la prescription dans les sept jours précédant l’un des forfaits Perfadom 10 à 20* ;

– que la voie centrale ne soit pas mobilisée pendant au moins les sept jours précédant la prescription ;

– que ces forfaits ne soient pas renouvelés plus de trois fois dans les vingt-huit jours suivant le débranchement de la perfusion.

→ Prix unitaires réglementés, avec prix limite de vente (PLV, pas de dépassement possible) pour :

– Perfadom 21-Entretien-VC-SF-Picc, code LPP : 1103392, PLV : 9,16 €.

– Perfadom 22-Entretien-VC-Picc-Line, code LPP : 1170419, 17,86 €.

→ Facturation à l’acte tous les sept jours.

→ Exemples de sets :

– Pour Perfadom 21 : Tetraset perfusion set de rinçage, set de rinçage sur voie veineuse centrale avec aiguille et à pointe de Huber, Tetraset perfusion set de rinçage, set de rinçage sur voie veineuse centrale sans aiguille (laboratoire Tetra Medical), MediSet pose sur voie veineuse centrale adapté à la pose de perfusion sur chambre implantable avec aiguille de Huber sécurisée 20G (ACL : 6013684, EAN : 4052199024462).

– Pour Perfadom 22 : Tetraset perfusion set de réfection pansement Picc-Line, set de réfection pansement et de rinçage pour Picc-Line (Tetra Medical). MediSet pose sur Picc-Line (Hartmann, EAN : 4052199024615).

(*) Les règles de non-cumul s’appliquent indépendamment pour chaque prestataire (arrêté du 14 mars 2018).

L’avis du spé

« Les modalités de prescription des immunoglobulines sont actualisées »

Christophe Tremoureux, gestionnaire dispositifs médicaux auprès du Comité économique des produits de santé (CEPS).

« Des interrogations concernant la prise en charge des perfusions d’immunoglobulines sont remontées au CEPS de la part de la CNAM et des prestataires de santé. Elles portaient sur le nombre de perfusions facturées et les différents modes d’administration utilisés pour les immunoglobulines.

Des pompes de plus grande capacité pour l’administration sous-cutanée d’immunoglobulines sont apparues sur le marché. Celles-ci permettent, avec une perfusion, d’assurer une cure hebdomadaire, administrée par une seule pompe et une seule tubulure alimentant plusieurs sites d’injection. Alors que d’autres modes d’administration, mensuelle ou tous les deux mois, existent, avec une perfusion journalière, éventuellement répétée sur un à trois jours successifs, administrée par système actif via un arbre à perfusion. Les modifications apportées par l’arrêté de mars 2018 distinguent ces deux modalités d’administration afin d’éviter les risques d’erreurs de comptage du nombre de perfusions. Elles permettent aussi, par dérogation, de recenser les perfusions d’immunoglobulines à part des autres perfusions. »

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