“Je voudrais une protection solaire” - Porphyre n° 543 du 01/06/2018 - Revues
 
Porphyre n° 543 du 01/06/2018
 

Exercer

Au comptoir

Auteur(s) : Nathalie Belin

1 Je questionne

Préciser la demande

« C’est pour un adulte ? Un enfant ? Une femme enceinte ? », « Bronzez-vous facilement ? », « Souffrez-vous de lucite estivale ? », « Où partez-vous ? », « Prévoyez-vous des activités nautiques, des baignades ? », en complément de l’observation du phototype, orientent vers un indice de protection adapté et une galénique résistant à l’eau et à la sueur.

Rechercher certains critères

« Avez-vous déjà eu des réactions d’intolérance à un produit solaire ou à un médicament ? » recherche un antécédent d’intolérance à un produit solaire ou de photoallergie à un gel de kétoprofène en raison de réactions croisées avec certains filtres organiques. « Suivez-vous un traitement ? » recherche la prise de médicaments photosensibilisants tels que cyclines, fluoroquinolones, sulfamides, psoralènes, phénothiazines, rétinoïdes, peroxyde de benzoyle, adapalène…

2 J’évalue

La photoprotection externe avec des produits solaires a une efficacité démontrée sur la plupart des effets délétères liés à l’exposition solaire, tels le vieillissement et les cancers cutanés. Ils limitent aussi la lucite estivale bénigne. Le choix du type de filtres solaires et de la protection est du ressort officinal.

3 Je passe en revue

Principes

• Pour assurer une photoprotection suffisante, un produit solaire doit protéger des UVB et des UVA, caractérisés par des plages de longueur d’onde différente. Selon la règlementation :

→ le facteur de protection solaire, ou SPF en anglais, qui mesure la protection contre les UVB doit être au moins de 6 ;

→ le ratio de protection UVA/UVB doit être d’au moins 1/3. La protection contre les UVA doit couvrir les plus grandes longueurs d’onde, avec une longueur d’onde critique minimale de 370 nm.

• On distingue ainsi quatre catégories de produits de protection solaire.

→ Faible : SPF 6 ou 10.

→ Moyenne : SPF 15, 20 ou 25.

→ Haute protection : SPF 30 ou 50.

→ Très haute protection : SPF 50+.

Un SPF 50 signifie que la quantité d’UV transmise à la peau est de 1/50, soit 2 %.

• Aucun filtre ne couvre seul tout le spectre UVA et UVB. Et certains filtres chimiques sont peu photostables mais le deviennent associés à d’autres. Photostable signifie que le filtre ne se dégrade pas et ne génère pas d’autres composés sous l’effet de l’irradiation. Pour étendre le spectre de protection et obtenir le niveau souhaité, les produits associent filtres, organiques ou chimiques, et/ou minéraux.

Deux types de filtres

Les filtres solaires utilisables dans un produit cosmétique sont inscrits sur une liste annexée à une directive européenne.

• Écrans minéraux. Seul le dioxyde de titane est autorisé. L’oxyde de zinc, très utilisé, ne figure pas sur la liste. Propriétés : ces particules d’origine minérale reflètent et difractent les radiations UVA et UVB. Photostables, ces filtres ne pénètrent pas la peau, donc ne provoquent pas d’allergie. Particularités : difficiles à étaler, ils laissent une couleur blanche après l’application. Pour pallier ces effets et accroître l’efficacité, ils sont souvent employés sous forme de nanoparticules (voir encadré à droite) ou micronisés.

• Écrans chimiques ou organiques. La liste européenne en mentionne vingt-sept. Propriétés : ces molécules de synthèse protègent en absorbant les UV. Le Tinosorb, particulier, assimile et réflecte la lumière. Certains filtres n’absorbent que les UVB ou les UVA, d’autres ont un spectre large tels que benzophénone, Mexoryl SX, XL, Tinosorb M et S… Certains sont photostables, d’autres le sont peu ou pas, tels le butyl-méthoxy-dibenzoyl-méthane, les cinnamates… Particularités : la pénétration cutanée varie d’un filtre à l’autre, inexistante pour certains ou possible pour d’autres, d’autant plus que la peau est lésée (coup de soleil, eczéma…). Presque tous peuvent induire des irritations. Des allergies sous forme d’eczéma de contact sont possibles avec PABA, méthylbenzylidène camphre, benzophénones, cinnamates… Des réactions photoallergiques sont décrites avec les cinnamates et surtout les benzophénones, en particulier l’oxybenzone. Le noyau des benzophénones similaire à celui du kétoprofène explique les réactions croisées avec cet AINS. L’octocrylène induit aussi des allergies croisées avec le kétoprofène et de contact. Benzylidène camphre, benzophénone, octyl methoxycinnamate… pourraient être des perturbateurs endocriniens.

Autres composants

• À visée nourrissante et apaisante : huile d’Argan, bisabolol, acide hyaluronique…

• À visée antioxydante pour combattre la formation de radicaux libres : huile de plantules d’avoine Rhéalba, mélanine, eaux thermales, vitamine E, flavonoïdes, pro-taurine… Ces éléments sont fréquents dans les gammes dédiées aux personnes sujettes à la lucite estivale bénigne, avec une haute protection UVA : Eucerin SUN LEB, Photoderm LEB Bioderma, SVR Ultra Max écran…

Galénique

Elle conditionne le bon usage, telles des applications suffisantes et répétées.

• Textures. Émulsion : convient au visage en cas de texture crème ou au corps si plus fluide à type lait. Huile : facile à étaler, elle est utilisée pour le corps.

• Présentations. Spray : pratique et rapide, mais veiller à en appliquer assez. Brume : délivre de fines gouttelettes rapidement mais en mettre assez. Stick : contenant souvent beaucoup de filtres, il cible les zones très exposées, nez, pommettes, menton.

4 Je choisis

Type de filtres

• Enfants, peaux intolérantes, allergiques, grossesse : écrans minéraux ou gammes « peaux intolérantes » ou « enfants » car excluent les parfums, certains filtres…

• Antécédents d’allergie au kétoprofène : bannir octocrylène et oxybenzone.

Indice de protection

• Peau très claire : SPF 30 minimum.

• Haute montagne, tropiques, réverbération : au moins SPF 30, même peau mate.

• De 2 à 10 ans : SPF 50+, résistant à l’eau.

• Antécédents de lucite estivale bénigne, grossesse, médicament photosensibilisant, montagne, mer, tropiques : SPF 50+ et selon, résistant à l’eau.

5 J’explique

La protection vestimentaire est la première mesure pour se protéger du soleil. Les produits de protection solaire ne viennent qu’en complément et ne sont efficaces que s’ils sont appliqués en quantité suffisante et régulièrement renouvelés.

6 Je conseille

• Compter environ 6 cuillères à café pour protéger le corps moyen d’un adulte, au moins vingt minutes avant l’exposition pour les filtres organiques à l’action non immédiate. Un produit waterproof garantit une certaine résistance à l’eau et à la transpiration mais les frottements la diminuent. À renouveler toutes les deux heures, après chaque bain ou transpiration excessive.

• Continuer la protection même bronzé car le bronzage n’arrête pas les UVA.

• Chez les moins de 2 ans, la protection vestimentaire est primordiale, chapeau à large bord, tee-shirt… Le produit n’est appliqué que si elle n’est pas possible, lors de baignades par exemple, mais on peut se baigner avec un tee-shirt.

• S’exposer progressivement, en évitant de le faire de 12 à 16 heures l’été en France, notamment pour les enfants. L’ombre n’est pas sécurisante sur la plage car les UV sont réfléchis par le sable. Se méfier d’un ciel couvert et du vent car le rayonnement UV peut être intense.

• Se protéger les yeux avec des lunettes de catégorie 3.

Le condiv

Le rayonnement solaire qui atteint la surface de la terre se compose d’infrarouges (IR) qui génèrent de la chaleur, de rayons visibles et d’ultraviolets UVA et UVB.

→ Les UVA pénètrent dans la peau jusqu’au derme : ils sont à l’origine du vieillissement cutané et des allergies comme la lucite estivale bénigne. Ils produisent de nombreux radicaux libres susceptibles aussi d’entraîner des altérations de l’ADN et des composants des cellules, voire de générer des cellules cancéreuses.

→ Les UVB sont à l’origine du bronzage, des coups de soleil et des cancers.

→ L’impact des IR et du rayonnement visible demeure peu connu, mais ils jouent un rôle important dans le vieillissement cutané en favorisant la formation de radicaux libres. Les IR génèrent également des mutations sur l’ADN des cellules.

Les nanoparticules en question

Des ingrédients sous forme de nanoparticules (moins de 100 nm), améliorent la galénique et l’efficacité de la protection solaire. Ils sont surtout présents dans les solaires avec filtres minéraux. L’Agence nationale de sécurité des produits de santé (ANSM) recommande (1) d’éviter leur utilisation sur une peau lésée, et en spray ou aérosol du fait du risque d’inhalation et du passage systémique. Des experts déconseillent des applications répétées sur de grandes surfaces, en particulier chez l’enfant. Leur présence doit être mentionnée dans la liste des ingrédients sous la mention « nano ». Les labels bios les autorisent en quantité limitée.

(1) État des connaissances relatif aux nanoparticules de dioxyde de titane et d’oxyde de zinc dans les produits cosmétiques en termes de pénétration cutanée, de génotoxicité et de cancérogenèse, Afssaps, juin 2011.

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