La Poste cherche son modèle pour livrer à domicile

Commander ses médicaments à l’officine et se les faire livrer par le facteur, tel est le concept que veut développer La Poste. Un premier pas dans le maintien à domicile. Les modalités sont simples : le client se connecte sur mesmedicamentschezmoi.com, crée son espace personnel en renseignant la partie prescription, carte Vitale et mutuelle, pharmacie retenue, et choisit sa formule. Il passe la commande, en transmettant son ordonnance scannée s’il s’agit de médicaments prescrits, et sélectionne le jour de ramassage de l’ordonnance et celui de livraison. Le facteur passe alors au domicile du client et récupère son ordonnance. Le pharmacien prépare, lui, la prescription et récupère l’ordonnance le lendemain.

Tout au long du processus, client et pharmacien peuvent suivre la commande ou dialoguer via le site Internet ou par messagerie sécurisée. Le facteur prend ensuite la commande à l’officine et la livre au patient. Pour garantir la confidentialité, les médicaments sont placés par le pharmacien dans un emballage sécurisé. Il en est de même pour l’ordonnance, que le facteur ne peut pas voir. Le client peut commander de la parapharmacie en même temps que ses médicaments. Si son officine habituelle ne figure pas sur le site Internet, le patient peut l’indiquer et La Poste se charge de la contacter pour qu’elle rejoigne le réseau. Le patient peut, enfin, opter pour un abonnement « pilulier ».

Trois expérimentations

La Poste a lancé un premier test en octobre 2016 à Bordeaux (33), en partenariat avec le site mesoigner.fr et la société Medissimo, spécialiste du pilulier. La Poste avait alors annoncé sa généralisation pour février 2017. Finalement, le groupe a décidé de mener de nouvelles expériences avec d’autres partenaires, l’initiative en Aquitaine n’ayant impliqué qu’une trentaine de pharmacies et quelques dizaines de clients réguliers. La deuxième se déroule à Nantes (44) avec le groupement Giphar. Elle débutera véritablement en septembre 2017, mais soixante officines Giphar sont déjà référencées. Le troisième test, lui, commence dès à présent, à Marseille (13), avec PharmaBest, un groupement de pharmacies réalisant en moyenne 10 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel. À Bordeaux, la livraison coûte 8,90 € au client et 7,90 € s’il choisit un pack de six livraisons. L’abonnement au pilulier revient, lui, à 19,90 € par mois. À Nantes, les prix seront identiques, à l’exception du pilulier, facturé 25,90 € par mois. Une différence qui s’explique par le fait que le pharmacien aura le choix de la marque et ne sera pas obligé d’opter pour un pilulier Medissimo. Autre évolution, les médicaments ne seront plus stockés dans les locaux de La Poste mais ramenés à l’officine s’ils ne peuvent être remis au patient. Quant à Marseille, le service sera gratuit pour le client, PharmaBest prenant les frais à sa charge.

La Poste indique qu’elle se donne « environ une année » pour choisir un modèle économique et l’étendre au niveau national. Travaillera-t-elle avec différents groupements de pharmacies ou sites Internet comme mesoigner.fr ? « Pas nécessairement, il est possible d’élargir à d’autres partenaires », répond son service de presse.

Une stratégie de services à domicile

Depuis quelques années, la stratégie du groupe vise à développer ses services à domicile. Le premier axe est la proposition de nouveaux services, comme les visites aux personnes âgées, la réalisation de pré-diagnostics énergétiques, la livraison de médicaments…, fondés sur la présence de facteurs sur tout le territoire et leurs liens de proximité avec la population. Le second est l’acquisition ou la prise de participation dans des sociétés spécialisées. En 2016, le groupe a pris une participation majoritaire dans Axeo Services, qui s’illustre dans les services à la personne (ménage, jardinage, garde d’enfants…). Et le 4 mai, La Poste a annoncé une prise de participation majoritaire dans le groupe Asten Santé, l’un des leaders français de la prestation de santé à domicile, sous réserve de l’accord de l’Autorité de la concurrence.

Asten Santé intervient dans plusieurs domaines : insuffisance respiratoire, perfusion, nutrition, insulinothérapie, maintien à domicile et télémédecine. Présente dans quarante et un départements, la société a réalisé un chiffre d’affaires de 100 millions d’euros en 2016 et compte près de 60 000 patients à domicile. Cette prise de participation permet donc à Asten Santé d’élargir son champ d’action à l’ensemble du territoire et de développer sa clientèle, et à La Poste de se positionner sur le marché du maintien à domicile. Une stratégie qui risque de déplaire aux pharmaciens. Certains accusent déjà La Poste de leur faire de la concurrence déloyale en livrant des médicaments au domicile des patients…