Ajout de lévothyroxine au Thyrozol dans Basedow - Porphyre n° 530 du 28/02/2017 - Revues
 
Porphyre n° 530 du 28/02/2017
 

Savoir

L’ordo

Auteur(s) : Nathalie Belin

Madame C., 55 ans, est sous propranolol et thiamazole (Thyrozol) depuis un mois suite au diagnostic d’une maladie de Basedow. L’endocrinologue ajoute ce jour de la lévothyroxine.

Ce que je dois savoir

Législation

L’ordonnance ne pose pas de problème.

Condiv

C’est quoi ?

L’ordonnance vise à prendre en charge des troubles thyroïdiens. Thyrozol, qui freine la synthèse des hormones thyroïdiennes, indique que la patiente souffre d’une hyperthyroïdie, ici d’une maladie de Basedow. Cette maladie auto-immune est plus fréquente chez les femmes (sept pour un homme) entre 40 et 60 ans. Elle est liée à la présence d’anticorps anti-récepteurs de TSH, qui miment les effets de cette dernière, entraînant une synthèse excessive d’hormones thyroïdiennes T3 et T4.

Quels sont les signes cliniques ?

La thyrotoxicose est l’ensemble des symptômes liés à l’hyperthyroïdie : perte de poids avec appétit conservé, fatigue, tachycardie, palpitations, essoufflement à l’effort, nervosité, troubles du sommeil, intolérance à la chaleur, avec sueurs, mains chaudes et moites, hausse de la fréquence des selles. La plupart des patients ont une augmentation diffuse du volume de la thyroïde (goitre) à l’auscultation et, parfois, une exophtalmie, qui est une saillie du globe oculaire hors de l’orbite.

Objectif

• Bloquer la production d’hormones thyroïdiennes grâce au Thyrozol, l’antithyroïdien de synthèse qui la freine. Un bêta-bloquant peut être prescrit (cas ici) pour ralentir la fréquence cardiaque et soulager les symptômes, tels que tremblements, anxiété, intolérance à la chaleur.

• Rétablir l’euthyroïdie, c’est-à-dire un taux normal d’hormones thyroïdiennes. Au bout de trois à quatre semaines environ, un contrôle hormonal vérifie l’efficacité du traitement, avec T3, T4 et anticorps abaissés. Deux options sont alors possibles : diminuer la dose de l’antithyroïdien de synthèse pour éviter une hypothyroïdie, ou la maintenir à dose élevée et supplémenter en hormones thyroïdiennes (lévothyroxine) pour conserver l’euthyroïdie, cas de Madame C.

Dans tous les cas, l’antithyroïdien est prescrit sur douze à dix-huit mois.

Médicaments

Thiamazole (Thyrozol)

Antithyroïdien de synthèse inhibant l’incorporation de l’iode dans la tyrosine, et donc la nouvelle synthèse d’hormones thyroïdiennes. La libération d’hormones thyroïdiennes déjà synthétisées n’est pas affectée. D’où la période de latence avant une amélioration clinique qui peut être plus ou moins longue selon les patients.

Lévothyroxine sodique (Levothyrox)

Proche de l’hormone endogène (thyroxine), la lévothyroxine (T4) est transformée en T3, l’hormone active. La lévothyroxine est préférée à l’hormone active car sa demi-vie est plus longue, d’où des taux plasmatiques stables sur une journée.

Propranolol (Avlocardyl)

Bêta-bloquant non cardiosélectif notamment indiqué dans la correction des manifestations cardio-vasculaires de l’hyperthyroïdie (palpitations, tachycardie) lorsque ces symptômes se montrent gênants.

Repérer les difficultés

• Un risque d’agranulocytose. Les antihtyroïdiens de synthèse tels Thyrozol, mais aussi Néo-Mercazole, Basdène et Proracyl, exposent à un risque de neutropénie et d’agranulocytose (voir Lexique), rare mais grave, survenant dans les premiers mois de traitement. Des contrôles de la numération formule sanguine (NFS) et des plaquettes sont nécessaires tous les huit à dix jours les deux premiers mois de traitement.

• Respect de la lévothyroxine. Son absorption digestive est modifiée par certains médicaments ou aliments et la dose d’équilibre peut être difficile à obtenir. Le patient doit toujours respecter des modalités de prise identiques. De même, toujours donner le même médicament, générique ou princeps, surtout chez les patients les plus à risque d’effets indésirables : grossesse, fragilité cardio-vasculaire, personnes âgées.

Ce que je dis à la patiente

J’ouvre le dialogue

« Je vois que le médecin a diminué la posologie du propranolol et prescrit des hormones thyroïdiennes, le traitement a donc été efficace ! », « Comment vous sentez-vous à présent ? » et « Le médecin vous a-t-il indiqué comment prendre ce nouveau médicament ? » fait le point sur ce qu’a dit l’endocrinologue.

J’explique le traitement

Mécanisme d’action

• Thyrozol : l’antithyroïdien de synthèse empêche la synthèse des hormones thyroïdiennes. Il doit être poursuivi sur une durée suffisante de douze à dix-huit mois pour limiter le risque de récidive.

• Lévothyroxine : elle est prescrite pour compenser l’hypothyroïdie induite (à « dose substitutive »).

• Propranolol : ce médicament n’agit pas sur la production d’hormones thyroïdiennes mais permet, en attendant l’action du thiamazole, de limiter certains symptômes de l’hyperthyroïdie comme la tachycardie, l’essoufflement ou l’anxiété.

Horaires d’administration

• Thyrozol : le matin, pendant ou après le petit déjeuner.

• Lévothyroxine : le matin à jeun, 30 minutes avant le petit déjeuner du fait des interférences possibles avec l’alimentation ou alors deux heures après un repas. En pratique, toujours la prendre dans les mêmes conditions, horaire et distance par rapport au repas. Sa demi-vie longue, environ sept jours, garantit des taux plasmatiques stables. Ne pas rattraper un oubli, des prises trop rapprochées pouvant au contraire entraîner une tachycardie.

• Propranolol : matin et soir, avant 18 heures pour éviter toute perturbation du sommeil, insomnies, cauchemars.

Effets indésirables

• Thyrozol : possibles troubles du goût, réversibles à l’arrêt, et atteintes hématologiques (neutropénies sévères, agranulocytose) les premiers mois. Une agranulocytose est une contre-indication définitive à tout antithyroïdien de synthèse. Des atteintes hépatiques sont parfois observées.

• Lévothyroxine : tachycardie, sueurs, diarrhée…ou constipation, frilosité… signant respectivement un surdosage et un sous-dosage, sont à signaler au médecin.

• Propranolol : asthénie, bradycardie, refroidissement des extrémités, insomnies, cauchemars.

J’accompagne

Surveillance

Vérifier que Madame C. a une ordonnance pour surveiller sa formule sanguine. Lui rappeler que fièvre, maux de gorge, aphtes ou tout autre signe d’infection nécessitent d’arrêter le thiamazole, d’alerter le médecin et de faire réaliser au plus vite une NFS.

Ictère, prurit, nausées ou douleurs abdominales justifient un dosage des transaminases pour vérifier l’absence d’atteinte hépatique.

Automédication

Attention aux nombreuses interactions possibles avec la lévothyroxine. Sels de fer, de calcium, de magnésium, topiques antiacides doivent être pris au moins deux heures après. Pas de millepertuis non plus car il est inducteur enzymatique !

Hygiène de vie

→ La maladie étant très fatigante, un repos complet est indispensable les premiers jours, avec une reprise progressive des activités.

→ Une alimentation suffisamment énergétique (féculents) et riche en protéines (viandes, œufs, poissons) pallie la fonte musculaire et permet la reprise du poids.

→ Pour corriger les troubles du transit : hydratation suffisante et limitation des fibres si diarrhée en cas d’hyperthyroïdie ; alimentation riche en fruits et légumes si constipation en cas d’hypothyroïdie.

→ Le tabagisme est un facteur d’aggravation et de rechute de la maladie de Basedow. Madame C. est fumeuse, évoquer l’arrêt du tabac et l’orienter si besoin vers un centre de tabacologie.

Vente associée

En cas d’anxiété ou d’angoisses, fréquentes au cours de la maladie, proposer des plantes à visées anxiolytiques ou sédatives : Dormicalm, Spasmine, Seriane…

Prescription

Dr A.

Endocrinologue.

Mme Claire C., 55 ans, 51 kg, 1,57 m.

Ordonnance

• Thyrozol 20 mg

1 cp par jour le matin.

• Levothyrox 75 µg

1 cp le matin à jeun.

• Avlocardyl 40 mg

Diminuer à ½ cp 2 fois par jour.

Traitement pour 1 mois.

Lexique

→ Agranulocytose : disparition des polynucléaires neutrophiles sanguins dans le sang, avec un risque infectieux majeur nécessitant une hospitalisation.

La patiente me demande

« Phyto Soya, c’est bien contre les bouffées de chaleur ? »

La prise d’aliments riches en soja ou de compléments alimentaires à base d’isoflavones de soja est déconseillée car ils diminuent l’efficacité de la lévothyroxine et peuvent perturber l’atteinte de l’équilibre thyroïdien.

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