La thrombose veineuse profonde - Porphyre n° 521 du 06/04/2016 - Revues
 
Porphyre n° 521 du 06/04/2016
 

Savoir

Patho

Auteur(s) : Florence Leandro

La thrombose veineuse profonde, anciennement phlébite, est une affection aiguë caractérisée par la formation d’un caillot de sang dans une veine profonde des membres inférieurs. Sa résolution doit permettre d’éviter l’embolie pulmonaire, sa principale complication immédiate. La prise en charge et la prévention des récidives reposent sur des anticoagulants : HBPM, HNF, AVK et AOD.

La maladie

Notions physiologiques

Sur les vaisseaux

• Le retour veineux au niveau des membres inférieurs est assuré à 90 % par le système veineux profond – veine fémorale –, et à 10 % par celui superficiel – veines saphènes –, ces deux systèmes étant reliés par des veines perforantes.

• Le retour veineux, c’est-à-dire le retour vers le cœur d’un sang appauvri en oxygène et enrichi en dioxyde de carbone, est favorisé par divers mécanismes, dont le plus important est un jeu efficace de pompes, et en particulier celle du mollet actionnée lors de la marche. Il existe également une différence de pression entre les veines périphériques et le cœur de 15 mmHg environ. Les valvules veineuses jouent un rôle anti-reflux et imposent un sens unidirectionnel, tandis que les veines, grâce à leur rigidité et à leur vasoconstriction, assurent à la fois une propulsion et une résistance mécaniques.

Sur l’hémostase

L’hémostase est l’ensemble des mécanismes permettant au sang de rester fluide, tout en prévenant les saignements et en stoppant les hémorragies. Elle se découpe en trois phases, à partir d’une lésion vasculaire.

• L’hémostase primaire consiste en la formation d’un caillot plaquettaire.

• La coagulation aboutit à un caillot de fibrine, plus résistant au flux sanguin, grâce à une cascade enzymatique complexe mettant en jeu différents facteurs de la coagulation numérotés de I à XIII, et des inhibiteurs physiologiques de régulation. La plupart sont synthétisés au niveau du foie, et nécessitent parfois l’action de la vitamine K, notamment pour les facteurs II, VII, IX, X, et les protéines C et S.

• La fibrinolyse est la dissolution du caillot et la restauration de la perméabilité vasculaire.

Définitions

• La maladie thromboembolique veineuse regroupe la thrombose veineuse profonde (TVP) et sa principale complication, l’embolie pulmonaire (EP).

• La TVP, anciennement nommée phlébite, correspond à la formation d’un caillot dans une veine profonde des membres inférieurs, bloquant le flux sanguin.

→ En fonction de la localisation du caillot, se distinguent les TVP proximales poplitées ou sus-poplitées – au-dessus du genou –, plus à risque de complications, et les TVP distales sous-poplitées – au-dessous du genou.

→ Les stratégies thérapeutiques exposées ci-après concernent à la fois les TVP proximales et distales, car « en France, nous avons tendance à les soigner de la même façon, ce qui n’est pas le cas par exemple des États-Unis. Le traitement des TVP distales ne fait pas l’objet de consensus », explique Laurence Camoin-Jau, professeur des universités et praticien hospitalier en hématologie à l’hôpital de la Timone à Marseille (13).

Physiopathologie

Triade de Virchow

La combinaison plus ou moins complète de trois facteurs, dite triade de Virchow, entraîne la formation d’un caillot sanguin (voir infographie).

• Une stase veineuse ou diminution de la vitesse d’écoulement du flux sanguin. Elle est favorisée par une immobilisation prolongée, l’insuffisance cardiaque décompensée, les compressions liées à un cancer…

• Une lésion des cellules endothéliales qui tapissent l’intérieur de la paroi des veines à cause de traumatismes, suite à une chirurgie, un cathéter veineux central… La lésion entraîne une adhésion des plaquettes qui peut constituer le point de départ de la thrombose.

• Un phénomène d’hyper-coagulabilité : le sang, pour diverses raisons constitutionnelles ou acquises, permanentes ou transitoires, voit ses processus de coagulation s’amplifier avec rupture de l’équilibre hémostatique.

Localisation et devenir

• La majorité des thromboses débute dans les membres inférieurs, notamment dans les veines du mollet, parce qu’ils sont plus souvent et plus facilement immobilisés que les membres supérieurs.

• Le thrombus ainsi formé peut rester asymptomatique plusieurs jours mais sa lyse spontanée est possible, en particulier en cas de disparition du ou des facteur (s) déclenchant (s) (voir plus bas). Il peut aussi se fragmenter et migrer vers les poumons, causant une embolie pulmonaire ou continuer à s’étendre, entraînant un syndrome obstructif responsable des phénomènes douloureux et d’un œdème. C’est ce syndrome obstructif qui représente la TVP.

Circonstances de survenue

Âge

Le premier facteur de risque identifié de TVP reste l’âge. Les enfants et les jeunes adultes sont exceptionnellement concernés, l’incidence augmente graduellement à partir de 40 ans et de façon exponentielle chez le sujet âgé.

Sexe

Les femmes peuvent être impactées de façon plus fréquente au moment de la grossesse et du post-partum en raison d’un état d’hyper-coagulabilité, et sous traitement hormonal, contraception ou traitement de la ménopause. Cependant, l’épidémiologie montre que les hommes sont les plus atteints, notamment lorsque l’âge augmente.

Classification des circonstances

Les facteurs de risque peuvent être :

• transitoires majeurs : chirurgie récente, fracture, immobilisation pour cause médicale et pour une durée de plus de trois jours… ;

• transitoires mineurs : grossesse, contraception hormonale, voyage en avion de plus de six heures… ;

• permanents liés au sujet : antécédents familiaux, insuffisance veineuse chronique, obésité, maladies inflammatoires…

Thrombophilies

Des anomalies constitutionnelles de la coagulation, sous forme d’un déficit en inhibiteurs physiologiques, tel le déficit en antithrombine, rare mais gravissime, ou d’une mutation sur un facteur de la coagulation, sont regroupées sous le terme de thrombophilies. Elles sont à l’origine de thromboses à caractère insolite spontanées, récidivantes, familiales, avec une localisation inhabituelle et avant 40 ans.

Autres circonstances de survenue

• Le cancer, en raison de plusieurs facteurs de risque qui se cumulent (voir encadré à droite).

• En l’absence de facteurs de risque retrouvés, la TVP est dite idiopathique, ce qui représente tout de même la moitié des cas.

Signes cliniques

Les signes sont présents de façon inconstante, ce qui pourra poser des difficultés de diagnostic.

• La douleur : elle va d’une simple gêne avec sensibilité douloureuse de la peau, à une douleur aiguë empêchant la marche, le patient boitant et traînant sa jambe. Le signe de Homans est en faveur d’une TVP ; c’ est une douleur déclenchée lorsque le pied est en dorsiflexion sur la jambe – pointe du pied ramenée vers le genou.

• L’œdème plus ou moins important peut entraîner une différence de circonférence entre les deux mollets, ainsi qu’une diminution du ballottement du mollet atteint.

• La température locale peut augmenter, le patient peut se sentir légèrement fébrile (38 °C), voire anxieux. Le trajet veineux est plus visible et devient douloureux au toucher.

• Parfois, un érythème ou une coloration cutanée légèrement foncée et bleutée côté phlébite.

Évolution

Sans traitement, « la taille du thrombus s’accentue et le risque d’embolie pulmonaire est fortement accru », explique le Pr Camoin-Jau. Si la TVP est traitée, les anticoagulants (voir Traitements) empêchent l’extension du thrombus mais n’assurent pas sa dégradation progressive. Cette étape est réalisée par la fibrinolyse physiologique.

À court terme, une embolie pulmonaire

Lorsque tout ou partie du thrombus se détache, il peut migrer via la circulation sanguine et former un embole qui obstrue alors un vaisseau pulmonaire, et notamment l’artère.

Les signes cliniques sont cardio-pulmonaires et d’apparition brutale : toux, douleur thoracique, dyspnée et hémoptysie (voir Dico +). L’embolie pulmonaire (EP) est la complication la plus redoutée. Elle met en jeu le pronostic vital et nécessite une prise en charge en urgence. En France, près de la moitié des TVP proximales se compliquent d’une EP symptomatique ou non.

À long terme, un syndrome post-thrombotique

Dans les années qui suivent l’épisode aigu, 20 à 50 % des patients peuvent développer des symptômes locaux regroupés sous le terme de syndrome post-thrombotique ou post-phlébitique : douleurs, varices, œdèmes, pigmentation cutanée, voire ulcères. « La jambe phlébitique entraîne une sensation désagréable de jambes lourdes », précise le Pr Camoin-Jau. Sur le plan anatomique, un tissu de granulation se forme et conduit à la rétraction et à l’épaississement de la paroi veineuse, avec éventuellement une re-canalisation et la ré-endothélisation de la veine. Cela aboutit à la destruction des valvules, dont l’incontinence est à l’origine du syndrome post-thrombotique.

Un risque de récidives à plus ou moins long terme

Les récidives de TVP, précoces ou tardives, restent un problème majeur. À l’issue de la première année suivant l’arrêt du traitement, entre 8 et 15 % des patients ont déjà récidivé. Les chiffres varient en fonction de l’âge et des circonstances de survenue de l’épisode initial. Dans certains cas, « les récidives peuvent faire envisager au médecin la mise en place d’une anticoagulation au long cours », explique la spécialiste.

Diagnostic

Il n’est pas toujours facile en raison de la présence inconstante des signes cliniques et de la multiplicité des situations pouvant conduire à une phlébite. Le patient peut avoir été réorienté par son généraliste ou repéré lors de sa venue aux urgences. Il est rapidement adressé à un cardiologue ou à un médecin vasculaire, en milieu hospitalier ou non.

Clinique et condiv

• Les signes cliniques, locaux et unilatéraux peuvent être signalés dans un premier temps par le patient lui-même, et sont confirmés par le médecin lors d’un examen à la fois visuel et reposant sur la palpation du membre concerné. Les signes cliniques de la TVP ne lui sont pas spécifiques, et peuvent parfois correspondre à d’autres pathologies : érysipèle – dermatose infectieuse –, traumatisme musculaire, lymphœdème, phlébite superficielle, kyste…

• L’interrogatoire est un autre élément très important de cette consultation, car il permet de révéler des facteurs favorisants, des antécédents, des traitements en cours…

• Le score de Wells regroupe des données issues de l’examen physique telles que la caractérisation de l’œdème, la douleur en regard du réseau veineux profond…, et de l’entretien avec le patient : cancer ou non, alitement, chirurgie majeure dans les douze semaines précédentes…Il est performant pour écarter ou conforter un diagnostic.

Examens complémentaires

• Dosage des D-dimères dans le sang : ce sont des produits de dégradation de la fibrine constitutive des caillots sanguins. Ils sont dosés en cas de doute à l’examen clinique, un résultat négatif permettant d’exclure un diagnostic de TVP.

• Écho-doppler veineux : examen paraclinique de référence pour confirmer le diagnostic suite à une probabilité clinique forte ou des D-dimères positifs. « En cas d’indisponibilité de l’appareil mais de forte suspicion de TVP, on commence par traiter et l’examen est réalisé dès que possible », explique le Pr Camoin-Jau. Indolore, non invasif et durant moins de 30 minutes, il utilise les ultrasons afin d’étudier les veines et les flux sanguins.

• Phlébographie : contrairement à l’écho-doppler veineux, c’est un examen invasif qui comprend l’injection d’un produit de contraste pour explorer les veines. Ceci explique son quasi-abandon aujourd’hui pour le diagnostic.

• Recherche de facteurs de risque biologiques de maladie thromboembolique veineuse (MTEV) : elle est justifiée face à une thrombose à caractère insolite décrite précédemment.

Son traitement

Objectif

Le but du traitement d’une TVP est double. Au-delà de la résolution de l’épisode, il s’agit de prévenir les différentes complications possibles, et en premier lieu l’embolie pulmonaire. Tous les patients reçoivent un anticoagulant, sauf ceux qui présentent des contre-indications.

Stratégie thérapeutique

En ambulatoire ou à l’hôpital ?

• L’hospitalisation ne concerne plus qu’un nombre réduit de patients, les critères d’admission étant clairement définis : insuffisance rénale sévère (< 30 ml/min), risque hémorragique, TVP proximales avec syndrome obstructif sévère et/ou localisation ilio-cave (au niveau de la veine iliaque ou cave), EP instable, condiv psycho-social, géographique et médical défavorable.

• La plupart des patients avec TVP peuvent être traités en ambulatoire, après une courte hospitalisation permettant de poser le diagnostic et d’évaluer les risques thromboemboliques et hémorragiques propres. Par contre, cela impose le respect de règles en matière d’éducation du patient et de coordination ville-hôpital.

Traitement initial

Anticoagulants

Il repose sur la mise en place rapide d’un traitement anticoagulant, choisi en fonction du patient et notamment de sa fonction rénale.

• Les héparines de bas poids moléculaire ou HBPM en première intention administrées à dose curative, en une à deux fois par jour pendant cinq à dix jours ;

• Le fondaparinux sodique est une alternative en une injection par jour car demi-vie longue, et pour une durée quasi similaire aux HBPM.

• Par voie orale, deux molécules ont l’AMM en traitement initial d’une TVP : l’apixaban et le rivaroxaban, deux anticoagulants oraux d’action directe, avec une phase d’attaque à forte dose durant sept jours pour l’apixaban et vingt et un pour le rivaroxaban, suivie d’une phase d’entretien à dose plus faible.

• Les héparines non fractionnées ou HNF sont réservées aux sujets insuffisants rénaux sévères car les autres traitements sont contre-indiqués. Elles s’administrent en intraveineux à l’hôpital mais en sous-cutané à domicile. « Leur demi-vie courte impose deux à trois injections par jour, soit autant de passages infirmiers et d’hématomes, et donc un inconfort supplémentaire pour ces patients » explique le Pr Camoin-Jau.

Mesures adjuvantes

En parallèle, la compression veineuse (voir Autres traitements) et la mobilisation précoce sont utilisées. Il s’agit de faire lever le patient le plus tôt possible, plutôt que de le laisser alité.

Durée totale du traitement

Anticoagulants

Dictée par le condiv clinique et le risque de récidive, la durée de traitement sera toutefois toujours égale ou supérieure à trois mois car, plus courte, elle expose à un sur-risque de récidive thromboembolique à l’arrêt.

• Facteur déclenchant majeur transitoire : trois mois car risque de récidive faible.

• Facteur de risque persistant majeur (cancer, hémopathie maligne…) : six mois voire plus si le facteur persiste, car risque de récidive élevé.

• Pas de facteur déclenchant ni de facteur de risque identifiés : six mois voire plus, car risque de récidive élevé.

Des facteurs modulateurs peuvent allonger la durée du traitement, telle une thrombophilie, ou la raccourcir, tel l’alcoolisme chronique et son risque hémorragique plus élevé.

Compression

• Elle est maintenue deux ans minimum.

Organiser le relais des différents anticoagulants

Pourquoi ?

Parce que la voie parentérale n’est pas adaptée au long cours (risque infectieux, altération cutanée au point d’injection, inconfort…), et que les héparines exposent à un risque de thrombopénie (voir encadré), un relais par voie orale doit être envisagé dès le départ. À savoir : dans certains cas (non observance, cancer…), le relais n’est pas fait, le patient reste sous injection.

Comment ?

• Le cas classique consiste à passer d’une voie injectable aux antivitamines K (AVK). Ces derniers sont introduits de façon très précoce, parfois en même temps que l’héparine, afin de réduire la durée du traitement parentéral. L’obtention de deux INR (test de suivi des AVK, voir plus loin) consécutifs compris dans la zone thérapeutique permet d’arrêter l’héparine ou le fondaparinux, soit en général entre cinq et neuf jours après avoir débuté les injectables. Attention, lors de la période de co-administration, il y a cumul des risques hémorragiques, « et le risque de nécrose cutanée au point d’injection est à prendre en compte », explique la spécialiste.

• En cas de traitement initial injectable, les anticoagulants oraux directs, apixaban, rivaroxaban ou dabigatran, peuvent aussi être prescrits en relais à la place d’un AVK, mais dans ce cas sans chevauchement avec le traitement parentéral car leur action est rapide.

• En cas de traitement initial par apixaban ou rivaroxaban, il est poursuivi sans relais vers d’autres molécules mais à plus faible dose.

Suivi médical

Une fois l’anticoagulant en route pour la résolution de l’épisode aigu, un contrôle par écho-doppler est réalisé au bout d’une à deux semaines, avec pour critère principal l’absence d’aggravation du thrombus.

À l’issue de l’épisode, la surveillance se fera surtout par écho-doppler, à trois, six, douze mois, voire ensuite tous les ans selon les séquelles et les facteurs de risque encore présents.

Médicaments

Voie injectable

Héparines non fractionnées (HNF)

• Molécules : héparine sodique, héparine calcique. De haut poids moléculaire, elles s’administrent en sous-cutané ou en intraveineux.

• Mode d’action : blocage du système d’activation de la coagulation, et en particulier les facteurs IIa et Xa (voir Info +), sur lesquels les HNF agissent de façon équivalente. L’héparine forme un complexe avec un inhibiteur physiologique de la coagulation, l’antithrombine, et en potentialise l’activité anticoagulante. L’héparine ne dissout pas le caillot constitué mais l’empêche de se développer davantage.

• Effets indésirables : hémorragies, notamment chez le sujet âgé, en cas de traitement prolongé, d’interactions médicamenteuses… ; thrombopénies induites par l’héparine (voir encadré page suivante), imposant l’arrêt ; hématomes, hyperkaliémie, notamment si association avec des hyperkaliémiants, ostéoporose si traitement au long cours. Le sulfate de protamine est l’antidote spécifique des héparines en cas de surdosage ou d’accumulation.

• Surveillance

→ Avant la mise en route du traitement : le calcul de la clairance de la créatinine (voir Info + p. 33) évalue la fonction rénale et permet de choisir une HNF en cas de clairance inférieure à 20 ml/min. Le taux de plaquettes est mesuré avant de démarrer.

→ De l’efficacité : le test TCA ou temps de céphaline activée permet d’adapter la posologie de l’HNF, en révélant l’activité anticoagulante effective car celle-ci varie d’un flacon à un autre. Ce test est réalisé quelques heures après le démarrage du traitement et après chaque modification de dose. L’héparinémie ou mesure de l’activité anti-Xa est un simple dosage médicamenteux qui donne la quantité d’héparine active circulante ; elle est parfois utilisée afin de dépister un éventuel surdosage.

→ De la tolérance : le taux de plaquettes doit être surveillé de façon étroite sous HNF, en raison du risque de thrombopénie (voir encadré p. 30). Il est mesuré deux fois par semaine pendant les vingt et un premiers jours de traitement.

Héparines de bas poids moléculaire (HBPM)

• Molécules : daltéparine sodique, énoxaparine sodique, nadroparine calcique, tinzaparine sodique. Les HBPM s’administrent en sous-cutané uniquement. Elles sont obtenues par fragmentation des HNF et correspondent à la seconde génération dans les années 1980.

• Mode d’action : idem HNF, sauf que les HBPM agissent davantage sur le facteur Xa que IIa.

• Effets indésirables : la plupart cités pour les HNF peuvent potentiellement survenir sous HBPM, mais ces dernières sont mieux tolérées.

• Surveillance

→ Avant la mise en route du traitement : taux de plaquettes et clairance de la créatinine sont évalués. « Les prescripteurs doivent être particulièrement sensibilisés aux précautions d’usage des HBPM et au risque d’accumulation chez un patient insuffisant rénal sévère », rappelle le Pr Camoin-Jau.

→ De l’efficacité : aucun examen biologique n’est effectué en routine, sauf en cas d’hémorragie par exemple.

→ De la tolérance : la surveillance du taux de plaquettes sous HBPM n’est plus systématique mais adaptée à chaque cas (recommandations de l’ANSM, 2011).

Fondaparinux

• Molécule : petit polysaccharide (pentasaccharide) de synthèse correspondant à la fraction active également présente sur les héparines. Il constitue en quelque sorte la troisième génération des héparines, mais non issue du monde animal. « Ceci est intéressant quand on a encore en mémoire les scandales liés à la contamination des héparines », note la spécialiste. Par exemple, en 2008, des accidents ont été recensés suite à l’administration d’héparine fabriquée à partir de matière première d’origine chinoise.

• Mode d’action : inhibition sélective du facteur Xa par liaison à l’antithrombine et potentialisation de son activité anticoagulante.

• Effets indésirables : hémorragies, notamment chez le sujet âgé, en cas de faible poids ou d’insuffisance rénale. « À l’époque des alertes sanitaires, peu après le lancement du produit, les patients arrivaient à l’hôpital complètement bleus des pieds à la tête. Il a fallu rapidement recibler la population susceptible de tirer bénéfice de ce traitement », précise le Pr Camoin-Jau ; thrombopénies très rares. Pas d’antidote spécifique en cas de surdosage ou d’accumulation.

• Surveillance : elle est allégée par rapport aux héparines, car l’activité anticoagulante est très reproductible et le risque de thrombopénie, très faible. Une insuffisance rénale doit cependant être recherchée avant la mise sous fondaparinux.

Voie orale

Antivitamines K (AVK)

• Molécules : deux dérivés coumariniques, warfarine et acénocoumarol, et un dérivé de l’indanedione, le fluindione, molécule AVK de loin la plus prescrite en France. Les AVK peuvent aussi se classer selon leur demi-vie : 8 heures pour l’acénocoumarol, 31 heures pour la fluindione et 35 à 45 heures pour la warfarine. Ces principes actifs comptent parmi ceux qui sont le plus liés aux protéines plasmatiques, d’où un risque supplémentaire d’interactions médicamenteuses.

• Mode d’action : indirect, au sein des hépatocytes. Les AVK sont des analogues structuraux de la vitamine K. Ils l’inhibent de façon compétitive et bloquent la synthèse des formes actives des facteurs de la coagulation vitamine K dépendants : facteurs II, VII, IX et X. Cette activité en amont de la cascade de la coagulation entraîne un effet anticoagulant retardé, qui persiste quelques jours après l’arrêt du traitement. Les AVK ne sont pas des médicaments de l’urgence.

• Effets indésirables : le surdosage entraîne un risque hémorragique (voir encadré ci-dessous), tandis que le sous-dosage majore le risque de thrombose ; troubles digestifs, arthralgies, alopécie, réactions d’hypersensibilité.

• Surveillance : l’examen biologique de référence pour la surveillance des traitements AVK est l’International Normalized Ratio (INR), un dérivé standardisé et facilement interprétable du temps de Quick, et le reflet de l’anticoagulation chez le patient.

→ L’INR est mesuré au minimum une fois par mois par prise de sang le matin, pas forcément à jeun, mais de façon plus rapprochée en début de traitement ou lors d’événements intercurrents : diarrhées, infection, modification de l’alimentation, ajout d’un médicament…

→ Le patient doit absolument connaître son INR cible, compris entre 2 et 3 pour la plupart des indications. Un INR trop bas (< 1,5) correspond à un risque thrombotique, un INR trop haut (> 5) à un risque hémorragique.

Anticoagulants oraux directs (AOD)

• Molécules : rivaroxaban et apixaban, deux inhibiteurs du facteur Xa (suffixe « xaban »), et le dabigatran, un inhibiteur du facteur IIa (suffixe « gatran ») administré sous forme de prodrogue dabigatran etexilate avant d’être transformé en dabigatran actif dans l’organisme.

• Mode d’action : inhibent de façon directe, compétitive et sélective un facteur de la coagulation, le Xa ou le IIa. Leur action rapide, environ 2 heures, permet leur utilisation en urgence.

• Effets indésirables : risque hémorragique assez proche des AVK, et majoré en cas d’insuffisance rénale, de faible poids ou d’âge avancé ; risque thrombotique en cas de sous-dosage ; troubles digestifs fréquents ; atteintes hépatiques, rénales (rivaroxaban) et cardiaques (dabigatran).

• Surveillance : pas de surveillance de l’anti-coagulation en routine, l’INR restant spécifique aux AVK. En situation hémorragique ou chirurgicale urgente, des mesures spécialisées peuvent être effectuées, telle la mesure de l’activité anti-Xa ou anti-IIa. Cependant, « il est indispensable d’évaluer la fonction rénale avant la mise sous traitement et à un rythme semestriel, voire trimestriel en cas d’insuffisance rénale modérée », rappelle le Pr Camoin-Jau.

Autres traitements

Compression veineuse élastique

• Quand ? La compression fait partie intégrante des traitements préventifs et curatifs de la TVP, et vient compléter, voire remplacer en cas de contre-indications et/ou de risque hémorragique élevé, les médicaments anticoagulants.

• Comment ? Les bas de compression (voir info+) exercent sur le membre inférieur une pression dégressive du pied vers le haut qui favorise le retour veineux. Devant un épisode de TVP, un dispositif de compression de classe III (20-36 mm Hg à la cheville) est rapidement mis en place et maintenu au moins deux ans.

• Efficacité ? Il n’y a pas de différence d’efficacité entre chaussettes, bas-cuisses et collants mais les chaussettes semblent d’un usage plus aisé.

• Contre-indications ? L’artériopathie oblitérante des membres inférieurs (AOMI, lire la patho Porphyre n° 497, novembre 2013) ou la microangiopathie diabétique évoluée par exemple.

• Alternative ? Est parfois utilisée la compression pneumatique intermittente qui, par un jeu de pompes et de pressions, augmente le rythme sanguin et réduit la stase veineuse. Elle consiste à utiliser une pompe à air pour gonfler et dégonfler un sac étanche entourant la jambe.

Filtre cave

La pose d’un filtre cave dans la veine cave inférieure est réalisée chez quelques patients, notamment en cas de contre-indications aux médicaments ou d’échec d’un traitement bien conduit. Ce dispositif empêche mécaniquement la migration du caillot des membres inférieurs vers les poumons, et diminue donc le risque d’embolie pulmonaire.

Thrombectomie

Il s’agit de retirer le caillot de son emplacement par voie chirurgicale ou via un cathéter. Cette méthode est aussi réservée « aux situations d’impasse thérapeutique », assure le Pr Camoin-Jau.

Prévention de la TVP

Situations

Toute réduction de la mobilité associée ou non à des facteurs de risque thromboemboliques veineux doit faire envisager une prophylaxie anticoagulante. Les situations sont multiples, mais il est possible de distinguer :

• la prévention de la TVP en milieu chirurgical : le risque de « thromboser » peut être faible, modéré ou élevé, lors de la mise en place d’une prothèse totale de hanche ou de genou ;

• la prévention de la TVP en milieu médical : reconnu plus tardivement, le risque de « thromboser » est pourtant bien réel, par exemple lors d’une exacerbation sévère chez un patient BPCO (voir La patho n° 518 de Porphyre décembre 2015-janvier 2016).

Moyens utilisés

• Le traitement préventif repose principalement sur les héparines et le fondaparinux, à des doses plus faibles et pour des durées totales plus courtes qu’en curatif, en général, entre sept et quatorze jours, parfois jusqu’à un mois.

→ La compression veineuse est aussi utilisée.

→ L’arrivée des AOD a permis de se passer d’un traitement par voie injectable, mais uniquement en cas de prothèse totale de hanche ou de genou. Là encore, les posologies et les durées sont réduites par rapport au curatif.

Conseils aux patients

Observance

Conseils liés à la voie injectable

Se renseigner sur la personne en charge des injections d’héparine. Le plus souvent, elles seront effectuées par une infirmière, mais dans le cas d’une auto-injection ou d’un geste effectué par le conjoint, rappeler quelques consignes de base : varier les sites d’injection, piquer dans un pli de peau en sous-cutané avec l’aiguille à angle droit… « Pour limiter les bleus, notamment chez la femme enceinte traitée plusieurs mois, il est conseillé de varier les sites et d’appliquer du froid après la piqûre », rapporte le Pr Camoin-Jau. Rassurer quant au caractère indolore des injections, et remettre au patient un contenant pour les Dasri. À noter que l’héparine ne se conserve pas au réfrigérateur.

Conseils liés à la voie orale

Modalités de prise

• Excepté Sintrom qui peut se prendre matin et soir, les AVK se prennent une fois par jour le soir pour une adaptation rapide de la dose après le résultat de l’INR dans la journée.

• Pour les AOD, les posologies varient en fonction des molécules et des indications, avec une ou deux prises par jour.

• Par rapport aux repas : le rivaroxaban à 15 et à 20 mg se prend au cours d’un repas, les autres AOD au cours ou en dehors des repas.

• En pratique : ne jamais ouvrir la gélule de dabigatran au risque de modifier la biodisponibilité et d’accroître le risque hémorragique. À l’inverse, les comprimés d’apixaban et de rivaroxaban peuvent être écrasés au besoin.

En cas d’oubli

• Si l’oubli de l’AVK date de moins de 8 heures, prendre immédiatement le comprimé. Sinon, attendre la prochaine prise.

• Pour les AOD, le rattrapage peut se faire dans les 12 heures en cas d’une seule prise par jour et dans les 6 heures en cas d’une prise biquotidienne. Dans le cas du traitement d’attaque à 30 mg/jour de rivaroxaban répartis en deux prises, il est possible de prendre deux comprimés simultanément pour assurer une anticoagulation efficace. Dans tous les autres cas, ne jamais doubler la dose suivante pour compenser l’oubli.

Pour la compression veineuse

• Toujours rappeler l’intérêt de la compression en complément des traitements médicamenteux. Si possible, effectuer les prises de mesures le matin, et prendre le temps de faire toucher les matières, de choisir les couleurs ou les motifs, en vue de favoriser la bonne observance. Orienter vers des dispositifs qui ne serrent pas le genou ou n’irritent pas la cuisse, tels les systèmes JarFix et BasFix de Radiante, Sigvaris, Gibaud…

• Faire essayer à la pharmacie, afin de repérer et de corriger d’éventuelles erreurs ; il faut d’abord retourner le bas jusqu’au talon avant de l’enfiler et de le dérouler progressivement. Proposer une aide type enfile-bas au besoin.

• Délivrer quelques conseils pour l’entretien : lavage à 30° ou à la main, séchage à plat loin de toute source de chaleur. Proscrire adoucissant, fer à repasser et sèche-linge.

Automédication

Gare aux interactions

Les interactions médicamenteuses avec les anticoagulants oraux sont multiples. Ceci est bien connu avec les AVK mais semble exister aussi sous AOD. Le patient doit donc être particulièrement vigilant dès lors qu’il prend un nouveau médicament (voir interview). En vente libre, les deux principales classes à risque sont les AINS, notamment ibuprofène et aspirine, avec augmentation du risque de saignement et risque d’altération de la fonction rénale, et les produits à base de millepertuis, inducteur enzymatique avec risque thrombotique par inactivation de l’anticoagulant.

Prévenir tout professionnel

Le risque hémorragique peut être tel qu’il impose de prévenir l’ensemble des personnels médicaux et paramédicaux vus par le malade : dentiste, infirmiers, kinésithérapeute, podologue… En général, il n’est désormais plus nécessaire de stopper l’anticoagulant oral avant un soin, mais ne pas hésiter à se renseigner au préalable auprès du professionnel de santé concerné. En cas de geste plus invasif, et notamment dans un cadre chirurgical, des relais vers l’héparine sont mis en place.

Vie quotidienne

Alimentation

Parmi les anticoagulants, seuls les AVK peuvent interagir avec l’alimentation.

→ Les légumes verts tels que le chou ou le brocoli, le chocolat… sont particulièrement riches en vitamine K. Pour autant, « il ne faut pas interdire des aliments aux patients sous AVK, mais plutôt leur conseiller d’avoir une alimentation variée et équilibrée », propose le Pr Camoin-Jau.

→ Attention, tout changement de situation nutritionnelle peut exposer à un risque. Par exemple, « un patient âgé qui perd son épouse et modifie son alimentation, ou le passage à un système de portage de repas », poursuit la spécialiste.

Reconnaître les signes d’un surdosage ou d’une récidive

• En cas de surdosage, les signes hémorragiques sont d’abord mineurs. Ce sont des saignements cutanéo-muqueux lors du brossage des dents, du rasage ou encore l’apparition d’hématomes spontanés. Une fatigue inhabituelle doit faire suspecter une hémorragie interne potentiellement plus grave, de même que des hématuries – sang dans les urines. Dans tous les cas, il faut encourager le patient à consulter.

• En cas de récidive, le patient se retrouve souvent avec le même tableau que l’épisode initial. « Les patients sont déjà sensibilisés à ce qui leur arrive et vont consulter plus rapidement », explique le Pr Camoin-Jau.

Cas des voyages

Un trajet de plusieurs heures (bus, avion…) constitue un facteur de risque de TVP, car la personne se retrouve en position assise prolongée. Or, « de nombreuses personnes âgées peuvent être amenées à faire des voyages en groupe à bord de bus, notamment avec l’arrivée des beaux jours », souligne le Pr Camoin-Jau. En l’absence d’antécédents de TVP, seuls des bas de compression sont prescrits ; sinon, le médecin ajoute une HBPM à dose préventive. Le caractère ponctuel mais quelque peu contraignant du traitement peut entraîner un défaut d’observance ; l’officinal a ici un rôle essentiel de conseil pour renforcer la prévention. Éviter les vêtements serrés, boire régulièrement, profiter des arrêts pour se lever et marcher quelques instants.

Avec l’aimable participation et relecture de Laurence Camoin-Jau, professeur des universités-praticien hospitalier (PU-PH) en hématologie, CHU La Timone, Assistance publique-Hôpitaux de Marseille (AP-HM), Marseille (13).

Info+

→ Autres thromboses : il existe aussi des thromboses veineuses superficielles et des TVP du membre supérieur, mais celles-ci sont soit moins sévères, soit moins fréquentes. Leurs protocoles de prise en charge ne seront pas évoqués ici.

Info+

→ 100 000 phlébites et 10 000 décès par embolie pulmonaire sont recensés chaque année en France, selon la Société française de phlébologie.

TVP et femme enceinte

→ Particularités du condiv

Pour chaque femme enceinte, le risque thromboembolique doit être évalué. Il est élevé si : au moins deux antécédents thromboemboliques, thrombophilie complexe, antécédent thromboembolique idiopathique ou survenu sous contraceptif oestrogénique ou pendant une grossesse.

→ Particularités du traitement préventif et curatif

En dehors d’un traitement curatif de TVP, les femmes enceintes à haut risque reçoivent de l’héparine dès le début de la grossesse, et jusqu’à six semaines en post-partum. Les doses en prévention sont inférieures à celles curatives. Les héparines ne passant pas la barrière foeto-placentaire et absentes du lait maternel constituent, notamment les HBPM, le traitement anticoagulant de référence de la femme enceinte et allaitante, en préventif et en curatif. Le fondaparinux et les formes orales sont contre-indiqués ou déconseillés.

TVP et maladie cancéreuse

→ Particularités du condiv

Le patient cancéreux est à risque élevé de TVP. Aux facteurs de risque « classiques », et notamment l’immobilisation lors des hospitalisations, s’ajoutent des facteurs de risque liés à la tumeur elle-même et aux traitements. En particulier, la chirurgie carcinologique et la pose d’un cathéter veineux central.

→ Particularités du traitement préventif et curatif

Le recours systématique aux HBPM ou aux AVK en préventif n’est pas recommandé. Lors d’une TVP, une HBPM est préconisée au moins trois mois, l’efficacité et la tolérance étant meilleures qu’avec un relais AVK. Les posologies à l’issue de l’épisode aigu restent proches des doses curatives. Seules la daltéparine (Fragmine) et la tinzaparine (Innohep) possèdent une AMM dans ce traitement prolongé.

Dico+

→ Dyspnée : essoufflement.

→ Hémoptysie :

crachats sanglants.

Info+

→ Les héparines sont des médicaments d’origine naturelle et issus du monde animal, notamment de la muqueuse intestinale porcine.

Héparines et thrombopénies

La thrombopénie induite par l’héparine (TIH), ou thrombopénie de type II, d’origine immuno-allergique et d’apparition retardée aux alentours du dixième jour de traitement, est une complication rare mais redoutée sous héparinothérapie car c’est la seule thrombopénie qui entraîne un risque majoré de thrombose plutôt qu’un risque hémorragique, en raison d’une agrégation des plaquettes entre elles.

La TIH est mise en évidence lorsque le taux de plaquettes est inférieur à 150 000/mm3, lorsque la chute du taux initial est supérieure à 50 % ou devant des signes d’aggravation de la thrombose.

La TIH impose l’arrêt du traitement à base d’héparine, des explorations biologiques complémentaires et un relais par danaparoïde sodique (Orgaran, disponible à l’hôpital), afin de poursuivre l’anti-coagulation chez le patient.

Le risque de TIH est plus élevé avec les HNF qu’avec les HBPM.

Contre-indications médicales absolues

→ HNF : antécédents de trombopénie induite par l’héparine (TIH), troubles de l’hémostase, lésion susceptible de saigner.

→ HBPM : antécédents de TIH, troubles de l’hémostase, lésion susceptible de saigner, insuffisance rénale sévère.

→ Fondaparinux : saignement évolutif significatif, endocardite bactérienne aiguë, insuffisance rénale sévère.

→ AVK : insuffisance hépatique sévère.

→ AOD : saignement évolutif significatif, insuffisance hépatique associée à un risque de saignements, insuffisance rénale sévère.

Info+

→ Les facteurs IIa et Xa de la coagulation jouent un rôle majeur dans la cascade enzymatique qui aboutit à la formation du caillot sanguin. La mention « a » accolée au chiffre signifie que le facteur est sous forme activée.

Info+

→ Clairance de la créatinine : dans la prise en charge de la TVP, elle est calculée grâce à la formule de Cockcroft et Gault : [(140-âge) x poids] x k / créatininémie, avec âge en années, poids en kilos, créatininémie en µmol/l et k = 1,04 pour les femmes et 1,23 pour les hommes Souvent critiquée, cette formule reste cependant d’actualité dans la prise en charge de la TVP car elle est le meilleur reflet du risque hémorragique.

Risque hémorragique sous AVK

Les AVK, en raison de leur fenêtre thérapeutique étroite et du risque hémorragique qu’ils génèrent, représentent la classe thérapeutique la plus à risque d’accidents iatrogènes, d’hospitalisation et de décès. 5 000 morts sont liées aux hémorragies sous AVK par an en France(1). D’où le renforcement de l’éducation thérapeutique des patients sous AVK, notamment au travers d’un carnet de suivi et des entretiens pharmaceutiques. Un avenant entre l’Assurance maladie et les pharmaciens va inclure sous peu les patients sous AOD, soumis au même risque hémorragique.

(1) Les anticoagulants en France en 2014 : états des lieux, synthèse et surveillance, ANSM, avril 2014.

Info+

→ Remboursement de la compression : une lettre de la Caisse nationale d’Assurance maladie du 22 avril 2015 précise que le nombre de paires remboursées est limité à quatre par an et par patient, voire huit sous certaines conditions (modification de la morphologie…). Cette mesure, diversement appliquée selon les départements, vise à limiter abus et trafics.

Interview

Faire un INR sous AVK dès six jours d’antibiotiques

Laurence Camoin-Jau, professeur des universités-praticien hospitalier (PU-PH) en hématologie, CHU La Timone, Assistance publique-Hôpitaux de Marseille (AP-HM), Marseille (13).

Quel rôle peut jouer l’officinal pour les patients atteints de TVP ?

Il doit contribuer par tous les moyens à l’observance, mais aussi veiller au respect des contre-indications et informer le patient du risque hémorragique, de façon simple et claire. Le rôle de l’équipe officinale est donc majeur dans la prise en charge et le suivi des patients ayant fait une TVP.

Comment prévenir les interactions médicamenteuses liées aux AVK ?

Il faut être particulièrement vigilant dès lors qu’un nouveau médicament est introduit chez le patient. En particulier, rappelons que les antibiotiques constituent la première cause d’iatrogénie et d’interactions médicamenteuses avec les AVK, car ces médicaments ont une action sur la flore intestinale productrice de vitamine K et un rôle métabolique pur – inhibiteur ou inducteur enzymatique – pouvant perturber l’INR. Celui-ci doit être réalisé de façon systématique en cas d’antibiothérapie de plus de six jours.

Info+

→ Actualités AOD : l’idarucizumab (Praxbind), un antidote ciblant le dabigatran, est en autorisation temporaire d’utilisation (ATU). L’andexanet alfa est testé pour annuler les effets de l’apixaban et du rivaroxaban.

L’edoxaban (Lixiana) est, lui, déjà commercialisé dans plusieurs pays.

→ Vigilance en délivrant les HBPM : attention aux confusions entre les formes curatives et préventives qui peuvent entraîner des hémorragies ou des thromboses parfois fatales. Appeler le prescripteur si la prescription ne comporte pas la dénomination incluant quantité totale en unité anti-Xa et volume total de la seringue, posologie en ml/jour ou UI anti-Xa/jour. En cas de doute, se référer aux RCP.

À RETENIR

→ La thrombose veineuse profonde (TVP), ou phlébite, est la formation d’un caillot sanguin dans une veine profonde des membres inférieurs.

→ Sur le plan physiopathologique, elle combine lésion de l’endothélium, stase veineuse et hypercoagulabilité.

→ Les circonstances de survenue sont très variées.

→ Les signes cliniques sont inconstants : les plus classiques sont douleur, lourdeur et œdème de la jambe.

→ Le diagnostic est confirmé par un écho-doppler veineux.

→ Les principales complications sont l’embolie pulmonaire,le syndrome post-phlébitique et les récidives.

→ Le patient atteint de TVP doit rapidement être mis sous traitement anticoagulant, classiquement une héparine de bas poids moléculaire (HBPM), avec un relais précoce par un antivitamine K (AVK).

→ Le fondaparinux et les anticoagulants oraux directs (AOD) sont des alternatives, ainsi que l’héparine non fractionnée (HNF) en cas d’insuffisance rénale sévère.

→ La compression veineuse et une mobilisation précoce font aussi partie de la prise en charge de base.

→ Sous anticoagulant oral, l’observance est capitale et l’automédication évitée. Les professionnels de santé consultés doivent être prévenus.

→ Sous AVK, le patient doit régulièrement contrôler son INR, et connaître sa valeur cible.

→ L’apport en vitamine K doit être régulier dans l’alimentation.

→ Le patient doit être sensibilisé aux signes de surdosage en anticoagulant (saignements superficiels et profonds), ainsi qu’aux signes de récidive.

→ Les bas de compression doivent être portés régulièrement, et notamment en prévention des récidives lors d’un long voyage (bus, avion…).

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