Le syndrome du canal carpien - Porphyre n° 516 du 03/10/2015 - Revues
 
Porphyre n° 516 du 03/10/2015
 

SAVOIR

Le point sur…

Auteur(s) : Anne-Gaëlle Harlaut

Fréquemment lié à l’activité professionnelle, ce syndrome touche majoritairement le pouce, l’index et le majeur. L’évolution favorable sans traitement est possible. L’immobilisation, les infiltrations, voire la chirurgie sont souvent nécessaires pour éviter des complications motrices.

Qu’est-ce que c’est ?

• Le canal carpien, situé sur la face antérieure de la paume de la main, forme un tunnel inextensible délimité en arrière par l’os du carpe, et en avant par un ligament épais, dit « annulaire antérieur » (voir infographie). À l’intérieur passent les neuf tendons des muscles fléchisseurs des doigts et le nerf médian, qui descend de l’avant-bras vers la main. Ce nerf assure la sensibilité des pulpes du pouce, de l’index et du majeur et l’innervation motrice de certains muscles du pouce.

• Le syndrome du canal carpien désigne l’ensemble des troubles liés à la compression du nerf médian dans le canal carpien à la hdiv du poignet. Il fait partie des troubles musculo-squelettiques ou TMS (lire Porphyre n° 508).

À savoir : cette affection est liée à un problème d’inadaptation du contenu au contenant. Dans la majorité des cas, il existe une prédisposition anatomique correspondant à ce canal étroit(1).

Quelles en sont les causes ?

• Le syndrome est idiopathique dans la majorité des cas, c’est-à-dire que sa survenue n’est reliée à aucune cause. Il peut être secondaire à une affection ou favorisé par certains facteurs.

• Certaines activités, professionnelles ou de loisirs, sont associées à un risque accru de sa survenue en raison de microtraumatismes ou mouvements répétitifs (voir encadré ci-contre). L’environnement froid et les vibrations, celles du marteau-piqueur par exemple, sont des facteurs aggravants.

• Certaines affections et états semblent exposer à sa survenue : prévalence de 30 % chez les diabétiques atteints de neuropathie, hypothyroïdie, grossesse, ménopause, obésité, polyarthrite, goutte, anomalies du canal carpien…

Quels en sont les symptômes ?

Les signes cliniques sont en général d’installation progressive, parfois bilatérale. Typiquement :

• des paresthésies, à type de fourmillements ou d’engourdissement, prédominantes sur la face palmaire des trois premiers doigts. Ils surviennent initialement la nuit et sont cause de réveil, voire d’insomnie, ou apparaissent le matin au réveil et disparaissent en secouant la main. Elles peuvent se manifester dans la journée lors de mouvements répétés ou prolongés ;

• des douleurs de même localisation et/ou ascendantes au niveau du coude et du bras ;

• une sensation de faiblesse dans le poignet et la main ;

• une diminution de la sensibilité ou hypo-esthésie de la pulpe des doigts.

Quelle en est l’évolution ?

L’évolution naturelle est variable sans aucun facteur prédictif connu.

• Dans un tiers des cas environ, les symptômes disparaissent spontanément.

• Dans deux tiers des cas, ils persistent ou s’aggravent avec un risque de chronicité, de formes hyperalgiques et de déficiences motrices ou sensitives : sensibilité diminuée, amyotrophie des muscles thénariens (du pouce) externes, perte partielle des capacités motrices ou parésie, puis paralysie de l’opposition du pouce : mouvement qui permet de former une pince en amenant la pulpe du pouce contre celle des autres doigts.

Aucun critère ne permet de définir la fréquence, le délai d’apparition ou la gravité des séquelles en l’absence de traitement. Mieux vaut une prise en charge précoce.

Comment le diagnostiquer ?

• Les signes cliniques évocateurs, appuyés par des tests de provocation, suffisent souvent pour poser le diagnostic. Le médecin fait prendre des postures qui déclenchent les symptômes ou la limitation des mouvements. À savoir : à ce stade, si une origine professionnelle est suspectée, une demande de reconnaissance de maladie professionnelle peut être adressée à la caisse d’assurance maladie, qui conduira une expertise.

• Des examens complémentaires peuvent être nécessaires pour affiner le diagnostic : une radiographie des mains et du poignet pour dépister un rétrécissement d’origine osseuse après un traumatisme ; un électroneuromyogramme (ENMG), en mesurant l’influx électrique transmis par le nerf radian via des électrodes placées sur son trajet, permet d’évaluer la gravité ; une échographie du poignet pour visualiser un kyste, un lipome ou une inflammation des tendons.

Quelle est la prise en charge ?

Le traitement dépend de la sévérité de la compression et des éventuelles maladies causales.

Corriger les facteurs favorisants

Éviter les sollicitations mécaniques en aménageant le poste de travail ou les activités favorisant la douleur.

Traitements conservateurs

• Deux méthodes sont utilisées en première intention et en priorité :

→ l’immobilisation par orthèse du poignet, la nuit, pour soulager les symptômes en maintenant le poignet en rectitude, dans une position antalgique. Son efficacité est jugée après trois mois ;

→ l’infiltration intracanalaire de corticoïdes (Altim) si les symptômes persistent malgré l’attelle. La cortisone « dégonfle » le contenu du canal carpien et limite ainsi la diminution de l’influx nerveux au niveau du nerf médian. Deux ou trois infiltrations par canal carpien doivent soulager, sinon, c’est un échec.

• Indications : en première intention en l’absence de signes de gravité clinique (troubles de la sensibilité, faiblesse des muscles du pouce) ; en solution d’attente lorsqu’une résolution spontanée est attendue, après une grossesse par exemple, ou avant une intervention chirurgicale.

• Efficacité : en général temporaire, quelques mois. La récidive à moyen ou long terme serait de 75 à 90 % des cas.

• Autres méthodes : corticothérapie orale, kinésithérapie, ultrasons…

Traitement chirurgical

• Principe : il consiste à réduire la pression intracanalaire afin de libérer le nerf médian. Le plus souvent, en ouvrant l’épais ligament annulaire qui ferme le canal carpien (voir infographie).

Modes opératoires : l’intervention est réalisée en ambulatoire sous anesthésie loco-régionale, soit en incisant la paume sur quelques centimètres, soit par voie endoscopique, via une incision au niveau du poignet, et intervention guidée par une caméra. Le patient rentre chez lui après l’intervention. Parfois, des gestes complémentaires sont réalisés : libération du nerf en un point précis (neurolyse), résection d’une membrane synoviale épaissie (synovectomie), incision d’une gaine nerveuse (épineurotomie).

• Indications : dans les cas modérés à sévères lorsque les mesures conservatrices ont été inefficaces, ou d’emblée en cas de lésions sévères du nerf médian, de déficits moteurs et/ou sensitifs ou de refus de traitement conservateur.

• Suites opératoires : régression des troubles sensitifs et neurologiques intermittents et des troubles sensitifs permanents en quelques semaines. Un arrêt de travail de 7 à 56 jours peut être nécessaire selon le poste professionnel. La récupération peut être longue, partielle, voire absente, selon l’âge, le degré et l’ancienneté de la compression et la persistance de facteurs de risque (travail manuel lourd, diabète…).

Une maladie professionnelle

→ Le syndrome du canal carpien figure au tableau des maladies professionnelles.

Il peut être reconnu et indemnisé dans ce cadre. Ou entraîner un aménagement du poste et/ou des horaires de travail.

→ En cause : mouvements répétés ou prolongés d’extension du poignet ou de préhension de la main ; appui carpien ou pression prolongée ou répétée sur le talon de la main.

Un trouble fréquent(1)

→ En France, chaque année : 200 000 nouveaux cas (3 femmes pour 1 homme) et 130 000 opérations chirurgicales.

→ Atteinte bilatérale : dans un tiers des cas.

→ Âge moyen : 50 ans.

(1) Syndrome du canal carpien, optimiser la pertinence du parcours patient, Haute autorité de santé, février 2013.

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