“Je voudrais un lubrifiant intime” - Porphyre n° 516 du 03/10/2015 - Revues
 
Porphyre n° 516 du 03/10/2015
 

EXERCER

Au comptoir

Auteur(s) : Nathalie Belin

1 Je questionne

Précisez la demande

« Recherchez-vous plutôt un “produit plaisir” ou un lubrifiant “soin” ? » oriente le choix, masculin ou féminin.

Déterminez le problème

À une femme désirant un « soin », « Êtes-vous ménopausée ? » ou « N’avez-vous pas eu un bébé récemment ? » selon l’âge ciblent le problème. À l’écart des autres clients, « Est-ce pour améliorer les rapports sexuels parce que source d’inconfort ? » Compléter avec « Êtes-vous stressée, fatiguée ? » et « Quelles sont vos habitudes en matière d’hygiène intime ? »

Recherchez le condiv médical

« Avez-vous eu récemment une infection vaginale, une mycose ? », « Prenez-vous des traitements contre l’acné, une dépression, un cancer ? » oriente ou non vers une consultation médicale pour une femme.

2 J’évalue

On recourt à un lubrifiant intime par « jeu », pour faciliter une pénétration sexuelle et/ou pallier une insuffisance de lubrification vaginale, passagère ou définitive. Ce défaut de lubrification rend les rapports sexuels inconfortables, voire indésirables et redoutés. Et risque d’entraîner une diminution du désir, qui à son tour aggrave la sécheresse vaginale. Les lubrifiants atténuent également l’irritation vulvaire, vaginale et anale. Ils peuvent être utilisés quasiment sans restrictions, mais ne remplacent pas une consultation en cas de douleurs vulvo-vaginales persistantes, de brûlures, de pertes vaginales importantes, de suspicion d’infection locale et d’un condiv de ménopause car, dans ce cas, des œstrogènes locaux pourraient être plus indiqués.

3 Je passe en revue

Produits cosmétiques ou dispositifs médicaux, les lubrifiants intimes se différencient par leur composition et leur galénique. La forme gel, plus usitée que l’ovule, sera plus ou moins rémanente selon le type d’actifs et/ou de procédé galénique.

Selon la composition

Les lubrifiants sont en général à base :

• d’eau et de substances hydrophiles, telles que :

→ le glycérol (glycérine) : très hygroscopique, humectant, le glycérol, inodore et incolore, est la composition de base de la majorité des gels lubrifiants ;

→ l’acide hyaluronique : cet agent filmogène hydrophile capte l’eau et ses propriétés cicatrisantes sont intéressantes en cas de brûlures, picotements ou d’irritations vulvaires. Ses propriétés hydratantes sont liées à une masse moléculaire élevée ;

→ des carbomères : ils forment un film hydrophile ;

→ des dérivés de la cellulose hygroscopiques (dans Sensilube) ;

→ du polycarbophile capable de retenir soixante fois son poids en eau et de se fixer sur les parois vaginales ;

• de silicones : réputé plus glissant, son pouvoir lubrifiant est plus élevé et plus prolongé que ceux à base d’eau. Il est avant tout un lubrifiant « plaisir » compatible avec tous les préservatifs, mais sans sensation de fraîcheur. Précautions : non compatible avec les sex-toys en silicone, qu’il peut endommager. À savoir : comme tous les corps gras, la vaseline fragilise les préservatifs en latex.

• d’aloès (aloe vera = barbadensis) aux propriétés émolliente et humectante, anti-irritante et anti-inflammatoire ;

• d’autres actifs en plus : extraits de bardane, camélia ou guimauve, apaisants ; salicaire, hélichryse, melaleuca, faiblement antiseptiques ; calendula, anti-inflammatoire ; Centella asiatica, cicatrisante et anti-inflammatoire. L’acide nicotinique ou vitamine PP, vasodilatatrice, favorise la lubrification naturelle. L’acide lactique et le lactate de sodium agiraient sur le pH… À savoir : certains associent différentes substances hydrophiles, glycérine et acide hyaluronique, d’autres mélangent silicone et eau + glycérol (No Limit de Smile, Terpan).

Selon l’usage

La revue Prescrire(1) distingue les gels à base d’eau « hydratants », parce qu’utilisables plusieurs fois par semaine pour soulager la sécheresse, et les autres, dits gels lubrifiants, car employés uniquement lors de rapports sexuels.

• Lubrifiants « classiques »

En général à base d’eau et de glycérine, parfumés, à « effet chauffant » grâce au glycol ou « frisson » (Durex, Manix…), ils s’évaporent vite et peuvent nécessiter de réitérer les applications. Précautions : ceux aromatisés, à base de plantes, à effet « chaud » sont à risque de sensibilisation. Au moindre signe d’intolérance, les arrêter.

• Lubrifiants hydratants

→ Action ponctuelle : ceux à base d’acide hyaluronique (Hydralin Lubrifiant, Monasens, Oxens), d’aloès (Bartoline, Monolub…), ou des deux (Cicatridine ovules, Saforelle Lubrifiant…), s’appliquent en journée si besoin pour soulager l’inconfort et quelques heures avant le rapport.

→ Action prolongée : ceux à base d’acide hyaluronique très concentré ou dans une galénique adaptée (Hyalofemme, Mucogyne avec applicateur, PremenoDuo ovules), de polymère (Replens unidoses avec applicateur) ou de polysaccharide (Ménophytéa Hydratation intime crème) ont une action hydratante et lubrifiante prolongée. Le plus souvent présentés avec applicateur ou en ovules, ils libèrent leurs actifs en intravaginal tous les deux ou trois jours. Attention : PremenoDuo et Ménophytéa sont incompatibles avec le latex.

4 Je choisis

Selon le condiv

• Pour accompagner la lubrification au début du rapport sexuel : un « classique ».

• En cas de sécheresse légère et/ou irritation temporaire : hydratant ponctuel.

• En cas de sécheresse dans un condiv médical (ménopause, post-partum, cancer…) : hydratant d’action prolongée.

• Pour une application discrète quelques heures avant le rapport : hydratant ponctuel ou à action prolongée.

• Après une mycose ou infection : avec acide lactique (PremenoDuo…) ou aux actifs apaisants (Cicatridine, Saugella…).

Selon la présentation

Le tube est plus économique. Le flacon-pompe et les monodoses sont plus hygiénique et ces dernières aussi plus pratiques.

5 J’explique

Dans un premier temps, un gel lubrifiant peut permettre de retrouver des rapports sexuels « confortables ». Et soulager l’inconfort en dehors des rapports. En cas de douleur ou de gêne persistante, il est nécessaire de consulter.

Dans beaucoup de cas, une excitation sexuelle satisfaisante peut pallier une sécheresse vaginale due à une muqueuse affaiblie à cause d’une carence en estrogène ou de traitements… Autrement dit, faire durer les préliminaires car, même à la ménopause, la lubrification vulvaire reste en état de marche.

6 Je conseille

Les applications

• Quand ? Recourir à un lubrifiant dès les premiers signes d’inconfort pour ne pas fragiliser davantage la muqueuse. En user aussi souvent et longtemps que nécessaire, mais au long cours préférer des formules sans parabens, suspectés être des perturbateurs endocriniens. Les produits à action prolongée nécessitent en moyenne trois applications par semaine.

• Comment ? Appliquer la forme gel sur les muqueuses externes, l’entrée du vagin, la verge, l’anus et le préservatif si compatible… Les applicateurs peuvent blesser une muqueuse fragilisée ; y apposer un peu de gel lubrifiant avant insertion.

Des compléments alimentaires

En cas de sécheresse chronique, un complément alimentaire riche en acides gras essentiels (huiles de poisson, de bourrache…) peut améliorer la souplesse des muqueuses : Ménophytéa Hydratation intime, Donalis, Luboral

Des règles d’hygiène

• Une toilette intime externe quotidienne, voire deux, mais la deuxième à l’eau claire. En cas d’irritation, opter pour un lavant doux, peu parfumé. Proscrire douches vaginales et antiseptiques sans avis médical.

• Éviter les irritants : produits parfumés, pantalons serrés. Déconseiller les protège-slip systématiques en dehors des règles car ils sont absorbants mais aussi desséchants, ou de tampons lors des règles.

Avec l’aimable participation du Dr Béatrice Guigues, gynécologue-obstétricienne à Caen, vice-présidente du Collège national des obstétriciens gynécologues français.

(1) N° 383, septembre 2015, Traitements locaux de la sécheresse vaginale liée à la ménopause.

Le condiv

La lubrification vulvo-vaginale dépend notamment des estrogènes, qui favorisent la trophicité des muqueuses, et de facteurs psychologiques. Elle est assurée par :

→ la lubrification vulvaire : les glandes vestibulaires urétrales (de Bartholin et de Skene) sécrètent une sorte de mucus qui lubrifie la vulve et facilite la pénétration ;

→ la lubrification vaginale : elle n’est pas assurée par une glande mais par un transsudat. Lors de l’excitation sexuelle notamment, les vaisseaux sanguins de la paroi vaginale se dilatent, permettant la production d’un liquide qui traverse la paroi et lubrifie le vagin.

Les causes d’une insuffisance de lubrification : variations hormonales (ménopause, allaitement, post-partum) ; déséquilibre de la flore locale suite à une infection vaginale ; hygiène intime inadaptée ; médicaments (isotrétinoïne, anticancéreux, neuroleptiques, tricycliques…) ; pathologies (dépression, syndrome de Gougerot-Sjögren) ; trouble psychologique ; abstinence sexuelle prolongée…

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