Allô, doc’ ? C’est la pharmacie… - Porphyre n° 502 du 30/04/2014 - Revues
 
Porphyre n° 502 du 30/04/2014
 

Les mots pour

Auteur(s) : Caroline Bouhala

Téléphoner au prescripteur. Aïe, un problème sur l’ordonnance, il faut appeler le médecin. Voici quelques astuces pour communiquer à bon escient et sans paniquer.

Puis-je appeler ?

Dans les divs

Aucun div législatif ne réglemente l’appel aux prescripteurs. Le préparateur étant habilité à seconder le pharmacien, rien ne s’oppose à ce qu’il gère l’appel, sous son contrôle. Dans certaines officines, seuls les pharmaciens appellent les prescripteurs, au titulaire d’en décider. Certains ont une procédure, pourquoi pas vous ?

Selon le condiv

Si vous n’êtes pas à l’aise avec le problème rencontré, pathologie ou traitement complexe, mieux vaut déléguer l’appel au pharmacien, mais suivez son intervention avec attention pour les fois suivantes.

Y a une coquille !

Ordonnance illisible, contre-indication, interaction, dosage oublié, erreur de posologie, problème de réglementation… de nombreuses situations justifient un appel au médecin, mais le faire trop souvent risque de le déranger et, à terme, de créer des tensions. La première étape est d’évaluer si l’appel relève d’une urgence ou s’il peut être reporté, voire évité.

Enquêtez de votre côté

Avant de vous précipiter sur le combiné, pensez aux autres ressources.

→ Le patient : il est une mine d’informations. Il saura dans la majorité des cas répondre à votre question.

→ L’informatique : consulter l’historique du patient, le cas échéant son dossier pharmaceutique et les messages laissés lors des précédentes délivrances.

→ Les collègues : confrontés à une situation identique ou plus au courant du suivi de ce patient, ils peuvent avoir la solution.

Évaluez l’urgence

Si votre problème persiste, l’appel s’impose, mais pas forcément tout de suite.

→ Le type de problème. Contre-indication, interaction et posologie inadaptée justifient typiquement l’appel en urgence.

→ La pathologie. Il est plus important de régler un souci portant sur une pathologie aiguë ou cardiaque que sur le traitement au long cours d’une arthrose…

→  Le stock du patient. Si le médecin a oublié de marquer un médicament habituel, vérifiez le stock du patient et proposez de régulariser plus tard avec le médecin.

→ La situation n’est pas urgente. Exemple, un problème réglementaire (ex. : dispositif médical non prescrit sur ordonnance à part…). Décalez l’appel à un moment plus calme, comme par exemple à 14 heures, heure de creux à l’officine et de reprise des consultations médicales. Astuce : proposez aux « jeunes » médecins de les joindre par e-mail ou SMS pour un dérangement minimum.

Toujours prêt

Pour gagner en efficacité et traçabilité, l’idéal est de mettre des outils en place.

→ Une fiche contact : près du téléphone, elle réunit les coordonnées des prescripteurs habituels (téléphones fixe et portable, e-mail et horaires d’ouverture).

→ Un cahier téléphonique : bien que sans valeur « légale », cet outil qualité plus que conseillé consigne les appels avec nom de l’officinal, date, noms du médecin et du patient, motif et résultat de l’appel.

Je me lance

Informez le patient

→ Ne foncez pas à l’arrière pour téléphoner sans lui avoir expliqué la situation au préalable. Il pourrait penser que vous l’avez oublié et s’impatienter.

→ Impliquez-le : « Cette prescription est sans doute justifiée mais j’ai besoin d’une confirmation ». À éviter : « C’est une contre-indication absolue », « Le médecin s’est trompé », « Ces médicaments ne vont pas ensemble »… Ces phrases mettent en cause le médecin et risquent d’apeurer le patient, qui pourrait cesser son traitement.

Préparez-vous

Le médecin appréciera votre aide pour resituer le patient et, éventuellement, trouver une solution.

→ Notez les infos : interrogez le patient et son dossier informatique ; relevez et notez sur une feuille nom, prénom, âge poids, motif de consultation, traitements en cours, pathologies et allergies.

→ Cherchez une alternative : si besoin, avec le pharmacien, réfléchissez à une alternative car l’expertise officinale est attendue du médecin ! Vérifiez que la solution de substitution est disponible chez le grossiste pour éviter un second appel…

Dialoguez « efficace »

→ Présentez la situation : dans l’ordre, précisez vos nom et fonction, les noms de l’officine et du patient, le motif et la date de sa consultation et le motif de l’appel : « Bonjour Dr X, je suis Y, préparateur à la pharmacie Z. Je me permets de vous déranger à propos de l’ordonnance de Madame Z, de passage dans notre région et que vous avez vue ce matin pour une angine. Vous lui prescrivez de l’amoxicilline, mais je vois sur son dossier une forte suspicion d’allergie aux bêta-lactamines depuis l’enfance. »

→ Mettez-y les formes : en plus d’être dérangé, le médecin « craint » l’appel de l’officine car, comme tout bon professionnel de santé, il redoute d’avoir fait une erreur. Évitez « Vous vous êtes trompé », qui risque de le vexer et de le rendre moins réceptif. Sans compter qu’il peut détenir de nouvelles informations que vous ignorez… Restez neutre et concis : « Vous lui avez prescrit du X, mais c’est incompatible avec son autre traitement Y prescrit par Z », et enchaînez directement par votre proposition : « Je voulais voir avec vous si on pouvait le remplacer par W, qui est le traitement de deuxième intention recommandé dans ce cas précis ».

Je fais quoi si le médecin est…

→ Absent : je diffère l’appel. En cas d’urgence seulement, le pharmacien décidera de rectifier ou non l’ordonnance.

→ Grincheux : il vous accueille d’un grognement : « Encore la pharmacie… » Ne le prenez pas pour vous. Ne vous démontez pas et montrez de l’empathie : « Je sais que vous êtes très occupé ». Il devrait s’adoucir…

→ Hospitalier : il n’y a pas un numéro par médecin mais par service. Aidez-vous de la spécialité du prescripteur pour le trouver. S’il est absent ou si son nom est illisible (souvent le cas avec les internes n’ayant pas de tampon), expliquez la situation : déclinez les coordonnées du patient, sa date de consultation et demandez à ce qu’un médecin qui prendra connaissance du dossier vous réponde ou, si urgence, vous rappelle au plus vite.

Après l’appel

Annotez l’ordonnance

En cas de désaccord du prescripteur, informez un pharmacien, qui tranchera entre maintenir ou refuser la prescription. Quelle que soit la décision, il faudra mentionner sur l’ordonnance toute modification ou refus de délivrance avec la date et la signature du pharmacien. Communiquez ensuite la décision au médecin par téléphone, e-mail, courrier ou fax.

Informez le patient

Expliquez avec des mots simples la décision et les arguments qui l’ont motivée. En cas de refus de délivrer : « Le médecin maintient sa prescription mais, selon le pharmacien, le bénéfice attendu ne justifie pas le risque de cette association/dose… Il choisit donc de refuser la délivrance. »

Nourrissez son dossier

Notifiez les informations dans la fiche patient et dans le DP s’il existe. Cela permet de garder une trace, mais également d’éviter des appels superflus au médecin par vos collègues.

Jouez la qualité

Outre le cahier téléphonique, dans une démarche qualité idéale, le pharmacien peut choisir d’établir et d’archiver une opinion pharmaceutique à destination du médecin, reprenant la motivation de l’appel, les décisions prises et une copie de l’ordonnance. Malgré les recommandations de l’Ordre, elle demeure peu pratiquée. Une solution alternative ou complémentaire est l’avis pharmaceutique, de même teneur mais à destination de la pharmacie.

L’avis de…

Dr Guillaume Gallier, interne en médecine générale, remplaçant dans l’Aude (11)

Quels rapports téléphoniques entretenez-vous avec la pharmacie ?

Je suis contacté en moyenne deux à trois fois par semaine. Les appels interrompent ma consultation, ce qui n’est pas toujours simple, mais la plupart du temps, ils s’inscrivent dans une démarche bienveillante et justifiée, donc j’essaie de me rendre disponible au maximum. En revanche, les questions de changement de galénique me paraissent superflues.

Comment optimiser l’appel ?

Un appel réussi est avant tout une question de fond, mais y mettre la forme est très appréciable. Il doit être simple, concis et aller à l’essentiel : nom du patient, jour de la consultation, rappel sommaire de sa pathologie, de ses traitements et le souci rencontré. J’apprécie que l’on me propose des alternatives thérapeutiques, mais j’attends qu’elles soient argumentées. C’est pourquoi, dans certains cas complexes, je préfère parler à un pharmacien.

Comment préférez-vous être contacté ?

Pour les messages urgents, je préfère le téléphone, plus direct. Dans les autres cas, les e-mails pourraient être une bonne solution. En revanche, le SMS reste pour moi de l’ordre du privé.

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