Tous unis pour réformer - Porphyre n° 501 du 29/03/2014 - Revues
 
Porphyre n° 501 du 29/03/2014
 

Actus

Auteur(s) : Christine Julien

Malgré l’absence du préparateur dans la réforme licence-master-doctorat, les représentants de la profession officinale et hospitalière aiguisent leurs arguments en vue de reprendre les travaux de rénovation des diplômes des préparateurs. Une réunion avec le ministère de la Santé est imminente. Avant fin mars, selon nos sources.

Une omission ou l’art de gagner du temps ? Le rapport sur le processus d’intégration des paramédicaux à la réforme LMD(1) était attendu comme le loup blanc au printemps 2013. Il devait donner le coup d’envoi de la reprise des travaux sur la formation des préparateurs, avait dit le ministère de la Santé (voir encadré p. 6). Le rapport vient de sortir avec près d’un an de retard, mais rien n’est dit ou presque sur les préparateurs officinaux et hospitaliers. Normal, ils n’étaient pas mentionnés dans la lettre de mission des inspecteurs… Peu importe, les représentants de la branche officine et les préparateurs hospitaliers repartent au combat. Ils ont rendez-vous avec la Direction générale de l’offre de soins (DGOS), en charge des diplômes au sein du ministère. Prévue d’après nos sources fin mars, cette réunion doit inciter à clarifier la position du ministère. Et à fixer un cap…

Chacun son livre

« Nous avons toujours été hors champ de ce rapport, constate Olivier Clarhaut, secrétaire de FO, qui ironise : nous ne sommes pas dans le bon livre du code de la santé publique. » Ce que pose clairement la mission de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) et de l’Inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche (IGA/ENR) dans son rapport : « Il est à noter que la profession de préparateur en pharmacie, figurant au titre IV du livre II du code de la santé publique, n’entre pas dans le champ des professions paramédicales. » Ainsi, la réponse du ministère de la Santé début 2013 disant qu’il fallait attendre le rapport « était une réponse politique », pour Philippe Denry, de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). Interrogée par Porphyre, l’Igas justifie l’absence des préparateurs en disant que « le ministère n’a jamais abordé la réingénierie de leur formation, ce qui a interrogé la mission. Aussi, celle-ci a-t-elle reçu les représentants de la FSPF pour les écouter et leur expliquer ce qu’il en était. Mais elle n’est pas allée plus loin compte tenu de son mandat ». En apprenant que la refonte du diplôme de préparateur devait attendre, l’Association nationale des préparateurs en pharmacie hospitalière (ANPPH) a aussi cherché à se faire entendre. « Nous leur avons envoyé nos documents de travail », relate Marie-Hélène Grongnet, présidente de l’ANPPH. Cela a porté ses fruits puisque les rapporteurs stipulent dans le document que la profession de préparateur « devrait être concernée par la réingénierie des formations ». Ce que demandent depuis plus de cinq ans la branche officine et les représentants des préparateurs hospitaliers.

La réingénierie signifie la réorganisation au sens large d’une formation afin de la rendre plus efficiente : matières, modalités de recrutement, des enseignements, etc. La CPNE-FP, c’est-à-dire la branche officine en charge de cette question, travaille depuis plus de cinq ans à la réforme du BP. Les syndicats de titulaires et de salariés(2) œuvrent main dans la main pour élaborer le remplaçant du BP. Christelle Degrelle, préparatrice de la CFE-CGC, suggère « d’élever le niveau de formation actuellement insuffisant pour assurer la sécurité au comptoir ». Pour Marie-Hélène Grongnet, de l’ANPPH, « dispenser devient de plus en plus difficile. On a encore beaucoup de travail à faire pour sécuriser la délivrance. À l’officine comme à l’hôpital, le préparateur doit être capable de faire son travail correctement ».

Trois ans sinon rien

Ainsi, préparateurs de ville et d’établissement de soins poursuivent des objectifs communs, surtout depuis les réunions de travail qui les ont rapprochés en 2013. « Le ministère de la Santé nous a demandé de travailler avec les officinaux. Nous avons répondu à sa demande », explique la présidente de l’ANPPH. La CPNE-FP et l’ANPPH ont élaboré une trame sur les activités communes et spécifiques de leurs deux professions. « Nous avons listé des activités avec les hospitaliers, mais il ne s’agit pas d’un référentiel, juste d’un document de travail. Ce n’est pas la peine d’aller plus loin aujourd’hui », constate lucidement Daniel Burlet, de l’Union des syndicats des pharmaciens d’officine (USPO). Tous restent très circonspects sur les desirata des ministères. De nombreux bruits et interviews dans Porphyre laissaient penser que le remplaçant du BP serait un BTS en deux ans et non un diplôme de technicien supérieur en trois ans. Côté hospitaliers, le ministère de la Santé ne souhaitait pas toucher à un diplôme qui, à son avis, avait déjà été réingénieré en 2006.

CPNE-FP et ANPPH optent pour un diplôme en trois ans. L’ANPPH souhaite intégrer la réforme LMD et un grade licence ; la branche officine veut une formation de trois ans, dont deux de tronc commun, et un an de spécialisation, officine et hôpital. « Le rêve serait un diplôme d’état », s’enthousiasme Christelle Degrelle, comme pour les infirmiers. Olivier Clarhaut milite « pour une formation en trois ans, dont une dernière année de spécialisation, une formation “3 dont 1” et non “2+1” ». Les diplômes en trois ans sont rares. Il y a bien une licence, voire une licence pro, mais dans ce cas, il faudrait faire deux ans en BTS, puis une année supplémentaire. Or, « le BTS est un diplôme pour entrer dans la vie active, souligne Daniel Burlet. Si vous ne pouvez délivrer le médicament, personne ne vous embauchera, et si vous pouvez déjà délivrer avec un BTS, qui poursuivra en licence ? ». Et une licence tout court comme l’avait proposée l’Académie de pharmacie en 2009 pour les « auxiliaires des pharmaciens » ? Une licence, personne n’est contre, mais officinaux et hospitaliers réclament un enseignement pratico-pratique et des garde-fous. Philippe Denry, de la FSPF, insiste sur « l’alternance salariée, la préservation des centres, et que la profession ait son mot à dire sur les enseignements avec une vraie réforme également de l’examen » pour éviter de réussir grâce aux préparations et au bachotage seuls… Cette nouvelle formation serait le lit pour de nouvelles responsabilités pour les préparateurs.

À l’heure ou nous bouclons, le plan de bataille est cette réunion avec le ministère de la Santé. « Maintenant, comment faire pour continuer et aboutir, pose Daniel Burlet. Nous sommes la profession qui a le plus avancé sur le diplôme qu’elle désire. Fusionnons nos travaux avec ceux des hospitaliers et mettons-les en musique ». À la condition que, pour une fois, le ministère ne fasse pas la sourde oreille.

(1) Rapport Igas/IGA ENR, Les formations paramédicales : bilan et poursuite du processus d’intégration dans le dispositif LMD, juillet 2013, publié en février 2014.

(2) Titulaires : FSPF, USPO et UNPF ; salariés : FO, CFE-CGC, CGT, CFDT et CFTC.

(3) Réponse publiée dans le Journal officiel du Sénat du 3 mars 2013, page 18.

La réforme LMD

Une réforme est en cours afin d’harmoniser les diplômes de l’enseignement supérieur et de les aligner sur les normes européennes LMD (licence-master-doctorat) suite aux accords de Bologne de 1999.

→ Décembre 2006 : les ministres de la Santé et de l’Enseignement supérieur inscrivent les formations paramédicales(a) dans le schéma LMD.

→ Novembre 2008 : début des travaux de réingénierie.

→ Fin 2012 : les ministres chargent l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) et l’Inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche (IGA/ENR) de faire un bilan.

→ Février 2014 : le rapport Les formations paramédicales : bilan et poursuite du processus d’intégration dans le dispositif LMD est publié.

(a) Audioprothésiste, cadre de santé, diététicien, ergothérapeute, infirmier, manipulateur d’électroradiologie médicale, masseur-kinésithérapeute, opticien lunetier, orthophoniste, orthoptiste, pédicure podologue, psychomotricien, technicien de laboratoire, nouveaux métiers de l’appareillage médical.

C’était prévu…

Depuis trois ans, les syndicats saisissent députés ou sénateurs afin de dissuader le ministère de la Santé de choisir un BTS (bac + 2) pour remplacer le BP. À la requête des sénateurs de reconsidérer la question et de mettre en place un diplôme en trois ans, le ministère a répondu en 2013(3) : « La démarche de réingénierie des diplômes est une priorité majeure pour le gouvernement. Compte tenu des nombreuses questions qu’elle vient poser en termes de contenu comme de gouvernance, la ministre des Affaires sociales et de la Santé et la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche ont décidé de diligenter une mission conjointe Igas/IGA ENR chargée d’interroger le processus engagé et de faire toute proposition visant à en faciliter la poursuite. Ses conclusions, attendues pour le printemps 2013, permettront de réengager les travaux de rénovation du brevet professionnel de préparateur en pharmacie sur une base consensuelle. »

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