Le cancer de la prostate - Porphyre n° 500 du 04/03/2014 - Revues
 
Porphyre n° 500 du 04/03/2014
 

La patho

Auteur(s) : Nathalie Belin

Le cancer de la prostate est une tumeur maligne qui se développe initialement au sein de la prostate, majoritairement à partir des cellules qui constituent le revêtement de la glande prostatique, d’où le terme d’adénocarcinome. Le plus souvent, son évolution est très lente. Ainsi, certaines tumeurs demeurent à un stade latent ou progressent en restant confinées à la prostate. D’autres, plus agressives, peuvent se développer et envahir des organes voisins (vessie, rectum…) ou plus éloignés, notamment les os. C’est le cancer masculin le plus fréquent en France et dans les pays occidentaux.

La maladie

PHYSIOPATHOLOGIE

Rappel de physiologie

→ La prostate participe avec les vésicules séminales à la production du liquide séminal entrant dans la composition du sperme. Les spermatozoïdes sont fabriqués par les testicules. La prostate n’est pas indispensable à l’érection, mais les nerfs érecteurs passant à sa surface le sont. Située sous la vessie et en avant du rectum, elle est traversée par l’urètre et est entourée d’une capsule qui l’isole des tissus avoisinants.

→ La prostate est sous la dépendance des hormones sexuelles mâles, les androgènes. Ces derniers sont sécrétés par les testicules, sous forme de testostérone, et en plus faible quantité par les glandes surrénales, sous forme de déhydroépiandrostérone (DHEA).

Développement tumoral

→ Le cancer de la prostate est une tumeur maligne qui se développe initialement au sein de la glande prostatique.

→ Le plus souvent, la tumeur se constitue au niveau de la zone périphérique de la prostate (voir schéma ci-dessous), facilement palpable au toucher rectal mais éloignée de l’urètre, ce qui explique que la tumeur doive atteindre un certain volume pour comprimer l’urètre et devenir symptomatique.

→ Les cellules prolifèrent anormalement, envahissent progressivement la glande, puis la capsule, gagnent l’urètre, les vésicules séminales et la vessie. Parallèlement, des cellules cancéreuses peuvent se détacher de cette tumeur primitive et migrer vers d’autres organes par voie lymphatique ou sanguine, où elles constituent de nouvelles tumeurs dans d’autres parties du corps appelées métastases.

SIGNES CLINIQUES

La présence de symptômes traduit une maladie déjà évoluée, soit localement (signes urinaires), soit à distance (douleurs liées aux métastases).

Signes urinaires

Non spécifiques du cancer, ils peuvent aussi être dus à une hyperplasie bénigne de la prostate (HBP, voir Dico+) parfois associée au cancer : dysurie (difficultés à la miction), pollakiurie (mictions fréquentes et souvent peu abondantes), hématurie, rétention urinaire.

Au stade métastatique

→ Les métastases sont souvent osseuses ; elles se manifestent par des douleurs qui révèlent parfois le cancer, ou des fractures des os longs ou des vertèbres (tassement vertébral), parfois par des signes de compression médullaire (douleur, raideur du rachis, troubles moteurs et sensitifs). Les métastases pulmonaires et hépatiques sont plus rares.

→ Les métastases ganglionnaires peuvent être responsables d’une thrombose veineuse, d’un lymphœdème des membres inférieurs ou d’une urétéro-hydronéphrose (voir Dico+).

→ En phase terminale, l’anémie est fréquente et peut nécessiter des transfusions.

FACTEURS DE RISQUE

L’âge, l’origine afro-antillaise et l’hérédité, notamment des antécédents familiaux chez des parents du premier degré (père, fils), sont des facteurs de risque. L’exposition à certains pesticides, notamment le chlordécone, utilisé dans la culture de la banane, a été incriminée, mais ce lien n’est à ce jour pas démontré.

CLASSIFICATION

Les différents stades

Ce cancer évolue en quatre grandes étapes, ce qui permet sa classification en quatre stades (voir infographie) selon la classification internationale cTNM (« c » pour clinique).

→ Dans la classification TNM, la lettre « N » désigne l’absence (N0) ou la présence (N1) de métastases ganglionnaires régionales ; la lettre « M », l’absence (M0) ou la présence (M1) de métastases à distance.

→ Les stades T1 et T2 correspondent à des cancers localisés, sans extension au-delà de la capsule prostatique. Ils sont généralement asymptomatiques. Le stade T1 se rapporte à un cancer latent. Au stade T2, la tumeur est plus importante, mais le cancer est encore confiné à la prostate.

→ Les stades T3 et T4 correspondent à des cancers avancés localement qui ont envahi la capsule (stade T3) ou un organe voisin (stade T4). Parallèlement, des cellules tumorales peuvent emprunter la circulation lymphatique ou veineuse pour former des métastases.

Les grades histologiques

Outre la classification cTNM, l’examen anatomopathologique de la tumeur lors de la biopsie permet de la classer selon son grade histologique avec le score de Gleason allant de 6 à 10. Plus le score est élevé, plus la tumeur est agressive.

Le risque évolutif

Les formes localisées de ce cancer sont classées en fonction de leur risque évolutif à l’aide de la classification de d’Amico basée sur le score cTNM, le score de Gleason et la valeur du Prostate Specific Antigen ou antigène prostatique spécifique (PSA) total. Cette classification établit trois sous-groupes de cancers localisés de la prostate selon le risque de rechute : les tumeurs à faible risque évolutif, à risque intermédiaire et à haut risque.

DIAGNOSTIC

Au stade asymptomatique, c’est une anomalie du taux de PSA, ou plus rarement un toucher rectal anormal, qui alerte. Le diagnostic est ensuite établi par les biopsies de la prostate.

Le cancer est parfois diagnostiqué fortuitement au cours de l’examen anatomopathologique des tissus prélevés lors du traitement d’une hyperplasie bénigne de la prostate.

Selon le cas, seront réalisés une IRM prostatique et des examens complémentaires en cas de cancer avéré pour évaluer l’envahissement tumoral (IRM, scanner abdomino-pelvien, scintigraphie osseuse).

Le toucher rectal

Il évalue la taille de la prostate, sa consistance et détecte des anomalies : induration, nodule…

Le dosage du PSA sérique

→ Le PSA est une glycoprotéine sécrétée par les cellules prostatiques ; il participe à la liquéfaction du sperme.

→ La valeur seuil de PSA total la plus souvent utilisée pour le diagnostic de cancer de la prostate, est de 4 ng/ml Son élévation n’est pas spécifique du cancer de la prostate, d’où un dosage non recommandé en routine (voir encadré).

→ Le taux de PSA total s’élève au cours d’un cancer et en cas d’anomalie non cancéreuse comme une HBP ou une prostatite, d’où l’importance d’interpréter une hausse en tenant compte des résultats du toucher rectal et, selon le cas, des examens complémentaires (biologiques, imagerie). Par ailleurs, toute élévation du PSA ne conduit pas d’emblée à une biopsie prostatique. On peut également se baser sur la « cinétique » du PSA, notamment sur le temps de doublement, c’est-à-dire le temps que met le taux de PSA pour être multiplié par deux. Le PSA libre, fraction du PSA non fixé aux protéines, n’est jamais demandé en première intention (voir Info+).

Les biopsies prostatiques

Guidées par échographie endorectale, elles sont réalisées sous anesthésie locale. Elles sont indiquées en cas d’augmentation du taux de PSA ou d’anomalie du toucher rectal (induration) indépendamment de la valeur du PSA. L’examen anatomopathologique des prélèvements confirme le diagnostic.

Autres marqueurs

Non utilisés en première intention, ils permettent d’affiner les indications des biopsies prostatiques. Le PCA3 correspond à un gène exprimé uniquement par le cancer de la prostate. Non remboursé actuellement en France, il a un coût très élevé (environ 300 €). Le calcul de l’index phi (Prostate Health Index) prend en compte différents paramètres, dont le PSA. Son coût est d’environ 90 €.

ÉVOLUTION

Généralement découvert lors d’un dépistage individuel, le cancer de la prostate a le plus souvent une évolution très lente. Certaines formes restent latentes durant toute la vie du patient.

Diagnostiqué précocement, il est le plus souvent curable. Au stade localisé, il peut être guéri définitivement par un traitement radical (prostatectomie, radiothérapie). Un cancer avancé en revanche ne peut plus être guéri définitivement. Une rémission plus ou moins longue de la maladie peut cependant être obtenue, en particulier grâce à un traitement hormonal.

SUIVI

En dehors de « l’abstention surveillance » ou de « la surveillance active », qui permet de différer la mise en route d’un traitement (voir interview ci-contre), le protocole de suivi s’adapte au patient. Globalement, il comporte le dosage du PSA total et un examen clinique deux à trois mois après initiation du traitement (chirurgie, radiothérapie, traitement hormonal…), puis à six mois, puis tous les six mois pendant trois ans, et ensuite tous les ans

Une densitométrie osseuse peut être recommandée sous hormonothérapie de longue durée.

Son traitement

OBJECTIF

Dans tous les cas, le traitement vise à prévenir les complications, à améliorer la qualité de vie et à allonger la survie.

Lorsque l’espérance de vie est estimée supérieure à dix ans, l’objectif est :

– au stade localisé, l’éradication du cancer ;

– au stade localement avancé, la prévention de l’extension métastatique ;

– au stade métastatique, le ralentissement de la stimulation hormonale de la tumeur.

Pour le patient à l’espérance de vie estimée inférieure à dix ans, le choix se porte sur une surveillance simple, sur un traitement hormonal ou palliatif.

STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE

Cancer localisé

Le choix du traitement dépend de la classification de d’Amico (voir plus haut).

À risque faible de récidive

Quatre choix sont possibles ; ils se discutent avec le patient et dépendent des contre-indications. Ce sont la surveillance active, la prostatectomie (traitement chirurgical de choix), la radiothérapie (les « rayons ») et la curiethérapie (une « radioactivité locale tueuse »). Le recours aux ultrasons focalisés de haute intensité est possible, mais le recul est plus faible (voir page suivante).

À risque intermédiaire

→ La prostatectomie ou la radiothérapie, associée ou non à une hormonothérapie courte (au maximum six mois), est indiquée.

→ L’hormonothérapie consiste à réaliser une suppression androgénique (castration réversible), c’est-à-dire à supprimer la sécrétion testiculaire d’androgène grâce aux agonistes ou aux antagonistes de la LH-RH ou à inhiber l’action des androgènes en recourant aux anti-androgènes non stéroïdiens ou, moins souvent, stéroïdiens. Le diéthylstilbestrol n’est, pour sa part, quasiment pas utilisé en raison des effets indésirables cardio-vasculaires.

À risque élevé et cancer localement avancé

Un traitement multimodal est instairé : prostatectomie et/ou radiothérapie, en association à une hormonothérapie prolongée (deux à trois ans).

Au stade métastatique

→ Le traitement de référence est l’hormonothérapie prolongée, mais l’efficacité est limitée à environ deux voire trois ans car, avec le temps, la tumeur devient hormonorésistante.

→ Au stade d’hormonorésistance (progression du PSA ou des symptômes), le traitement repose sur une chimiothérapie à l’hôpital (docétaxel en première ligne, cabazitaxel, mitoxantrone) ou une hormonothérapie de deuxième intention avec l’abiratérone (Zytiga). L’enzalutamide (Xtandi) est un nouvel antagoniste aux androgènes, indiqué en cas de cancer métastatique résistant à la castration et progressant pendant ou après un traitement par docétaxel.

→ Le traitement des complications osseuses fait appel aux biphosphonates, qui limitent l’incidence des douleurs, des fractures et de la compression médullaire. La radiothérapie à visée palliative et les antalgiques sont également prescrits.

LA PROSTATECTOMIE

La prostatectomie radicale ou totale correspond à l’exérèse totale de la prostate et des vésicules séminales. Elle inclut si besoin un curage ganglionnaire. Lorsque c’est possible, les bandelettes vasculo-nerveuses, filets nerveux sur les bords latéraux de la prostate impliqués dans l’érection, sont préservées, ce qui facilite la récupération des érections spontanées.

→ Effets indésirables : risque d’accident thromboembolique post-opératoire (prévenu par une compression médicale, le lever précoce, le recours aux héparines de bas poids moléculaire), l’incontinence urinaire et la dysfonction érectile.

LA RADIOTHÉRAPIE

Elle se déroule en séances successives réalisées cinq jours par semaine pendant six à sept semaines.

→ Effets indésirables : cystites et rectites radiques (brûlures urinaires, besoins fréquents d’uriner, douleurs abdominales et rectales, impériosités fécales). À long terme, l’incontinence urinaire est assez rare (moins de 5 % des cas). La dysfonction érectile est moins fréquente, mais survient plus tardivement qu’après la chirurgie.

LA CURIETHÉRAPIE

Elle consiste à implanter dans la prostate des grains radioactifs (iode 125) qui vont détruire les cellules cancéreuses. Elle est réservée aux cancers localisés à faible risque.

→ Effets indésirables : signes urinaires irritatifs (difficultés à uriner, brûlures…), rares rectites. Une dysfonction érectile est possible.

LES ULTRASONS FOCALISÉS DE HAUTE INTENSITÉ

Le traitement par ultrasons focalisés de haute intensité (HIFU, dispositif Ablatherm) induit une fibrose de la prostate par effet thermique d’un faisceau d’ultrasons de haute intensité.

→ Effets indésirables : troubles urinaires, parfois incontinence urinaire, troubles de l’érection.

L’HORMONOTHÉRAPIE

Analogues de la LH-RHi

→ Molécules : buséréline, goséréline, leuproréline, triptoréline (Suprefact et Bigonist ; Zoladex, Enantone et Eligard ; Décapeptyl et Gonapeptyl).

→ Mode d’action : après une phase initiale de stimulation (« flare up »), au cours de laquelle les taux plasmatiques de FSH, LH, et par conséquent de testostérone, augmentent durant deux à trois semaines, les analogues de la LH-RH induisent une phase de désensibilisation avec effondrement des taux de FSH, de LH, et donc de testostérone. Pour contrer la phase de « flare up », un anti-androgène est souvent débuté avant la première injection d’analogue et poursuivi durant un mois.

→ Effets indésirables : réactions au point d’injection, bouffées de chaleur, troubles de la libido et de l’humeur, impuissance, prise de poids, gynécomastie, céphalées, syndrome dépressif. Au long cours, augmentation du risque de fracture osseuse, de décompensation d’un diabète et du risque cardio-vasculaire.

→ Surveillance : de la testostéronémie (< 0,5 ng/ml) et du taux de PSA.

→ Conservation : au réfrigérateur pour Eligard et Gonapeptyl LP 3,75 mg.

Antagoniste de la LH-RH

→ Molécules : dégarélix (Firmagon).

→ Mode d’action : antagonise l’effet de la LH-RH, donc diminue les taux de FSH, LH et donc de la testostérone, sans effet « flare up ». Prescription concomitante d’anti-androgène non nécessaire.

→ Surveillance et effets indésirables : idem analogues de la LH-RH.

Anti-androgènes non stéroïdiens

→ Molécules : bicalutamide, flutamide, nilutamide (Casodex, Eulexine, Anandron).

→ Mode d’action : blocage des récepteurs périphériques aux androgènes, notamment ceux de la prostate. Le taux de testostérone est maintenu, voire augmenté par rétrocontrôle.

→ Surveillance: bilan hépatique avant le début du traitement, puis régulièrement.

→ Effets indésirables : moins de troubles sexuels, moins de diminution de la masse osseuse que les traitements ciblant la LH-RH puisqu’ils ne suppriment pas la sécrétion d’androgènes, mais bouffées de chaleur, gynécomasties et douleurs mammaires fréquentes et invalidantes ; atteintes hépatiques. Sous nilutamide : effet antabuse, pneumopathies interstitielles, troubles visuels. Sous flutamide : photosensibilisation (rare), coloration possible des urines en jaune-vert.

Anti-androgènes stéroïdiens

→ Molécule : acétate de cyprotérone (Androcur).

→ Mode d’action : action anti-androgène périphérique et effet antigonadotrope (action centrale) induisant une diminution de la synthèse de la testostérone par les testicules.

→ Effets indésirables : gynécomasties, somnolence, dépression, prise de poids, baisse de la libido, impuissance, toxicité hépatique, ostéoporose et thromboses veineuses profondes.

Œstrogènes

→ Molécule : diéthylstilbestrol (Distilbène).

→ Mode d’action : action anti-androgène périphérique et effet antigonadotrope.

→ Effets indésirables : augmentation du risque d’accidents thromboemboliques artériels, veineux (prescription concomitante d’acide acétylsalicylique), HTA, hyperlipidémie, ictère, lithiase biliaire, dépression, gynécomastie, atrophie testiculaire et impuissance.

Inhibiteur de la synthèse des androgènes

→ Molécule : abiratérone (Zytiga).

→ Mode d’action : inhibition du cytochrome responsable de l’activité de l’enzyme assurant la synthèse des androgènes. Cette inhibition augmente aussi la synthèse de l’aldostérone, d’où l’adjonction d’un corticoïde – prednisone ou prednisolone – pour diminuer les effets de l’hyperaldostéronisme (hypokaliémie, HTA et rétention hydrique). La castration médicale par analogues de la LH-RH est maintenue durant le traitement.

→ Effets indésirables : œdèmes périphériques, hypokaliémies, HTA et infections du tractus urinaire ; hépatotoxicité et affections cardiaques rapportées. Contraception efficace de la partenaire et rapports protégés sous traitement.

→ Surveillance : tension artérielle, kaliémie, rétention hydrique (prise de poids, œdèmes périphériques) mensuellement, ou davantage en cas de risque d’insuffisance cardiaque. Un dosage des transaminases est réalisé toutes les deux semaines pendant les trois premiers mois de traitement, puis tous les mois.

→ Législation : prescription initiale hospitalière annuelle réservée aux spécialistes en oncologie et cancérologie. Renouvellement non restreint.

Autre anti-androgène

→ Molécule : enzalutamide (Xtandi).

→ Mode d’action : inhibiteur puissant de la voie de signalisation des récepteurs aux androgènes.

→ Effets indésirables : bouffées de chaleur, céphalées, troubles digestifs (nausées, vomissements…), douleurs osseuses et musculaires. Neutropénie, affections psychiatriques (hallucinations, anxiété…), troubles cognitifs, convulsions, sécheresse cutanée et prurit. S’assurer d’une contraception efficace de la partenaire et avoir des rapports protégés jusqu’à trois mois après la fin du traitement.

→ Surveillance : de l’efficacité des traitements associés (tramadol, fentanyl, clarithromycine, lévothyroxine, bêta-bloquants…) car l’enzalutamide est un inducteur enzymatique.

→ Législation : prescription initiale hospitalière annuelle réservée aux spécialistes en oncologie et cancérologie. Renouvellement non restreint. Conseils aux patients

Conseils aux patients

OBSERVANCE

Du traitement

L’hormonothérapie

Elle implique une observance stricte du traitement pour maintenir son efficacité.

→ Un traitement par anti-androgène est le plus souvent débuté quelques jours avant la première injection d’un agoniste de la LH-RH. Le patient doit ensuite poursuivre l’anti-androgène (de quinze jours à un mois, selon prescription) pour limiter la phase de « flare up ».

→ La prise de Zytiga : les comprimés se prennent en une prise au moins deux heures après un repas. Ne pas consommer de nourriture dans l’heure qui suit au risque d’augmenter de façon importante l’absorption du médicament. Le traitement est toujours associé à une corticothérapie.

Gérer les effets indésirables

Après prostatectomie

→ Toute fièvre supérieure à 38,5 °C, toute douleur allant en s’aggravant doit amener à consulter et à réaliser une analyse d’urine (ECBU).

→ Une incontinence urinaire est fréquente après l’intervention. Une rééducation périnéale avec des exercices de contraction du périnée accélère le retour à la continence et limite la survenue d’une incontinence urinaire d’effort au long cours. Encouragez le patient à faire quotidiennement les exercices de kinésithérapie. Il doit apprendre à contracter le périnée avant chaque changement de position puis avant un effort. Et veiller à avoir des mictions régulières (bien boire) et à vider complètement sa vessie à chaque fois.

→ L’altération de la qualité des érections est très fréquente après intervention (voir Impact sexuel).

Lors de la radiothérapie

→ Boire suffisamment et régulièrement pour assurer une bonne diurèse et un « lavage vésical ».

→ Signaler les troubles liés à une cystite radique (brûlures urinaires, dysurie…), car des traitements symptomatiques peuvent être prescrits (antalgiques, AINS, antispasmodiques…). Si les symptômes sont gênants, la radiothérapie peut être suspendue transitoirement.

→ En cas de rectite (diarrhée…), limiter les aliments irritants (gras ou riche en fibres, épices, café…) et privilégier riz, pommes de terre, pâtes, carottes cuites, bananes, compote de coings.

Lors de la curiethérapie

→ L’irradiation émise à distance de la prostate par les grains radioactifs est faible et décroît au fil du temps, mais des précautions s’imposent les premières semaines : ne pas prendre d’enfants sur ses genoux, se tenir à un mètre de distance des femmes enceintes.

→ Il peut être demandé au patient de filtrer ses urines à l’aide d’une passoire et dans un récipient spécial donné, puis remis à l’hôpital.

→ Protéger les rapports sexuels (préservatifs…) les premières semaines ; c’est le radiothérapeute qui décide en général.

Sous hormonothérapie

→ L’hypotestostéronémie. Elle favorise la prise de poids, la fonte musculaire, induit des anomalies métaboliques (HTA, dyslipidémie, diabète…) et accroît aussi le risque d’ostéoporose et de fracture. Encouragez une alimentation équilibrée, une activité physique régulière, l’arrêt du tabac si besoin, un apport suffisant en calcium et vitamine D (sur prescription). Prévenir du risque de chutes : bon chaussage, éclairage suffisant…

→ Les bouffées de chaleur. Elles sont invalidantes. Outre les conseils classiques (vêtements légers, limiter l’alcool et les plats épicés…), les compléments alimentaires destinés aux femmes ménopausées (isoflavone de soja, sauge, actée à grappes noires…) peuvent être essayés.

→ Troubles cognitifs. Difficultés à se concentrer, capacités intellectuelles diminuées, désintérêt, voire syndrome dépressif sont fréquents. L’entourage doit être prévenu de ces effets pour démasquer les premiers signes d’une dépression.

→ Sous abiratérone (Zytiga) : recommandez au patient de surélever les jambes en position assise et de limiter sa consommation en sel pour limiter l’apparition des œdèmes. L’automesure tensionelle peut être préconisée. Une hausse de la tension artérielle, une prise de poids importante ou l’apparition ou l’aggravation d’œdèmes imposent une consultation en urgence.

→ Sous anti-androgènes : des signes cliniques faisant suspecter une hépatite (nausées ou vomissements, douleurs abdominales, ictère ou urines foncées…) nécessitent d’alerter le médecin.

→ Sous biphosphonates : pour les patients avec métastases, bilan et surveillance bucco-dentaire avant et pendant le traitement sont indispensables en raison du risque d’ostéonécrose de la mâchoire.

Automédication

Proscrire les AINS pour soulager des brûlures urinaires après une prostatectomie ou au cours d’une radiothérapie en l’absence d’un contrôle ECBU attestant l’absence d’infection urinaire car l’anti-inflammatoire pourrait aggraver l’infection.

VIE QUOTIDIENNE

Hygiène de vie

Encouragez une alimentation équilibrée et une activité physique régulière pour limiter le risque de prise de poids. Celle-ci est associée à un risque plus élevé de récidive du cancer (voir interview). Recommandez de privilégier une alimentation riche en fruits et légumes, de préférer les huiles végétales et de restreindre les graisses saturées.

Impact sexuel

Le constat

Tous les traitements ont un impact sur la sexualité et la fertilité. Une conservation du sperme est proposée aux patients qui le souhaitent avant le début de l’intervention ou du traitement médical.

→ Le retour d’érections naturelles dépend notamment de l’âge du patient, de la préservation ou non des bandelettes nerveuses responsables de l’érection et de la reprise précoce (dans les trois à six mois) d’une activité sexuelle.

→ Après radiothérapie, les troubles de l’érection surviennent plus tardivement, du fait de la destruction progressive des tissus.

Les solutions

→ Pour les hommes qui le souhaitent, l’objectif est de provoquer des érections régulières – si besoin avec des médicaments – pour maintenir l’oxygénation des tissus caverneux et préserver ainsi leur capacité à pouvoir être en érection. Cette récupération des érections est possible jusqu’à deux ans après l’intervention du fait de la régénérescence lente des fibres nerveuses.

→ Sont utilisés et éventuellement associés : les injections de prostaglandine, les inhibiteurs de la phosphodiestérase de type 5 et le vacuum. Ces traitements sont indiqués en cas de troubles sexuels liés à l’hormonothérapie ou à la radiothérapie.

→ Le vacuum ou pompe à érection ou érecteur à dépression est une sorte de cylindre qui permet de faire le vide autour du pénis, ce qui crée l’afflux de sang nécessaire à l’érection. Celle-ci est ensuite maintenue grâce à un anneau placé à la base du pénis. Son prix varie de 80 à 270 €. Marques : Owen Mumford, MEDintim…

Troubles psychologiques

Les troubles anxieux et dépressifs engendrés par la maladie peuvent être majorés par l’atteinte sexuelle. Une vie sexuelle est possible, même sans érection. Il ne faut pas hésiter à le dire au patient et/ou au couple, et à les orienter si besoin vers un sexologue et/ou, lorsque l’anxiété ou des troubles dépressifs sont présents, vers un psychologue ou un psychiatre.

Avec la collaboration du professeur Alexandre de la Taille, service d’urologie de l’hôpital Henri-Mondor, Créteil (94).

Info+

L’hypertrophie ou hyperplasie bénigne de la prostate (HBP) correspond à une prolifération non cancéreuse des cellules prostatiques de la « zone de transition » ou transitionnelle qui entoure l’urètre (voir schéma), d’où les symptômes urinaires.

Info+

Le rapport PSA libre/PSA total oriente sur la nécessité de répéter ou non les biopsies de la prostate après une première série de biopsies négatives. Un rapport élevé, supérieur à 20 %, est plutôt en faveur d‘une hyperplasie bénigne de la prostate (HBP) ; alors qu’un rapport inférieur à 10 % est en faveur d’un cancer ou d’une prostatite.

Des avis divergents sur le dépistage du cancer de la prostate

→ NON JUSTIFIÉ. Selon la Haute autorité de santé (HAS)(1), le dépistage systématique du cancer de la prostate par dosage du PSA n’est pas justifié dans la population générale ou chez les hommes avec facteurs de risque.

→ JUSTIFIÉ. Pour l’Association française d’urologie (AFU), l’avis de la HAS ne dispense pas d’une démarche de diagnostic précoce afin d’identifier les formes agressives de cancer et de pouvoir les traiter à temps. L’AFU recommande un toucher rectal annuel et un dosage annuel du PSA à partir de 55 ans, et dès 45 ans chez les hommes avec facteurs de risque (hérédité, origine ethnique). Ce dépistage concerne les patients dont l’espérance de vie est d’au moins dix ans, sans facteurs associés de comorbidité. Si la valeur du PSA initiale est inférieure à 1 ng/ml, le risque de développer un cancer agressif est très faible et les dosages peuvent être espacés, voire arrêtés.

(1) Cancer de la prostate : identification des facteurs de risque et pertinence d’un dépistage par dosage de l’antigène spécifique de la prostate (PSA) de populations d’hommes à haut risque ?, rapport d’orientation, HAS, février 2012.

Info+

La prise de sang pour doser le PSA ne nécessite pas d’être à jeun, mais doit être réalisée au moins trois jours après le toucher rectal, qui peut entraîner une hausse artificielle du taux de PSA. Sous inhibiteur de la 5-alpha-réductase (finastéride, dutastéride), sa valeur est abaissée de 50 % environ.

Info+

Une biopsie prostatique expose à un risque hémorragique et infectieux, d’où une antibioprophylaxie par quinolone de deuxième génération. L’apparition d’une fièvre ou de douleurs pelviennes après la biopsie évoque une prostatite aiguë et justifie une hospitalisation en urgence.

Interview

Surveiller avant de traiter ou pas”

Professeur Alexandre de la Taille, service d’urologie de l’hôpital Henri-Mondor, Créteil (94).

À qui s’adresse l’abstention surveillance et la surveillance active ? L’abstention surveillance ou « watchfull waiting » s’adresse aux hommes ayant un cancer latent ou une tumeur localisée non agressive et dont l’espérance de vie est inférieure à dix ans. Un traitement à visée palliative n’est proposé que chez les patients devenant symptomatiques.

La surveillance active se destine aux patients atteints d’un cancer localisé à faible risque. Elle implique de suivre étroitement le cancer pour pouvoir si nécessaire traiter à temps : dosage du PSA tous les 3 à 6 mois, toucher rectal tous les 6 à 12 mois, biopsie prostatique tous les 12 à 18 mois. En pratique, cette démarche génère beaucoup de stress et d’anxiété. Il faut expliquer au patient que si elle lui est proposée, c’est que son cancer est à faible risque. Un traitement ne sera peut-être pas nécessaire, ce qui évite de nombreux effets indésirables.

Info+

Le cancer de la prostate est hormonosensible, c’est-à-dire que son développement est stimulé par des hormones masculines, les androgènes, et plus particulièrement la testostérone.

Info+

L’hormonothérapie consiste à empêcher l’action stimulante de la testostérone pour stopper le développement du cancer, mais à partir d’un certain stade, un échappement au traitement se produit et les cellules cancéreuses n’ont plus besoin des androgènes pour se multiplier ; c’est la phase d’hormonorésistance.

Principales contre-indications des médicaments

Abiratérone : insuffisance hépatique sévère.

Bicalutamide, flutamide, nilutamide : insuffisance hépatique sévère. Nilutamide : insuffisance respiratoire sévère.

Acétate de cyprotérone : affections hépatiques graves, tuberculose, dépression chronique sévère, affections thrombo-emboliques ou antécédents, anémie à hématies falciformes.

Diéthylstilbestrol : accident thrombo-embolique artériel ou veineux, THA, diabète compliqué de micro- ou macro-angiopathie, pathologie oculaire d’origine vasculaire, affection hépatique sévère ou récente.

Info+

La cryothérapie consiste à détruire la tumeur par un refroidissement intense (azote liquide). Il s’agit d’une technique en cours d’évaluation.

Info+

L’orchidectomie (exérèse des testicules) et la pulpectomie (exérèse de la pulpe testiculaire), interventions chirurgicales qui aboutissent à une castration irréversible, ne sont quasiment plus employées.

Info+

Pour les tumeurs très agressives, le traitement hormonal associe un analogue ou un antagoniste de la LH-RH et un anti-androgène stéroïdien ; le blocage androgénique est dit complet.

Interview

Mieux vaut limiter la prise de poids”

Professeur Alexandre de la Taille, service d’urologie de l’hôpital Henri Mondor à Créteil (94).

Qu’est-ce que l’hormono-thérapie intermittente ?

De plus en plus proposée, elle consiste à interrompre la suppression androgénique après quelques mois en cas de bonne réponse, et à ne la reprendre qu’en cas de progression tumorale ou d’élévation du taux de PSA. Des études ont montré que l’hormonothérapie intermittente est aussi efficace qu’une hormonothérapie continue, avec l’avantage de diminuer les effets indésirables du traitement sur les os, les bouffées de chaleur et les troubles de l’érection, d’où amélioration de la qualité de vie.

L’alimentation joue-t-elle un rôle dans la prévention du cancer de la prostate ?

Aucune étude solide n’a à ce jour montré le rôle protecteur de certains aliments (tomate, lycopène, protéines du soja, thé vert, sélénium vitamine E…) dans le cancer de la prostate. Des études montrent que les patients atteints d’un cancer de la prostate qui suivent un régime alimentaire pour limiter la prise de poids ont moins de risque de progression et de récidive de leur cancer.

Le manque à gagner lié à la perte des produits de contraste vous inquiète-t-il ?


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