C’est le moment de prendre sa dose - Pharmacien Manager n° 234 du 01/06/2023 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Pharmacien Manager n° 234 du 01/06/2023
 
PDA

PRATIQUES

ACHATS

Auteur(s) : Matthieu Vandendriessche

Est-il opportun pour le pharmacien de fournir piluliers et sachets de médicaments aux Ehpad ? La progression récente des contrôles dans ces structures semble de bon augure. Mais attention, la gestion de cette mission ne s’improvise pas : elle demande une bonne coordination des pratiques.

La préparation des doses à administrer (PDA) figure dans le code de la santé publique1 comme une partie intégrante - non systématique - de l’acte de dispensation. Les officinaux qui la pratiquent pour les résidents des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) vous le diront : c’est un métier à part entière ! « Il faut avoir la fibre PDA. Ce n’est pas une simple relation commerciale de prestation. Il faut s’investir, cultiver la relation humaine. C’est une aventure qui peut faire peur », témoigne Christian Sauné, titulaire de la pharmacie Esquirol à Toulouse (Haute-Garonne), fournisseur de 14 Ehpad, et consultant pour la société d’équipement Robotik Technology. Les exigences qui s’imposent rassurent. En deux ans, tous les Ehpad devront être contrôlés ou même inspectés sur site, contre une fois tous les vingt à trente ans avant la crise de confiance qui a éclaté en 2022 à la suite de la parution de l’ouvrage Les Fossoyeurs2. Et les vérifications par les Agences régionales de santé (ARS) portent particulièrement sur le processus qui démarre avec la PDA à l’officine et va jusqu’à l’administration des médicaments aux résidents.

Le marché repart de plus belle.

« Lorsqu’un Ehpad se tourne vers moi, je commence par lui expliquer mon mode de fonctionnement avant qu’il m’expose ses besoins et ses spécificités. Ensuite, on voit si l’on peut travailler ensemble. Quand un établissement impose d’emblée ses standards, cela ne peut pas fonctionner », considère Christian Sauné. Fait assez nouveau dans le lien qui les relie : certaines officines sont parvenues à obtenir une participation financière de l’établissement dans l’achat des consommables (sachets et piluliers). « Car la PDA peut aussi devenir un gouffre financier pour une pharmacie, pointe Bruno Dupouy, directeur national des ventes Observance d’Equasens (ex Pharmagest). Il faut toujours dépanner, courir après les ordonnances, sans oublier de fournir deux ou trois chariots à l’établissement. » Les difficultés de recrutement qui s’ajoutent à tout cela peuvent occasionner une mise à l’arrêt pure et simple de l’activité. « Faute de personnel, certaines officines ont choisi de se repositionner sur le comptoir et sur les missions conventionnées », explique Émilie Taranger, responsable marketing et communication du fournisseur de matériel Oréus. Autre élément conjoncturel qui a plombé l’activité, le recul du taux d’occupation des établissements en lien avec la pandémie de Covid-19, la récente crise de confiance et la tendance inflationniste. Depuis le début de l’année, le marché repart et il n’est pas saturé. Sur 7 500 Ehpad en France, près de 5 100 recevraient des médicaments des officines. Environ 3 500 d’entre elles sont impliquées, dont 2 500 pratiquent la PDA3.

Des activités complémentaires.

Deux options s’offrent aux officinaux qui voudraient se lancer. Elles sont liées au projet d’entreprise et aux capacités d’investissement, l’équipement pouvant coûter de quelques milliers d’euros pour une solution semi-automatisée à 200 000 € pour une solution entièrement robotisée. La PDA peut être menée a minima, avec un matériel peu coûteux. « C’est délicat de ne pas répondre à la demande de l’Ehpad à proximité. Vous ne générez pas vraiment de marge mais il n’y a pas non plus de perte, expose Sébastien Ragot, expert-comptable au cabinet CAAG. Dans tous les cas, il faut un effectif de résidents suffisant pour que l’activité soit rentable. » Autre stratégie, l’investissement dans une activité robotisée et professionnalisée dans des locaux adaptés. Elle ne s’entrevoit pas sans la perspective de traiter avec plusieurs Ehpad. Les pharmaciens peuvent être épaulés dans cette nécessité de diversifier leurs partenariats. « Un fournisseur de solutions de PDA ne doit pas se limiter à vendre ses produits, estime Émilie Taranger. Il doit accompagner le pharmacien au démarrage et dans le développement de son activité pour lui permettre de produire pour davantage d’établissements, en privilégiant une implantation de proximité. » La rentabilité de l’activité reste liée à la capacité de négociation avec les laboratoires de génériques. Le taux de substitution en établissement avoisine 100 % et le taux de marge brute sur les génériques atteint ainsi 35 % à 38 %, voire 40 %, estime Sébastien Ragot. Émilie Taranger ajoute que la PDA permet aussi de voir converger vers l’officine des ordonnances sur l’orthopédie, la compression médicale et même l’oxygène, qui concerneraient près de 60 % des résidents.

L’horizon du domicile.

Pour diversifier leur production, les pharmaciens répondront aussi aux demandes des collectivités pour personnes handicapées : institut médico-éducatif (IME), foyer d’accueil médicalisé (FAM), maison d’accueil spécialisée (MAS), etc., dont les effectifs sont tout de même moindres qu’en Ehpad. Activité encore balbutiante, la préparation de piluliers pour les personnes âgées au domicile n’est pas en reste. Pour Bruno Dupouy, ce sont aussi les patients chroniques à risque élevé d’inobservance qu’il faut cibler. « L’officine fidélise des patients qui, en ville, fréquentent plusieurs pharmacies. Ils n’iront plus chercher leur traitement ailleurs. Et si vous ne faites pas payer ce service, il n’y a pas de raison que l’Assurance maladie le fasse un jour puisqu’il aura toujours été considéré comme gratuit », pointe le responsable chez Equasens.

1. Article R 4235-48 du code de la santé publique.

2. Les Fossoyeurs, Victor Castanet, éditions Fayard, 2022.

3. Rapport « La dispensation des médicaments à l’unité à l’officine » adopté par le conseil de l’Académie nationale de pharmacie le 13 avril 2021. Télécharger le pdf sur le lien : bit.ly/42YwcaZ.

LES EHPAD À LA PEINE

S’il repart à la hausse depuis le début de cette année, le taux d’occupation des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) a enregistré un recul en 2022. Il est peu marqué dans le secteur public, à 94 % fin 2022, soit une baisse de moins de 3 % depuis 2019 (Fédération hospitalière de France). « Avant la crise, le remplissage affichait un taux de 110 % à 120 %, du fait de listes d’attente établies une à deux années avant l’intégration du résident. L’an dernier, ce taux d’occupation a chuté, se situant entre 70 % et 80 %, avec pour certains Ehpad un taux à 40 % », estime, sur la base du témoignage de pharmaciens, Bruno Dupouy, directeur national des ventes Observance d’Equasens (ex Pharmagest).

LA PDA À L’OFFICINE

« Développer des services pour les personnes âgées, c’est faire le choix de se démarquer face à une pharmacie qui mise sur les prix et sur une clientèle jeune. Je vais donc m’adresser à eux à travers une panoplie de services », préconise Sophie Gillardeau, consultante et formatrice pour les services et la communication à l’officine. S’adresser aux seniors, c’est bien sûr proposer des bilans partagés de médication et des entretiens pharmaceutiques sur les anticoagulants oraux. Mais, c’est aussi travailler sur l’aménagement de l’espace de vente. « En élargissant les allées, en installant des sièges et en permettant aux personnes âgées d’attendre leur tour en restant assis face aux comptoirs. » La proposition de piluliers intègre pleinement cette stratégie. En faisant payer ce service et si possible dans une offre d’abonnement.

LES NOUVEAUTÉS DES FOURNISSEURS

Les fournisseurs de matériel font évoluer la pratique de la préparation des doses à administrer (PDA). Dernier né chez Robotik Technology, le robot RT 86 K7 (86 cassettes) se destine aux officines qui voudraient faire leurs premiers pas dans la PDA. Occupant un encombrement minimal, il confectionne des piluliers pour les patients à domicile comme pour les résidents des Ehpad. Sur le même créneau, JVM propose désormais le robot JV-300 NS (300 cassettes). Il est relié aux dispositifs proposés en option, comme le système d’inspection de sachets Vizen Ex. Une production semi-automatisée est également possible avec le JV-45 RDC (45 cassettes). Parmi les solutions semi-automatisées, Oréus vient de lancer la gamme Tempo, avec son pilulier à sept compartiments. Elle est complétée par la boîte de transport TBox (non connectée). Chaque boîte comprend une prise de traitement journalier pour 19 résidents.

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