L’ENGAGEMENT DURABLE EN HÉRITAGE - Pharmacien Manager n° 211 du 01/07/2021 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Pharmacien Manager n° 211 du 01/07/2021
 

REPORTAGE

Auteur(s) : Fabienne Colin

A la Pharmacie de la Tour, on interroge les laboratoires pour des précisions sur les formules, on s’active pour limiter les déchets, on s’organise pour le bien-être de l’équipe et des patients. Résultat de cet engagement durable, l’officine est labélisée Très haute qualité sociale et environnementale (THQSE), depuis 2020.

Demandez à Dominique Vaissières de vous faire visiter son officine et la titulaire de la Pharmacie de la Tour, à Castelginest, au nord de Toulouse, commence par vous présenter les poubelles. Dans le sas de livraison, s’alignent les différents bacs pour le carton, l’organique, les déchets médicaux, les médicaments… Ce serait banal sans le registre des déchets affiché-là. Ici, à chaque départ de carton Cyclamed, on mentionne sur cette feuille la quantité évacuée, la date et la provenance : soit l’officine elle-même, soit son activité de piluliers réalisée pour une maison de retraite locale. « Mais pour le carton, c’est encore trop compliqué ! », regrette la pharmacienne.

DES LABOS À L’ŒIL.

Installée-là depuis vingt-et-un ans, d’abord au côté de son mari Gilles et, depuis 2018, avec son fils Arnaud, Dominique Vaissières met en application ses propres convictions environnementales dans sa pharmacie. Les déchets sont limités au maximum et sont quantifiés. Les dépenses d’énergie superflues sont traquées et, quand les étiquettes des produits sont imprécises, toute l’équipe officinale s’assure de l’origine des ingrédients auprès des laboratoires. « Regardez ce carton GSK, ouvrons-le ! », poursuit Dominique Vaissières. Sans la moindre surprise, mais toujours aussi agacée par la situation, elle trouve ce colis démesuré pour seulement contenir cinq petites boîtes avec des tests de grossesse. Depuis cinq ans, elle prend une photo de ces paquets et l’adresse aux laboratoires pour s’insurger du transport…. du vide. « Mais, ça ne sert à rien ! Chez Pierre Fabre, c’est pareil : nous recevons du cartonnage avec un emballage plastique à l’intérieur », s’énerve-t-elle.

UN LABEL RSE.

La pharmacie de la Tour a été parmi les trois premières officines en France à être labélisée Très haute qualité sociale et environnementale (THQSE), en mars 2020. A l’initiative du projet, le groupe Pierre Fabre a épaulé l’officine dans sa démarche avec l’agence Primum Non Nocere, spécialisée dans le coaching RSE, pour accompagner les entreprises vers des pratiques plus responsables (lire page 15). Pour décrocher ce label, l’officine a dû protocoliser ce que la titulaire avait instinctivement commencé. Et, petit à petit, aller plus loin en mesurant les résultats des efforts fournis. Ainsi, l’équipe s’est mise à limiter les déchets et mieux les trier. Recrutée au printemps 2020, Anne, la pharmacienne, avoue avoir été « un peu choquée » à son arrivée. « Ici, on refuse les boîtes de médicaments rapportées. Les gens doivent faire le tri eux-mêmes. Et finalement, avec le recul, je trouve ça bien ! », admet l’adjointe. Preuve que toutes ces actions contribuent à une prise de conscience environnementale, tant du côté des troupes que des patients.

UN RÉAGENCEMENT ÉCO-RESPONSABLE.

Devenu co-titulaire en 2018, Arnaud Vaissières a apporté une touche de modernité à la pharmacie parentale. En commençant par agrandir l’espace de vente, dès 2019. En grignotant des m2 sur le back-office, la surface de vente a, alors, quasi doublé pour dépasser les 200 m2. Un chantier mené dans un esprit “durable”, convictions familiales obligent ! La façade est couverte d’un bois de châtaigner de Corrèze. « Ça va griser avec le temps », prévient Dominique Vaissières. « Et pas question, ici, de poser des vitrophanies qui sont à changer et à jeter tous les mois ». Sur l’unique vitrine commerciale des lieux, d’un côté de la porte, des messages défilent sur un écran, et de l’autre, les produits sont installés sur un socle en bois, agrémenté de caissons de différentes couleurs, “faits maison”. « On doit trouver des supports, autres que les cartons des laboratoires », explique celle qui insiste auprès de chaque fournisseur pour ne recevoir ni PLV, ni magazine, ni flyer, ni facture en version papier… Dans la même veine, à l’intérieur de l’officine, l’essentiel des linéaires était déjà là avant les travaux. Comme le carrelage.

UN BIEN-ÊTRE RESSENTI.

L’agencement a pris aussi en compte le bien-être de l’équipe. « Grâce à la vitrine latérale, près des comptoirs, les filles travaillent à la lumière du jour. L’équipe doit se plaire dans les lieux, pour que les patients s’y plaisent aussi », clame Dominique Vaissières. L’espace Nature est, lui, organisé sous forme de cercle, avec une table centrale équipée d’un lavabo et agrémentée d’un arbre stylisé, en métal. Tout autour, de nouvelles offres eco-friendly abondent, comme les soins sans eau Minima [liste], les lavants Dr Bronner’s, les cure-oreilles Sagyène, les coton-tiges en bois Cadaques… Résultat de cet engagement durable hérité en famille, le chiffre d’affaires a grimpé de plus de 20 % en 2020, et affiche une tendance +40 % à fin mai 2021. Et ce, hors tests ! Un bon test.

Équipe

2 titulaires

3 adjoints

7 préparateurs

1 apprenti

Date des travaux

Avril 2019

Investissement

200 000 €

Surface totale (avant/après transfert)

230 m2/

310 m2

Surface de vente (avant/après transfert)

110 m2/210 m2

C.A 2020 HT

2,95 M€

(+ 21,4 % vs 2019)

Répartition du C.A actuel par taux de TVA

54 %

de TVA à 2,1 %

22 %

de TVA à 20 %

13 %

de TVA à 5,5 %

11 %

de TVA à 10 %

Taux de marge

commercial 2020

32 %

(+ 4 points vs avant les travaux)

Fréquentation

239 clients/jour

(vs 150 avant les travaux)

Groupement

Aprium depuis février

2021

Enseigne

Non

Présence sur internet

Google My Business

Label

THQSE

PIERRE GREMET

CONSEILLER EN DÉVELOPPEMENT DURABLE CHEZ PRIMUM NON NOCERE

La pharmacie de la Tour a décroché le niveau « or » de la labélisation THQSE. Quelle fut, selon vous, tout au long du process, la démarche la plus facile à démontrer à l’organisme certificateur ?

La pharmacie de la Tour avait déjà anticipé un assortiment de produits plus vertueux, qui prend en compte des critères environnementaux et sanitaires. Par exemple, un espace était déjà organisé autour de produits “zéro déchet”, comme des cure-oreilles, des coton-tiges réutilisables, des savons solides sans emballage et des produits labélisés Cosmebio, BDIH… Dans cette partie de l’officine, on tend vers l’absence de substances controversées, comme les perturbateurs endocriniens. Cela se traduit par la demande systématique aux laboratoires de la composition des produits et par le refus des produits en contenant. Dans cet espace, les patients n’ont pas besoin d’utiliser une application comme Yuka. L’officine fait ce travail en amont.

Un exemple d’action plus compliquée à mettre en œuvre à la pharmacie de la Tour ?

La tenue du registre des déchets sortants, pourtant obligatoire pour toutes les entreprises. En officine, cela concerne principalement les déchets dangereux : les déchets d’activité de soins à risques infectieux (dasri), les cyclamed, mais aussi les luminaires, etc. Ce registre est une action peu visible, difficile à valoriser.

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