CE N’EST QU’UN AU REVOIR - Pharmacien Manager n° 208 du 01/04/2021 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Pharmacien Manager n° 208 du 01/04/2021
 

RETAIL

QUOI DE NEUF ?

Auteur(s) : Audrey Chaussalet

Alors que Serge Carrier et Lucien Bennatan s’apprêtent, l’un et l’autre, à quitter leurs fonctions, ils ont accepté de nous rendre visite et de nous raconter les années passées, sans se retenir d’évoquer le futur, que l’on devine “actif” pour eux.

Serge Carrier Dg de Pharmactiv

Racontez-nous la genèse du groupement Pharmactiv ?

S.C. Pharmactiv a été créé en 1988 par Jacques Ambonville et j’en ai pris la direction fin 2006. A l’époque, Jacques avait créé un groupement laboratoire d’art et d’essai, avec une réflexion sur l’avenir et le prospectif. C’était un groupement créé par une dizaine de pharmaciens visionnaires et financé par l’OCP. L’OCP travaillait sur l’espace de santé : « La pharmacie, un espace de santé indispensable », un concept où les comptoirs étaient éclatés dans l’espace de vente. Dans l’ADN de Pharmactiv, il n’y avait pas d’enseigne. La communication était centrée autour de deux personnages, Tiv et Tivette, patients de Pharmactiv. Mais, pour moi, il était évident que la marque devait servir de support au développement de la pharmacie. Nous avons donc procédé à une refonte du logo, des supports et d’une bannière (terme que je préfère à “enseigne” !), en 2009.

Quand le premier concept Pharmactiv est-t-il né ?

S.C. En 2007, à Viry-Châtillon (Essonne). Plutôt qu’un agenceur spécialisé dans la pharmacie, nous avons fait appel à des agenceurs issus de la distribution servicielle. Nous avons travaillé l’assortiment, en rationnalisant. Puis, nous avons sectorisé les zones et on a créé “l’Espace de confidentialité“. Le concept Pharmactiv a été revisité en 2014, où les corners servent de “teasing”. Comme chez les concessionnaires automobiles ou à la Fnac, où tout n’est pas en stock, mais où tout peut être présenté aux clients sur tablette, écran… La digitalisation des points de vente a agrandi la zone de chalandise, le temps et l’espace. Par exemple, le click&collect fonctionne si la commande est prête au moment où le client passe la chercher, ce qui suppose qu’un poste soit dédié à cette tâche. Si bien que 100 m2 de surface de vente est devenue une taille critique pour une officine. Pour moi, on s’oriente vers une hyper spécialisation de la pharmacie.

Quels types de spécialisation ?

S.C. Comme le naturel, le MAD, le véto, Maman&Bébé… Notre concept Betterlife propose une solution à 360°, avec une centaine de MDD et tout un catalogue produits à disposition des clients. A fin mars 2021, notre réseau compte 75 points de vente Betterlife. Si bien qu’une campagne d’affichage sur les abris de bus débutera mi-avril. Nous souhaiterions également proposer un concept de shop in the shop en dermocosmétique et en vétérinaire…

Comment se porte le réseau Pharmactiv ?

S.C. En 2006, il y avait 480 adhérents et j’ai très vite compris qu’il fallait atteindre l’objectif de 800. Aujourd’hui, nous avons un peu moins de pharmacies que fut une époque. C’est avant tout conjoncturel ! Chaque année, il y a 300 pharmacies qui ferment ou se regroupent. En dessous de 2 M€ de C.A, la rentabilité d’une officine est compliquée, par rapport notamment aux charges du personnel, d’où les regroupements de plus en plus nombreux. Dans quelques années, le maillage va tomber à 16 000 ou 17 000, contre 21 000 à ce jour. Pharmactiv compte aujourd’hui près de 1 400 adhérents, mais ces derniers sont plus motivés et impliqués qu’hier.

Quelles sont les retombées, positives comme négatives, de la crise du Covid-19 ?

S.C. Avec la crise sanitaire, les pharmaciens se sont rendus compte qu’il était difficile de travailler seul. La cohésion des pharmaciens au sein du réseau s’est renforcée. Le Workplace, notre Facebook professionnel, est devenu une mine d’or.

Lucien Bennatan Dg de Pharmacie Référence Groupe

Comment vous est venue l’idée de créer PHR ?

L.B. PHR est l’émanation d’un syndicat. Durant mes cinq années d’étude en pharmacie, j’ai passé quatre ans à la tête de l’Association Nationale des Etudiants en Pharmacie de France (ANEPF). Jeune diplômé, je cherche alors à m’installer. Pour moi, les syndicats de la profession existants avaient une vision trop passéiste et peu prospective. J’utilise, alors, les contacts que j’ai gardés auprès des étudiants des différentes universités de France et je lance le syndicat “Engagement pharmacien”, dont l’objectif était de promouvoir ce pour quoi les pharmaciens avaient fait des études : être des professionnels de santé libéraux, des entrepreneurs mais pas des individualistes, des indépendants, mais qui ne veulent pas rester isolés. En 1988, les pharmaciens sont dans la rue, ils viennent de perdre 2 % de marge linéaire. Un pharmacien se manifeste dans la presse professionnelle et déclare vouloir les aider à défendre leur profession. Ce pharmacien, n’était autre que Jacques Séguéla. Je l’appelle et il travaille à nos côtés (Lucien Bennatan, Willy Hodin et Dominique Brasseur sont les 3 pharmaciens fondateurs), à l’élaboration d’un réseau, durant deux ans. Pour le nom, il voulait “Pharmacie Préférence” (La chanson de Julien Clerc “Ma préférence à moi” passait sur sur toutes les ondes Ndlr), mais on a choisi “Pharmacie Référence” pour son côté plus btoc. L’ADN de PHR, c’est donc un fort accent syndical, une propension à innover, à anticiper, à oser expérimenter, à être un laboratoire d’idées pour les syndicats, voire pour le conseil de l’Ordre des pharmaciens.

30 ans après la création de PHR, pensez-vous que nous sommes arrivés à la pharmacie 2.0 ?

L.B. En 1991, nous savions que le digital allait aider à bâtir une pharmacie de proximité avec toujours plus d’humain. La pharmacie est le premier poste avancé de soins. Elle doit être au plus près du patient. Un rôle conforme aux souhaits des pouvoirs publics et aux évolutions sociétales. Mais, nous ne sommes pas encore à la pharmacie 2.0. On a gagné la bataille sur la gestion du stock, mais pas sur la logistique (comment l’ordonnance arrive, comment j’achète et comment le patient est livré), ni sur le parcours client (nous n’en sommes qu’au balbutiement du phygital). Chacun se digitalise de son côté, mais les systèmes continuent de fonctionner en silo. La pharmacie 2.0 verra le jour quand le pharmacien sera un coach santé à distance, quand le corporatisme entre les différents professionnels de santé arrêtera de freiner les services des soins non programmés, quand le pharmacien clinicien sera débarrassé de l’administratif… Nous ne sommes qu’à la préhistoire de la pharmacie 2.0. Même si la crise du Covid-19 a accéléré la mutation.

Quelle est votre vision de la pharmacie en 2050 ?

L.B. Les vraies questions à se poser sont : quels usages on va faire du pharmacien et de la pharmacie ? Les pharmacies comportent des espaces dédiés à leurs patients en fonction de l’âge de vie. La résistance des autres professionnels de santé évolue et cela va aussi booster le pharmacien en tant qu’acteur de santé de 1er recours. Aujourd’hui, il remplit déjà ce rôle, mais la reconnaissance n’est pas encore assez marquée. Les médecins et les infirmières soignent des malades, alors que le pharmacien, lui, accueille des patients et des bien portants. Nous avons un rôle dans la prévention, le premier soin, l’accompagnement et le suivi. La pharmacie de demain sera orientée encore plus santé, et un peu moins commerce. Et le pharmacien sera un centre de premier soin, un pivot au cœur du système de santé.

La pandémie a aussi été en accélérateur pour déclencher des achats via notre centrale. On a doublé le C.A et le volume des commandes. Aujourd’hui, seule une trentaine de pharmacies Pharmactiv n’achète rien à la centrale.

Quelle est votre vision du métier de pharmacien ?

S.C. Le mass-market de la santé, c’est fini ! Maintenant, nous sommes dans le curatif ou le préventif personnalisé. Le pharmacien va être le gestionnaire du capital santé de ses patients. Demain, il sera décisionnaire sur l’adaptabilité des traitements et des produits et proposera davantage de traitements personnalisés, un protocole spécifique. Le plus gros défidu pharmacien, c’est l’observance. Et le gros défide l’observance, c’est de la faire accepter ! Le pouvoir de conviction des pharmaciens, les médecins ayant un peu perdu le leur, c’est un fort ancrage territorial. C’est le sens de l’histoire ! Avec la vaccination contre le Covid-19, c’est la première fois que les pharmaciens ont le droit de prescription. Demain, les médecins traiteront les pathologies plus difficiles et les urgences soigneront des “vraies urgences”.

Pensez-vous que le monopole de la pharmacie est menacé ?

L.B. Malheureusement, tous les pharmaciens ne sont pas encore inattaquables sur leur cœur de métier, mais je suis fier des 300 pharmacies certifiées Qualité au sein de Pharmacie Référence Groupe, même si ce n’est pas encore assez. La certification est une ré-assurance pour le patient et un gain de temps pour le professionnel. Aujourd’hui, nous nageons entre deux eaux. C’est seulement en 2009 que le pharmacien a officiellement été reconnu comme “acteur de santé”, avant nous étions considérés comme “des épiciers de luxe”. Chez PHR, nous préconisons l’honoraire depuis quinze ans. Nous sommes en train d’y aller, contraints et forcés pour certains, volontaristes pour d’autres. Mais, plus on est rémunéré à l’honoraire, moins on est dépendant des prix, des volumes, et plus on est focalisé sur la qualité de l’acte et du service ! Nous sommes dans l’ère #touchepasmapharmacie et le patient est notre meilleur allié. Entre un médicament et un patient, vous trouverez toujours un pharmacien. Amazon pharmacy embauche des pharmaciens. Ce n’est pas la pharmacie, mais la place du pharmacien qui est en danger.

Clémence Maillot, nouvelle Dg de Pharmactiv

Issue de l’industrie, d’abord en grande distribution, puis dans le secteur de la santé, Clémence Maillot prend la succession de Serge Carrier, à la tête de Pharmactiv, début avril. Durant les deux mois de passation, elle a côtoyé « un grand homme, qui a beaucoup marqué Pharmactiv. J’ai senti une vraie sincérité et beaucoup d’engagement. C’est avec beaucoup d’enthousiasme et de fierté que je prends sa relève », déclare la nouvelle Dg. Après un premier mois passé à la rencontre des pharmaciens, Clémence Maillot est impressionnée par « l’engagement, tant de la part des adhérents que de l’équipe ». Ses défis sont entiers et il lui faudra travailler sur l’homogénéité et l’identité du réseau, améliorer la visibilité des services proposés aux patients, accompagner les adhérents dans leur rôle clef d’acteur de santé.

François Tesson, Dg de PHR

François Tesson a lancé sa carrière dans la répartition pharmaceutique, avec un passage à l’OCP entre 2010 et 2015, avant de passer côté retail, où il a œuvré pour le développement du groupement Le Gall Santé Service, avant de prendre les rênes de Pharmacie Référence Groupe. Convaincu que « la pharmacie au cœur du système de santé a un rôle essentiel auprès des patients », il estime que le positionnement de Pharmacie Référence Groupe est « idéal, car son ADN qui consiste à défendre la profession à travers l’innovation est plus que jamais dans l’actualité ». Durant ses deux mois au côté de Lucien Bennatan, il avoue qu’une relation forte s’est créée entre eux. « La trace qu’il laisse chez PHR va également m’inspirer. Je vais structurer mon équipe pour continuer le travail déjà accompli et entreprendre de nouvelles choses. Je suis enthousiaste de mettre mon expérience au service de PHR », conclut-il.

Prévoyez-vous de fermer votre officine le 30 mai prochain en signe de protestation ?


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