REMPLUMER SA TRÉSORERIE - Pharmacien Manager n° 200 du 01/09/2020 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Pharmacien Manager n° 200 du 01/09/2020
 
COVID-19

PRATIQUES GESTION

Auteur(s) : François Pouzaud

Pour consolider une trésorerie placée sous haute tension par la crise sanitaire, les entreprises ont actionné plusieurs leviers dès le début du confinement. Après ce sauvetage d’urgence, il faut maintenir le navire à flot pour ne pas replonger en eaux troubles en cas de nouvelle vague.

L’AVENIR TANT SANITAIRE QU’ÉCONOMIQUE EST PLEIN D’INCERTITUDES

En tant que bon chef d’entreprise, lorsque la visibilité est faible, la gestion de l’entreprise doit être prudente et anticipée. Si la reprise tant attendue tarde, il faudra faire le dos rond et préserver sa trésorerie. Face à cette situation difficile, toutes les pharmacies ne sont pas logées à la même enseigne. « Chaque officine gère une problématique différente, souligne Philippe Becker, expert-comptable, directeur du département Pharmacie de Fiducial Expertise. Un titulaire qui a fini de rembourser ses emprunts n’aborde pas la situation de la même manière qu’un jeune qui vient d’acheter son officine. » Selon lui, si l’activité de son officine reste à l’étiage, il faut agir rapidement. « Attendre serait une erreur qui va grever la trésorerie inutilement. Pour éviter une réanimation très incertaine faute de « cash », mieux vaut gérer les difficultés en amont et consulter son cabinet comptable pour évaluer les mesures à prendre », poursuit-il.

ROUND D’OBSERVATION

Avant toute prise de décision, « il convient de mesurer le point mort financier, c’est-à-dire la marge brute minimum à dégager pour faire face aux charges d’exploitation et aux éventuels remboursements d’emprunts une fois que le délai de suspension des échéances de 6 mois sera passé », poursuit Olivier Desplats, expert-comptable du cabinet Flandre comptabilité conseil (groupe CGP). Il propose l’échéancier suivant : « La période d’observation peut s’étaler jusqu’à fin octobre. Si d’ici là, le niveau d’avant crise n’est pas revenu et que le point mort n’est pas atteint, alors il conviendra d’envisager des mesures structurelles, au niveau de l’exploitation ; envisager un ou des licenciements, aussi douloureux cela soit-il, et au niveau financier, un réétalement de la dette. » Dès le début du confinement, Joël Lecoeur, expert-comptable du cabinet Lecoeur, Leduc et associés (groupe CGP), a conseillé aux pharmaciens confrontés à une baisse du C.A, d’user de toutes les mesures d’accompagnement prises par le gouvernement pour passer ce cap. Le prêt garanti par l’Etat (PGE) est, selon lui, le meilleur dispositif pour sécuriser la trésorerie, pérenniser la pharmacie, régler ses fournisseurs et préserver ses emplois. « Sollicitez-le et si au bout de 12 mois vous constatez ne pas en avoir besoin, vous pourrez le rembourser en une seule fois », a -t-il recommandé à ses clients pharmaciens. Sans, pour autant, négliger les autres pistes offertes par les mesures d’accompagnement aux entreprises : reports d’échéances fiscales et sociales, de cotisation retraite CAVP, d’échéances de crédits bancaires et de crédit-bail différées de 6 mois sur simple demande du locataire et de l’emprunteur… « Le PGE et le décalage des emprunts de 6 mois sont les deux dispositifs les plus efficaces en pharmacie, ajoute Olivier Delétoille, expert-comptable du cabinet AdequA.

BAISSER SA PROPRE RÉMUNÉRATION

Si les mesures d’aide de l’Etat ne sont pas suffisantes ou tardent à se faire sentir, il faut enclencher en parallèle des processus de réduction de coûts. « La première des choses à faire est de différer les commandes et livraisons des achats directs non nécessaires à la poursuite de l’activité et de privilégier les commandes auprès des grossistes répartiteurs pour le réapprovisionnement », indique Joël Lecœur. En revanche, différer ses paiements fournisseurs est une fausse bonne idée. « En effet, une telle action déployée à grande échelle risque de gripper le système et de multiplier les défaillances d’entreprise. » En gestion de crise, il faut travailler plus et limiter les prélèvements du dirigeant. Corollaire dans ce cas : « Si le pharmacien est amené à réduire sa rémunération de gérance ou son revenu, il peut moduler à tout moment le taux et les acomptes de prélèvement à la source, conseille Joël Lecœur. Il peut également reporter d’un mois sur l’autre jusqu’à trois fois le prélèvement mensuel, une seule fois s’il est au prélèvement trimestriel. »

En complément, il est possible de demander par anticipation un ajustement de son échéancier de cotisations pour tenir compte d’ores et déjà d’une baisse de ses revenus, en estimant son revenu sans attendre la déclaration annuelle.

INVESTIR

Pour relancer son activité, le pharmacien a besoin de toutes ses forces vives (bras et marchandises). « S’engager précipitamment vers une restriction drastique des coûts peut s’avérer contreproductif », met en garde Olivier Delétoille. Il plaide, à l’inverse, pour une réactivité. « En gestion de crise, la communication est un véritable levier amplificateur pour sortir ou, en cas de communication défaillante, s’y enfoncer », explique-t-il. Une vraie réflexion est à mener sur le plan humain. En effet, cette période a été l’occasion de repérer les membres de l’équipe qui ont été solidaires et constructifs, mettant d’autant plus en exergue ceux qui ne l’ont pas été. Le message de cet expert-comptable reflète le sentiment général des économistes : les entreprises doivent s’ouvrir et investir plutôt que de se refermer, se replier, et aller à la recherche d’économies de charges anodines. Une vraie réflexion est également à mener « Si le dirigeant arrive à déceler l’origine exacte de la crise actuelle et à la cataloguer opportunément, les solutions à mettre en œuvre devraient couler de source », conclut-il. Pour améliorer ou affiner la démarche, le dirigeant doit être éclairé objectivement sur les compétences, les points forts et les faiblesses, ainsi que les menaces et les opportunités de l’entreprise par rapport à son environnement. Autrement dit, il faut avoir connaissance du mal et en connaître les causes pour apporter le bon remède.

LE REPORT D’EMPRUNT N’EST PAS GRATUIT

Attention, la suspension des échéances de remboursement (capital, intérêts et assurances) est annoncée par la banque sans frais ni intérêt de retard, mais un report de 6 mois de manière échelonnée en fin de prêt n’est pas gratuit. Ce report générera la perception d’intérêt au taux du prêt sur la période courue à partir de la première échéance qui suivra la reprise du paiement du prêt plus, éventuellement, de nouveaux frais de dossier. « Le coût supplémentaire est relatif, par rapport au risque de rencontrer des difficultés de trésorerie sur les 10 ans à venir », minimise Olivier Delétoille, expert-comptable du cabinet AdequA, qui recommande cette solution de prudence.

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