CPTS : Un projet moteur ? - Pharmacien Manager n° 195 du 01/02/2020 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Pharmacien Manager n° 195 du 01/02/2020
 

PRATIQUES

Auteur(s) : François Pouzaud

Au nord, il y a des corons et la Communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS) de Liévin-Pays d’Artois (Pas-de-Calais). Sophie Sergent, pharmacienne à Liévin, présidente de la commission pharmacie clinique et exercice coordonné à la FSPF et administratrice à l’URPS pharmaciens des Hauts-de-France, a été l’instigatrice et la cheville ouvrière de cette CPTS, créée en mars 2018 et homologuée en 2019. Sans la connaissance des CPTS créées par la loi de modernisation du système de santé de janvier 2016 dite “Loi Touraine”, elle n’aurait jamais été l’un des membres fondateurs de cette association loi 1901. « Lorsqu’on crée une CPTS, il faut savoir pourquoi et comment y aller, sinon c’est très compliqué ! », met-elle en garde. Pour embarquer ses confrères dans l’aventure des CPTS, elle n’a pas compté ses heures, ses déplacements, les réunions d’information au cours desquelles les pharmaciens ont écouté religieusement la leçon CPTS. A fin 2019, elle a formé plus de 1000 pharmaciens de la métropole et des DOM. Olivier Rozaire, président de l’URPS pharmaciens Auvergne-Rhône-Alpes et président de l’USPO Loire, prêche également la bonne parole auprès de ses ouailles, les invitant régulièrement à être à l’initiative de la création de CPTS. « Elles représentent un des pans d’avenir de notre profession, tout ce qui est prévu dans les divs des lois de santé ne pourra se faire qu’au travers des CPTS », martèle-t-il à l’envi. Un discours qui porte ses fruits dans sa région. « Sur les 50 à 60 projets de CPTS en cours, il y en a un bon quart dont le porteur de projet est le pharmacien, soit parce qu’il en est à l’origine, soit parce qu’il a été désigné par les autres co-fondateurs pour revêtir ce statut », précise-t-il.

SAISIR l’opportunité.

Comme Sophie Sergent, Michel Leroy, titulaire parisien, est à l’initiative d’une CPTS, dans le 13ème arrondissement de la capitale. Il a, lui aussi, baigné dans l’interprofessionnalité avant de se lancer dans cette nouvelle entreprise. « J’ai fondé le premier réseau de soins palliatifs de France et j’ai entraîné dans cette structure 85 % des pharmaciens du quartier », affirme Michel Leroy, qui est également co-président du syndicat des pharmaciens de Paris (FSPF). En montrant la voie, il est luimême moteur pour la profession et lors de réunions syndicales, l’objectif est de créer “une étincelle” (sic) chez ses confrères. Son message : l’heure n’est plus à la réflexion, mais à l’action. « Il faut profiter de la dynamique actuelle, car elle ne durera pas. Aujourd’hui, l’imagination est un peu au pouvoir, mais dans deux ou trois ans, le maître d’école (l’Assurance maladie) sifflera la fin de la récréation et des financements directs des créations des CPTS. Après, le cadre deviendra plus contraignant et plus lourd sur le plan administratif », prévient-il. Pour lui, il faut vite profiter de l’effet d’aubaine. « Les tutelles sont demandeuses, les chefs de services de la sécurité sociale et des Agences régionales de santé ont des objectifs à atteindre en termes de nombre de CPTS créées et, de ce fait, ne se montrent pas trop regardants sur la façon dont elles sont composées », souffle Michel Leroy.

DE LONGUE haleine.

Au-delà des connaissances et de la “technique” pour monter une CPTS, la réussite est d’abord d’ordre comportemental. La patience et la résilience deviennent les vertus cardinales lors d’une telle création. « Même si, en deux ans tout a changé ! Le parcours de création des CPTS est devenu plus fluide, mieux balisé et les aides au démarrage n’existaient pas », souligne Sophie Sergent. Son conseil ? Ne pas se précipiter et bien définir les projets de santé en rapport avec les besoins du territoire, en relation avec l’ARS et les collectivités locales. « Laisser le projet arriver à maturité, car il est essentiel que ses acteurs se l’approprient, sinon il n’accouchera que d’une coquille vide ». Et elle ajoute : « Le temps n’est pas un frein. Il est nécessaire pour mettre en lien des professionnels avec des compétences, des formations et des spécificités différentes. Il faut compter entre 6 et 18 mois pour monter une CPTS. Sinon, on court à l’échec ! »

EXERCER un bon leadership.

Le but d’une CPTS est de fédérer les professionnels en communauté. Peu importe si le pharmacien est le premier artisan de sa création, selon Sophie Sergent. « S’il n’y a pas de CPTS sur son territoire, le pharmacien doit être moteur. S’il existe déjà un projet en cours et qu’il est appelé, il doit le rallier et être dans l’organe de gouvernance ». Pour elle, pas question de s’investir dans ce type d’organisation pour laisser la main à d’autres. Tout en rappelant que « l’objectif d’une CPTS n’est pas de tirer la couverture à soi, mais de créer une logique de travail de coordination et d’interprofessionnalité ». Même son de cloche du côté de Michel Leroy : « Il faut être leader, mais sans se mettre à dos les confrères ». Les professionnels de santé participant aux CPTS perçoivent des indemnités en fonction du temps passé à créer le projet : participation à des réunions de coordination ou de qualité… « Demain, on peut imaginer, dans le cadre des négociations mono-catégorielles, qu’une partie des rémunérations du pharmacien soit assujettie à son adhésion à une structure d’exercice coordonné », pronostique Sophie Sergent.

LE CAS DU MOIS

En tant que premier système de coordination structuré, les Communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) sont un outil indispensable à l’exercice d’une grande partie des nouvelles missions du pharmacien : dispensations protocolisées, pharmacien correspondant, la téléconsultation (TLC) en officine… Sur la TLC, par exemple, les CPTS ouvrent davantage le champ des possibles. Dans l’avenant n° 15 à la convention pharmaceutique, lorsque l’exigence tenant au respect du parcours de soins ne peut pas être satisfaite (patient ne disposant pas de médecin traitant désigné ou médecin traitant non disponible), la téléconsultation peut être assurée dans le cadre d’une CPTS. On l’a compris, la CPTS est le sésame du pharmacien pour conforter et valoriser son rôle de professionnel de santé et se positionner comme un acteur clé de la nouvelle organisation du système de santé. De bonnes raisons pour être proactif.

LES EXPERTS

Sophie Sergent PRÉSIDENTE CPTS LIÉVIN-PAYS D’ARTOIS

Michel Leroy FONDATEUR D’UNE CPTS DANS LE 13ÈME À PARIS

Olivier Rozaire PRÉSIDENT DE L’URPS, PHARMACIENS AUVERGNE RHÔNE-ALPES

AH OUI !

Le pharmacien doit prendre les rênes des CPTS. « Il n’y a que les pharmaciens d’officine qui voient les non-malades », explique Michel Leroy, et de par la répartition démo-géographique des officines, « ce sont eux qui connaissent le mieux un territoire de santé. »

OH NON !

Se servir de la CPTS comme un moyen de promotion de la pharmacie, ou de sollicitation de la clientèle.

CPTS

Les étapes-clés pour réussir

• Organiser des réunions à l’échelle du territoire pressenti : par équipe de soins primaires, par profession, par thème abordé. Prévoir à chaque fois un temps d’échange collectif.

• Identifier des axes de travail prioritaires et créer des groupes de réflexion pour recenser les solutions existantes et généralisables à partir du diagnostic territorial de santé des besoins ; identifier de nouvelles pistes de travail ; associer les autres acteurs concernés (ex : l’hôpital du secteur) ; réaliser des fiches-actions qui constitueront le projet de santé final.

• Définir le ou les projets de santé à déposer à l’ARS en vue d’une contractualisation et d’un financement.

• Mettre en place la CPTS (association loi 1901) et créer un bureau, un répertoire des adhérents, rédiger les statuts et les déposer en préfecture.

- Déposer le projet de santé à l’ARS qui donne sa réponse sous 2 mois (avis sur le projet par le biais d’une instruction). Dans l’intervalle, il faut fixer une date de signature du contrat territorial de santé en vue des demandes de financement.

- Effectuer les demandes de financement : réalisation d’un budget prévisionnel, identification de toutes les sources de financement possibles : ARS (aide au démarrage, Fond d’Intervention Régionale), le contrat de plan Etat-Région (CPER) pour des projets de télémédecine ; les caisses primaires ; les collectivités territoriales (conseil départemental ou communautés de communes)…

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