Créer de la valeur

Comme son nom l’indique, le management par les valeurs s’appuie sur des valeurs partagées par toute l’équipe. « La méthodologie pour le déployer commence par un questionnement simple : quelles sont les valeurs et les postures qui permettront d’améliorer la performance du business et de mieux travailler ensemble ? », confie Francis Boyer, consultant en innovation managériale au sein du cabinet Dynesens. Une question que l’ensemble de l’équipe doit se poser. « La participation des collaborateurs au choix des valeurs conditionne la réussite du projet, car si la démarche vient d’en haut, il y a de fortes chances que certains ne se sentent pas concernés et n’aient pas envie de les incarner », constate Eric Delavallée, directeur d’IM Conseil & Formation, un cabinet de conseil spécialisé dans la transformation des organisations et le développement managérial.

DONNER du sens.

Lorsqu’il intervient en entreprise, Francis Boyer soumet une dizaine de valeurs liées au business et à la relation avec les clients : la confiance, la crédibilité, la transparence, l’empathie ou le respect… Il en propose d’autres qui relèvent, elles, du collaboratif : l’agilité, l’entraide, l’innovation, le partage, la convivialité ou la responsabilisation… Charge à l’équipe de voter pour les quatre qui lui semblent les plus importantes. « L’idéal étant de retenir deux valeurs business et deux collaboratives, afin d’établir un mode de management équilibré », précise Francis Boyer. Une fois les valeurs déterminées, il faut rédiger pour chacune d’entre-elles une phrase d’explication qui va donner du sens. « Si l’on prend, par exemple, la confiance ou le respect, on peut tous les interpréter de manière différente. Pour les exploiter en management, il faut que tout le monde partage la même représentation », assure Francis Boyer. Le consultant demande ensuite à tous les membres de l’équipe de dire si, sur une échelle de un à dix, ils adhèrent à cette valeur, et sur une échelle de un à quatre, s’il leur sera facile de l’incarner au quotidien. « Ensuite, il ne reste plus qu’à définir le contrat collaboratif qui va définir l’état d’esprit et l’attitude attendue auprès des clients et au sein de l’équipe. »

RENFORCER la cohésion.

Eric Delavallée applique, lui, une approche sensiblement différente qui part du projet stratégique de l’entreprise. « Je distingue les valeurs affichées des valeurs pratiquées, explique le consultant. Les premières sont celles que vous souhaitez partager avec les salariés, les secondes, celles qui sont issues de votre culture et de votre histoire. Les deux ne se superposent pas forcément, et lorsqu’il y a un écart trop important, cela peut devenir problématique et générer de la frustration au sein des équipes. » Dans un premier temps, Eric Delavallée conseille d’identifier les valeurs pratiquées au sein de l’équipe, « en distinguant celles qui sont positives, et que l’on souhaite réaffirmer, les négatives, qu’il s’agira de faire évoluer ou disparaître, et les nouvelles valeurs qui ne sont pas encore acquises, mais dont l’officine aura besoin demain. » Là encore, pour obtenir un management équilibré, il est conseillé de retenir deux valeurs dans chaque catégorie. « Si l’officine se distingue par une vraie culture en matière d’accueil et de conseil, il faut les retenir comme les deux valeurs pratiquées positives à maintenir. Si l’équipe pêche sur la capacité à proposer des services aux patients ou a tendance à se montrer nostalgique, ces deux items seront ceux qu’il faudra améliorer ou faire disparaître. Enfin, pour ce qui est des nouvelles valeurs à adopter, cela peut être l’innovation, la créativité, l’esprit d’équipe… », ajoute Eric Delavallée.

Y’A plus qu’à !

La mise en application au quotidien constitue d’ailleurs la principale difficulté de ce mode de management, comme le rappelle Francis Boyer : « lorsque l’on interroge les collaborateurs, 95 % d’entre eux adhèrent aux valeurs choisies, 70 % y croient, mais ils ne sont plus que la moitié à estimer qu’ils arriveront facilement à se les approprier. » Mettre en place des actions permet de faciliter cette appropriation. « Si la crédibilité fait par exemple partie des items retenus, des formations peuvent être proposées à l’équipe, afin d’améliorer la connaissance des produits ou la qualité du conseil », suggère Francis Boyer. Même si le meilleur indicateur du respect des valeurs reste la satisfaction client. « Lorsque les patients sont contents, cela veut dire que les valeurs sont respectées », affirme Catherine Mieg, clinicienne du travail et consultante en management. Pour s’assurer dans le temps que l’équipe respecte le cadre fixé, Francis Boyer recommande de réunir les collaborateurs une fois par trimestre. « Il faut leur demander d’évaluer chaque valeur avec un code couleur qui peut aller du rouge au bleu. Et dès qu’une valeur ressort en rouge, il faut essayer de trouver les solutions qui vont permettre de régler le problème. » Le management par les valeurs possède plusieurs vertus, d’après Francis Boyer. « Il permet de donner du sens et d’améliorer le bien-être et l’efficacité au travail. Il se révèle aussi efficace comme outil de recadrage en cas de conflit avec des personnalités difficiles. » Pour Éric Delavallée, il contribue aussi à souder les équipes en instaurant un mode de management organique qui va diffuser la culture de l’entreprise auprès de chaque collaborateur. « Et lorsque cette culture est partagée, vous avez moins besoin de contrôles, de règles ou de process, ce qui laisse plus de place à l’autonomie et à la responsabilisation des collaborateurs. »