Capital humain

Ce jour-là, début mai, la préparatrice, Bouchra*, s’agace. Face au titulaire, dans son bureau, elle recherche une référence dans un catalogue que son patron ne trouve pas. Tout se passe dans un esprit de camaraderie respectueux. A la tête de la Pharmacie Carré Sénart, Adrien Soumet y tient. Ainsi, ce fan de l’équipe de football A.J. Auxerre coache en étant à l’écoute et, surtout, en laissant libre son équipe. A la base, 7 salariés ont été repris lors du rachat de l’officine et huit nouvelles recrues ont été méticuleusement sélectionnées en fonction de leurs savoir-faire et de leur savoir-être. Plusieurs d’entre elles avaient déjà travaillé avec le titulaire. C’est le cas de Mélanie, une jeune femme à la double compétence esthétique et diététique. Et aussi d’Emmeline, une préparatrice qui a la bougeotte. Elle ne conçoit pas de passer sa journée au comptoir et elle adore le merchandising. Son rayon “totottes”, compliqué à ordonner, est particulièrement impeccable.

UNE AIDE logistique.

La pharmacie, dont le stock était jusque-là de 350 000 € et qui a doublé dans la nouvelle officine, a besoin d’assurer le remplissage de ses immenses rayons. Emmeline est chargée d’assurer le relai entre l’entrepôt du sous-sol et la surface de vente. Du coup, son emploi du temps se répartit entre 8 h et 16 h, du lundi au vendredi. Résultat, tout le monde est content : le patron qui voit ses linéaires remplis et la salariée, mère de famille, qui ne vient pas le samedi.

UN ESPRIT d’équipe.

Elle travaille main dans la main avec les jumeaux, Marvin et Jefferson, aux commandes de l’entrepôt. Eux, non plus, ne sont pas là par hasard. Comme le titulaire, ce sont des supporters de l’A.J. Auxerre. C’est par le biais de cette passion qu’ils se sont rencontrés. Et quand, en marge d’un match, les deux jeunes se plaignent d’avoir du mal à trouver un emploi, le pharmacien leur propose de piloter les stocks - 110 m² en sous-sol, où désormais flotte le drapeau bleu et blanc du club historique du foot français. Le matin, le duo monte des produits sur des transpalettes jusqu’aux rayons. Là, Emmeline prend le relai et remplit les étagères. Dans la journée, elle est amenée à aller chercher des caddies de boîtes pour refaire le plein. Pour les épauler, la pharmacie s’est équipée d’un robot Meditech (150 k€). Plus de 20 000 boîtes peuvent y être stockées. Grâce à cette machine, impressionnante par sa taille, le personnel au comptoir reste plus longtemps avec les patients. Dans le même esprit, quatre personnes (deux préparatrices et deux esthéticiennes) sont en permanence dans la surface de vente, aux deux comptoirs d’accueil et dans les rayons pour renseigner la clientèle.

UN DIALOGUE permanent.

Avec cette équipe choisie sur mesure, l’ambiance est bon enfant. Le titulaire demande régulièrement l’avis des uns et des autres. Pour communiquer, il est adepte de WhatsApp. Le groupe du staff permet de passer les messages du quotidien : la photo de la soirée au restaurant pour fêter l’inauguration, celle d’un écouteur perdu par l’un d’eux… Plus surprenant, il existe aussi un WhatsApp des voleurs. Le titulaire les photographie en flagrant délit sur son écran de contrôle et diffuse leur portrait sur ce groupe privé. Quand le larron repasse, il est temps pour le pharmacien de lui proposer la note. Enfin, Adrien Soumet est également actif sur les comptes WhatsApp de son groupement GPO. C’est là qu’il demande leur avis à ses co-adhérents : si telle marque se vend bien, par exemple.

A L’ÉCOUTE des clients.

L’endroit se veut aussi plaisant pour les clients. Après plusieurs remarques de la clientèle sur l’aspect sombre de la zone des neuf caisses, le titulaire a choisi un éclairage plus clair. Pour que la circulation soit plus fluide, les tablettes des gondoles, habituellement de 30 cm de profondeur, ont été limitées à 20 cm. La largeur des allées est de de 1,40 m. « Nous sommes passés d’un magasin accueillant à un magasin agréable […] Aujourd’hui, 80 % des ventes proviennent du conseil », estime le titulaire qui remarque aussi que les personnes en fauteuil roulant rentrent là plus volontiers. « J’ai l’impression d’en avoir reçu davantage durant le premier mois, qu’en un an dans mon ancienne pharmacie ». Résultat, la Pharmacie Carré Sénart donne une image rassurante. « Depuis que nous avons cette enseigne, on nous demande souvent si nous avons une carte de fidélité », remarque le titulaire, qui précise qu’elle est en cours de développement. De fait, Adrien Soumet est toujours en action, toujours à l’écoute des suggestions. Et sur son bureau, un tapis de souris rapporté d’un voyage du centre spatial Kennedy résume sa motivation : « Failure is not an option » (l’échec n’est pas possible).