Lorsque votre promesse est bonne, vous n’avez pas besoin de marketing !

Après un BEP électrotechnique et un bac pro informatique en alternance à la SNCF, Paul Morlet commence à travailler en apprentissage comme électricien à la SNCF. À 20 ans, il se lance dans la création de sa première entreprise de lunettes publicitaires/personnalisables (Lulu Frenchie) avec seulement 3 000 € en poche. Quatre ans plus tard, il lance Lunettes Pour Tous à Paris avec Xavier Niel, le fondateur de Free.

« Pharmacien Manager ». Quelle est votre vision de l’optique en France ?

Paul Morlet. Pour porter des lunettes en France, il fallait du temps et de l’argent. Pour répondre à ces besoins, j’ai apporté de meilleurs prix et délai. Maintenant, c’est 10 € et 10 minutes…

P. M. Le créneau des lunettes low cost, est-ce une vraie tendance ?

P. M. Tous les marchés ont déjà été secoués - l’aérien avec Easyjet, l’hôtellerie avec airbnb, les taxis avec Uber, les forfaits mobiles avec les box… - l’optique est juste un marché supplémentaire.

P. M. Votre démarche n’est pas sans rappeler celle de Xavier Niel, le patron de Free. Est-ce un modèle pour vous ?

P. M. En effet, Lunettes Pour Tous est née d’une discussion avec Xavier Niel, en 2013. Et nous avons monté cette entreprise ensemble : lui aux finances et moi aux opérations.

P. M. Quelle est votre cible clientèle ?

P. M. Chez Lunettes Pour Tous, il existe deux types de clients : ceux qui n’ont pas beaucoup d’argent et ceux qui en possèdent sans avoir de temps. Notre concept s’adresse vraiment à tout le monde. Les personnes pressées peuvent obtenir des lunettes en 10 minutes et celles qui n’ont pas beaucoup de moyens peuvent s’en procurer en déboursant seulement 10 € (et aussi en 10 minutes !). Les deux promesses vont de pair, l’une ne va pas sans l’autre.

P. M. Comment être rentable avec des prix aussi bas ?

P. M. En moyenne, un opticien traditionnel reçoit 2,8 clients/jour. Lunettes Pour Tous accueille plus de 100 clients/jour, par magasin. Pour assurer ce flux de clients tous les jours, nous garantissons les lunettes prêtes en 10 minutes. Nous sommes les seuls à garantir un tel service et délai en France. Et en adaptant le service, en mutualisant les coûts, nous divisons entre 5 et 10 fois le prix des lunettes. Les clients sont conquis.

P. M. Comment abordez-vous la notion d’accompagnement et de services dans vos points de vente ?

P. M. Nous vendons, aujourd’hui, environ 1 000 paires de lunettes par jour, soit 300 000 paires de lunettes par an sur un marché total de 13 000 000 de paires, soit 2 % du marché en volume avec huit magasins. Le service est notre ADN, est efficace, peu commun car il est en capacité d’absorber plusieurs centaines de clients par jour et par magasin. Notre stratégie démontre qu’un magasin retail attire toujours beaucoup de clients par rapport à la vente en ligne, à condition d’apporter de l’innovation et du service.

P. M. Comment communiquez-vous ?

P. M. Principalement par le bouche-à-oreille. Nous avons mis du temps à venir sur les réseaux sociaux, parce que nous voulions une communication de proximité. Nous gagnons beaucoup de clients sans réseaux sociaux et il vaut bien mieux ne pas dépendre uniquement de ces plateformes. Lorsque votre promesse est bonne, vous n’avez pas besoin de marketing ! Mais, je dois avouer que les nombreux reportages à la télévision ont été une vraie rampe de lancement.

P. M. Où en est le développement de votre réseau ?

P. M. Nous avons installé notre enseigne dans huit villes en France (Paris, Lyon, Marseille, Bordeaux, Lille, Toulouse, Nantes et Rennes) et nous employons 230 collaborateurs après seulement quatre années d’existence. En 2019, nous prévoyons une nouvelle ouverture par mois, pour atteindre un effectif total de 600 collaborateurs répartis dans une quinzaine de villes d’ici à un an.

P. M. L’optique en officine, vous y croyez ?

P. M. Pourquoi pas, mais aujourd’hui les offres existantes proposent un service au rabais, voire inexistant (pas d’examen de vue, livraison longue, peu de choix de montures, pas toujours d’opticiens sur place) avec des prix très légèrement en dessous du marché classique, ce n’est pas une révolution du tout pour les Français. Nous voulons absolument que nos clients aient accès à un vrai service complet et clé en main : examen de vue complet, gratuit et sans rdv, un choix très large de montures (400 modèles), une livraison de vos lunettes de manière immédiate, quelques minutes après l’achat.

P. M. La santé low cost : rêve ou cauchemar ?

P. M. La santé low cost a eu mauvaise presse avec les nombreux concepts de cabinets dentaires. Ce que l’on n’imagine pas dans la santé low cost, c’est qu’en réalité, il faut embaucher des praticiens beaucoup mieux payés que le marché traditionnel et investir dans des équipements dernière génération de taille industrielle, ce sont les deux clés évidentes pour faire du volume en gardant de la qualité.

P. M. Vous avez participé à la nouvelle émission de TF1, Les Français ont du génie. Pourquoi ?

P. M. Je trouve très encourageant et intéressant que la plus grosse chaîne TV du pays présente au premier plan des jeunes inventeurs et créateurs, partant de rien. C’est touchant et cela révèlera sûrement des nouveaux talents ne se croyant pas capables de réussir.