" La marque est un être de discours et d’actes " - Pharmacien Manager n° 177 du 27/04/2018 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Pharmacien Manager n° 177 du 27/04/2018
 
L’INVITÉ PHILIPPE SACHETTI

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Auteur(s) : Fabienne Colin

Pharmacien de formation, Philippe Sachetti est devenu conseiller en communication. Il estime que la marque est le véhicule de toutes les valeurs. Il explique pourquoi le titulaire a intérêt à rédiger ses convictions pour les incarner. Et les transmettre à son équipe.

→ Docteur en pharmacie, ce diplômé de l’Institut d’Administration des Entreprises de Caen oeuvre depuis toujours dans des agences de communication. Il a d’abord créé Bossa Nova, puis Kuryo, agence on-line spécialisée sur la communication de marques, avant de donner naissance au cabinet d’architectes de marques, pH6. Son portefeuille client comprend des enseignes comme Paris Pharma, Fly, Leroy Merlin, Norauto… Au sein de pH6, il a mis en place “Le Labo de la Confiance”, un outil de diagnostic qui fait état de la confiance et/ou de la méfiance du public envers les marques.

« Pharmacien Manager ». Sur quels critères un commerçant doit-il choisir le nom de son point de vente ?

Philippe Sachetti. Il doit opter pour un nom signifiant, qui dit quelque chose à l’autre. L’officine peut s’appeler « Pharmacie Dupont » ou « Pharmacie du marché », car c’est déjà un élément de distinction. Le nom doit également être simple et le plus mémorisable possible. Faire du commerce revient à faire du design, c’est-à-dire à essayer d’améliorer la vie de l’autre en se mettant à sa place. Il faut réduire l’effort que l’autre va devoir fournir pour vous comprendre.

P.M. Quel est l’intérêt pour une officine d’être une marque ?

P.S. Avant toute chose, il faut définir une marque. Une marque est créée par un groupe, une entreprise, une collectivité, une association, un syndicat etc, donc par un collectif. C’est un être de discours et d’actes. Une représentation humanode, je dirais même anthropomimétique, qui va imiter une personnalité humaine et va prendre la parole au nom d’une organisation. Elle va agir au nom de ce collectif. Le consommateur va nouer une relation avec elle. Dans le cas du pharmacien, celuici est déjà celui qui agit. Il a intérêt à s’inspirer de ce qu’on utilise pour construire une marque, mais il n’a pas besoin de bâtir un autre lui-même. Il doit s’imprégner de sa propre vision du monde, d’une posture, d’opinions fortes et définir sa manière d’interagir avec l’autre et sa conception du commerce… Autant d’éléments de marque que le pharmacien doit d’abord incarner pour que ces attributs soient reconnus par ses clients. Et surtout les partager avec son équipe.

P.M. Quelles sont les questions à se poser pour construire cette marque ?

P.S. Premièrement, qu’est-ce qui me caractérise ? Qu’ai-je envie que l’on perçoive de moi ? Qu’est-ce qui m’intéresse ? Quel est mon point de vue sur les problèmes de mes clients ? Ce travail introspectif doit permettre de savoir ce sur quoi on va pouvoir agir et parler. Cette bannière est le point de départ d’une nouvelle mission. Toute l’équipe peut, alors, se comporter d’un seul homme. D’ailleurs, si une marque disparaît sans attrister personne, c’est que cette marque n’en est pas une !

P.M. Comment faire comprendre ses valeurs à son équipe ?

P.S. Il faut les écrire. Rédiger sa manière d’exercer du commerce, son point de vue sur tel et tel sujet… Puis, cela suppose de former ses équipes à ses valeurs dans le but d’être cohérent. L’objectif est d’éviter la cacophonie. Par exemple, il est impensable qu’un titulaire transmette ses convictions sur l’homéopathie et que son assistant affirme, de son côté, que ce n’est que du sucre ! Le consommateur percevrait tout de suite le discours discordant.

P.M. Quel est l’impact d’Internet et des réseaux sociaux sur une marque ?

P.S. Les médias sociaux sont les premiers recours d’un citoyen consommateur. C’est là qu’il va se faire une idée, avant même de se déplacer dans un commerce. Là, il va observer tous les points de contact que lui offre une marque et les juger. D’où l’importance de miser sur la cohérence. On ne peut pas avoir une superbe pharmacie et un site négligé !

P.M. Le rôle de la pharmacie est en train de muter, conseilleriez-vous aux titulaires d’accompagner ce changement par un nouveau nom ?

P.S. Supprimer, par exemple, le mot « pharmacie » et le transformer par « un espace de santé » ? Non, je pense qu’il faut défendre la pharmacie avec une grande fierté. Si on lui donne de nouvelles missions, l’officine va retrouver ses racines. Une pharmacie est un endroit où l’on trouve de la connaissance, de l’accueil, des actes… Il faut capitaliser sur tout ce qui va venir et le prendre comme un juste retour des choses. N’oublions pas que le consommateur a pour aspiration d’avoir des repères. Et je pense que supprimer le mot « pharmacie » ou la racine « pharma », c’est lui enlever un repère. En revanche, il devient intéressant d’enrichir le mot « pharmacie ». C’est l’occasion d’affirmer aux patients/clients qu’une pharmacie « apporte bien plus que ce qu’ils imaginent ». Tout l’enjeu est de parler de la vaccination, raconter ses nouvelles missions, présenter le pharmacien tel un professionnel de santé.

P.M. La croix verte est-elle un repère suffisant ?

P.S. C’est un signe fort, un repère important. Et même s’il y a quantité de signaux émis à l’extérieur, avertir de la présence d’une pharmacie » restera essentiel pendant longtemps encore. Je suis attaché à la conservation des repères, plutôt que de les changer.

P.M. La perte de confiance des consommateurs vis-à-vis des marques nationales pourrait-elle, un jour, affecter le capital confiance dont les officines bénéficient aujourd’hui ?

P.S. Il y a quelque temps, nous avons créé “Le Labo de la Confiance”, pour étudier de plus près cette confiance qui disparaît. Le résultat est pandémique. La défiance ou la méfiance sont absolument redoutables. Elles reposent sur trois causes : le jugement de la compétence, de l’intégrité et de la bienveillance. Et pour avoir la confiance de l’autre, les trois sont nécessaires. Dans une officine, la compétence doit être criarde – ce n’est pas simple, l’intégrité parfaite – la dualité entre professionnel de santé et commerce n’est pas évidente à assumer, et il faut de la bienveillance, c’est-à-dire dans certains cas offrir davantage à l’autre qu’à soi-même. Trois points clés dans lequel le pharmacien doit se demander s’il est bon !

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