Le déstockage, une autre façon d’acheter - Pharmacien Manager n° 176 du 29/03/2018 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Pharmacien Manager n° 176 du 29/03/2018
 

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Auteur(s) : Fabienne Colin

Des invendus, des lots de marque nationale, des produits inconnus à vil prix… les déstockeurs vendent diverses marchandises par Carton, palette ou camion. Bien capitaliser sur ces réseaux est complexe. Mais cela peut rapporter gros.

Des Pampers en pharmacie ? C’est devenu presque banal. Leader Santé avait fait figure de pionnier en achetant des lots de couches-culottes de grande distribution pour les revendre en officine. L’objectif : se différencier en proposant des produits du quotidien à petits prix. Depuis près de dix ans, le groupement parisien a appris à gérer les achats de déstockage. Aujourd’hui, d’autres lui ont emboîté le pas. À tel point que le salon Pharm’Affaires, lancé en 2014, fait la part belle aux déstockeurs. Parmi les exposants de l’édition 2017, des entreprises tels que Chamylinex, Interlots, Sacha Destock, les belges BB Concept et J&Co achètent des surstocks et des fins de série bradés pour les revendre à des commerçants… La technique, bien huilée dans le textile ou l’électroménager, est désormais mise à profit dans le circuit pharmaceutique. « Aujourd’hui, comme le consommateur, le pharmacien achète partout. Le déstockage est un canal d’approvisionnement au même titre que le grossiste, le “direct labo”, les plateformes Internet, les sites de rétrocession… », observe Alexandre Mergui, président de Pharmavance, un réseau de 42 croix vertes en France. « Il représente 10 à 15 % de nos achats, soit environ 100 000 € de CA et 30 000 € de marge par an, par pharmacie. » Des ratios qui donnent à réfléchir !

MARCHER sur les plates-bandes de la grande distribution.

Le déstockage permet de référencer des marques originales en officine, car habituellement vendues en grandes surfaces. Au-delà de Pampers, on voit des petits pots Blédina, de la crème Nivea, des bains de bouche Listerine… C’est aussi un moyen de s’approvisionner en objets à faible valeur faciale. Comme des coupeongles, des brosses à cheveux, des sticks à lèvres qui sont souvent propices aux achats d’impulsion. « C’est une façon d’élargir l’offre et les prix », explique Alexis Berreby, président de Leader Santé Groupe et titulaire de la Pharmacie Moderne à Aubervilliers (93). « Et ça marche particulièrement bien dans les quartiers populaires. Il faut dire que certains de nos prix publics sont inférieurs à ceux de la GMS ! » De son côté, Pharmavance applique une méthode simple. Le tarif sur les étiquettes est conçu en fonction des euros grapillés sur le prix d’achat habituel : « On divise la marge en deux : moitié pour nous, moitié pour le client », détaille Alexandre Mergui. La chaîne se fait livrer deux camions de couches-culottes par mois, mais aussi du Neutrogena, du Scholl et toutes sortes de produits d’hygiène que les consommateurs achètent plus spontanément en grande surface. « Nous voulons capter, non pas le flux des autres pharmacies, mais ceux de la GMS ou des grandes enseignes de déstockage comme Babou ou Tati qui vendent de la parapharmacie. »

UNE ORGANISATION spécifique.

Réussir de tels coups et sur la durée nécessite une organisation bien rodée. Si n’importe quel pharmacien peut se rendre à Aubervilliers - là où quantité de déstockeurs sont installés, réaliser ses achats carton par carton exige du temps, une excellente connaissance des prix, de l’argent comptant et un véhicule pour rapporter ses achats. Et dans ce monde, l’étalon par référence est plus proche du camion ou de la palette, que du carton de 36 ! Autrement dit, mieux vaut travailler à plusieurs pour espérer une rentabilité. Les groupements les plus organisés ont développé un savoir-faire spécifique. Après avoir découvert le déstockage à Aubervilliers, Pharmavance a remonté les filières et appris les rouages du marché. Désormais, les achats via ce canal sont industrialisés. L’entrepôt de la centrale d’achat abrite les produits ainsi achetés « pour six mois, en général ». L’enseigne dispose également d’un acheteur dédié à ce sourcing. Ce dernier est en charge de trouver des partenaires de confiance et d’apprendre à gérer ces produits à petits prix. « Mais si un laboratoire s’aligne sur le prix du déstockeur, nous préférons toujours travailler avec le premier », confie Alexandre Mergui. Pharmavance soumet systématiquement le tarif d’un lot à son fabricant avant d’acheter ailleurs. C’est ainsi que les filiales des labos installées en Europe de l’Est se retrouvent en concurrence avec leur société soeur basée en France. Quant à Leader Santé, il s’interdit le déstockage de marques dont il est par ailleurs partenaire. Il peut, ainsi, proposer sans gêne six produits toutes les six semaines, dans le cadre d’une promotion « à un prix exceptionnel et en quantité limitée ».

L’INTÉRÊT du déstockage.

Au final, le jeu en vaut-il la chandelle ? À la tête du réseau SupraPharm (52 adhérents), Bruno Fellous s’interroge. « Il y a deux jours, on m’a proposé des produits Mustela, ainsi que du Filorga en quantité astronomique par palettes pour 70 000 € », explique le titulaire de la Pharmacie Château Villiers à Levallois-Perret (92). « Or le prix n’est pas toujours si intéressant, car il faut payer au cul du camion, entreposer […] Faut-il vraiment stocker pour deux ans de sticks à lèvres pour gagner 50 centimes pièce ? » Celui qui fut pourtant l’un des premiers à vendre des Pampers sous l’enseigne Leader Santé a reconsidéré son point de vue. Et Procter a baissé ses prix. « Certes, je peux toucher du Pampers à 15 € le carton via un déstockeur. Mais chez Procter, je l’ai à 17,50 € dans les quantités que je veux, avec un escompte, une RFA, la possibilité de payer à deux mois et de travailler avec Fluocaril… » Aujourd’hui, il est toujours à l’écoute mais le prix n’est plus sa seule boussole.

Initiative originale

L’épicier ambulant des pharmacies

Le pharmacien n’a pas le temps de dénicher des produits innovants et à petits prix ? Qu’à cela ne tienne, la marchandise vient à lui. C’est le parti pris de Laurent Wajnfeld, qui a lancé son activité de déstockage fin 2017 et exposé à Pharm’Affaires avec sa camionnette. Il achète des lots, remplit son fourgon et démarche les pharmacies une à une. Un pack de six coupe-ongles par ci, un carton de 12 bains de bouche par là… En quelques minutes, le titulaire fait ses emplettes. Et le bouche-à-oreille fonctionne à plein. Les pharmaciens soufflent le nom de leurs confrères à cet épicier d’un nouveau genre. Résultat, plusieurs fourgons tournent déjà en Ile-de-France !

L’ESSENTIEL

→ Comme pour tout sourcing, le déstockage nécessite de bien connaître ses fournisseurs.

→ Il impose souvent d’acheter en très grande quantité.

→ Vendre des produits à très petits prix génère de l’achat d’impulsion.

→ Les lots permettent rarement un suivi des produits à la référence près.

- 30 %

C’EST LA RÉDUCTION moyenne procurée par un déstockeur, par rapport aux approvisionnements classiques.

LES CONTRES

Certains réseaux de pharmacies s’opposent au déstockage. Comme Paris Pharma ou Lafayette Conseil. « En vendant de la crème Nivea et du dentifrice Signal en officine, on ne défend pas le métier du pharmacien », estime Hervé Jouves, à la tête du réseau Lafayette. D’autres craignent le manque de suivi des gammes et de traçabilité. Restent que de nombreux groupements fondent leur modèle économique sur les remises accordées par les laboratoires. Or, le déstockage court-circuite ces derniers !

40 %

C’EST LA PART des ventes réalisées en 2017 avec des articles démarqués, tous secteurs confondus, contre 25 % en 2005.

Étude OpinionWay, novembre 2017.

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