Le marché respire mieux ! - Pharmacien Manager n° 173 du 01/12/2017 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Pharmacien Manager n° 173 du 01/12/2017
 

TENDANCES

Auteur(s) : Carole De Landtsheer

Après une période de forte décroissance, la courbe s’inverse et le marché des traitements nicotiniques de substitution reprend du poil de la bête. Retour sur les causes de cette reprise.

Après plusieurs années de baisse depuis 2013, les traitements pour l’arrêt du tabac renouent avec la croissance : + 28,5 % à fin août 2017, en cumul annuel mobile, soit la plus forte hausse enregistrée depuis 2007, selon l’Observatoire français des drogues et toxicomanies (l’OFDT). Un scénario impensable il y a deux ans, alors que le marché s’était enfoncé avec l’explosion de la cigarette électronique. Une e-cigarette qui était alors perçue comme un moyen de réduire, voire de supprimer toute dépendance au tabac. Mais l’engouement est quelque peu retombé et l’actuel équilibrage du marché de la cigarette électronique (avec une baisse de 6 % du nombre des points de vente dédiés en 2016) profiterait aux substituts nicotiniques. Car il ne s’agit pas de regarder du côté du marché, sans innovation marquante depuis le lancement du spray buccal de Nicorette, pour expliquer cette amélioration. « Le nombre d’utilisateurs de la cigarette électronique s’est stabilisé. Il y a maintenant très peu de nouveaux usagers, mais les vapoteurs sont de plus en plus des usagers quotidiens et exclusifs de ce produit. Aujourd’hui, pour ceux qui souhaitent stopper leur consommation de tabac, les substituts nicotiniques redeviennent le mode le plus simple pour arrêter de fumer, alors que vapoter est désormais interdit dans les espaces publics et que le débat sur l’innocuité perdure. On assiste également à une hausse de la fréquentation des consultations de tabacologie en 2016, preuve que de plus en plus de personnes ont recours à un professionnel de santé », explique Aurélie Lermenier-Jeannet, div de Tabagisme et arrêt du tabac en 2016, publié par l’OFDT. « Le marché de la cigarette électronique a trouvé son pôle d’utilisateurs ; l’effet de la nouveauté ne joue plus », renchérit Coraline Lan, chef de groupe, en charge des gammes Nicopatch et Nicopass chez Pierre Fabre Health Care. Un phénomène nouveau qui coïncide, surtout, avec une forte mobilisation gouvernementale autour du sevrage tabagique marquée par une multiplication de mesures en 2016.

UN DÉFI de santé publique

De toute évidence, les multiples actions gouvernementales menées en faveur de l’arrêt du tabac, issues du Programme national de réduction du tabagisme, jouent dans le sens d’une reprise du marché des substituts nicotiniques. Rappelons en toile de fond, la hausse régulière du prix du paquet de cigarettes (+ 1 € en mars 2018, pour atteindre 10 € en 2020), l’instauration du paquet neutre ou encore l’élargissement de la catégorie des professionnels autorisés à prescrire des substituts nicotiniques (médecins, sagesfemmes, chirurgiens-dentistes, infirmiers et masseurs-kinésithérapeutes). à cela s’ajoute deux autres mesures, mises en place en 2016, et qui ont contribué au revirement tangible du marché des substituts nicotiniques : le triplement du remboursement forfaitaire annuel (porté à 150 €) et la prise en charge partielle élargie à l’ensemble des fumeurs a engendré une hausse du nombre de bénéficiaires du dispositif. Le tout couplé à l’opération « Moi(s) sans tabac », lancée en novembre 2016 et réitérée en 2017. Dès le mois suivant, la tendance des ventes de cigarettes est à la baisse (- 14,3 %) et les ventes de traitements à la hausse (+ 13,1 %). « Le nombre estimé de patients ayant pris un traitement d’aide à l’arrêt du tabac repasse au-dessus de la barre symbolique des deux millions, constituant le deuxième niveau le plus élevé depuis cinq ans, même s’il n’égale pas le chiffre de 2011 », commente Aurélie Lermenier-Jeannet.

LES PATCHS en tirent le plus de profit

Si la hausse du marché s’applique à l’ensemble des substituts nicotiniques, les timbres transdermiques, qui représentent 35 % de parts de marché en volume, enregistrent la plus forte croissance, soit + 57 % (en nombre de patients estimés) à fin août 2017. Une progression significative après avoir été « la forme la plus impactée par la cigarette électronique », relève Coraline Lan. Une forme passive facile à adopter, qui ne requiert aucune gestion du fumeur. Et largement prescrite par les professionnels de santé. « Les mesures gouvernementales, comme l’augmentation du forfait de remboursement, incitent les fumeurs souhaitant arrêter à aller chez leur médecin. Or, ces derniers prescrivent à 80 % des patchs », fait remarquer un porte-parole de la marque Nicorette (Johnson & Johnson). Quant aux formes orales, soit 60 % de parts de marché en valeur, elles enregistrent, en équivalents patients estimés, une hausse moins conséquente de 15 % à fin août 2017. « Une forme plus comportementale, qui permet de gérer une envie irrépressible de fumer, le “craving”, moins dépendante de la prescription », rappelle Coraline Lan. Soulignons, toutefois, la commercialisation des premières gommes génériques (Nicotine EG) en juillet 2016, qui a joué en faveur de la hausse du segment. Enfin, les traitements Zyban et Champix (ce dernier étant réinscrit sur la liste des médicaments remboursables), suivent également des progressions positives (respectivement + 1 % et + 36 %), bien que leurs parts de marché, en valeur, soient mineures (0,4 % et 2 %).

UNE CROISSANCE à prendre avec prudence

Le marché devrait-il continuer à progresser ? « Il est difficile de se prononcer, mais le niveau actuellement atteint est parmi les plus élevés de ces quinze dernières années, un peu moins de 2,5 millions de personnes traitées », indique Aurélie Lermenier-Jeannet. N’oublions pas que la forte hausse enregistrée fait surtout suite à une forte baisse et qu’elle intervient dans un condiv très favorable. « La mobilisation des pouvoirs publics est très importante, avec des mesures déjà en place et d’autres à venir. La hausse du prix du tabac ou un remboursement plus important des traitements sont des facteurs susceptibles d’influencer l’évolution de ce marché », poursuit notre interlocutrice. N’oublions pas, non plus, l’extraordinaire volatilité des fumeurs comme nous le rappelle Coraline Lan : « Ils sont attirés par la nouveauté et dans l’attente du produit miracle, qui leur permettra d’arrêter de la façon la plus facile possible. Toute innovation peut alors avoir un impact positif ou négatif sur le marché des traitements nicotiniques de substitution. »

+ 28,5 %

C’est l’augmentation enregistrée par les traitements pour l’arrêt du tabac, entre septembre 2016 et août 2017. Source : Données chiffrées de l’OFDT.

+ 57 %

C’est la hausse du nombre de bénéficiaires du forfait annuel de remboursement des substituts nicotiniques, constatée à fin mars 2017, en cumul annuel mobile. Source : Données chiffrées de l’ OFDT.

Prix bas

E. Leclerc s’attaque aux substituts nicotiniques !

Si les substituts nicotiniques sont disponibles exclusivement en pharmacie, le Mouvement E.Leclerc entend bien changer la donne (après une première tentative infructueuse en 2014) et interpelle les pouvoirs publics pour obtenir l’autorisation de les vendre, moins chers, dans son réseau de 250 parapharmacies. En cause : leur coût encore trop élevé, véritable frein au sevrage tabagique. La démonstration s’appuie sur l’impact du remboursement forfaitaire, « une action de santé publique qui a contribué à faire très sensiblement progresser la vente de traitements. » Une revendication brandie à la veille de la deuxième opération “Moi(s) sans tabac” et visible sous la forme d’une annonce militante, dès le 23 octobre, dans la presse quotidienne régionale et nationale. Après avoir obtenu le droit de vendre des tests de grossesse, des préservatifs et des lentilles, le mouvement E.Leclerc réussira-t-il à se faire entendre sur les substituts nicotiniques ?

Vous sentez-vous régulièrement en insécurité dans vos officines ?


Décryptage

NOS FORMATIONS

1Healthformation propose un catalogue de formations en e-learning sur une quinzaine de thématiques liées à la pratique officinale. Certains modules permettent de valider l'obligation de DPC.

Les médicaments à délivrance particulière

Pour délivrer en toute sécurité

Le Pack

Moniteur Expert

Vous avez des questions ?
Des experts vous répondent !