Allô Maman, bobo ! - Pharmacien Manager n° 171 du 29/09/2017 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Pharmacien Manager n° 171 du 29/09/2017
 

TENDANCES

Auteur(s) : Pascale Caussat

Parmi les enjeux de la digitalisation, la médecine en ligne accuse un certain retard. Mais, depuis que la ministre de la santé, Agnès Buzyn, en a fait son cheval de bataille, tout s’accélère : prise de rendez-vous à distance, transmission des ordonnances, livraison de médicaments… les start-up sont en pleine effervescence.

A l’heure de la digitalisation à tout va, la télémédecine apparaît comme un futur eldorado. Ses promesses alléchantes – prise de rendez-vous en ligne, recommandation de praticiens, consultation en ligne… – séduisent déjà un Français sur deux, à en croire l’enquête 2017 de BVA pour le compte de Zava, un site de consultations médicales. Et même si ses défenseurs présentent le déploiement de la consultation en ligne comme un moyen de lutter contre les déserts médicaux, sa mise en application en France demeure compliquée. Essentiellement pour des raisons de financement, les patients n’étant pas prêts à payer pour une prestation non prise en charge par la Sécurité sociale. Des services de téléconseil sont cependant proposés par des mutuelles et des assureurs, via des accords passés notamment avec la société MesDocteurs, qui a levé 1,2 million d’euros en 2016.

POLÉMIQUE autour de l’expertise médicale

À son lancement en 2015, le site Deuxieme Avis a fait couler beaucoup d’encre en offrant la possibilité de solliciter un deuxième avis médical pour des pathologies particulières, moyennant la somme de 295 euros, non remboursés. Sa fondatrice, Pauline d’Orgeval, elle-même confrontée au problème de trouver un spécialiste pour son fils, qui souffre d’un handicap mental et devait subir une opération lourde, considère que ce service répond à un besoin, en raison de « l’inégalité d’accès à l’expertise médicale en fonction de son lieu d’habitation, de son niveau social, ou si l’on n’a pas le réseau. » Voir les créateurs de ces start-up comme des opportunistes attirés par l’appât du gain serait une fausse piste. C’est d’abord le constat d’une carence de l’offre et des possibilités offertes par Internet qui motivent leurs projets. Mais, les ARS (Agences régionales de santé) restent réticentes à donner leur homologation. Enfin, des brèches s’ouvrent : L’ARS d’Île-de-France vient d’approuver le service de téléconsultation de Mondial Assistance.

DU PATIENT à l’actient

Dans le domaine de la prise de rendez-vous, Mondocteur se positionne comme un « facilitateur d’accès à la santé en donnant une meilleure visibilité sur l’offre de soin réellement disponible. Notre service permet de baisser l’absentéisme, d’alerter les patients si un créneau se libère en dernière minute, de partager des comptesrendus avec d’autres médecins », décrit Thibault Lanthier, co-fondateur et directeur général. Cette société adossée au groupe Lagardère (comme Doctissimo et Doctipharma) se partage avec Doctolib ce marché en pleine croissance. « À peine 8 % des médecins français sont équipés de solutions de prise de rendez-vous en ligne. On prévoit d’atteindre 20-25 % dans les 18 prochains mois, précise Thibault Lanthier. Nous référençons actuellement 12 000 praticiens, y compris des centres hospitaliers, et nous équipons 500 à 1 000 médecins chaque mois. » Doctolib revendique pour sa part plus de 20 000 abonnés. Pensées d’abord pour faciliter la vie des médecins libéraux (on estime que la gestion des appels coûte 500 à 1 000 euros par mois à un généraliste, contre une centaine d’euros d’abonnement à une plateforme), ces solutions digitales participent aussi à l’autonomisation des patients qui veulent être acteurs de leur santé. Le succès des forums de Doctissimo (40 millions de visites par mois) a montré leur avidité d’information. Mais quoi de plus frustrant que d’attendre plusieurs mois qu’un créneau se libère chez un spécialiste, quand un coup d’œil sur une plateforme permet de voir en un instant les prochains rendez-vous disponibles ? « L’annonce d’une maladie grave ou chronique, provoque une situation stressante et on ne sait pas à qui s’adresser quand on n’a pas de médecin dans son entourage, justifie le docteur Florian Reinaud. Concilio offre une recommandation objective et anonymisée. Nous voulons devenir un tiers de confiance avec également de l’aide à la prise de rendez-vous et demain des services de coaching en sevrage tabagique ou en nutrition. » Son business model s’appuie sur les mutuelles santé des employeurs, car Concilio s’adresse à certaines populations d’actifs comme les expatriés, les cadres en déplacements professionnels fréquents ou les personnes mutées qui doivent reconstituer leur réseau médical.

RECOMMANDATION et partage

L’évolution logique de cette technologie, sur le modèle de « l’ubérisation » de l’économie, est la notation des praticiens. De même que l’on peut donner des étoiles à un chauffeur Uber, un loueur sur Airbnb ou un vendeur sur Le Bon Coin, les patients peuvent légitimement souhaiter connaître la réputation d’un médecin ou d’un pharmacien. C’est le créneau de l’application Dokbody, le « Tripadvisor » de la santé, lancé en juillet 2016 par trois associés. En avril 2017, elle revendiquait 400 000 professionnels de santé référencés dans 45 spécialités. De son côté, la plateforme Concilio – créée en 2015 par Florian Reinaud, médecin urgentiste, et Georges Aoun, polytechnicien passé par Paypal et Amazon – recense 15 000 médecins dans 50 pays, sélectionnés en fonction des recommandations de leurs pairs. Impossible, aussi, pour les utilisateurs de Mondocteur de laisser un jugement ou d’attribuer une note. « Nous nous y refusons pour des questions d’éthique, mais les médecins et les hôpitaux peuvent mettre en place des questionnaires de satisfaction », affirme Thibault Lanthier. Même si, le docteur Didier Mennecier, Directeur du Centre de traitement de l’Information Médicale des Armées (CeTIMA), estime que cette évolution logique obligerait les professionnels à descendre de leur piédestal. Une chose est sûre : la santé ne peut pas se tenir à l’écart d’une digitalisation qui touche tous les secteurs et pas seulement les populations les plus jeunes.

DIGITALISATION

Plus d’un Français sur deux (51 %) a déjà utilisé un service en ligne d’accès aux soins. un sur trois a déjà pris un rendezvous médical sur internet, un sur quatre a acheté des médicaments en ligne (sans ordonnance) et 3 % ont déjà consulté un médecin on-line. Au final, 42 % des sondés se disent prêts à téléconsulter.

Source : Etude BVA pour la société Zava, un site de consultations médicales, publiée en juillet 2017.

4 MILLIARDS d’euros

C’est le poids de l’ e-santé en France. Il atteindra 20 milliards d’euros en Europe, en 2020, selon Concilio.

Ordonnance en ligne

Les pharmacies aux premières loges

Depuis qu’une décision de justice lui a interdit la vente de médicaments, Doctipharma (qui appartient au pôle santé du groupe Lagardère avec Doctissimo et Mondocteur) s’est repositionné sur la vente en ligne de produits en parapharmacie, le conseil digital aux pharmacies et l’envoi d’ordonnances. « Plus de 2 000 pharmacies sont inscrites sur notre application qui permet de localiser une officine, de photographier et d’envoyer l’ordonnance, pour venir retirer la commande le jour-même, témoigne Stéphanie Barré, directrice générale. On se développe en click & collect, car de nombreux pharmaciens ne sont pas prêts à proposer la livraison à domicile, souhaitant plutôt garder un lien direct avec leurs patients. » L’accord entre La Poste et Pharmabest prend le contre-pied et vise une centaine de livraisons quotidiennes à domicile. De son côté, SOS Médecins est partenaire de la start-up Pharma Express, pour satisfaire les patients qui ne peuvent pas récupérer leurs prescriptions en dehors des heures d’ouverture des pharmacies.

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