De nouveaux fonds pour la pharma - Pharmacien Manager n° 168 du 31/05/2017 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Pharmacien Manager n° 168 du 31/05/2017
 

NEWS

Auteur(s) : François Pouzaud*, Myriam Loriol**

Qu’on se le dise, le capital des officines s’ouvre… Aux fonds d’investissement. De nouveaux montages financiers permettent ainsi d’apporter aux pharmaciens du cash extérieur. Aubaine ou piège ?

Si Fabien Brault-Scaillet a pu racheter une pharmacie de près de 7 M€ à peine sorti de la fac, c’est parce que la société Arpilabe lui a trouvé des fonds extérieurs. Ainsi, des intervenants d’un nouveau genre entrent dans le paysage pharmaceutique. Comme Arpilabe, la plateforme Levée Privée ou encore le cabinet de consulting Kross Partners font entrer indirectement des investisseurs (non pharmaciens) dans le capital des pharmacies. Par quel (s) moyen (s) ? Le prêt au titulaire se fait sous forme d’obligations convertibles en actions (OCA) ou de quasi-fonds propres. La conversion des obligations étant impossible en officine (interdiction à des non-pharmaciens de devenir actionnaires), le fonds d’investissement sort du montage financier le jour où le pharmacien décidera de rembourser l’emprunt obligataire. Le titulaire verse alors, à titre d’indemnisation, une prime de non conversion. Sans compter que pendant toute la durée du prêt, le fonds aura été gracieusement rémunéré via les taux d’intérêt qu’il perçoit. Ce mode de financement complémentaire coûte cher (10 à 12 % par an du montant du prêt) mais il est légal.

« Dans les contrats remis à l’Ordre au moment de l’inscription au tableau, les investisseurs ne figurent nulle part. L’obligation n’étant pas convertie, ils n’ont pas la qualité de devenir actionnaires », explique Luc-Bertrand Manry, avocat de l’étude Havre Tronchet.

PRIX à payer

S’ils ont un coût, ces nouveaux montages permettent aux officinaux de s’installer, alors qu’ils ne disposent pas d’emblée d’un apport suffisant pour convaincre la banque.

C’est aussi dans cet objectif que certains groupements trouvent ainsi des fonds pour aider de jeunes adhérents. Titulaire de la Pharmacie du Saut le Cerf à épinal, Paul-édouard Lambolez a remboursé par anticipation sa dette obligataire à Univers Pharmacie et sorti au bout de quatre ans (seulement !) le fonds d’investissement qui était entré dans la structure à hdiv de 300 000 €. « J’ai racheté la créance pour un montant de 615 000 €, prime de non conversion incluse, en la refinançant par un crédit bancaire classique. Le remboursement du capital étant in fine, j’ai payé en quatre ans 54 000 € d’intérêts. L’enseigne m’a bien accompagné, j’étais toutefois tenu de réaliser un CA journalier minimum, de rester dans des ratios de gestion cohérents et de rendre régulièrement des comptes. La sortie coûte cher mais j’estime que c’est le prix à payer pour l’accession à la propriété d’une officine qui réalise aujourd’hui un CA de 3,5 M€. »

SÉCURISER LES OPÉRATIONS

Et si le groupement Ceido a signé en mars dernier un partenariat avec Levée privée, ( lire page X ) c’est aussi pour permettre à ses adhérents de prendre la main sur des affaires proches de la leur, et de barrer la route à la concurrence. « Nous ne sommes ni des pousse-au-crime, ni là pour nous substituer au savoir-faire des professionnels libéraux et les transformer en salariés de fonds d’investissement », précise Jean-François Marquette, fondateur et président de Levée Privée, qui défend un cadre d’intervention sécurisé. « Nous avons privilégié une approche filière en nous appuyant sur un réseau de partenaires (KPMG, Grant Thorton, Quadratur Avocat…) pour qualifier les projets et les accompagner au-delà de leur levée de fonds. » L’idée étant de prévoir des montages où le pharmacien en sort gagnant et garde le contrôle. Chez Arpilabe, on trie aussi les dossiers de financement sur le volet. Partenaire de cette société, Jean-

Christophe Chanjou, créateur du site de transactions achat-de-pharmacie.com, affirme : « Arpilabe a fait refinancer par des banques les sommes apportées par les investisseurs dans toutes les structures qu’il accompagnait historiquement. La sortie systématique de l’investisseur démontre que l’amélioration de la performance a été au rendez-vous et c’est le titulaire qui en a bénéficié. »

PARIS PHARMA fait jaser

Il semble cependant que tous les fonds et opérateurs ne soient pas logés à la même enseigne de répartition « équitable » des profits. Ce qui se passe actuellement chez Paris Pharma, racheté par le fonds d’investissement Sagard il y a quelques mois, inquiète la profession. Que penser des propositions de financement des nouvelles officines susceptibles d’intégrer l’enseigne ? Qu’elles sont bien cachées… parce qu’elles sont loin d’être irréprochables. C’est en tout cas ce que suspectent les prestataires (avocats, experts-comptables, cabinets de transactions…) que nous avons interrogés. « Nous n’avons pas accès aux projets et aux actes car les pharmaciens engagés ont signé des clauses de confidentialité, il est donc difficile de les conseiller dans ce cas et de s’assurer qu’ils ne se sont pas fait manger tout cru », rapporte Olivier Delétoille, expert-comptable du cabinet ArythmA. Daniel Buchinger, président d’Univers Pharmacie, qui installe des jeunes sous enseigne par le biais des OCA depuis 2012, dénonce carrément un montage illégal et machiavélique. « Il repose sur des obligations à bons de souscription d’actions et un contrat dans lequel le résultat de l’officine revient en totalité au fonds. » Comment, dans ces conditions, le titulaire pourra-t-il monnayer sa sortie ? Lui qui perdrait, de plus, son indépendance professionnelle. Selon des informations concordantes, Paris Pharma s’occupe de tout : achats, management, gestion…

Mais si ce scénario était une opportunité pour un jeune de faire ses armes ? « L’important est donc que chaque pharmacien soit en phase avec le système auquel il participe. », estime Jean-Christophe Chanjou.

Contrats

Plus de transparence !

Alertés à propos des contrats ultra-confidentiels signés entre Paris Pharma et leurs jeunes adhérents lors de l’acquisition d’une nouvelle officine, les Conseils régionaux de l’Ordre demandent dorénavant que tous ces contrats leurs soient communiqués. Ils réclament une copie des statuts de la SEL, de son règlement intérieur, des conventions et avenants relatifs au fonctionnement de la société ou aux rapports entre associés.

À suivre donc…

L’ESSENTIEL

Les fonds d’investissement sont des financements alternatifs à la banque, destinés à renforcer les fonds propres de l’entrepreneur.

→ Le montage utilisé fait appel à des obligations convertibles en actions soumises à un taux d’intérêt et au paiement d’une prime de non conversion.

→ Deux modèles de fonds coexistent : la « captation spéculative » et la « répartition durable », avec des objectifs différents pour les investisseurs.

→ Avant de se lancer, il est donc essentiel de connaître les intentions des investisseurs.

ENTRE 5 ET 8 %

C’est une fourchette raisonnable selon Interfimo pour le taux de l’emprunt obligataire.

30 C’EST À CE JOUR LE NOMBRE DE TRANSACTIONS OFFICINALES

qui utilisent les obligations convertibles en actions, prêtées par des fonds extérieurs.

Source achat-de-pharmacie.com

100 % PHARMA ?

Créer un fonds d’investissement confraternel géré par des pharmaciens eux-mêmes. C’est l’idée que Jean-Christophe Hurel, président du directoire d’Interfimo, a évoqué lors de la soirée de présentation des prix de cession 2016. Cela pourra contribuer, selon lui, à abaisser le coût des ressources financières et à simplifier les modalités d’accès à ces dernières.

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