Surmonter les freins au changement - Pharmacien Manager n° 163 du 30/11/2016 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Pharmacien Manager n° 163 du 30/11/2016
 

PRATIQUES MANAGEMENT

Auteur(s) : Yves Rivoal

On le sait, l’être humain est naturellement conservateur… Et tout ce qui modifie ses habitudes engendre des résistances. Autant donc les lever auprès de vos collaborateurs si vous souhaitez mettre en place avec succès une nouvelle organisation.

Certains collaborateurs vont marquer leur opposition au changement par de la colère. Ils deviennent irascibles, démarrent au quart de tour quand vous leur demandez quelque chose… Vous en avez d’autres qui expriment une forme de peur en posant un tas de questions du type : pourquoi faites-vous cela ? Ce n’était pas assez bien avant ? Vous avez enfin des salariés qui vont se mettre en retrait et ne rien dire. Mais, l’air de rien, ils vont traîner les pieds et résister », observe Sophie Dufau, docteur en pharmacie, consultante et coach chez Edifia.

S’il est assez simple d’identifier une réaction de peur ou de colère chez un collaborateur, décrypter une mise en retrait se révèle plus compliqué comme le reconnait Gérard Carton, consultant spécialisé en conduite du changement. « Certains signaux doivent alerter. Lorsque un collaborateur perd le sourire, l’enthousiasme, ou qu’il ne rate pas une occasion de faire capoter le nouvel aménagement mis en place par le titulaire, c’est qu’il y a chez lui une résistance au changement que l’on assimile souvent, à tort, à de la mauvaise volonté. »

DONNER des explications.

Une fois les freins au changement décelés, il faut les traiter. « Lorsqu’un collaborateur exprime de la colère, il faut écouter ses arguments », conseille Sophie Dufau. Il faut aussi inviter ceux qui ne disent rien à exprimer leurs réticences. « Ce dialogue avec l’équipe va permettre au titulaire d’identifier ce qui coince : la peur de ne pas y arriver, une mauvaise interprétation… Il pourra alors répondre à ces inquiétudes et rappeler pourquoi il a souhaité ce changement, car il ne s’agit surtout pas de céder sur l’essentiel. Il est important que titulaire reste maître de ses décisions. »

Lorsque des résistances s’expriment, c’est le plus souvent à cause d’un défaut de communication. « Cela signifie en général que le manager n’a pas réussi à donner du sens au changement qu’il souhaite réaliser, estime Catherine Desprez, pharmacienne, experte en stratégie et management de l’innovation. Les collaborateurs n’arrivent pas à comprendre comment ils vont pouvoir se positionner dans la nouvelle organisation… »

APPORTER une vision.

La première chose à faire lorsque l’on souhaite impulser une transformation, c’est d’inscrire le projet dans une vision. « Il faut bien expliquer en amont que si vous changez d’organisation, c’est par exemple parce que les patients s’orientent de plus en plus vers de l’automédication, et que le rôle des pharmaciens sera de les accompagner dans cette nouvelle dimension, souligne Catherine Desprez. Lorsque vous arrivez à présenter de manière exaltante un projet, vous avez plus de chances d’embarquer votre équipe avec vous. » Ce travail d’explication doit aussi faire ressortir les bénéfices concrets pour les clients et l’équipe. « Il faut par exemple placer les modifications de planning en perspective d’un meilleur accueil client », illustre Gérard Carton. Le choix de la sémantique est très important dans cette phase d’explication. « Il faut privilégier des phrases courtes et claires, poursuit notre interlocuteur. Bannir des expressions négatives comme : « ne vous inquiétez pas ». Ce genre de formulation va inquiéter, stresser votre interlocuteur. »

FAIRE participer.

Le sens et la vision clairement exprimés, reste à les faire partager à l’ensemble de l’équipe. Pour relever ce challenge, Gérard Carton conseille de pratiquer la co-construction. « Un titulaire qui élabore seul dans son coin le nouveau planning a plus de 50 % de chances d’avoir à affronter des résistances. Alors que s’il expose sa vision, et demande à l’équipe de proposer des solutions, le risque d’opposition devient nettement moins élevé. »

Ce travail de co construction doit être suivi d’une phase orientée sur l’action. « Le manager a intérêt à organiser des réunions régulières afin de faire des points d’étape, explique Gregory Reyes, maître de conférences à l’IAE de Poitiers qui travaille sur le comportement des dirigeants dans les TPE. Il est également conseillé d’accompagner les salariés dans la transformation. Si la pharmacie s’est par exemple dotée d’un nouveau LGO, il faut prévoir des formations. » Gregory Reyes conseille aussi de faire travailler l’équipe en binôme, en associant si possible un collaborateur qui se distingue par un état d’esprit positif avec un collègue plus inquiet, afin qu’il y ait un effet d’entraînement.

ETABLIR un feedback.

« Pour une implication continue de l’équipe dans la transformation, il est aussi essentiel de maintenir un sentiment d’urgence », complète l’enseignant. Un sentiment d’urgence qui se cultive lors d’une dernière étape. « Cette phase de la cristallisation est trop souvent négligée par les managers, et c’est pourtant là que se joue l’adoption ou le rejet du changement sur le long terme, assure Gregory Reyes. Par exemple, après un transfert le titulaire doit régulièrement organiser des réunions d’équipe afin de lui rappeler que les résultats sont là : le CA est en augmentation, le nombre de visiteurs jour aussi. Les files d’attente ont diminué sur le point de vente… »

Une conduite de changement réussie se traduit en général par des effets bénéfiques sur la productivité de l’équipe, l’organisation, l’ambiance, la satisfaction des clients… « Le changement doit en effet être positionné comme un exercice constant d’amélioration et de progrès », conclut Gérard Carton.

50 %

C’est la perte de productivité quand une équipe en arrive à se résigner au changement, en regrettant et en embellissant le passé.

POUR ALLER + LOIN

Le livre « Eloge du changement » rédigé par Gérard Carton aux Editions du Palio, répond aux grandes questions posées par la conduite du changement : quelles sont les différentes phases ? Comment tirer profit des résistances ? Comment les anticiper ? Etc.

4

C’est le nombre de formes de résistances au changement identifiées : l’inertie, l’argumentation, la révolte et le sabotage.

Essentiel

Instaurer la confiance

La conduite du changement se construit sur deux leviers de succès : la confiance et la satisfaction. « Plus le degré de confiance entre le manager et son équipe est grand, et plus les collaborateurs éprouvent une réelle satisfaction à travailler avec lui, mieux se passent les changements », assure Gérard Carton, consultant spécialisé en conduite du changement. A l’inverse, lorsque les indices de confiance et de satisfaction sont bas, la marge de manœuvre se révèle extrêmement faible. « Il faut alors commencer par progresser sur ces deux items avant d’envisager des changements profonds. Ou alors, le manager n’aurait bien souvent pas d’autre alternative que d’imposer autoritairement ses choix. Or, les changements imposés occasionnent toujours une résistance forte. Avoir le sentiment de ne pas avoir de choix n’est jamais motivant », conclut Gérard Carton.

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