La dermo-oncologie entre à l’officine - Pharmacien Manager n° 160 du 26/08/2016 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Pharmacien Manager n° 160 du 26/08/2016
 

TENDANCES

Auteur(s) : Pascale Caussat

Ongles abîmés, épiderme desséché… la liste des effets secondaires de la chimiothérapie sur la peau et les phanères est longue. C’est pourquoi les laboratoires dermocosmétiques placent désormais l’équipe officinale en première ligne pour accompagner les patients.

Les compresses et les massages à l’eau thermale d’Avène ont prouvé leur efficacité sur les dommages cutanés dus aux traitements anticancéreux. Une étude d’envergure l’a démontré il y a quatre ans, la première réalisée sur deux populations de patients, un groupe bénéficiant d’une cure thermale et un groupe témoin sans prise en charge. La marque du groupe Pierre Fabre s’appuie sur ces résultats pour informer les professionnels de santé de l’importance de la prise en charge dermatologique des malades. Après avoir mené soixante sessions de formations dans les centres hospitaliers en 2015 et autant début 2016, elle inaugure en septembre un module spécifique pour le personnel des officines, par demijournées d’une vingtaine de personnes. « Nous leur présentons les résultats de l’étude et nous les informons sur les molécules et leurs effets secondaires, explique Nuria Perez Cullell, directrice d’Eau Thermale Avène. Nous voulons que les pharmaciens aient le réflexe de proposer une solution dermocosmétique aux patients. Par exemple, une protection solaire en cas de photosensibilisation, un cicatrisant contre les suites d’opération, un émollient pour la peau sèche… » La marque a créé le programme One Smile (Onco Education & Skin Side Effects Minimized for Living Even Better) qui comprend des brochures, des vidéos, un site internet dédiés à l’information du personnel médical.

« Les nouvelles thérapies ciblées sont plus efficaces, mais leurs effets secondaires cutanés sont importants, précise le docteur Victor Georgescu, dermatologue et directeur médical chez Avène. Les oncologues focalisés sur la survie du patient ont peu de temps à consacrer à ces effets. Des services de dermo-oncologie se constituent actuellement dans les hôpitaux, mais on n’en est encore qu’au début. » Il ne s’agit pas ici de soins de confort, mais d’une réelle prise en charge de handicaps sérieux : « Certaines molécules provoquent des fissures des mains, des pieds et des ongles, au point que les patients ne peuvent plus marcher ou fermer leurs chaussures, souligne Nuria Perez Cullell. Il serait dommage d’arrêter le traitement ou de diminuer les doses alors que des solutions efficaces et bien tolérées existent. »

DISPONIBILITÉ oblige

L’information aux pharmaciens est aussi un axe de communication de La Roche-Posay (L’Oréal Cosmétique Active) depuis trois ans. Amélie Priollet, responsable scientifique du projet oncologie, est en charge de la diffusion des messages auprès des professionnels. « Nous avons créé le programme Freskimo, French Skin Management in Oncology, avec un groupe de travail de dermatologues et d’oncologues. Nous distribuons des brochures et organisons une cinquantaine de formations par an pour lesquelles nous avons des listes d’attente. Nos produits ont été testés pour prouver leur tolérance lors des traitements. Ainsi, les pharmaciens peuvent répondre aux questions des patients, en cas, par exemple, de peau sèche ou de cuir chevelu irrité, et renvoyer vers l’oncologue en cas de besoin. » L’évolution des traitements place le pharmacien au centre du suivi des malades : « C’est un acteur clé car il est en contact fréquent avec le patient ou l’accompagnant. En effet, avec les nouvelles thérapies ciblées disponibles en officine, les malades vont moins à l’hôpital, note Amélie Priollet. Il y a davantage de dépistages, donc des personnes diagnostiquées plus tôt avec une chance de survie accrue. Puisque l’on vit plus longtemps grâce aux traitements, l’accompagnement des effets secondaires est de plus en plus important. » Face à des personnels hospitaliers débordés, le pharmacien reste plus disponible. « À l’hôpital, le patient est abreuvé d’informations, il ne peut pas tout intégrer. S’il oublie qu’il doit soigner sa cicatrice dans 15 jours, le pharmacien peut le lui rappeler », ajoute Nuria Perez Cullell.

LOBBYING des patients

La mobilisation des associations a aussi accéléré la prise de conscience des professionnels. Rose Magazine, titre créé il y a cinq ans spécialement pour les femmes souffrant de cancer, vient de lancer une « box » Beauté et Bienêtre destinée aux personnes hospitalisées, avec le soutien de plusieurs marques recommandées par ses lectrices comme Avène, Uriage, Bioderma, Erborian, Lierac. « En 1998, lors des états généraux du cancer, c’était le désert en termes de traitements d’appoint, témoigne Céline Dufranc, rédactrice en chef adjointe du magazine. Le lobby des patients et des journalistes a incité les malades à être proactifs, à ne pas tout attendre des médecins, à se renseigner auprès des associations. Notre message est de dire qu’il ne faut pas subir la maladie et les traitements. » Chez Avène aussi, « l’objectif est d’amener les patients à se prendre en charge, à se resociabiliser après la bataille contre le cancer », affirme Marie-Ange Martincic, directrice de la station thermale héraultaise. Les hommes ne sont pas oubliés. « Il faut user de psychologie, souligne Amélie Priollet de La Roche-Posay. En cas de folliculite, des boutons causés par certains médicaments, on parle de soin correcteur plutôt que de fond de teint. La marque étant unisexe, le message passe bien, et les hommes suivent volontiers les consignes quand elles s’intègrent dans le traitement. » La pharmacie de quartier a toutes les cartes en main pour aider les patients dans leur parcours vers la guérison.

385 000 NOUVEAUX CAS DE CANCER EN 2015 EN FRANCE MÉTROPOLITAINE, DONT 211 000 CHEZ LES HOMMES ET 174 000 CHEZ LES FEMMES. (Source : Institut national du cancer).

1,147 million C’EST LE NOMBRE DE PERSONNES HOSPITALISÉES, PAR AN, À CAUSE DU DIAGNOSTIC, DU TRAITEMENT OU DE LA SURVEILLANCE D’UN CANCER. (Source : INC).

Témoignage

Féminine pendant sa chimio

Dans son récit On ne meurt pas comme ça, qui sort chez Pocket en octobre, la journaliste Charlotte Fouilleron livre un témoignage précieux sur le quotidien d’une malade qui tient à garder sa féminité malgré la maladie. À chaque étape importante de son traitement, elle porte un vernis à ongles différent. « J’avais pris un abonnement dans un nail bar près de chez moi, et je n’ai pas cessé d’y aller quand je suis tombée malade. C’était important pour moi de ne pas changer mon quotidien sous prédiv que j’avais un cancer. J’avais à coeur de continuer à être coquette, avec tout ce que ça peut avoir de superficiel. Comme je le dis dans mon livre : “Ces parures sont mon armure”. » La jeune femme n’a pas souffert de perte de cheveux ou d’effets secondaires cutanés sévères. En revanche, elle a apprécié la visite d’une socio-esthéticienne pendant sa chimiothérapie à l’hôpital. « La chimio ne donne pas bonne mine, et le temps semble long quand on est sous perfusion ». Une lecture recommandable à tous : patients et professionnels de santé.

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