Comment gérer les retards d’un salarié ? - Pharmacien Manager n° 150 du 01/09/2015 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Pharmacien Manager n° 150 du 01/09/2015
 

PRATIQUES QUESTION

Auteur(s) : Fabienne Rizos-Vignal

La ponctualité est un principe de base tellement essentiel et évident que vous ne l’avez peut-être jamais communiqué de manière explicite à votre équipe. Or, si le chef d’entreprise n’exprime pas clairement ce qu’il attend de ses collaborateurs, il s’expose à d’éventuels manquements. « Il est donc primordial de définir les valeurs de l’entreprise et ses règles de fonctionnement, même les plus élémentaires », insiste Brigitte Defoulny, consultante en management, communication et dirigeante d’Héliotrope. En donnant le tempo, le titulaire se met également en conformité avec la législation sociale. L’article D. 3171-2 du Code du travail impose d’afficher les horaires collectifs dans les locaux de l’entreprise. Quant aux horaires individuels, ils sont fixés dans le contrat de travail. Essentiel également, le chef d’entreprise doit montrer l’exemple en respectant lui-même la ponctualité. Sinon, comment la réclamer à ses collaborateurs ?

RÉAGIR vite

Reste que votre préparatrice arrive systématiquement en retard de 15 minutes. Plutôt que de l’épingler sur-le-champ, vous prenez sur vous en espérant qu’elle rectifiera le tir d’elle-même. « C’est une erreur, il est inutile de collectionner les dysfonctionnements. L’accumulation des non-dits engendre le plus souvent des réactions disproportionnées par l’effet de la goutte d’eau qui fait déborder le vase », précise Michel Lora, dirigeant de GII (Groupe Intervention Innovation). D’autant que si vous ne réagissez pas dès les premiers retards, votre silence pourrait être perçu comme un accord tacite. « Avec le risque d’entraîner une contagion des retards au sein de l’équipe. Ou de générer des tensions internes en raison des perturbations sur l’organisation du travail, les retards d’un collaborateur se répercutant sur le travail des autres », prévient Marie-Hélène Gauthey, dirigeante d’Atoopharm. Pas question de sermonner votre préparatrice devant la clientèle ou le reste de l’équipe ! La jurisprudence est très claire, les critiques et remontrances à voix haute revêtent un caractère vexatoire et humiliant pouvant exposer leur div à une condamnation pour harcèlement moral (Cass. crim. 12 mai 2015, n° 12-86776 D).

ANALYSER la cause

La démarche doit au contraire être constructive. « Plutôt que d’insister sur ce qui ne va pas (vous n’arrivez jamais à l’heure), le manager projettera le comportement attendu (respecter les horaires pour le bon fonctionnement de l’équipe) », conseille Michel Lora. De son côté, Marie-Hélène Gauthey préconise de « décrire les faits sans jugement (“Lundi, vous êtes arrivée à 9 h 12…) et d’expliquer leurs conséquences (“Le flux d’attente au comptoir n’a pas pu être absorbé par l’équipe présente, cela a déstabilisé le service client”…). »

Bien conduit, l’entretien fera émerger la cause des retards chroniques. Il peut aussi mettre en évidence un malaise et faire émerger des objections telles que : « Certes j’arrive en retard, mais je reste aussi plus tard le soir sans être rémunéré pour cela. » Au regard du droit, l’argument du collaborateur est imparable puisqu’il pointe une défaillance de l’employeur. Si la qualité de l’accueil fait partie du métier et que l’équipe se doit de servir correctement les clients même à l’heure de fermeture, en contrepartie, le titulaire doit compenser le service rendu par exemple au moyen d’une prime de disponibilité. D’un point de vue managérial, il s’agit de mettre en place des concessions/arrangements réciproques sans perturber l’organisation officinale.

DURCIR le ton si besoin

Face à un collaborateur effronté, n’hésitez pas à « muscler votre discours » conseille Brigitte Defoulny, par exemple en disant « Je ne tolérerai plus d’écarts ». Le titulaire peut menacer d’opérer une retenue sur salaire. Cette méthode est licite à condition que la retenue soit strictement proportionnelle au temps de retard (Cass. soc. 21 mars 2012, n° 10-21097). Si un salarié arrive 15 minutes en retard, l’employeur retiendra exactement la rémunération correspondant aux 15 minutes de travail non effectuées. Si le recadrage n’a donné aucun résultat significatif, il est temps de faire jouer le pouvoir disciplinaire de l’employeur. Première étape : l’avertissement. Il doit être formalisé par lettre recommandée avec AR ou par lettre remise en main propre contre décharge. Et lorsque les retards fréquents et persistants perturbent le bon fonctionnement de l’entreprise, l’employeur dispose de raisons suffisantes pour rompre le contrat de travail du salarié peu ponctuel. Ultime solution, le licenciement disciplinaire se joue alors en trois actes (convocation du salarié à un entretien préalable ; confrontation des parties au cours de l’entretien ; notification du licenciement par lettre recommandée avec AR] et sonne la dernière heure de la collaboration.

LE CAS DU MOIS

L’heure, c’est l’heure ! Cet adage ne fait pourtant pas l’unanimité dans votre équipe. L’un de vos collaborateurs non seulement arrive fréquemment en retard, mais joue les prolongations au vestiaire pour mettre sa blouse. Vous l’avez déjà réprimandé à plusieurs reprises, sans succès…

Vous ne savez plus comment vous y prendre. Et vous savez pertinemment que si vous laissez ce mauvais exemple perdurer, vous prenez le risque de fragiliser votre autorité ou d’être accusé d’inégalité de traitement. Pourtant, le chrono doit s’imposer à toute l’équipe sans exception. Nos conseils pour remettre les pendules à l’heure.

LES EXPERTS

Michel Lora

FONDATEUR DE GII

Brigitte Defoulny

DIRIGEANTE D’HÉLIOTROPE

Marie-Hélène Gauthey

DIRECTRICE ASSOCIÉE D’ATOOPHARM

OH NON !

Attendre d’être excédé pour recadrer, car vous risquez de perdre votre sang-froid et de vous emporter à mauvais escient.

AH OUI !

Profitez du règlement intérieur pour rappeler que le manque de ponctualité est de nature à perturber le bon fonctionnement de l’officine.

EXPÉRIENCE

Prime à la sérénité des salariés

Mathilde Palix Roillet a racheté il y a un an l’emblématique pharmacie de la vieille ville d’Annecy. Une première expérience en tant que titulaire mais un parcours rompu au management après plusieurs années dans le marketing et comme responsable d’un centre d’appels chez un grossiste-répartiteur.

« Les effectifs ne sont pas à la même échelle, mais la méthode de gestion des retards reste similaire. Si un collaborateur arrive systématiquement après l’horaire prévu de sa prise de poste, cela crée une situation inconfortable pour le reste de l’équipe qui doit compenser. Cela pose également un problème d’équité et de justesse. Dans l’entreprise, il ne peut y avoir une règle pour chaque personne. » Pour la titulaire, la première étape consiste à comprendre cette récurrence des retards. « Car il y a forcément une raison. Pourquoi la personne est-elle en difficulté pour arriver à l’heure ? » Les retards génèrent des tensions qui ne sont pas compatibles avec l’accueil et le service client. « Le collaborateur qui arrive en retard n’est lui-même pas serein », souligne Mathilde Palix Roillet, qui insiste sur l’importance, en tant que chef d’entreprise, de mettre son équipe dans des conditions optimales afin que chacun puisse donner le meilleur. « En entretien, je vais amener le salarié à analyser son manque de ponctualité, à trouver une solution, et à s’engager à la tenir. S’il exprime le besoin que l’on réajuste ses horaires, je lui donnerai satisfaction si sa demande est en adéquation avec la bonne marche de l’entreprise. » Dans tous les cas, la titulaire consigne chaque échange dans un souci de suivi et de traçabilité. Après les travaux de réagencement en cours, elle compte rédiger pour chaque salarié une fiche de tenue de poste avec une partie consacrée au « savoir-être ». La ponctualité en fera évidemment partie.

Pourrez-vous respecter la minute de silence en mémoire de votre consœur de Guyane le samedi 20 avril ?


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