Quand les finances vont mal… - Pharmacien Manager n° 149 du 01/07/2015 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Pharmacien Manager n° 149 du 01/07/2015
 

PRATIQUES MANAGEMENT

Auteur(s) : François Pouzaud

LA TRÉSORERIE VOUS FAIT CRUELLEMENT DÉFAUT ET VOTRE CHIFFRE D’AFFAIRES EST EN BAISSE CONTINUELLE… FACE AU MUR, DEUX SOLUTIONS AVANT LE REDRESSEMENT : MOTIVER L’ÉQUIPE POUR TROUVER DE NOUVEAUX LEVIERS DE CROISSANCE ET/OU PROPOSER UN LICENCIEMENT ÉCONOMIQUE. CE QU’IL FAUT SAVOIR POUR GÉRER CET EXERCICE DÉLICAT.

La tuile ! Les travaux prometteurs de construction d’un centre commercial proche de l’officine qui cessent brutalement pendant deux ans, laissant la pharmacie difficile d’accès et peu attrayante… Ce scénario, Jean-Pierre Dosdat, titulaire de la pharmacie du Soleil à Thionville (57) et président du groupement Objectif Pharma, en a fait les frais. Son commerce a perdu 30 % de son chiffre d’affaires. « Le projet de centre commercial, privé, a été arrêté en raison de difficultés de financement, donc on ne pouvait attendre aucune aide financière de la commune et ne compter que sur nous-mêmes », raconte-t-il. Licencier un salarié ? Le titulaire n’y était pas favorable. Car, pour lui, le personnel est un investissement ajusté au potentiel de l’officine et non un coût pour l’entreprise. Aussi a-t-il été aidé par le départ à la retraite d’un de ses collaborateurs, qui représentait un gros salaire. « Il y a une toujours une forme de démotivation lorsqu’on parle de licenciement. Le projet de redressement reposait, au contraire, sur la cohésion de l’équipe, et cela passe par une information permanente (mensuelle) et totalement transparente. J’expliquais à tout le monde ce que j’étais amené à faire, et cela a radicalement changé ma façon de manager », constate Jean-Pierre Dosdat.

MANAGER de façon participative

Le dialogue a permis d’augmenter le capital confiance à l’égard de son équipe. « Nous avons comblé le fossé qu’il peut y avoir d’ordinaire entre prérogatives des salariés et objectifs du chef d’entreprise. Ainsi mon projet officinal a bien été bien compris. » Son management est devenu par la force des choses « participatif », chaque salarié a été sollicité pour trouver des idées de développement ou de maintien du chiffre d’affaires.

« En cas de difficultés, il faut effectivement mobiliser les troupes plus par la tête que par les mains, mettre en place plus de délégations et communiquer une énergie positive », résume Philippe Lebas, gérant de l’agence pédagogique Evok. La stratégie de remotivation de Jean- Pierre Dosdat a payé. « Avec mon équipe, on est arrivé au bout du tunnel sans casse sociale », se félicite-t-il. « L’idéal pour garder des collaborateurs impliqués et motivés en cas de crise est de montrer sa détermination àse battre et à la transmettre à son équipe, souligne Philippe Lebas, gérant de l’agence pédagogique Evok. Pour cela, il faut l’informer tous les mois de l’évolution de la situation de l’officine et terminer l’entretien sur une note d’espoir et une perspective dont chacun peut se saisir pour aller de l’avant. » Et ce d’autant plus s’il y a eu un licenciement économique. Car, malheureusement, toutes les situations de crise ne connaissent pas de « happy end » comme celle de la pharmacie du Soleil.

JOUER la transparence

Ainsi, Mme P. (cette pharmacienne souhaite garder l’anonymat) a dû se résoudre à licencier un de ses salariés, sur les conseils de son expert-comptable, pour tenter de se sortir des difficultés, parallèlement à la mise en place d’autres solutions (refinancement du prêt, injection de fonds propres…). « L’annoncer à l’intéressé a été aussi éprouvant que d’en informer le reste de l’équipe, qui était convaincu que ce licenciement pouvait en cacher d’autres car la situation se détériorait de jour en jour », raconte-t-elle. Elle avait, en effet, anticipé cette réaction du personnel. « J’ai donc tardé à en faire part àmes salariés, qui l’ont appris directement par l’intéressé. » Conséquence : des suppositions et des rumeurs qui enflent ont créé rapidement une ambiance délétère et un climat de travail négatif. « Plus une décision de licenciement est annoncée tôt, mieux elle sera prise par les collaborateurs », assure Philippe Lebas. Le maître mot en cas de crise est la communication. Comme l’atteste Jean-Pierre Dosdat :

« Grâce à ma politique de transparence, si j’avais dû licencier, la décision serait mieux passée au sein des collaborateurs que si ma communication était restée opaque sur mes difficultés. » Dans le cas de Mme P., l’équipe n’a pas compris ni accepté la décision du titulaire. « Face à l’incompréhension de mes salariés, il n’y avait plus la même énergie et la même motivation, ce qui n’arrangeait en rien une situation déjà difficile », explique-t-elle. Pourtant, elle avait justifié sa décision en se fondant sur des faits concrets et factuels que chacun peut comprendre et constater facilement : baisse du CA, de la fréquentation, mesures d’amélioration qui n’ont pas donné les résultats escomptés, un personnel qui n’est plus occupé à 100 % de son temps, etc. Mais l’annonce s’est faite trop tardivement !

RESSOUDER l’équipe

Il est également indispensable d’informer les collaborateurs des conséquences du licenciement : par exemple, une réorganisation des tâches et du planning. Le dialogue sert à recueillir leur avis, à prendre en compte leurs remarques pertinentes mais aussi à évaluer le moral des troupes. Toute la difficulté pour le manager, lors des réunions suivantes, est de transformer la décision de licenciement en levier pour ressouder l’équipe et mobiliser son engagement pour passer ce cap difficile. En somme, le challenge consiste à présenter le défi collectif qui permettra à chacun de se mettre en situation d’acteur, et pas seulement de subir les conséquences d’une décision. Mme P. a mis du temps avant de regagner la confiance de ses salariés. Les moyens mis en oeuvre ont redonné une bouffée d’air et des perspectives d’avenir. Même si elle n’est pas encore sortie des difficultés, elle est formelle sur un point : « C’est dans cet exercice périlleux que se révèle votre professionnalisme. Manager cette situation délicate va me permettre de construire un lien indispensable avec mon équipe. »

Fausse bonne idée

Alternative au licenciement économique, la réduction des horaires de travail a un moindre impact sur les comptes de l’officine. Pour le salarié, cela se traduit par une réduction de salaire… Alors que le licenciement donne droit à des indemnités.

POUR ALLER + LOIN

→ Conseils-employeurs.fr. Une multitude de ressources et d’outils indispensables pour prévenir et résoudre les problèmes liés à la gestion du personnel. Base documentaire : plus de 2 500 articles et leurs annexes d’astuces et conseils, dossiers pratiques, etc.

Dialogue

L’annonce d’une mauvaise nouvelle

Pas facile d’annoncer un licenciement ou la suppression de primes… Il faut savoir organiser formellement une réunion d’équipe pour décrire la situation économique de l’officine, en précisant les orientations et moyens mis en oeuvre : optimisation des stocks, renégociation des emprunts, aide d’un groupement structuré… L’objectif est de donner des perspectives à moyen terme. « Il faut bannir tout ce qui est de l’ordre de l’opinion ou du sentiment, il faut être dans le pourquoi avant d’être dans le comment », insiste Philippe Lebas (evok). en fait, plus l’argumentaire sur les causes et les conséquences de décision est bien préparé, plus il aide le titulaire à se montrer sûr et convaincant. « Tout est également dans la formulation, il ne faut pas être dans l’émotion pour ne pas dramatiser la situation. On ne fait pas avancer une équipe par la peur », souligne Philippe Lebas. Sinon, résultat inévitable, l’équipe sera démobilisée.

Vous sentez-vous régulièrement en insécurité dans vos officines ?


Décryptage

NOS FORMATIONS

1Healthformation propose un catalogue de formations en e-learning sur une quinzaine de thématiques liées à la pratique officinale. Certains modules permettent de valider l'obligation de DPC.

Les médicaments à délivrance particulière

Pour délivrer en toute sécurité

Le Pack

Moniteur Expert

Vous avez des questions ?
Des experts vous répondent !