« Ne pas rater le train de l’officine connectée » - Pharmacien Manager n° 143 du 02/12/2014 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Pharmacien Manager n° 143 du 02/12/2014
 
DIGITALISATION
INTERVIEW

Cahier spécial point de vente

Des clients aux p’tits oignons

Auteur(s) : Fabienne Colin

Dans la poche des patients, sur leurs écrans à la maison…, l’internet est partout. Mais comment appréhender à bon escient cette transformation digitale dans les commerces – et à forciori en officine ? Réponses de Vincent Druguet, ‘pro’ du point de vente connecté.

Pharmacien Manager : Comment la transition numérique en cours impacte-t-elle le commerce ?

Vincent Druguet : Les conséquences sont monstrueuses. Au-delà du e-commerce qui continue à progresser de façon phénoménale sur tous les secteurs, les enjeux portent aujourd’hui sur la convergence entre magasin et Internet. La révolution 2013-2014 étant le click & collect (qui permet de réserver un produit en ligne et de le récupérer dans un magasin physique, N.D.L.R.). Aujourd’hui, la crainte que le e-commerce fasse disparaître les magasins a disparu. Le retour sur investissement d’un site e-commerce n’est plus calculé selon le taux de conversion (ratio du nombre de passages en caisse par rapport au nombre de visiteurs, N.D.L.R.) du site, mais selon le trafic que ce dernier a réussi à générer dans le magasin physique.

P.M. : Le click & collect permet de mettre une option sur des produits. Les clients viennent-ils réellement les acheter en magasin ?

V. D. : Malgré le fait qu’on paie en magasin, en moyenne 85 % des gens viennent y chercher les produits. On constate donc seulement 15 % de « no-show ». Il s’agit de la plus importante révolution concernant l’impact du digital sur les ventes. La deuxième révolution concerne les expériences digitales en magasin. En France, nous en sommes au début. Mais les chiffres parlent d’eux-mêmes : 75 % des propriétaires de smartphone l’utilisent dans les magasins. Chaque commerce doit prendre cela comme une opportunité. Il faut installer le wi-fi, donner la possibilité de télécharger l’application de sa boutique ou de son officine. Cette appli doit procurer des informations complémentaires sur les produits, permettre la comparaison avec la concurrence. En fait, il faut offrir les moyens de démontrer qu’on est le meilleur. C’est ce qu’ont fait Wal-mart aux États-Unis, Tesco et Burberry’s au Royaume-Uni… On commence à voir des prémices à la Fnac, chez But et Darty.

P.M. : Quels consommateurs sont concernés par ces nouvelles habitudes ?

V.D. : Ce n’est pas une question d’âge. À partir du moment où une personne achète un smartphone, quel que soit l’âge, elle bascule dans un nouveau comportement. Le smartphone devient le « personal shopping assistant ».

P.M. : En quoi le rôle du vendeur change ?

V.D. : Le digital bouleverse sa manière d’être. Aujourd’hui, les vendeurs sont paumés. Chez DigitasLBI, nous travaillons principalement dans la cosmétique, la mode, la culture et l’automobile en concession (Sephora, Fnac…). Dans ces quatre secteurs d’activité, le vendeur voit arriver des clients avec énormément d’informations, des avis, etc. Devant lui, les clients consultent leur mobile, pour lire des commentaires sur les produits qu’il leur conseille. L’enjeu consiste à se repositionner au-dessus du consommateur pour éviter d’être pris en tenaille. La digitalisation du processus d’achat n’entraîne pas la mort du métier de vendeur. Le vendeur conserve un rôle à jouer mais il doit être formé autrement. Il doit être exactement dans la même logique que le consommateur : en temps réel, connecté, expert… Il doit être capable d’adresser tous les services du magasin.

P.M. : Que se passe-t-il chez Sephora par exemple ?

V.D. : Chaque « beauty advisor » a en main un iPod Touch. Elle demande au client sa carte de fidélité au prédiv de trouver les promotions auxquelles il aurait droit. En scannant la carte, un algorithme détermine et affiche une liste de produits susceptibles d’intéresser le client, en fonction de ses achats précédents. La conseillère sait également à quel niveau de client elle a affaire. Elle le traitera différemment selon qu’il est « gold » ou « silver ». En connaissant mieux son client, le vendeur reprend la main. Et ça marche. Sephora annonce que le panier moyen a augmenté de manière significative auprès des personnes servies avec l’iPod Touch en support.

P.M. : Comment l’officine peut-elle prendre le train du commerce connecté ?

V.D. : Selon moi, le site marchand et le click & collect sont fondamentaux. Proposer de la vente en ligne, une livraison en 1 heure, ce genre de services va connaître une révolution dans les cinq ans à venir. Je suis persuadé qu’il faut y aller. Un exemple : un énorme acteur polonais (InPost, N.D.L.R.) arrive sur le marché français avec un système de consignes réfrigérées, ouvrable avec un code. Cela va révolutionner la façon de faire ses courses en général. Demain, on peut imaginer les médicaments d’une ordonnance préparés et installés dans ces box accessibles depuis l’extérieur de l’officine.

P.M. : Comment s’adapter face à une clientèle de personnes âgées ?

V.D. : Ce n’est pas la question. Regardez Medissimo, qui a gagné le Prix 2014 de l’Innovation du salon Consumer Electronics Show (CES) dans la catégorie Health & Fitness pour son pilulier connecté. Ce pilulier redonne un sens extraordinaire à la relation entre le pharmacien et le patient. Cette boîte, remplie par l’officinal, est connectée au wifi et au smartphone de la personne âgée. Ensuite, à chaque utilisation, le pilulier peut, selon les besoins, enregistrer l’action dans une base de données, envoyer un sms à la famille… Si le patient oublie de prendre son comprimé, le système alerte le pharmacien ou des proches etc. Ce service est vendu par le pharmacien. Ce dernier devient le professionnel qui favorise la connectivité. Tous ces objets connectés vont révolutionner la pharmacie.

Biographie

Ingénieur de formation, ce « pur produit digital » comme il se définit lui-même, Vincent Druguet a réalisé l’essentiel de sa carrière en agence de communication : FullSix, DDB, Rapp Collins, avant d’intégrer Digitas en 2007. Il est aujourd’hui directeur général adjoint de DigitasLBi, l’agence digitale du groupe Publicis, spécialisée dans la transformation digitale des commerces. DigitalLBI édite depuis quatre ans un Baromètre annuel de l’expérience marchande connectée. Objectif : comprendre l’évolution de l’usage de l’Internet dans le cadre d’achats en magasins physiques.

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