Construire une maison de santé - Pharmacien Manager n° 143 du 02/12/2014 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Pharmacien Manager n° 143 du 02/12/2014
 
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côté entreprise

Auteur(s) : François Pouzaud

Créer une maison de santé afin d’y regrouper des professionnels du corps médical, ce scénario peut être envisagé par un officinal, avec comme objectif le transfert de son officine à proximité immédiate de la structure. Marche à suivre.

Même si le jeu en vaut la chandelle – assurer un flux de patients dans l’officine pour l’avenir -, monter un dossier de permis de construire pour une maison de santé demande de la patience. Comptez environ deux ans avant que la structure sorte de terre, tant les démarches administratives sont complexes. « Je fais construire une cellule brute de béton, un lot que je diviserai ensuite en trois pour les revendre à prix coûtant et sans pouvoir récupérer la TVA aux occupants de la maison de santé, un pour les médecins et infirmières, un pour le chirurgien-dentiste et un pour la pharmacie », raconte Pierre Jacquot, installé à Vic-sur-Seille (57). Depuis janvier 2013, il travaille sans relâche sur ce projet et le pilote de bout en bout. Ce pharmacien se fait assister d’un architecte dans toutes ses démarches administratives et techniques. Il a fait le choix d’investir 1,2 M€ en tant que particulier et non sous le couvert de son officine. Mais un tel montage est l’exception qui confirme la règle.

Constituer une société civile immobilière (SCI)

Dans la grande majorité des cas, la SCI a la faveur des pharmaciens qui se lancent dans ce nouveau genre d’opérations d’acquisition. « La constitution d’une SCI permet de dissocier, sur le plan juridique et sur le plan fiscal, le patrimoine professionnel du patrimoine privé », souligne Frédéric Tripier, conseil en gestion de patrimoine chez Fiducée Gestion Privée. La SCI est un bon moyen de protéger le patrimoine immobilier des aléas de l’activité économique de l’entreprise. Un bail est consenti par la SCI aux professionnels de santé occupant les lieux, éventuellement regroupés au sein d’une société civile de moyens.

Envisager la SCI d’attribution

La SCI d’attribution a l’avantage de préparer le partage entre les associés d’un bien immobilier. Ainsi, pour pouvoir revendre les différentes parties de la maison médicale à ses nouveaux occupants, qui aspirent à racheter leurs murs professionnels, il est possible de faire appel à cette SCI régie par le code de la construction et utilisée dans le cadre de programmes immobiliers bien précis. Son objet est l’acquisition ou la construction d’un immeuble, en vue de sa division par fractions attribuées aux associés en propriété ou en jouissance. La SCI établit parallèlement un règlement de copropriété et un état descriptif de division. Par exemple, aux parts 1 à 5 sera attribuée la jouissance du lot numéro 1, aux parts 11 à 20 correspondra le lot numéro 2, etc. Les associés de la SCI d’attribution peuvent demander à tout moment l’attribution en pleine propriété des lots, mais ce n’est pas obligatoire. Dans cette hypothèse, la SCI d’attribution est alors une société éphémère vouée à dispa­raître une fois que chaque associé de la SCI a récupéré son lot.

Choisir un régime fiscal en connaissance de cause

L’IR et ses revenus imposables. Sous le régime de l’IR, les revenus sont déterminés comme des revenus fonciers répartis entre les associés de la SCI en proportion de leurs droits. Ce sont les associés qui s’avèrent imposés individuellement au titre des revenus fonciers (après déduction des intérêts d’emprunt éventuels). La fiscalité applicable en cas de cession est celle des particuliers. Les locataires (personnes physiques ou morales), eux, déduisent de leurs résultats le loyer versé et les seules charges locatives (réparations, entretien…), à l’exclusion des charges de la propriété (amortissements, intérêts des emprunts, taxe foncière…).

L’IS et ses contraintes de gestion. « Si la SCI opte pour l’IS, elle peut déduire les frais d’acquisition et pratiquer des amortissements comptables et fiscaux, indique Frédéric Balhand, également expert chez Fiducée Gestion Privée. L’IS permet aussi de limiter à 15 % ou 33,33 % l’imposition des bénéfices qui servent à rembourser l’emprunt. Au contraire, du fait de la transparence fiscale dans le régime IR, les associés sont imposés sur des résultats non perçus, la SCI ne générant pas de trésorerie les premières années. » Mais le gain fiscal à l’IS est contrebalancé par des contraintes de gestion beaucoup plus lourdes et une pénalisation importante à la sortie, surtout si l’immeuble est susceptible de se valoriser dans le temps. Cependant, « dans le cas de l’acquisition d’une maison de santé par une SCI, l’objectif recherché dans ce projet est professionnel et non pas de réaliser une plus-value immobilière », souligne Frédéric Tripier.

Opter pour le crédit amortissable

Concernant les modalités de financement, le prêt amortissable classique à taux fixe est vivement conseillé compte tenu des taux extrêmement bas du marché. « Les banques sont très frileuses sur les crédits in fine qui sont adossés en garantie sur des supports d’investissement (assurance-vie, Capi…); elles demandent aux emprunteurs un montant d’apport important et les objectifs de rendement nécessaires doivent être de 4 à 5 %, ce qui suppose une part de risques élevée pour l’emprunteur », met en garde Frédéric Balhand. Pierre Jacquot a opté pour un crédit amortissable sur 15 ans avec différé d’amortissement le temps de la construction de la maison médicale (en début de crédit, il ne paiera temporairement que les intérêts d’emprunt et les cotisations d’assurances, mais pas de capital). « Une fois les lots vendus, je rembourse partiellement mon emprunt sans pénalité afin de réduire le coût des mensualités. » Le montage financier est prévu pour que son investissement (1,2 M€ au total avant revente des lots) ne lui coûte rien. « En montant, le total du loyer que me versera la pharmacie moins les mensualités de remboursement du crédit équivaut au loyer que je verse actuellement à mon bailleur », précise-t-il. En SCI également, il faut que le loyer encaissé équilibre les charges de remboursement et les charges d’exploitation de cette société.

Précaution

Un dédit à ses futurs occupants

Si le projet de maison de santé n’apporte pas suffisamment de garanties de bonne fin de travaux ou prend du retard, les futurs occupants ne s’engageront pas ou n’attendront pas, et passeront à autre chose », précise Pierre Jacquot (titulaire à Vic-sur-Seille). Et d’ajouter qu’il faut avoir de bonnes relations avec les élus locaux et les services de la préfecture, en cas de recours pour débloquer une situation. Pour tenir ses futurs locataires, le temps des travaux de la maison de santé de Diarville (54), Fabrice Foltz, qui avait essuyé plusieurs désistements de professionnels de santé au début de la « commercialisation » de son projet, a fait signer une promesse de bail avec un dédit de 10 000 € à chacun de ses futurs locataires en cas de rétractation. « Ce dédit est une sécurité qui sur le plan financier permet de couvrir les remboursements d’emprunt le temps de trouver un nouveau locataire », explique ce pharmacien qui a monté une SCI familiale avec son père. Ayant transféré son officine près de la maison médicale, laquelle a ouvert ses portes en juin 2011, ce pharmacien réalise aujourd’hui une extension. L’arrivée d’un nouvel occupant suffit à garantir ce nouveau risque financier : sa SCI a contracté un second prêt sur 15 ans !

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