Les champignons toxiques - Le Moniteur des Pharmacies n° 3386 du 09/10/2021 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 3386 du 09/10/2021
 

Cahier Formation

CONSEIL

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INTOXICATIONS AUX CHAMPIGNONS

« A part une gastro, je risque quoi ? »

Pour le grand public, les champignons se divisent en deux catégories : les bons et les mauvais. Les mycophages distinguent les comestibles, ceux sans intérêt culinaire et les toxiques. Pour les mycologues, parmi les quelque 30 000 espèces de macromycètes décrites en France, seule une vingtaine est considérée comme toxique grave, voire mortelle.

ÉPIDÉMIOLOGIE

En France, on répertorie près d’un millier d’intoxications par les champignons chaque année, trois décès et plus d’une vingtaine de cas graves. Les causes sont multiples :

– la toxicité innée ou naturelle est liée à la présence de toxines naturelles dans une espèce de champignon. C’est la cause la plus fréquente d’intoxication résultant le plus souvent de confusions entre espèces toxiques et comestibles, mais pouvant aussi être liée à un usage récréatif ;

– la toxicité indirecte ou acquise est liée à l’ingestion de champignons altérés ou contaminés par des conditions environnementales délétères (amendements, pesticides, radioactivité, métaux, microorganismes) ou à une consommation inappropriée (trop fréquente, en grande quantité, crue, mal préparée ou conservée).

Les conséquences d’une intoxication dépendent notamment de l’âge et l’état de santé du consommateur. Jeunes enfants et personnes âgées sont particulièrement sensibles aux syndromes gastro-intestinaux (risque de déshydratation).

Certaines personnes ont une intolérance aux champignons. Les patients porteurs d’un déficit en tréhalase, enzyme qui dégrade le tréhalose (disaccharide naturel) en glucose, risquent un syndrome de type résinoïdien, les champignons renfermant tous du tréhalose.

LES SYNDROMES MYCOTOXIQUES

• L’intoxication par les champignons se manifeste généralement en premier lieu par une gastro-entérite, plus ou moins précoce et accompagnée ou non d’autres symptômes.

• Différents syndromes sont décrits selon l’association de signes cliniques et biologiques, la nature de la substan­ce responsable et l’identité du champignon. Le délai d’apparition des premiers symptômes après ingestion, caractéristique, sert de base à la classification des syndromes. La persistance de troubles digestifs précoces peut être le signe d’une intoxication par différentes variétés de champignons.

Les syndromes à incubation courte

• Ils apparaissent moins de 6 heures après ingestion et sont généralement de pronostic favorable même s’il existe quelques cas graves liés à des susceptibilités individuelles ou à l’apparition de complications secondaires.

• La prise en charge est en général symptomatique, à l’exception du syndrome muscarinien qui dispose d’un antidote. Un suivi médical, éventuellement en milieu hospitalier, est conseillé en particulier pour les personnes à pathologie cardiaque ou rénale, les patients âgés, les femmes enceintes ou les enfants.

Les syndromes à incubation longue

• Ils apparaissent plus de 6 heures et jusqu’à quelques jours après l’ingestion et sont le plus souvent (mais il existe des exceptions) le signe d’une intoxication grave, souvent mortelle.

• Ils nécessitent le plus souvent une prise en charge en milieu hospitalier.

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION

« Mon guide parle de lames décurrentes, quèsaco ? »

MÉTHODE ANALYTIQUE

• Les confusions entre espèces comestibles et espèces toxiques résultent d’une observation incomplète des champignons. La méthode permettant d’identifier les principales familles, genres ou espèces de champignons doit s’appuyer sur des critères précis et implique avant tout la connaissance et l’observation des caractères macroscopiques discriminants, voire microscopiques et organoleptiques.

• L’utilisation de clés de détermination, fondées sur une suite d’alternatives permettant d’identifier un genre ou un groupe, apporte une aide précieuse.

PRINCIPAUX CARACTÈRES À OBSERVER

La forme générale

On peut faire un premier tri des champignons en observant leur forme générale le plus souvent conditionnée par la localisation de leur hyménium, porté par l’hyménophore : celui-ci peut être interne, externe et protégé ou non par un chapeau (forme la plus classique et la plus récoltée). L’hyménophore est, selon les espèces, à lames, à aiguillons, à tubes, à pores ou lisse.

L’hyménium et l’hyménophore

• L’hyménium est la partie où se forment les spores, située sous le chapeau des champignons quand ils en ont un. A maturité, les spores colorées ou non se détachent de la partie fertile pour être disséminées par le vent, les insectes, etc.

• L’hyménophore est constitué de lames, cas le plus fréquent chez les macromycètes, leurs caractéristiques sont des éléments essentiels. Leur apparence doit être observée. Elles sont plus ou moins épaisses, espacées ou serrées, anastomosées ou fourchues et, selon les espèces, présentent ou non des lamelles ou lamellules intercalées. Leur consistance peut également déterminer l’espèce, les lames des coprins étant, par exemple, déliquescentes. Enfin, leur mode d’insertion est aussi un caractère fiable.

• L’hyménophore peut aussi être à aiguillons (ils pendent sous le chapeau, séparables ou non), à plis ou à veines (replis de la surface inférieure du chapeau), à tubes, voire lisse.

Le chapeau

• Sa forme, qui évolue au fur et à mesure de la croissance, est un aspect déterminant. Parmi les plus fréquentes : convexe (agarics, armillaires, etc.), mamelonnée (exemple : inocybes), conique (coprins notamment), en entonnoir (lactaires, chanterelles, etc.).

• La marge (bord du chapeau) est déterminante chez certaines espèces : droite, enroulée, incurvée, relevée, cannelée ou encore lisse.

• Sa surface est lisse ou pourvue d’ornementations, intégrées à la cuticule (fibrilles, tâches, etc.), partiellement dérivées de la cuticule (écailles) ou de résidus du voile général (verrues, plaques). Son toucher, sec ou visqueux, peut aussi orienter.

• Sa chair, dont la consistance est fibreuse, cassante, spongieuse ou coriace peut varier de couleur au contact de l’air, à la cassure ou à la manipulation. La présence de lait à la cassure est un élément différenciant (exemple : lactaires). Son odeur peut être caractéristique de l’espèce (farine, amande amère, fruitée, etc.). Sa saveur est parfois déterminante : tout champignon peut se goûter à condition de recracher l’échantillon !

Le pied ou stipe ?

• Trois caractéristiques essentielles sont recherchées : la forme (cylindrique, bulbeux, fin, ventru, etc.), la surface lisse ou pourvue d’ornementation (rides, réseau de fibres, etc.) et les résidus de structure (volve, anneau, cortine). La consistance peut être cassante (russules et lactaires) ou fibreuse (le plus souvent). Le pied est soit plein, soit creux. ?

• La liaison pied-chapeau est également à observer, les éléments étant inséparables si les lames sont adnées, échancrées ou décurrentes.

Résidus de voile

• Le voile général ou universel est l’enveloppe entourant le jeune champignon dans sa première phase de croissance. Ses résidus, chez le champignon adulte, se retrouvent sous forme de verrues ou de plaques sur le chapeau et sous forme de volve ou d’armille à la base du pied.

• Le voile partiel est l’enveloppe recouvrant l’hyménophore. En se détachant de la marge du chapeau au cours de la croissance, il forme un anneau plus ou moins visible autour du pied. Chez certaines espèces, les résidus de voile partiel ont l’aspect de très fins filaments, la cortine.

AUTRES ÉLÉMENTS D’ORIENTATION

L’environnement

Les conditions de croissance du champignon sur le terrain sont des facteurs d’orientation : les arbres hôtes, la nature du sol (débris ligneux, herbe humide, p H acide ou basique, calcaire, argile, sable, etc.) ou son mode de croissance (isolé ou en groupe).

La taille

C’est un élément important pour différencier certaines espèces au sein d’un même groupe.

Couleur de la sporée et des lames

Les spores sont invisibles à l’œil nu, mais le recueil de la sporée permet de déterminer leur couleur, élément en particulier essentiel pour l’identification des champignons à lames. Leur examen microscopique apporte des renseignements plus précis. Attention, chez certaines espèces la couleur de la sporée à maturité peut parfois influencer la couleur des lames, mais les confondre est une source d’erreur pour l’identification (des spores blanches ne modifient pas la couleur des lames).

PRINCIPAUX CHAMPIGNONS TOXIQUES

« Il est toxique celui-là ? »

CHAMPIGNONS À LAMES

Amanites

Ce groupe comprend des dizaines d’espèces dont les espèces mortelles les plus fréquentes dans nos régions. Parmi elles, l’amanite phalloïde responsable de 95 % des intoxications les plus graves. Retenons que les amanites « blanches » mortelles se caractérisent par un habitat boisé, la présence d’un anneau large en jupe et une volve large membraneuse.

Amanites blanches à verdâtresAmanite phalloïde Amanita phalloides

CHAPEAU : 5 à 15 cm, lisse et convexe, puis étalé, blanc crème à vert olive/vert brun, marge lisse non striée,

chair assez épaisse, blanche, odeur de rose fanée désagréable, fibrilles brunes radiales

LAMES : libres blanches, épaisses à reflet verdâtre, lamellules

STIPE : 5 à 15 cm, élancé, plein puis creux, chiné de gris olivâtre ANNEAU : persistant, blanc, large, retombant en jupe

VOLVE : membraneuse, épaisse, en sac

TOXICITE : syndrome phalloïdien

Dose létale : environ 30 g (soit un chapeau)

Amanite printannière Amanita verna

CHAPEAU : 4 à 8 cm, lisse, blanc crème, sans fibrilles, convexe puis plan

LAMES : libres blanches, serrées, à lamellules STIPE : 8 à 12 cm, lisse, blanc ANNEAU : blanc, membraneux et large VOLVE : membraneuse en sac ample

TOXICITE : syndrome phalloïdien

Amanite vireuse Amanita virosa

CHAPEAU : 5 à 10 cm, blanc pur, lisse, conique puis étalé avec mamelon central, marge légèrement enroulée

LAMES : libres blanches, serrées, à lamellules tronquées

STIPE : 8 à 15 cm, blanc, pelucheux ou laineux, parfois un peu courbe

ANNEAU : floconneux, frangé, fragile

VOLVE : membraneuse en sac +/- engainant

TOXICITE : syndrome phalloïdien

Ne pas confondre avec… Rosé-des-prés (comestible) : chapeau lisse ou pelucheux ou écailleux, lames libres, rose carné puis brun chocolat, pas de volve

Autres amanites Amanite tue-mouches/fausse oronge Amanita muscaria

CHAPEAU : 4 à 20 cm, étalé, rouge à orangé, moucheté de verrues blanc jaunâtre, en cercles plus ou moins concentriques, labiles sous la pluie, marge striée, chair blanche, jaune orangé sous la cuticule, odeur faible

LAMES : blanches à crème, libres et serrées avec lamellules

STIPE : jusqu’à 20 cm, bulbeux, blanc pelucheux puis lisse

ANNEAU : persistant, large, en jupe

VOLVE : réduite en bourrelets concen­triques fragmentés

TOXICITE : syndrome panthérinien

Ne pas confondre avec… Amanite des césars/oronge (comestible) : chapeau orange vif, nu ou lambeaux de voile blanc, lames jaunes, chair et stipe jaune vif, volve en sac

Amanite panthère Amanita pantherina

CHAPEAU : 4 à 15 cm, brun-beige plus ou moins foncé, verrues blanc pur en cercles concentriques, labiles sous la pluie ou avec l’âge, marge striée cannelée, chair blanche, odeur faible

LAMES : blanches, libres et serrées avec lamellules

STIPE : 5 à 15 cm, blanc, bulbeux

ANNEAU : blanc, membraneux, pendant

VOLVE : fortement appliquée sur le bulbe surmontée d’un bourrelet en col roulé prolongé de remontées hélicoïdales

TOXICITE : syndrome panthérinien

Ne pas confondre avec… Amanite rougissante/golmotte (comestible bien cuite) : chapeau pelucheux ou écailleux, lames libres, rose carné puis brun chocolat, chair rougissante à la blessure

Amanite à volve rousse Amanita proxima

CHAPEAU : 5 à 10 cm, blanc à crème, couvert de résidus de voile, convexe puis plan déprimé

LAMES : blanches libres

STIPE : jusqu’à 15 cm

ANNEAU : large, semi-membraneux, strié

VOLVE : rousse, en sac

TOXICITE : syndrome proximien

Lépiotes

Plusieurs petites lépiotes contiennent, comme l’amanite phalloïde, des amanitines responsables d’intoxications mortelles. C’est le cas des lépiotes possédant des teintes brun vineux, rosé ou lilas. D’une manière générale, il ne faut ni cueillir ni consommer les petites lépiotes de taille inférieure à 10 cm.

Lépiote de Josserand Lepiota josserandii

CHAPEAU : 2 à 6 cm, aplati légèrement mamelonné, lisse à couvert de squames concentriques beige à saumon sur fond pâle, calotte brune, odeur d’agrumes, chair blanche

LAMES : libres, blanc crème à rosées

STIPE : allongé, blanc à rosé

ANNEAU : pas ou peu visible en bourrelet annulaire laineux

TOXICITE : syndrome phalloïdien

Lactaires

Ce groupe comprend une centaine d’espèces en France, dont de bons comestibles. Mais certaines d’entre elles sont la cause de syndromes gastro-intestinaux comme le lactaire à toison (dit « lactaire à coliques »).

Russules

Espèces forestières répandues, les russules ne provoquent pas d’intoxication grave. A la différence des russules douces comestibles, celles étant âcres sont à rejeter.

Russule émétique Russula emetica

CHAPEAU : 3 à 10 cm, convexe puis aplati, rouge à saumon, gluant par temps humide, chair blanche, grenue, donc cassante, odeur faible fruitée, saveur âcre

LAMES : blanches

STIPE : 4 à 9 cm, blanc, cassant comme la craie

ANNEAU : pas d’anneau

TOXICITE : syndrome résinoïdien

Tricholomes

De nombreuses espèces de tricholomes sont des comestibles très appréciées comme le tricholome de la Saint-Georges (ou mousseron vrai), colombette ou prétentieux, mais il existe quelques toxiques, en particulier le tricholome équestre (dit « bidaou ») : longtemps réputé comestible, il est à l’origine d’intoxications potentiellement mortelles quand il est consommé en grande quantité plusieurs repas de suite. Il est interdit à la vente depuis 2005.

Tricholome équestre/« bidaou » Tricholoma equestre

CHAPEAU : jusqu’à 10 cm, convexe mamelonné, jaune orangé, à centre brun, visqueux par temps humide, chair blanche dans le pied, jaunâtre en surface, faible odeur de farine

LAMES : échancrées, jaunes

STIPE : 6 à 10 cm, épais jaune pâle

ANNEAU : pas d’anneau

TOXICITE : syndrome de rhabdomyolyse longue

Clitocybes

Sur la centaine d’espèces de ce groupe, une quinzaine sont identifiées « espèces toxiques » comme plusieurs petits clitocybes blancs riches en muscarine.

Clitocybe des feuilles/faux meunier Clitocybe phylophylla

CHAPEAU : 5 à 11 cm, plat puis déprimé, à revêtement givré, blanc crème à grisé, taché de beige en vieillissant, plus ou moins craquelé, chair mince, élastique, odeur peu agréable terreuse

LAMES : blanches à crème, adnées ou légèrement décurrentes

STIPE : 8 à 10 cm, blanc crème

TOXICITE : syndrome muscarinien

Ne pas confondre avec… Meunier, clitopile petite prune (comestible) :

chapeau blanchâtre, non gercé, chair cassante, lames blanchâtres puis rosées très décurrentes, odeur de farine marquée

Omphalotus

Issue de la famille des omphalotacées, l’espèce Omphalotus olearius se rapproche par son aspect des pleurotes ou des clitocybes. Elle est très toxique comme O. illudens, moins méridionale, moins foncée et qui peut être confondue avec la girole.

Pleurote de l’olivier Omphalotus olearius

CHAPEAU : 4 à 10 cm, convexe puis légèrement déprimé, marge enroulée et sinueuse, chair épaisse, ferme, jaune safran, odeur désagréable acide

LAMES : jaunes orangé vif, serrées et minces, décurrentes, luminescentes à l’obscurité

STIPE : 6 à 15 cm, ondulé, ferme et fibreux, plus pâle que le chapeau

TOXICITE : syndrome résinoïde sévère

Ne pas confondre avec… Girole/chanterelle (comestible) :

terricole (pleurote de l’olivier sur bois mort), croissance isolée (en touffe pour la pleurote de l’olivier) pas de lames mais des plis fourchus anastomosés

Mycènes

Ce groupe comprend plusieurs espèces toxiques de petite taille, de coloration blanchâtre à jaunâtre ou rosâtre à lilas. Leur parfum caractéristique de rave permet de les éviter car, contenant de la muscarine, elles peuvent provoquer de graves intoxications.

Mycène rose Mycena rosea

CHAPEAU : 4 à 8 cm, conique puis plan, mamelonné, rosâtre à marge striée facilement fendillée, chair blanche, mince à odeur de rave

LAMES : libres à échancrées, épaisses, larges, à lamelles, rosâtres à lilas

STIPE : 4 à 9 cm, droit en massue, fibrilleux, blanc rosé

TOXICITE : syndrome résinoïdien, possibles signes muscariniques

Galérines

Anciennement Pholiota marginata, la galère marginée contient de l’amanitine responsable d’intoxication mortelle en quantité six fois supérieure à l’amanite phalloïde. L’apparition très tardive des symptômes a longtemps fait passer ce champignon pour inoffensif. Les ornementations présentes sous l’anneau chez la pholiote et absentes chez la galère permettent de distinguer l’espèce comestible de l’espèce mortelle.

Galère marginée Galerina marginata

CHAPEAU : 2 à 5 cm, jaune à brun-roux, hygrophane, lisse brillant, hémisphérique jeune puis convexe à plat, marge striée, chair brunâtre mince, forte odeur de farine

LAMES : crèmes puis ocre, serrées, échancrées

STIPE : long, droit ou courbe, assez grêle, crème, plus épais et plus foncé à la base, lisse sous l’anneau,

anneau étroit, mince, ocre brun, parfois absent

TOXICITE : syndrome phalloïdien

Ne pas confondre avec… Pholiote changeante (comestible) :

chapeau jaune-roux brillant, chair épaisse, blanchâtre, lames, peu serrées, adnées, ornementations sous l’anneau

Cortinaires

Pour ce groupe de plus de 3 200 espèces dans le monde, la difficulté d’identification est augmentée par la variabilité des caractères macroscopiques en fonction de l’âge. Ainsi, la cortine n’est identifiée qu’à l’état précoce chez certaines espèces. Plusieurs, en particulier de coloration rouge ou fauve, sont très toxiques.

Cortinaire couleur de roucou Cortinarius orellanus

CHAPEAU : 3 à 7 cm, roux à brun orangé, convexe puis aplani, parfois mamelonné, velouté, chair mince, fauve à jaunâtre, forte odeur de rave

LAMES : jaune orangé puis rouille, nettement espacées

STIPE : 3 à 9 cm, jaune-roux, fibrilleux, plein et ferme, cortine blanche à jaune, fugace

TOXICITE : syndrome orellanien

Cortinaire très joli Cortinarius rubellus

CHAPEAU : 2,5 à 8 cm, conique puis étalé et bosselé, mamelonné, fauve, à marge plus pâle, chair jaunâtre pâle à fauve, odeur de rave,

LAMES : ocre pâle puis fauves à rouille intense, larges

STIPE : 5 à 10 cm, faiblement épaissi à la base ou bulbeux, fibrilleux soyeux, de la couleur du chapeau, cortine non visible

TOXICITE : syndrome orellanien

Paxilles

Ce groupe comprend quelques espèces toxiques comme P. involutus, longtemps considéré comestible après cuisson mais provoquant des intoxications mortelles.

Paxille enroulé/chanterelle brune Paxillus involutus

CHAPEAU : 5 à 15 cm, à marge enroulée, convexe puis plan ombiliqué, brun-roux à brun-jaune, feutré, visqueux par temps humide, chair épaisse et molle, jaunâtre qui vire au brun-rouge au contact de l’air

LAMES : larges, décurrentes serrées, crème puis rouille, se tachent de brun-rouge au toucher, facilement séparables

STIPE : 5 à 7 cm, massif, couleur du chapeau

TOXICITE : syndrome paxillien

Entolomes

En général, on considère que tous les entolomes sont toxiques, attention notamment à la confusion avec les tricholomes et surtout le clitocybe nébuleux.

Entolome livide Entoloma sinuatum

CHAPEAU : 6 à 20 cm, épais, soyeux, convexe puis étalé, gris clair blanchâtre, teinté par endroits d’ocre, marge mince enroulée puis retroussée, sinueuse, chair épaisse, blanche à odeur de farine

LAMES : échancrées, jaunes couleur de buis puis roses à maturité

STIPE : 6 à 10 cm, massif, blanc, bulbeux à la base, pas d’anneau

TOXICITE : syndrome résinoïdien avec possibilité d’atteinte hépatique et troubles neurologiques

Ne pas confondre avec … au printemps (entolome en été et automne)

– Tricholome de la Saint-Georges (comestible) : chapeau blanc crème lisse, chair blanche peu odorante, lames blanches

– Clitocybe nébuleux (dite « gris ») (comestible mais peut provoquer des troubles gastro-intestinaux) : chapeau gris à tonalités brunes, pied gris creux, lames plutôt décurrentes, lames et sporée blanches à crème, forte odeur légèrement anisée

Psilocybes

Ce groupe comprend plusieurs espèces toxiques hallucinogènes. P. semilanceata est classé comme stupéfiant au Code pénal. Sa vente et sa détention sont interdites.

Psilocybe lancéolé Psilocybe semilanceata

CHAPEAU : 0,5 à 1,5 cm de haut, conique pointu en bonnet de lutin, à marge plissée, visqueux, brun jaunâtre à olivâtre, chamois ocre en séchant, chair mince, crème, odeur faible

LAMES : blanc-gris au début puis brun-pourpre foncé

STIPE : 2,5 à 7,5 cm, blanc à crème, luisant

TOXICITE : syndrome psilocybien

Coprins

Les espèces grêles et déliquescentes de coprins ont peu d’intérêt si ce n’est la toxicité de Coprinopsis atramentaria, en présence d’alcool.

Coprin noir d’encre Coprinopsis atramentaria

CHAPEAU : 6 à 10 cm, ovoïde puis conique, à marge relevée, gris à brun-gris, aspect soyeux, noircissant, chair très mince, fragile, pas d’odeur

LAMES : ventrues libres, rapidement noirâtre puis déliquescentes

STIPE : 8 à 18 cm de haut, blanc, non séparable du chapeau

ANNEAU : sous forme de fin bourrelet à la base du pied

TOXICITE : syndrome coprinien

AUTRES

Bolets

Ces champignons forestiers sont caractérisés par leur surface fertile formée de tubes s’ouvrant en pores de teintes variables. Il existe plus de 150 espèces dont certaines sont d’excellents comestibles (mais la plupart médiocres) et quelques espèces indigestes. Les espèces toxiques (en particulier à « pores rouges ») le sont très souvent lorsqu’elles sont consommées crues ou insuffisamment cuites (à l’exception de Rubroboletus satanas qui est toxique cru ou cuit), mais aucune n’est mortelle.

Bolet satan Rubroboletus satanas

CHAPEAU : 8 à 25 cm, massif, très épais et charnu, bombé et irrégulièrement bosselé, cuticule sèche, mate et veloutée, blanc à gris verdâtre, rosâtre au bord, chair blanche à crème, bleuissant modérément à la cassure, odeur faible désagréable

TUBES : fins, jaunes à rouge vif, noirâtres au toucher

STIPE : 3 à 8 cm, bombé, court et trapu, jaune au sommet, rouge carmin à rose vif vers le bas, orné d’un fin réseau médian rouge

TOXICITE : syndrome résinoïdien

Ne pas confondre avec… Bolet à pied rouge (comestible si bien cuit) :

chapeau brun foncé, pores rouges, stipe jaune ponctué de rouge, sans réseau, chair jaune vif, bleuissant fortement

Champignons à chapeau cérébriforme

Le gyromitre, longtemps considéré comme comestible, contient une toxine, la gyromitrine, cause d’intoxication mortelle lorsqu’il est consommé mal cuit ou mal déshydraté. Malgré son nom vernaculaire et les précautions de cuisson, sa consommation est à éviter. Attention par ailleurs à la confusion avec les morilles, qui comprennent plusieurs espèces comestibles à condition d’une cuisson suffisante, pour éliminer les substances hémolytiques thermolabiles, et d’une consommation modérée.

Gyromitre dit « comestible » Gyromitra esculenta

CHAPEAU : 3 à 9 cm, cérébriforme irrégulièrement lobé, brun ocre à brun-rouge,

chair blanche, peu épaisse

STIPE : 2 à 5 cm, creux, blanc, élargi et faiblement plissé à la base

TOXICITE : syndrome gyromitrien Suspicion de maladie de Charcot

PRÉVENTION À L’OFFICINE

« En cas de doute après notre fricassée, on fait quoi ? »

La prévention du risque mycotoxique s’appuie sur des connaissances théoriques solides, la pratique régulière de l’identification, la traçabilité de l’acte d’identification et les conseils pour la cueillette et la consommation.

TRAÇABILITÉ

• Dans une démarche qualité, la traçabilité consigne les informations transmises oralement et responsabilise le cueilleur.

• Un registre informatique ou manuscrit permet de garder une trace des identifications réalisées (date, nom du patient, lieu de récolte, espèces identifiées, etc.) et peut aider au recensement des espèces toxiques en région. Un outil en ligne de traçabilité des espèces mycologiques identifiées à l’officine est disponible gratuitement après inscription sur le site mycodb.fr : il simplifie la traçabilité et permet d’imprimer la fiche descriptive de la récolte.

CONSEILS ASSOCIÉS Pendant la cueillette

• Ne ramasser que les champignons en bon état que l’on connaît parfaitement et ne prélever que des spécimens adultes (caractères distinctifs pas toujours observables chez les jeunes), dans leur totalité en dégageant complètement le pied afin de préserver la volve, l’armille ou le bulbe.

• Éviter la cueillette après de fortes pluies ou gel, qui peuvent modifier les caractéristiques mycologiques, et proche de zones polluées ou industrielles, en bordure de décharge ou de route.

• Séparer les différentes espèces, prohiber les sacs en plastique qui accélèrent le pourrissement, utiliser un panier aéré, une cagette en carton, en osier ou en bois.

Après la cueillette

• Se laver soigneusement les mains.

• Conserver à part dans un endroit frais et aéré, au maximum 48 heures.

• Par précaution, prendre une photo des différentes espèces consommées, en visualisant chapeau, pied, zone fertile et coupe dans le sens vertical.

• Faire contrôler les champignons au moindre doute !

Consommation

• Les champignons, dont la paroi cellulaire est composée de chitine non digérée, sont des aliments peu digestes, à consommer en petite quantité, peu fréquemment et surtout pas au cours de repas successifs. Ils peuvent, mangés en quantité, provoquer des obstructions gastro-intestinales, notamment si la chair est très élastique comme celle des trompettes de la mort.

• Les émincer et, le cas échéant, ôter la cuticule visqueuse à l’origine de diarrhées (sur les bolets notamment).

• Ne jamais consommer crus les champignons de cueillette : une cuisson de 10 minutes au moins est vivement conseillée, voire 30 minutes pour ceux à manger impérativement cuits (morilles, mousseron des haies, shiitake, etc.).

• Ne pas faire consommer aux jeunes enfants, plus sensibles aux toxines.

En cas de suspicion d’intoxication

• Appeler le centre antipoison disponible 24 h/24. Si suspicion d’urgence vitale, appeler le 15, allonger la personne en position latérale de sécurité, la couvrir, ne rien donner à avaler, la rassurer.

• Recueillir le maximum de renseignements :

– symptômes précis, délai de leur apparition après le repas incriminé, signes chez d’autres convives ;

– délai entre cueillette et consommation, conditions de conservation et mode de préparation ;

– type d’environnement de la cueillette (bois, prairie, bords de route, etc.) ;

– spécimen cru restant, y compris épluchures.

POUR ALLER PLUS LOIN

OUVRAGES DE RÉFÉRENCE

Champignons de France et d’Europe – près de 1 760 espèces décrites, Régis Courtecuisse et Bernard Duhem, Delachaux et Niestlé, 2013*

Guide de poche de mycologie officinale – Apprendre à identifier une récolte de champignons, Yves-François Pouchus, Lavoisier Médecine Sciences Publications, 2020*

Champignons de France et d’Europe occidentale – Guide illustré de plus de 1 500 espèces et variétés, Marcel Bon, Flammarion, 2012*

FORMATIONS

Diplômes universitaires (DU) de mycologie officinale organisés par les facultés de pharmacie pour compléter la formation initiale.

Cours public de mycologie de la Société lorraine de mycologie, gratuit et sans inscription, renseignements sur societelorrainedemycologie.fr/cours-public.php.

Mooc (enseignement à distance) : porté par l’université de Rouen Normandie, le Mooc « champignons » propose à tout public une formation gratuite sur les champignons comestibles et toxiques. Renseignements et inscriptions sur monunivr.univ-rouen.fr.

Formations courtes :

• « Champignons comestibles et toxiques de Haute-Corrèze », 2 jours, station universitaire du Limousin (unilim.fr) ;

• « Risques mycologiques majeurs en officines », 2 jours, faculté de pharmacie de Limoges en Haute-Vienne (pharmacie.unilim.fr) ;

• Myco’Vergne, « Cas de comptoir à l’officine », 1 jour, faculté de pharmacie de Clermont-Ferrand dans le Puy-de-Dôme (pharmacie.uca.fr), etc.

SOCIÉTÉS ET ASSOCIATIONS DE MYCOLOGIE

Notamment la Société mycologique de France (mycofrance.fr), la Société lorraine de mycologie (societelorrainedemycologie.fr), le Cercle d’études mycologiques en Aquitaine (cemamycologiefr.wordpress.com), l’Association des mycologues pharmaciens (amyphar.org).

* Disponibles sur le site lemoniteurdespharmacies.fr.

MACROMYCÈTES

Champignons dont l’appareil reproducteur ou sporophore, constitué généralement du pied et du chapeau, est visible à l’œil nu (par opposition aux micromycètes).

HYMÉNIUM

Partie fertile du champignon

HYMÉNOPHORE

Surface portant l’hyménium

SPORE

Elément reproducteur unicellulaire assurant la reproduction des végétaux cryptogames (ne produisant pas de graines).

SPORÉE

Dépôt de spores visible à l’œil nu, produit naturellement ou obtenu de façon provoquée sur un support.

ATTENTION AUX IDEES REÇUES !

Un champignon véreux ou entamé par un animal est forcément comestible.

Faux ! Les vers ou les limaces consomment de l’amanite phalloïde.

Les champignons blancs sont comestibles.

Faux ! Les petits clitocybes blancs et plusieurs espèces d’amanites blanches sont bien toxiques.

Les champignons toxiques ont une odeur forcément désagréable.

Faux ! L’amanite phalloïde a une odeur de rose fanée, certaines petites lépiotes exhalent une odeur fruitée.

La cuisson fait disparaître la toxicité des champignons.

Faux ! L’amanite phalloïde est mortelle cuite, crue, déshydratée ou congelée ; la toxine du gyromitre dit « comestible » n’est que partiellement éliminée à la cuisson.

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