La course aux vaccins anti-Covid-19 continue - Le Moniteur des Pharmacies n° 3368 du 08/05/2021 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 3368 du 08/05/2021
 
LABORATOIRES

EXPERTISE

AUTOUR DU MÉDICAMENT

Auteur(s) : Yves Rivoal

Alors que la campagne vaccinale contre le Sars-CoV-2 bat son plein, trois nouveaux entrants, Novavax, CureVac et Valneva s’apprêtent à rejoindre les quatre vaccins déjà autorisés en Europe. Et des biotechs françaises préparent l’étape d’après, avec des vaccins de seconde génération et des approches innovantes.

Le prochain vaccin anti-Covid-19 qui devrait être mis sur le marché en Europe est celui de Novavax. « Cette biotech américaine s’appuie, comme Sanofi Pasteur pour un de ses candidats, sur une technologie déjà éprouvée puisqu’utilisée pour les vaccins contre le papillomavirus ou l’hépatite B, explique Brigitte Autran, professeure émérite d’immunologie à Sorbonne Université et membre du comité scientifique vaccins Covid-19. Elle consiste à produire des protéines recombinantes pour les assembler en nanoparticules, un adjuvant étant associé à la préparation. » Ce vaccin, qui nécessitera deux doses, a démontré une très grande efficacité lors des essais de phase 3, avec un niveau de protection de près de 90 %. « Et comme sur le plan de la versatilité il suffira de changer le code génétique ciblant la protéine Spike dans les cellules qui produisent cette protéine recombinante pour l’adapter à l’émergence de nouveaux variants, ce vaccin s’annonce très intéressant pour compléter la stratégie vaccinale », se félicite Brigitte Autran. Le sixième vaccin autorisé devrait être celui de CureVac, qui arriverait sur le marché en juin. Il s’appuie, comme ceux de Pfizer/BioNTech et Moderna, sur l’ARN messager. « Si nous n’avons pas encore les résultats de la phase 3 qui doit se terminer en mai, on peut, sans trop s’avancer, imaginer qu’il affichera les mêmes performances que ses deux prédécesseurs et les mêmes atouts en matière de versatilité. Et comme il s’agit d’un vaccin allemand, il renforcera encore un peu plus les capacités de production en Europe », estime Brigitte Autran.

Le VLA, mais pas tout de suite

Sur la troisième marche du podium pourrait figurer le premier vaccin français, le VLA2001 de Valneva à deux injections. Mais comme le Royaume-Uni a financé les essais cliniques, il sera produit et livré dans un premier temps… outre-Manche ! La phase 3 ayant démarré fin avril, le dépôt de demande d’autorisation de mise sur le marché pourrait intervenir à l’automne. Basée à Saint-Herblain, en Loire-Atlantique, cette biotech mise sur l’une des technologies les plus anciennes : le vaccin inactivé et adjuvanté inventé par Pasteur. « Celle-ci pourrait présenter un avantage : elle intègre tous les composants du virus, la spicule et la nucléocapside. Du coup, on pourrait espérer que ce vaccin, actuellement constitué de la souche historique du Sars-CoV-2, ait une relative efficacité contre les variants. Mais, à ma connaissance, Valneva n’a publié aucune donnée qui pourrait confirmer cette hypothèse », note Brigitte Autran.

Pour voir arriver les premiers vaccins français de seconde génération, il faudra encore patienter. Le plus avancé semble CoVepiT, développé par Ose Immunotherapeutics et actuellement en phase 1. Cette biotech nantaise affiche un positionnement radicalement différent. « Anticipant que le virus allait muter, nous avons opté pour une technologie fondée sur des épitopes immunodominants ciblant 11 protéines du virus, dont la spicule Spike, pour générer une réponse lymphocytes T mémoires qui induirait une protection de longue durée contre tous les variants. » Ce postulat ayant été confirmé au stade préclinique, le directeur général de la société, Alexis Peyroles, anticipe déjà la place que pourrait occuper ce candidat vaccin qui se conservera au réfrigérateur. « Il pourrait être administré en une dose en booster sur des personnes déjà vaccinées, afin d’élargir leurs défenses contre les variants, et sur une population immunodéprimée ou présentant des comorbidités, les lymphocytes T ayant la particularité de réactiver le système immunitaire », prévoit-il. CoVepiT devrait entrer en phases 2 et 3 en septembre prochain, avec une mise sur le marché espérée en 2022.

De son côté, Osivax a lui aussi fait le choix de l’universalité en misant, comme Novavax ou Sanofi Pasteur, sur les protéines recombinantes. Mais avec une approche totalement différente. « Nous avons pris le parti de cibler une protéine interne, la nucléocapside, qui est beaucoup moins sujette aux mutations. L’objectif étant de déclencher une réponse immunitaire cellulaire cytotoxique pour tuer les cellules infectées par le virus et empêcher ce dernier de se multiplier », explique Alexandre Le Vert, président et cofondateur de cette biotech franco-belge installée à Lyon, dans le Rhône, et à Liège, en Belgique. Osivax, qui utilise la même plateforme technologique que pour son candidat vaccin universel contre la grippe actuellement en phase 2, est à mi-chemin de la phase préclinique. Si tout va bien, les essais cliniques pourraient débuter l’année prochaine…

Universel et unidose

Un autre candidat français espère lui aussi tirer son épingle du jeu avec un vaccin universel basé sur l’ADN et administrable en une seule dose. « Nous avons repris pour le Sars-CoV-2 la même approche que pour notre vaccin contre le sida qui est actuellement en phase préclinique, confie Corinne Ronfort, cofondatrice et présidente de la biotech grenobloise Aiova (Isère). En utilisant un ADN, qui a l’avantage d’être extrêmement solide et peu dégradable, nous sommes capables de générer des anticorps neutralisants et d’activer un deuxième bras armé de l’immunité : des cellules tueuses. Celles-ci ayant la capacité d’attaquer les protéines situées à l’intérieur du virus et de conférer une protection pendant plusieurs années. » Cette technologie a aussi, pour Corinne Ronfort, d’autres vertus. « Les vaccins à ADN ne nécessitent pas de grosses infrastructures industrielles et se révèlent moins chers à produire en grande quantité que les vaccins à ARN. Et comme ils peuvent se conserver à température ambiante, ils pourraient être administrés dans les pays ne disposant pas d’infrastructures pour assurer le maintien à très basse température des vaccins à ARN. » Pour son candidat qui vient d’entrer en phase préclinique, Aiova ambitionne de démarrer les essais cliniques en 2022 pour une mise sur le marché prévue en 2023.

Brigitte Autran juge intéressantes les pistes suivies par ces vaccins de seconde génération en quête d’universalité. « Le problème, c’est que les technologies retenues, la nucléocapside pour Osivax et l’ADN pour Aiova, induisent une réponse cellulaire qui ne sera jamais aussi efficace qu’une réponse orientée sur les anticorps. Pour les infections virales de ce type, il faut en effet produire une quantité importante d’anticorps neutralisants pour obtenir un effet préventif. » Lorsqu’on lui demande alors à quoi ressemblera le paysage vaccinal dans un ou deux ans, l’immunologue avance un pronostic prudent. « Les vaccins à ARN messager seront toujours là, avec une version de deuxième génération induisant des anticorps neutralisants contre les variants. Les vaccins à vecteur viral recombinant, comme ceux de Janssen ou AstraZeneca, seront eux aussi toujours présents. Mais dans l’hypothèse où il faudrait se faire vacciner tous les ans, ils pourraient disparaître du paysage car on ne peut les utiliser de façon répétée. Les grands gagnants pourraient alors être les ARN messager, les vaccins à protéines recombinantes et peut-être les vaccins inactivés comme Valneva si leur efficacité est démontrée et si la lourdeur de production ne constitue pas un facteur limitant, les protéines recombinantes étant beaucoup plus complexes à produire que la simple synthèse d’un ARN messager », conclut Brigitte Autran.

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