« A nous quatre, nous avons vacciné 350 personnes »

Vendredi 5 mars, comme tous ses confrères d’Ile-de-France, Philippe Dauphin, installé à Beauchamp (Val-d’Oise), reçoit un courriel de l’union régionale des professionnels de santé (URPS) pharmaciens. Dans le cadre de la stratégie d’accélération du déploiement de la vaccination présentée la veille par le Premier ministre, l’agence régionale de santé cherche des professionnels de santé pour participer à une opération exceptionnelle de vaccination le week-end des 6 et 7 mars en Ile-de-France. Pleinement investi dans la lutte contre le Covid-19 (il a notamment réalisé environ 2 500 tests antigéniques de dépistage), Philippe Dauphin n’hésite pas une seconde à s’inscrire. Dès le lendemain, il est contacté pour se présenter à 11 h dans le centre de vaccination de Sarcelles (Val-d’Oise), mais ne peut se rendre disponible que l’après-midi. Finalement, il viendra en renfort le samedi pour vacciner des Franciliens entre 17 h et 21 h ! Après ce premier tour de chauffe, il est à pied d’œuvre le dimanche matin dès 9 h, en compagnie de trois autres pharmaciens d’officine du département, pour une cession de 9 h à 15 h.

« Les premiers rendez-vous sont programmés à 10 h, mais, avant, nous nous transformons en personnel d’entretien et de ménage pour nettoyer les bureaux : 6 postes permettant de vérifier l’éligibilité, 6 postes destinés à l’enregistrement, ainsi que les 7 box de vaccination, raconte-t-il. Puis, nous occupons le reste du temps à découper en quatre des compresses. Rien de passionnant pour l’instant ! » Patience, le coup d’envoi n’est plus très loin. 840 rendez-vous sont prévus mais, d’après l’équipe du centre de vaccination, 100 personnes ne recevront pas de dose si l’on considère les inscrits non éligibles et les défections. A 10 h, six vaccinateurs sont sur le pied de guerre pour vacciner une population arrivée en nombre. La file d’attente qui s’est formée à l’extérieur en témoigne. Philippe Dauphin, en tant que vaccinateur, n’a pas le plus mauvais rôle. Celui-ci est dévolu à une jeune médecin référente chargée d’expliquer à des personnes venues de loin qu’elles ne sont pas éligibles malgré des attestations de leur généraliste. « Je veux voir un médecin », « Je suis médecin », « Non, je veux voir un médecin », etc. « La scène se répétera plusieurs fois dans la journée, et des insultes résonneront dans toute la salle, il faudra presque en venir aux mains pour qu’une personne quitte le centre », précise-t-il.

La profession marque des points

A raison de 15 patients vaccinés à l’heure, Philippe Dauphin a fait beaucoup d’heureux. « Dans le box, les patients ont été surpris de savoir qu’ils étaient vaccinés par des pharmaciens, nous avons donc fait marquer des points à la profession ! », se réjouit-il. « A plusieurs reprises, juste avant l’injection, les patients voulaient être sûrs d’être vaccinés avec le vaccin de Pfizer/BioNTech… Il nous faudra faire preuve de pédagogie dans nos officines », argue-t-il. Pour cette opération, il a été rémunéré 70 € de l’heure, mais l’argent n’était pas le but recherché. « A nous quatre, nous avons vacciné 350 personnes. Je me suis inscrit sur un groupe WhatsApp qui construit des équipes pour vacciner et je me tiens prêt en cas de besoin. »