Décision de poids sur la faute lourde - Le Moniteur des Pharmacies n° 3360 du 13/03/2021 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 3360 du 13/03/2021
 

MONITEUR EXPERT

TRIBUNAL

Auteur(s) : Anne-Charlotte Navarro

La faute lourde est la plus grave que peut commettre un salarié. La lettre de licenciement devra démontrer son intention de nuire. Une décision de la Cour de cassation éclaire cette notion un peu floue.

LES FAITS

M. Q. est engagé le 18 mars 2002 en qualité de responsable des ressources humaines par la société SH. En mai 2011, la société SH apprend que M. Q. est associé majoritaire de la societé STTC, liée à SH. Estimant qu’en liant les deux entreprises entre elles M. Q. a commis une faute lourde, le P-dg de la société SH. licencie M. Q., le 26 juin 2011. Lequel conteste son licenciement.

LE DÉBAT

Le Code du travail recense trois types de fautes justifiant un licenciement : simple, grave ou lourde. La qualification du comportement dans l’une de ces fautes dépend de l’attitude du salarié, de son ancienneté et de ses états de service. Toutefois, les magistrats s’entendent pour considérer qu’une faute simple n’exige pas l’éviction du salarié immédiatement, ce qui est le cas d’une indiscipline ou de propos déplacés sur Internet.

La faute grave implique le départ immédiat de l’entreprise du salarié : ce peut être un comportement de harcèlement à l’encontre de collègues ou une erreur de délivrance ayant un impact lourd sur la santé du patient.

Pour un employeur, il peut être plus simple de licencier un salarié sur la base d’une faute grave, car, en cas de faute lourde, il devra démontrer l’intention de nuire du salarié. Ni l’exceptionnelle gravité des faits commis ni même le préjudice qui en résulte ne suffisent à la caractériser. C’est en l’espèce ce que reprochait M. Q. à son ancien employeur : de ne pas avoir démontré l’intention de nuire. Certes, le montage de société à son bénéfice pouvait être qualifié de faute, mais il affirmait qu’à aucun moment il n’avait eu envie de nuire à son employeur. La cour d’appel de Paris, le 29 janvier 2019, rejette le recours de M. Q. Les magistrats considèrent que « la dissimulation par le salarié de son intérêt personnel dans la réalisation d’opérations financières mettant en cause le fonctionnement de la société employeur établissait la volonté de l’intéressé de faire prévaloir son intérêt personnel sur celui de l’employeur. » Ainsi, l’existence même du montage suffit à démontrer l’intention de nuire du salarié. M. Q. forme un pourvoi en cassation.

LA DÉCISION

Le 10 février 2021, la chambre sociale de la Cour de cassation confirme l’interprétation de la cour d’appel et donne ainsi une définition de l’intention de nuire. Les magistrats retiennent qu’elle « implique la volonté du salarié de porter préjudice à son employeur dans la commission du fait fautif et ne résulte pas de la seule commission d’un acte préjudiciable à l’entreprise ». La Cour de cassation ajoute que l’appréciation des faits au regard de cette définition relève de l’interprétation des juges des tribunaux et cours d’appel. Elle estime que, dans sa décision, la cour d’appel de Paris a correctement justifié la qualification des faits. Le pourvoi de M. Q. est rejeté.

Ainsi, face à un comportement fautif, l’employeur qui souhaiterait licencier un salarié pour faute lourde devrait, dans la lettre de licenciement, s’appliquer à démontrer :

- la réalité et la gravité des faits ;

- la volonté du salarié de porter préjudice à l’entreprise ;

- le préjudice subi par celle-ci.

Cette preuve peut être apportée par tout moyen. Antérieurement, la Cour de cassation a retenu que la dégradation volontaire d’un outil de l’entreprise ou la divulgation d’informations confidentielles peuvent être des fautes lourdes.

Source : Cass. soc. 10 février 2021, n° 19-14.315.

À RETENIR

En cas de licenciement pour faute lourde, l’employeur doit démontrer, par tout moyen, la volonté du salarié de porter préjudice à l’entreprise.

Le salarié licencié pour faute lourde ne perçoit pas d’indemnité de préavis, ni de congés payés, sauf exception.

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