La course aux vaccins contre le Covid-19 s’accélère - Le Moniteur des Pharmacies n° 3344 du 21/11/2020 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 3344 du 21/11/2020
 
PANDÉMIE

EXPERTISE

AUTOUR DU MÉDICAMENT

Auteur(s) : Yolande Gauthier

La mise au point d’un vaccin contre le Sars-CoV-2 reste un enjeu majeur. Les annonces se sont succédé ces derniers jours. Mais que peut-on espérer des candidats vaccins en cours de tests cliniques ? Eléments de réponse.

L’Organisation mondiale de la santé fait état au 12 novembre de 48 vaccins en phase d’évaluation clinique, dont 11 en phase III (voir tableau). Ces essais incluant des milliers de volontaires dans le monde permettent de montrer à quel point le vaccin est efficace pour protéger contre l’infection versus placebo et aident à détecter des effets secondaires peu fréquents chez les sujets vaccinés. Aucun de ces produits n’est pour l’instant autorisé en Europe. L’Agence européenne du médicament (EMA) évalue actuellement les données préliminaires de trois d’entre eux, BioNTech/Pfizer, AstraZeneca/université d’Oxford et Moderna avec, comme pour tous les médicaments contre le Covid-19, une procédure accélérée appelée examen continu. « Cet examen se poursuivra jusqu’à ce que suffisamment de preuves soient disponibles pour étayer une demande d’AMM officielle », précise l’EMA. Ces preuves, elles commencent à s’accumuler, tout au moins dans les annonces faites crescendo par les laboratoires. BioNTech/Pfizer a ouvert le feu le 9 novembre, revendiquant un taux d’efficacité vaccinale supérieur à 90 % après l’analyse intermédiaire de 94 cas de Covid-19 sur les 164 à atteindre pour l’analyse finale. Dans la foulée, l’institut russe Gamaleya a renchéri en se targuant le 11 novembre d’une efficacité de 92 % pour son vaccin Spoutnik-V, mais fondée pour l’instant sur 20 cas confirmés de Covid-19. Le 16 novembre, c’était au tour de Moderna de déclarer une efficacité de 94,5 %, l’analyse intermédiaire ayant porté sur 90 cas.

Prêt pour 2021 ?

« Si les données sont solides, nous pourrons donner le feu vert au premier vaccin d’ici la fin de l’année et commencer la distribution à partir de janvier », a déclaré le directeur de l’EMA le 14 novembre dans le quotidien italien Il Sole 24 Ore. Les choses s’accélèrent, mais plusieurs questions demeurent quant à la production, le stockage et la distribution des candidats vaccins. Certes, les principaux laboratoires ont déjà commencé à fabriquer leur vaccin en quantité sans attendre les résultats définitifs des essais. Mais même ainsi, il n’y aura indiscutablement pas assez de doses pour pouvoir vacciner en 2021 60 % de la population mondiale, taux minimum à atteindre avant de commencer à envisager une éradication du Sars-CoV-2. Les vaccins à ARN messager (BioNTech/Pfizer, Moderna) reposent sur l’injection d’ARNm qui va induire la production transitoire, par transcription inverse, de la protéine d’enveloppe S, déclenchant ainsi une forte réaction immunitaire cellulaire et humorale. L’ARNm étant une molécule fragile, ces produits doivent être conservés à des températures très basses. Le vaccin BioNTech/Pfizer doit ainsi être stocké à - 70 °C, les doses pouvant être ensuite conservées six mois dans un congélateur à très basse température ou cinq jours entre + 2 et + 8 °C. Celui de Moderna doit quant à lui être stocké à - 20 °C, température à laquelle il peut être maintenu pendant 6 mois. Les tests du laboratoire montrent que par la suite le vaccin reste stable entre + 2 et + 8 °C pendant 30 jours. Ces considérations logistiques pèseront sans nul doute dans le choix des circuits de distribution et de vaccination.

Qui vacciner ?

Il est difficile de prédire aujourd’hui si les vaccins seront actifs chez tous les patients. Certaines catégories de population, comme les personnes âgées ou celles atteintes de pathologies chroniques, sont en effet souvent sous-représentées dans les essais cliniques, alors même que le Covid-19 est généralement plus fréquent et plus grave chez elles. Pourront-elles bénéficier tout de même des vaccins ? Cette question se pose également pour les femmes enceintes et pour les enfants, même si certains laboratoires comme Pfizer ou Johnson & Johnson ont commencé à recruter des adolescents de 12 à 18 ans pour leurs essais. Finalement, un vaccin donné sera peut-être plus approprié pour certains patients que pour d’autres, et il sera important de bien connaître ces différences.

La Haute Autorité de santé peaufine pour l’instant la stratégie vaccinale contre le Sars-CoV-2 et, dans des recommandations soumises à consultation publique jusqu’au 30 novembre, considère « qu’il serait inopportun, au début de la campagne, de rendre obligatoire la vaccination (…) que ce soit pour la population générale ou pour les professionnels de santé ».

Elle estime en effet que le calendrier de livraison des doses est trop incertain, et que les connaissances sur les futurs vaccins et leur capacité à limiter la contagion du virus sont encore insuffisantes. Les professionnels de santé auront un rôle crucial à jouer pour la bonne compréhension des objectifs de la vaccination et la confiance de la population. Il y aura fort à faire, compte tenu des nombreuses suspicions engendrées par le développement en un temps record de ces produits : environ la moitié des Français rechignerait aujourd’hui à se faire vacciner.

Le Sars-CoV-2 restera donc sans doute une préoccupation pendant encore plusieurs années. Même si le vaccin protège contre le développement d’une infection, il peut ne pas empêcher sa transmission. Une autre inconnue de taille est la durée de protection conférée. Sachant que celle de l’immunité naturelle fait toujours débat… L’efficacité démontrée dans les essais cliniques est en effet analysée peu de temps après l’injection de la deuxième dose de vaccin, lorsque la réponse immunitaire est très forte. Faudra-t-il des doses de rappel et à quel rythme ? L’avenir le dira.

Les vaccins contre le Covid-19 en phase III Sources : Organisation mondiale de la santé (OMS) ; Agence européenne du médicament (EMA).

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