Vitamine D et coronavirus - Le Moniteur des Pharmacies n° 3325 du 06/06/2020 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 3325 du 06/06/2020
 
IMMUNOLOGIE

EXPERTISE

AUTOUR DU MÉDICAMENT

Auteur(s) : Marianne Maugez

Connue principalement pour son rôle dans le métabolisme phosphocalcique, la vitamine D interviendrait également dans la régulation du système immunitaire. Retour sur cette pseudo-vitamine qui n’a pas fini de nous étonner.

La vitamine D n’est en fait pas une vitamine au sens propre du terme. « Contrairement aux vitamines A ou C qui ne sont apportées que par l’alimentation, la vitamine D peut être synthétisée au niveau de la peau à partir du cholestérol. Elle a donc un statut à part », explique Jean-Marie Bard, professeur de biochimie fondamentale et clinique à l’université de Nantes (Loire-Atlantique) et président du conseil scientifique de la Société française de nutrition. D’origine alimentaire ou endogène, la vitamine D ne peut être active qu’après deux hydroxylations. La première dans le foie est suivie d’une seconde au niveau rénal et aboutit à la 1,25-dihydroxyvitamine D3 ou calcitriol, le métabolite actif de la vitamine D.

Action osseuse et non osseuse

Le métabolite produit agit dans la régulation des niveaux de calcium et de phosphore et dans la minéralisation osseuse. « C’est le mécanisme le plus connu car, historiquement, c’est le premier qui a été découvert. Mais la vitamine D interviendrait aussi au niveau du système immunitaire », poursuit Jean-Marie Bard. Première cible du calcitriol, les récepteurs de la vitamine D (VDR pour vitamin D receptor) présents à la surface des macrophages, cellules de défense non spécifique qui participent à l’immunité innée. En présence d’agents infectieux, l’activation de ces récepteurs par fixation du calcitriol permet de réguler l’expression de gènes au sein des macrophages, pour augmenter leur activité antimicrobiologique en stimulant leur capacité à synthétiser des peptides antimicrobiens. Mais ce n’est pas tout. « Il semblerait aussi que le calcitriol agisse sur les cellules responsables de l’immunité adaptative, les cellules dendritiques, les lymphocytes T et les lymphocytes T régulateurs », détaille le spécialiste.

C’est ce qui intéresse les scientifiques actuellement car les lymphocytes T sont à l’origine de la production des cytokines responsables de la réaction inflammatoire naturelle. Récemment mises en cause par plusieurs études, les cytokines seraient produites en trop grande quantité en présence du nouveau coronavirus et induiraient une réponse inflammatoire excessive qui détruirait les tissus au lieu de les protéger. En régulant les lymphocytes T, le calcitriol permettrait de contrôler la production de cytokines inflammatoires et d’éviter ou de limiter la fibrose pulmonaire à l’origine de l’évolution défavorable des patients. « On peut envisager un effet protecteur de la forme active de la vitamine D contre l’orage cytokinique décrit par les infectiologues et les réanimateurs. Mais tout cela reste hypothétique, les données dont nous disposons se fondent uniquement sur des études in vitro. C’est une piste à explorer », indique Jean-Marie Bard.

De la théorie à la clinique

En dehors de ces études in vitro, des essais cliniques d’intervention comparant les effets de l’administration de vitamine D contre placebo ont mis en évidence une diminution de la charge virale ou des facteurs d’inflammation, tels que la protéine C-réactive (CRP pour C-reactive protein), circulant lors de certaines infections virales, notamment en cas de VIH. « Nous disposons aussi d’études sur la grippe saisonnière mais elles restent contradictoires, regrette Jean-Marie Bard. Il faudrait des études reposant sur les mêmes bases, en contrôlant no tamment la concentration initiale de vitamine D, pour tirer des conclusions. » Enfin, des études d’observation ont permis de démontrer le lien entre faible concentration du métabolite de stockage (celui qui n’a subi qu’une hydroxylation), reflet du statut en vitamine D du patient, et augmentation du taux de mortalité par infection, notamment respiratoire. « Ce sont des hypothèses reliant vitamine D et Covid mais ce ne sont que des hypothèses », souligne-t-il.

A partir de toutes ces données, l’Académie nationale de médecine a confirmé le 22 mai ses recommandations de 2012 d’assurer une supplémentation vitaminique D dans la population française. Tout en insistant sur le fait que la vitamine D ne peut pas être considérée comme un traitement préventif ou curatif de l’infection à SARS-CoV-2, l’académie précise qu’elle pourrait être considérée « comme un adjuvant à toute forme de thérapie » et recommande de doser rapidement le taux de vitamine D sérique chez les personnes de plus de 60 ans atteintes de Covid-19. Et d’administrer en cas de carence une dose de charge de 50 000 à 100 000 UI qui pourrait contribuer à limiter les complications respiratoires. Elle recommande également d’apporter une supplémentation en vitamine D de 800 à 1 000 UI par jour chez les personnes de moins de 60 ans dès la confirmation du diagnostic de Covid-19. « Compte tenu de ce que l’on sait ou ce que l’on pressent de l’activité de la vitamine D sur l’immunité, ces recommandations veulent optimiser les chances de lutte contre le Covid », conclut Jean-Marie Bard.

QUE PENSER DE LA DÉCONTAMINATION DES OBJETS PAR LES UV ?

La désinfection des vêtements par un séchage au grand air est une idée séduisante mais Géraldine Dantelle, chercheuse à l’Institut Néel (CNRS, Grenoble, Isère) est sceptique. « Cela n’a, à mon avis, pas grand intérêt. Les UV germicides n’atteignent pas la surface de la Terre. » Les ultraviolets (UV) regroupent trois catégories de rayonnements : les UVA, UVB et UVC. Les UVC sont capables d’altérer l’ADN cellulaire en scindant les liaisons entre les bases complémentaires des deux brins d’ADN provoquant la mort des organismes touchés. Heureusement, ces UVC sont bloqués par la couche d’ozone.

Avec l’épidémie de nouveau coronavirus, les UVC suscitent beaucoup d’intérêt. Des études solides ont déjà prouvé leur efficacité sur les autres coronavirus et les lampes à UVC sont utilisées pour neutraliser les microorganismes (bactéries, virus) dans des procédures hospitalières de stérilisation des surfaces. Mais même si les essais en cours démontrent l’action des UVC sur le SARSCoV2, l’utilisation des lampes UVC ne sera vraisemblablement pas destinée au grand public. Selon l’experte, « le paramètre important est la dose d’exposition aux UVC qui prend en compte la durée d’exposition et l’intensité du rayonnement. Sans oublier les précautions à prendre pendant le traitement car les UVC sont nocifs pour l’homme. » Des caractéristiques qui res treignent leur usage à un milieu professionnel. « Beaucoup de lampes vendues dans le commerce ne spécifient pas l’intensité du rayon nement lumineux émis. Or, si celui-ci est trop faible, il n’y a pas d’action germicide. »

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