L’incontinence urinaire féminine - Le Moniteur des Pharmacies n° 3324 du 30/05/2020 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 3324 du 30/05/2020
 

Cahier Formation

ORDONNANCE

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PATHOLOGIE

L’incontinence urinaire féminine en 4 questions

L’incontinence urinaire correspond à une perte involontaire et incontrôlable d’urine survenant de jour et de nuit. C’est un symptôme encore tabou alors qu’il existe des traitements efficaces.

1 QUELLES SONT LES FORMES D’INCONTINENCE ?

• Il existe cliniquement 3 types majeurs d’incontinence.

L’incontinence d’effort

Elle est la plus fréquente chez la femme (50 % des cas d’incontinence féminine). Elle est caractérisée par une fuite involontaire d’urine à l’occasion d’un effort physique non précédée de la sensation de besoin d’uriner. Trois grades permettent de caractériser l’incontinence d’effort :

– le grade I avec fuites urinaires ne survenant que lors d’un effort entraînant une élévation importante de la pression abdominale comme une toux ou un éternuement ;

– le grade II défini par une incontinence survenant au cours d’activités courantes (porter une charge, passer l’aspirateur, courir, etc.) ;

– le grade III qualifie une incontinence lors d’efforts de faible intensité (marcher ou changer de position par exemple) voire au repos.

L’incontinence d’effort résulte soit d’une altération du système de soutien périnéal, soit d’une insuffisance sphinctérienne, soit de l’association des deux. Les fuites urinaires sont diurnes et en général de faible quantité.

L’incontinence par hyperactivité vésicale

Appelée aussi incontinence par impériosité ou par urgenturie, l’hyperactivité (ou instabilité) vésicale est responsable de 25 % des incontinences urinaires chez la femme. Elle se manifeste par une perte d’urine précédée d’un besoin urgent d’uriner et une pollakiurie. Les fuites urinaires sont fréquentes, en général de grande quantité, diurnes ou nocturnes. Cette incontinence résulte d’une hypercontractilité du détrusor. Ces contractions non contrôlées s’accompagnent d’une augmentation de la pression de la vessie. Lorsque la pression vésicale devient supérieure à celle du sphincter, ce dernier, même s’il est fonctionnel, ne parvient plus à retenir l’urine et la fuite apparaît.

L’incontinence mixte

L’incontinence urinaire mixte se caractérise par la coexistence de fuites à l’effort et par impériosité. L’une des deux peut être dominante et devra être traitée en priorité. Un quart des incontinences urinaires féminines sont mixtes. Ce type d’incontinence est fréquent chez les personnes âgées.

• En outre, l’incontinence peut se manifester dans d’autres circonstances :

L’incontinence par regorgement

L’incontinence par regorgement correspond à une évacuation du « trop-plein vésical » et est donc la conséquence d’une rétention urinaire. La dysurie (miction lente et longue, à faible jet et nécessitant de pousser pour uriner) est souvent un signe annonciateur à ne pas négliger. Plusieurs causes sont constatées : obstacle urétral (fécalome qui comprime l’urètre), diminution des fibres élastiques du détrusor liée à l’âge, atonie du détrusor par atteinte neurologique (diabète, sclérose en plaques, lésions médullaires) ou dyssynergie vésico-sphinctérienne (hypertonie du sphincter, vessie neurologique), causes iatrogènes (anticholinergiques notamment, exposant au risque de rétention urinaire).

L’incontinence fonctionnelle

Elle concerne les personnes à mobilité réduite dont l’état physique ou mental empêche d’atteindre les toilettes à temps. La fonction vésicale n’est pas en cause.

2 QUELS SONT LES FACTEURS DE RISQUE OU AGGRAVANTS ?

L’incontinence est plurifactorielle :

– Facteurs gynéco-obstétricaux : affaiblissement des muscles du plancher pelvien causé par des traumatismes obstétricaux (accouchements multiples par voie basse) ou chirurgicaux, radiothérapie pelvienne, fistule vésico-vaginale, ménopause (la diminution du taux d’œstrogènes influence la tonicité du plancher pelvien).

– Facteurs neurologiques entraînant une incapacité à contrôler ou vider la vessie : AVC, maladie de Parkinson, sclérose en plaques, lésions médullaires, diabète, etc.

– Facteurs iatrogènes : diurétiques favorisant une incontinence par urgenturie et une pollakiurie, anticholinestérasiques et bêtabloquants qui contractent le détrusor, inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC), susceptibles d’induire une toux aggravant l’incontinence d’effort.

– Autres facteurs : âge, activité professionnelle ou physique exposant au port de charges lourdes, obésité, constipation (nécessitant des efforts de poussée répétée), toux chronique, consommation de boissons stimulant le détrusor (tabac, café et alcool).

3 QUELLES EN SONT LES CONSÉQUENCES ?

• Non prise en charge, l’incontinence peut avoir un retentissement sur l’hygiène et entraîner des infections urinaires, des troubles trophiques muqueux et cutanés voire des escarres, en particulier chez la personne âgée.

• Elle peut devenir invalidante et embarrassante au quotidien, induire un sentiment d’auto-dévalorisation, un repli sur soi (à l’origine d’un retrait social) et une perte d’autonomie et augmenter le risque de chutes, en particulier chez la personne âgée. Altérant la qualité de vie, elle peut mener à la dépression nerveuse.

4 COMMENT SE FAIT LE DIAGNOSTIC ?

Le diagnostic est fondé sur un interrogatoire précis et sur un examen clinique minutieux.

L’interrogatoire

• Le but est de définir le type d’incontinence et son retentissement sur la qualité de vie de la patiente.

• L’interrogatoire permet d’apprécier l’ancienneté et les circonstances déclenchantes (effort, toux, rire, incontinence précédée d’une envie pressante, etc.), l’importance des symptômes et le retentissement sur les activités sociales, professionnelles et de loisirs, ainsi que sur la sexualité.

• Il consiste aussi à préciser les antécédents gynéco-obstétricaux et chirurgicaux ainsi que les traitements médicaux en cours.

• Il permet de faire le point sur le statut hormonal de la patiente (recherche d’une ménopause et d’un éventuel traitement hormonal substitutif) et de rechercher des facteurs d’aggravation chronique de l’incontinence.

L’examen clinique

Un examen urogynécologique recherche un prolapsus génito-urinaire (une cystocèle ou une urétrocèle associée) et permet d’évaluer la qualité du plancher pelvien. L’examen à la toux permet d’objectiver une incontinence d’effort.

Les examens complémentaires

• L’examen cytobactériologique des urines recherche une infection ou une hématurie.

• L’échographie rénale et pelvienne apprécie l’état des reins, la présence de calculs, la vidange de la vessie par la mesure du résidu post-mictionnel et permet d’exclure une éventuelle tumeur.

• Le bilan urodynamique, qui dure entre 30 et 60 minutes, consiste à étudier en détail le fonctionnement de la vessie lors de son remplissage (à l’aide d’une sonde très fine) et de la miction.

PATHOLOGIE

Physiopathologie et pharmacodynamie

Une incontinence urinaire se manifeste si la pression intravésicale est supérieure aux résistances sphinctériennes. Les médicaments, indiqués seulement dans l’incontinence par hyperactivité vésicale ou mixte, permettent d’inhiber les contractions du détrusor.

ANATOMIE ET PHYSIOPATHOLOGIE

• Le bas appareil urinaire est composé de :

– la vessie, réservoir d’urine, dont la paroi musculaire lisse, le détrusor, se contracte pour expulser l’urine lors de la miction ;

– l’urètre, conduit qui part du col vésical et amène l’urine de la vessie vers l’extérieur ;

– deux sphincters : un sphincter lisse (ou interne) situé à la jonction entre la vessie et l’urètre et un sphincter strié (ou externe car entourant le sphincter lisse).

• La fonction vésico-sphinctérienne est soumise à un double contrôle neurologique : autonome (sympathique et parasympathique) et volontaire développé par l’éducation.

– Le système nerveux sympathique est support de la continence. Le nerf hypogastrique innerve le détrusor via des récepteurs bêta-adrénergiques et le sphincter lisse via des récepteurs alpha-adrénergiques. La stimulation sympathique relâche le détrusor et contracte le sphincter lisse.

– A l’inverse, le système nerveux parasympathique est moteur de la vidange de la vessie. Le nerf pelvien innerve le détrusor via des récepteurs cholinergiques muscariniques. La stimulation parasympathique contracte le détrusor lors de la miction.

– Le contrôle du sphincter strié est, quant à lui, volontaire via le nerf pudendal (dit nerf « honteux »).

• La miction résulte de contractions musculaires involontaires et volontaires du détrusor et du relâchement des sphincters.

• La continence urinaire est le résultat d’un équilibre entre la pression intravésicale et la pression urétrale. Lors de la phase de remplissage de la vessie, sous la commande du système sympathique, la vessie est relâchée (et la pression vésicale est basse), tandis que le sphincter lisse est contracté (et la pression urétrale est haute). Lorsque la vessie est pleine (environ 300 ml chez l’adulte), la distension vésicale entraîne l’activation du centre parasympathique. Elle permet la contraction du détrusor et l’inhibition du système sympathique entraînant un relâchement du col vésical. C’est le contrôle volontaire du sphincter strié qui permet d’inhiber la miction jusqu’à l’arrivée aux toilettes. Son relâchement autorise alors la miction.

• Il y a incontinence urinaire si la pression intravésicale est supérieure aux résistances sphinctériennes, c’est-àdire lorsque les forces de retenue deviennent inférieures à la pression vésicale (soit à cause d’une inefficacité sphinctérienne liée notamment à une insuffisance périnéale, soit à cause d’une anomalie de fonctionnement de la vessie).

LES MÉDICAMENTS DE L’HYPERACTIVITÉ VÉSICALE

• Les anticholinergiques : ce sont des antagonistes compétitifs et spécifiques des récepteurs muscariniques M3 du système nerveux parasympathique. Ils favorisent le relâchement des fibres musculaires lisses du détrusor et augmentent la capacité fonctionnelle de la vessie.

• Les bêta-3-agonistes (mirabégron) : le mirabégron est un agoniste puissant et sélectif des récepteurs bêta-3adrénergiques du système nerveux sympathique. Il provoque une relaxation de la vessie et en améliore le remplissage.

• Le flavoxate : c’est un antispasmodique musculotrope agissant par inhibition de la phosphodiestérase et augmentation de l’adénosine monophosphate cyclique (AMP cyclique) permettant une relaxation du détrusor. Il diminue aussi le seuil d’excitation de la vessie et augmente la capacité vésicale.

THÉRAPEUTIQUE

Comment traiter l’incontinence urinaire de la femme ?

L’incontinence urinaire féminine représente un problème majeur impactant la qualité de vie. L’évaluation de ce retentissement est un élément important de la décision thérapeutique.

STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE

Objectifs du traitement

• Le principal objectif est de rétablir une continence urinaire et d’améliorer la qualité de vie.

• L’instauration d’un traitement nécessite de définir au préalable le type d’incontinence urinaire et d’écarter la présence de causes d’irritation vésicale (cystite, tumeur et calcul) ou une pathologie neurologique sous-jacente.

• Selon les recommandations de 2003 de l’ANAES, agence désormais inclue au sein de la Haute Autorité de santé (HAS), la stratégie thérapeutique repose en premier lieu sur la mise en place de mesures hygiénodiététiques (voir Accompagner le patient, p. 14) et la correction des facteurs aggravants (voir Pathologie, p. 12). Par ailleurs, en fonction du type d’incontinence, la prise en charge fera appel à une rééducation périnéo-sphinctérienne ou un traitement médicamenteux et éventuellement à la chirurgie.

• Le traitement est évalué 8 à 10 semaines après l’initiation.

Choix du traitementIncontinence d’effortEn 1re intention

• La rééducation périnéale réalisée par un kinésithérapeute ou une sage-femme est efficace dans les deux tiers des cas. La première prescription comporte 10 à 20 séances et peut être prolongée de 10 à 15 séances supplémentaires si une amélioration est constatée. La poursuite n’est pas conseillée sans amélioration. Le bénéfice des séances perdure 1 an environ.

• Plusieurs techniques sont recommandées et peuvent être associées.

– Les exercices du plancher pelvien permettent d’identifier les muscles périnéaux et d’apprendre à les contracter.

– Le biofeedback instrumental réalisé à l’aide d’une sonde endocavitaire équipée de capteurs de pression améliore le recrutement des fibres musculaires. La patiente réalise des contractions vaginales qui sont enregistrées sur un écran de contrôle ce qui lui permet d’essayer d’en augmenter l’intensité.

– L’électrostimulation fonctionnelle, méthode passive et non douloureuse, consiste à appliquer des impulsions électriques à l’aide d’électrodes situées sur une sonde placée au contact de la muqueuse vaginale à proximité du nerf pudendal. Depuis 2007, il existe des dispositifs médicaux d’électrostimulation portables et programmables. Ils sont utilisables à domicile (Feminic U, Gyneffik, Keat, Myperitens, Urostim 2) et pris en charge en partie par l’assurance maladie.

En 2e intention

En cas d’échec de la rééducation, la chirurgie s’envisage si la gêne de la patiente est trop importante.

• La pose de bandelettes sous-urétrales a un taux de réussite de 85 % environ. Cette méthode consiste à poser une bandelette en polypropylène sous l’urètre en position trans-obturatrice (trans-obturator tape ou TOT) ou rétropubienne (tension-free vaginal tape ou TVT), pour corriger le défaut de soutien de l’urètre et du col de la vessie. Mais elle est à l’origine dans 5 à 10 % des cas de dysuries ou d’impériosités. Les 2 techniques, réalisées par voie basse, nécessitent une incision du vagin sur 1 cm environ. Elles sont réalisées en ambulatoire sous anesthésie générale le plus souvent, parfois en locorégional. Il n’y a pas de différence d’efficacité à court terme entre les 2 techniques mais, à plus long terme, la technique TVT semble plus efficace.

Les complications (rétention urinaire postopératoire, dysurie et infections urinaires) sont rares (moins de 1 % des cas). Les rapports sexuels, le port de charges lourdes et les efforts physiques intenses sont contre-indiqués pendant 4 semaines.

• La mise en place d’un sphincter artificiel est indiquée en cas d’échec à la pose de bandelettes. Cette pratique consiste à implanter autour de l’urètre un manchon hydraulique dont la patiente contrôle la pression au moment de la miction grâce à une petite pompe implantée au niveau de la grande lèvre. Elle est contre-indiquée chez les patientes démentes, en cas d’infections urinaires à répétition ou d’érosion urétrale. Une infection du matériel posé est possible.

Autres

En cas d’incontinence urinaire d’effort occasionnelle, d’incontinence due à un prolapsus ou en cas de contre-indication à la chirurgie, il est possible de placer un pessaire (anneau ou cube) dans le vagin pour soutenir les organes pelviens. L’anneau est placé et retiré par le gynécologue ou l’urologue tous les 2 mois environ. Les cubes sont manipulés par les patientes et retirés le soir. Ils sont lavés à l’eau et au savon. Des écoulements vaginaux anormaux, des saignements ou des infections urinaires doivent être signalés.

Incontinence par hyperactivité vésicaleEn 1re intention

• L’électrostimulation fonctionnelle associée à une rééducation comportementale (fondée sur l’utilisation d’un calendrier mictionnel) permet d’améliorer le contrôle des muscles du plancher pelvien et de renforcer le mécanisme inhibiteur des contractions sur le détrusor. La relaxation peut aussi être utile.

• Le traitement médicamenteux est utilisé en association ou en alternative à la rééducation.

– Les anticholinergiques (oxybutynine, chlorure de trospium, solifénacine, fésotérodine, toltérodine) sont utilisés en 1re intention. Leur efficacité doit s’observer dès 4 à 8 semaines après le début du traitement. Cependant, l’adhésion au traitement reste modérée principalement à cause d’effets indésirables atropiniques trop sévères.

– Le flavoxate représente une alternative aux anticholinergiques en cas de contre-indication, d’interaction ou d’intolérance ou lorsque les signes d’incontinence sont modérés. Cependant, il est très peu prescrit en raison d’une efficacité modeste.

– Le mirabégron est un agoniste bêta-3-adrénergique dont l’efficacité semble proche de celle des anticholinergiques. Il est principalement prescrit en cas de contre-indication ou d’intolérance à ceux-ci.

• La neuromodulation électrique transcutanée (TENS) peut être utilisée en cas d’hyperactivité vésicale réfractaire et invalidante. La pose d’une électrode externe en arrière de la malléole stimule le nerf tibial externe dans le but de corriger les afférences responsables du réflexe mictionnel. Les séances, réalisables à domicile pendant 30 minutes au moins 5 fois par semaine, améliorent l’incontinence mais l’efficacité s’estompe au bout de 2 ans.

En 2e intention

• La neuromodulation des racines sacrées du nerf rachidien permet d’inhiber le réflexe mictionnel. Cette technique nécessite l’implantation d’une électrode au niveau de la branche ventrale du 3e nerf sacré et d’un boîtier dans la fosse iliaque. Le taux d’amélioration est de 90 % et le taux de guérison fluctue entre 30 et 50 %.

• L’injection de toxine botulique tous les 6 mois dans le détrusor, par voie endoscopique sous anesthésie locale, inhibe les contractions du détrusor. Auparavant réservée aux blessés médullaires, elle est maintenant indiquée dans les hyperactivités vésicales non soulagées par les traitements habituels. Son efficacité est relative car elle supprime les épisodes d’incontinence dans 20 % des cas seulement. L’effet débute 48 heures après l’injection et perdure pendant 6 mois environ. Il existe un risque de rétention urinaire dans 5 % des cas.

• La chirurgie d’agrandissement vésical est rarement pratiquée. Elle est réservée aux vessies hyperactives neurologiques ou aux vessies devenues trop petites et douloureuses. La technique consiste à utiliser 20 à 30 cm2 d’iléon pour agrandir la vessie. La principale complication est la perforation de la portion iléale ajoutée à la vessie.

Incontinence mixte

Le bilan initial doit mettre en évidence les symptômes urinaires les plus gênants pour les prendre spécifiquement en charge.

Cas de la patiente âgée

• Les mesures hygiénodiététiques et la rééducation périnéale (sauf en cas de troubles cognitifs) sont à privilégier en 1re intention et les difficultés d’accessibilité aux toilettes doivent être prises en compte.

• En cas d’échec pour une incontinence par hyperactivité vésicale, il est possible d’utiliser des anticholinergiques mais avec prudence et à posologie progressive (initiation à mi-dose de celle utilisée chez l’adulte jeune) car les sujets âgés sont plus sensibles aux effets atropiniques. Les molécules traversant faiblement la barrière hémato-encéphalique (solifénacine, toltérodine) ou ne la traversant pas (fésotérodine, chlorure de trospium) doivent être privilégiées à l’oxybutynine (liposoluble). Chez les patientes présentant une maladie d’Alzheimer traitées par anticholinestérasique, l’association d’un anticholinergique est illogique car antagoniste (risque de diminution de l’efficacité de l’anticholinestérasique) et doit relever d’un spécialiste.

• Une œstrogénothérapie locale est conseillée quel que soit le type d’incontinence mais il est important de la faire précéder d’une phase d’hydratation du vagin (par crèmes, gels ou ovules à base de glycérol, de propylène glycol, d’acide hyaluronique et souvent enrichis en Aloe vera) pour limiter le prurit et les brûlures.

MÉDICAMENTS

Les anticholinergiques

Ils relâchent le détrusor et améliorent la compliance de la vessie. Les molécules récentes (chlorure de trospium, solifénacine, fésotérodine et toltérodine) sont mieux tolérées, notamment chez la personne âgée, et permettent de limiter le nombre de prises. L’oxybutynine est la molécule la plus ancienne et celle qui présente le plus d’effets indésirables.

• Effets indésirables : risque de rétention urinaire, sécheresse buccale, constipation, troubles de l’accommodation, sécheresse oculaire, allongement de l’intervalle QT, troubles neuropsychiques. Des troubles cognitifs, des hallucinations, une mydriase, une augmentation de la pression oculaire, une tachycardie et des troubles du rythme cardiaque sont possibles.

• Interactions : le risque d’interactions avec les molécules anticholinestérasiques (donépézil, galantamine, rivastigmine) ou à effets atropiniques (antidépresseurs, antihistaminiques H1, antiparkinsoniens, bronchodilatateurs) doit être pris en compte. Une diminution de l’efficacité des prokinétiques (métoclopramide) est possible.

Le flavoxate

Antispasmodique musculotrope, il ne présente pas d’effets anticholinergiques aux doses thérapeutiques.

• Effets indésirables : constipation, sécheresse buccale, céphalées, nausées.

Le mirabégron

C’est un agoniste bêta-3-adrénergique.

• Effets indésirables : céphalées, sensations vertigineuses, tachycardie et fibrillation atriale sont les plus fréquents. Des troubles digestifs et des infections urinaires sont possibles.

• Interactions : l’association à des inhibiteurs puissants du CYP 3A (itraconazole, kétoconazole, ritonavir, clarithromycine) en cas d’insuffisance rénale légère à modérée (DFG > 30 ml/ min/1,73 m2) est à prendre en compte car elle majore les effets indésirables cardiaques. L’association avec des substrats du CYP 2D6 (flécaïnide, fibrillation atriale sont les plus fréquents. Des troubles digestifs et des infections urinaires sont possibles.

Autres

• Une correction d’une éventuelle carence œstrogénique est possible et considérée comme utile par les spécialistes dans l’incontinence d’effort ou par hyperactivité vésicale même si les études peuvent être contradictoires.

• L’utilisation hors AMM d’œstrogènes (estriol, promestriène) en application locale, en l’absence de contre-indication (tumeurs du sein et de l’endomètre, métrorragies non diagnostiquées, accidents thrombo-emboliques récents), permet d’améliorer les urgences urinaires, de renforcer la pression sphinctérienne et de réduire le risque d’infections urinaires. Le confort de la patiente, notamment au cours des séances de rééducation, est augmenté.

PERSPECTIVES

Le laser intravaginal CO2 ou Erbium est en cours d’évaluation, il n’est pas recommandé en routine. Toutefois, cette approche est probablement intéressante lorsque l’incontinence urinaire d’intensité modérée à moyenne est associée à une atrophie de la muqueuse postménopausique. Sa tolérance est excellente. Le laser agit en stimulant l’angiogenèse vaginale et urétrale, améliorant ainsi la trophicité tissulaire, le soutien de l’urètre et la tonicité sphinctérienne.

ANALYSE D’ORDONNANCE

Mme G., 69 ans, souffre d’incontinence mixte

Mme G., âgée de 69 ans, est ménopausée depuis une vingtaine d’années. A la suite de ses 2 accouchements par voie basse, elle a suivi des séances de rééducation périnéale, en dépit desquelles sa gynécologue lui a toujours dit qu’elle avait un « périnée faible ». La cinquantaine passée, Mme G. a connu des problèmes de fuites urinaires lorsqu’elle toussait ou riait et sa gynécologue lui avait prescrit de nouvelles séances de rééducation périnéale et l’avait orientée vers un urologue. Celui-ci avait alors diagnostiqué une incontinence d’effort et, compte tenu de l’insuffisance de résultats de la rééducation, avait proposé à Mme G. la pose d’une bandelette sous-urétrale. Cela fait quinze ans que Mme G. a été opérée et, depuis, elle est suivie annuellement par son urologue. Aujourd’hui, elle l’a consulté car elle est à nouveau gênée par des fuites urinaires avec urgenturies. L’urologue initie un traitement médicamenteux.

QUEL EST LE CONdiv DE L’ORDONNANCE ?

Que savez-vous de la patiente ?

• Mme G. n’a pas de problème de santé particulier. Elle vient régulièrement à la pharmacie chercher son traitement de calcium et de vitamine D3 qu’elle prend depuis 10 ans, ainsi que du macrogol prescrit au long cours par son médecin traitant pour une constipation qui pourrait aggraver son incontinence.

• Les fuites urinaires actuelles se manifestent de temps en temps lorsqu’elle marche rapidement. En outre, elle ressent des besoins impérieux d’uriner. « Quand l’envie se fait sentir, je ne peux pas attendre et je dois trouver au plus vite des toilettes, c’est très incommodant ! », confie-t-elle au pharmacien.

Que lui a dit le médecin ?

L’urologue a expliqué à Mme G. qu’elle souff re d’incontinence mixte associant urgenturie et incontinence d’eff ort. Il met en place un traitement et souhaite la revoir au bout de 2 mois afin d’évaluer son efficacité.

LA PRESCRIPTION EST-ELLE COHÉRENTE ?

Que comporte la prescription ?

• La fésotérodine est un anticholinergique urinaire, indiqué en cas de vessie hyperactive.

• L’estriol est utilisé hors AMM dans le traitement de l’incon tinence urinaire.

Est-elle conforme à la stratégie thérapeutique de référence ?

Oui, en cas d’incontinence mixte, les signes les plus gênants sont traités. Les anticholinergiques constituent le traitement médicamenteux de première intention de l’hyper ac ti vi té vésicale.

Y a-t-il des contre-indications ?

• Mme G. ne présente pas de contre-indications à la fésotérodine : rétention urinaire, glaucome à angle fermé, myasthénie grave, insuffisance hépatique sévère, rectocolite hémorragique grave ou mégacôlon toxique.

• Mme G. ne souff re pas de métrorragies, ni de tumeur mammaire ou utérine, ni d’accidents thromboemboliques veineux qui contre-indiqueraient l’œstrogène.

Les posologies sont-elles cohérentes ?

• Oui. La dose initiale recommandée de fésotérodine est de 4 mg 1 fois par jour. Elle pourra être augmentée jusqu’à 8 mg par jour.

• La posologie initiale de Trophicrème est d’une application par jour pendant environ 3 semaines puis d’une application tous les 2 jours pendant 2 mois. La posologie d’entretien dans l’atrophie urogénitale avec urgenturie est ensuite généralement d’une application 2 fois par semaine pendant 1 mois.

QUELS CONSEILS DE PRISE DONNER ?

Utilisation des médicaments

• Les comprimés de fésotérodine doivent être avalés entiers, 1 fois par jour avec une boisson, avec ou sans nourriture. Le traitement peut être commencé le jour même.

• La crème vaginale s’administre à l’aide de l’applicateur fourni. Appliquer la crème le soir de préférence pour s’assurer qu’elle reste dans le vagin et éviter la macération à la marche. Se laver les mains avant et après l’application, nettoyer le piston et la canule de l’applicateur à l’eau savonneuse et les rincer à l’eau chaude après l’application.

Que faire en cas d’oubli ?

• Prendre le comprimé oublié dès que possible sans en prendre plus d’un par jour.

• Appliquer la crème dès que possible sans toutefois doubler la dose.

La patiente pourra-t-elle juger de l’efficacité du traitement ?

L’efficacité du traitement est attendue au bout de 6 à 8 semaines.

Y a-t-il une surveillance particulière ?

Une échographie de contrôle devra être prévue ; elle permettra notamment de vérifier l’absence de rétention urinaire.

Quels sont les principaux effets indésirables ?

• La fésotérodine peut être responsable de constipation, de sécheresse oculaire, de troubles de la vision, de sécheresse buccale, de confusion et d’agitation.

• Les principaux effets indésirables de la crème à base d’estriol sont surtout locaux : irritations ou démangeaisons, surtout en début de traitement. Des mastodynies peuvent survenir transitoirement.

Quels sont ceux gérables à l’officine ?

La sécheresse buccale et la sécheresse oculaire peuvent être soulagées respectivement grâce à des humectants (BioXtra, Hydral, Aequasyal, etc.) et à des lubrifiants oculaires (Spray Sensitive Vyséo, Optone, Aqualarm UP Intensive, Cationorm, Systane, etc.). La constipation peut être prévenue grâce à des conseils hygiénodiététiques. Le pharmacien s’assure qu’il reste du macrogol à Mme G. et lui conseille de bien le prendre. Elle doit boire suffisamment pour répondre à sa soif.

Quels signes nécessiteraient d’appeler le médecin ?

Une constipation majeure, une difficulté inhabituelle à uriner nécessiteraient d’appeler le médecin. Un œil très dur, brutalement douloureux, associé à une baisse de la vision, signes possibles d’un glaucome à angle fermé, doivent amener à consulter en urgence un ophtalmologue.

CONSEILS ASSOCIÉS

Accompagner la patiente

Pour soutenir la patiente et lui apporter des conseils adaptés, il est nécessaire de connaître l’impact de la maladie et des traitements sur la vie quotidienne et de cerner les problèmes susceptibles de se présenter pour prévenir leur survenue ou les prendre en charge.

L’INCONTINENCE URINAIRE VUE PAR LES PATIENTES

Impact sur la vie quotidienne

• Les patientes essaient souvent de limiter l’incontinence urinaire en buvant moins, ce qui expose au risque de déshydratation.

• Certaines peuvent refuser séjours ou déjeuners entre amis et avoir tendance à s’isoler et à s’exclure peu à peu de la vie sociale.

• De crainte des fuites pendant les rapports sexuels, certaines femmes peuvent les redouter et donc les éviter.

Impact psychologique

• L’incontinence est souvent vécue avec honte.

• Les patientes jeunes pensent que cela n’arrive qu’aux sujets âgés et ont tendance à cacher leur incontinence.

À DIRE AUX PATIENTS

A propos de la pathologie

• Plutôt que d’essayer d’utiliser des moyens pour « cacher » son incontinence aux autres, il convient de conseiller aux patientes d’en parler à leur médecin traitant qui pourra les orienter vers un urologue. Les rassurer en leur expliquant que cela concerne 30 % des femmes, que ce n’est pas une fatalité et qu’il existe des solutions.

• Un calendrier mictionnel, demandé par l’urologue, permet de connaître le mieux possible le « fonctionnement de la vessie » au moment du bilan diagnostique mais également de vérifier l’efficacité du traitement.

• Des exercices de renforcement du périnée peuvent limiter le risque de fuites urinaires. Les masseurs-kinésithérapeutes et les sages-femmes peuvent pratiquer les séances de rééducation périnéale et montrer des exercices à réaliser au quotidien.

• Insister sur l’importance de la rééducation périnéale après un accouchement.

Conseils hygiénodiététiques

• Veiller à maintenir une consommation de 1,5 l d’eau par jour mais réduire celle d’alcool, de thé et de café, particulièrement diurétiques ou irritants vésicaux. Il convient de conseiller aux patientes d’aller aux toilettes régulièrement (toutes les 2 heures et avant de sortir) en évitant de se retenir et de limiter la consommation de boissons 2 heures avant le coucher. Proposer le port de vêtements commodes permettant un déshabillage facile et rapide.

• Conseiller de vider la vessie avant les rapports sexuels. Trouver les positions (souvent latérales) qui exercent le moins de pression sur la vessie et l’urètre permet de limiter les fuites durant les rapports.

• Encourager l’arrêt du tabac et la réduction pondérale. Une activité physique modérée permet de contribuer à la perte de poids. Lutter contre la constipation qui aggrave l’incontinence.

A propos des médicaments

• Les effets indésirables des anticholinergiques sont nombreux et liés à leur mécanisme d’action. Ils sont d’autant plus fréquents que la patiente est âgée et polymédicamentée, présentant des altérations cognitives, une dépression, une dénutrition, des troubles neurosensoriels, une instabilité posturale, etc. Il convient notamment d’être particulièrement prudent, voire de privilégier une autre classe thérapeutique en cas d’administration de médicaments ayant le même mécanisme d’action (autres atropiniques comme les imipraminiques, les phénothiazines, les antihistaminiques H1, etc.) ou un mode d’action antagoniste comme les anticholinestérasiques utilisés dans la maladie d’Alzheimer.

• La constipation peut être prévenue grâce à des mesures hygiénodiététiques : bonne hydratation, alimentation équilibrée et riche en fibres, exercice physique adapté, etc.

• La sécheresse buccale peut être limitée grâce à une bonne hydratation et grâce à l’utilisation d’humectants buccaux.

• L’utilisation de collyres hydratants peut soulager la sécheresse oculaire.

A propos des protections absorbantes

• Les protections ne sont qu’un palliatif. L’achat de protections est l’occasion d’ouvrir le dialogue pour orienter les patientes vers une consultation spécialisée.

• Il existe diff érentes protections qui sont à choisir en fonction de la fréquence et du volume des fuites. Pour mieux conseiller les patientes, il est préférable de leur donner des échantillons pour tester la protection qui leur conviendra le mieux.

• Il existe des protège-slips et des protections anatomiques, des sous-vêtements absorbants et des changes complets. Les protections destinées aux fuites liées à une incontinence d’eff ort sont discrètes. Les changes complets munis d’ailett es en scratchs ou avec ceinture intégrée s’adressent particulièrement aux fuites urinaires importantes (notamment liées à une hyperactivité vésicale) ou aux personnes alitées. Avant de poser un change complet, il faut le déplier puis le plier longitudinalement pour lui donner une forme incurvée de godet, ce qui permet aussi de décoller les voiles latéraux de sécurité « anti-fuite ». Les sous-vêtements absorbants sont recommandés aux personnes mobiles et peuvent être intéressants à conseiller chez des patientes souff rant de démence de type Alzheimer qui ont tendance à arracher les ailett es des changes complets.

• Les protections sont conçues de manière à rester sèches le plus longtemps possible grâce à une absorption rapide de l’urine et sans odeur. Elles doivent toutefois être changées régulièrement pour éviter toute macération et risque d’escarres. Leur utilisation nécessite une hygiène intime particulièrement douce : toilett e avec un produit adapté et séchage en tamponnant. Sur les peaux matures, il est conseillé d’utiliser un produit de toilett e au p H compris entre 4,5 et 5,5 et d’appliquer une crème ou une mousse dermoprotectrice.

• Une aide pour l’achat des protections peut être obtenue via l’allocation personnalisée d’autonomie (APA).

L’INCONTINENCE URINAIRE FÉMININE

Délivreriez-vous ces ordonnances ?

• OUI, le latanoprost est un collyre analogue de prostaglandines destiné au traitement du glaucome à angle ouvert. Cette forme de glaucome, due à une modification progressive de la perméabilité du trabéculum et représentant 90 % des cas de glaucome, ne contreindique pas l’utilisation des anticholinergiques urinaires comme la solifénacine. En revanche, du fait de leur action mydriatique, les anticholinergiques sont contre-indiqués en cas de glaucome à angle fermé et de risque de glaucome par fermeture de l’angle (patients prédisposés par un angle irido-cornéen étroit, ce qui est souvent le cas des hypermétropes).

• OUI, l’ordonnance peut être délivrée, mais l’antiémétique demandé n’est pas adapté à Mme F. En effet, la métopimazine est un antagoniste dopaminergique phénothiazinique qui exerce une action secondaire anticholinergique. Il est préférable d’éviter l’association de 2 anticholinergiques, a fortiori chez les sujets âgés (d’autant que le chlorure de trospium est ici prescrit à la posologie maximale), car elle expose au risque d’addition d’effets indésirables atropiniques (sécheresse buccale, troubles visuels, constipation, dysuries, troubles mnésiques et comportementaux) particulièrement mal tolérés par les patients âgés.

Les autres antiémétiques allopathiques disponibles sans ordonnance présentent tous un effet anticholinergique. Il faut avant tout rappeler à Mme F. certains conseils hygiénodiététiques (se laver soigneusement et régulièrement les mains, éviter les aliments gras et fortement odorants, privilégier riz, pâtes et viandes blanches, veiller à boire régulièrement par petits volumes). De l’homéopathie peut éventuellement être conseillée. En l’absence d’amélioration rapide, une consultation médicale doit impérativement être encouragée.

• NON, pas sans avoir appelé le médecin. En effet, la galantamine est un anticholinestérasique visant à augmenter les transmissions cholinergiques par action parasympathomimétique indirecte. L’oxybutynine, anticholinergique urinaire, est quant à elle un antagoniste du système nerveux parasympathique franchissant la barrière hématoencéphalique. L’association de ces 2 médicaments est donc illogique car elle expose au risque de diminution de l’efficacité de la galantamine. Bien qu’il ne s’agisse que d’une interaction à prendre en compte, il est préférable d’appeler le médecin pour discuter avec lui du risque d’aggravation des troubles cognitifs et lui suggérer un autre anticholinergique qui ne traverse pas la barrière hémato-encéphalique (comme le chlorure de trospium ou la fésotérodine) ou encore le flaxovate, antispasmodique urinaire sans action anticholinergique.

LES CHIFFRES

• L’incontinence urinaire concernerait 3 millions de Français, un nombre probablement sousestimé car 43 % des Français la considèrent comme un sujet tabou et seules 30 % des femmes incontinentes consultent pour ce symptôme.

• La prévalence de l’incontinence urinaire de la femme est de 20 à 30 % en France.

• La fréquence et la sévérité augmentent avec l’âge.

L’ESSENTIEL

• L’incontinence urinaire est definie par une perte involontaire d’urine.

• Il existe 3 principales formes cliniques d’incontinence : incontinence d’effort, incontinence par hyperactivité vésicale et incontinence mixte.

• Seules 30 % des femmes incontinentes consultent.

TÉMOIGNAGE

JANINE, 90 ANS, RETRAITÉE

« Il y a environ 20 ans, comme beaucoup de femmes de mon âge, j’ai commencé à avoir régulièrement des fuites urinaires dès que je faisais un effort. Quand cela a commencé à devenir gênant, j’ai consulté mon médecin généraliste. Il m’a prescrit des séances de rééducation du périnée chez le kiné, qui n’ont eu aucune efficacite, et m’a parallèlement orientée vers un urologue. Celui-ci a recherché les causes de mon incontinence. A la suite d’examens, il m’a indiqué que mon urètre “tombait” et qu’une opération chirurgicale pourrait être utile. On m’a donc posé une bandelette transurétrale sous coelioscopie. Je me suis très rapidement remise de l’opération et, depuis, je n’ai plus jamais eu de problème de fuites. »

POLLAKIURIE

Augmentation de la fréquence des mictions.

DÉTRUSOR

Muscle lisse situé dans la paroi de la vessie sous la dépendance du système neurovégétatif.

CYSTOCÈLE

Hernie (ou descente) de la vessie dans le vagin faisant saillie au niveau de la vulve de façon plus ou moins importante.

URÉTROCÈLE

Saillie de l’urètre dans le canal vaginal. Elle est souvent accompagnée d’une cystocèle (cysto-urétrocèle).

POINT DE VUE

DELPHINE GIRARD, kinésithérapeute libérale spécialisée en pelvi-périnéologie à Lentilly (Rhône)

« Il y a toujours un bénéfice à la rééducation périnéale »

Quelle technique de rééducation pratiquez-vous le plus souvent ? Y a-t-il une différence d’efficacité démontrée entre les différentes techniques ?

Le biofeedback est une des techniques ayant une efficacite documentee dans la litterature scientifique. Cependant, il n’y a pas une technique a privilegier. Il faut connaître et savoir utiliser toutes les techniques, y compris les exercices de renforcement de la sangle abdominale, afin de pouvoir les appliquer de facon pertinente. Le choix est à l’appréciation du kinésithérapeute en fonction des patientes (certaines étant réfractaires aux techniques utilisant une sonde) et surtout du bilan initial permettant de déterminer les facteurs responsables de l’incontinence. Par exemple, dans certains cas, la tonicité du plancher pelvien ne sera pas forcément à corriger, mais il vaudra mieux travailler sur le renforcement du muscle abdominal transverse ou sur la correction de certains comportements délétères.

Y a-t-il un bénéfice à la rééducation quel que soit l’âge des patientes ?

Ma patiente la plus agee a 96 ans ! Il y a toujours un benefice a la reeducation puisque les séances s’accompagnent d’une éducation et de conseils qui permettront à la patiente d’adapter son hygiène de vie et de mieux se connaître. Il est vrai que dans la population la plus âgée les résultats obtenus ne sont pas toujours optimaux mais les patientes en tirent toujours un benefice.

Y a-t-il des contre-indications à la rééducation ?

Il y a des contre-indications à l’électrostimulation, comme la grossesse, les pathologies tumorales intrapelviennes, le port d’un pacemaker, les infections urogénitales ou encore les déchirures importantes pouvant entraîner une paralysie du périnée. Par ailleurs, la rééducation périnéale est limitée par la présence de troubles cognitifs.

L’ESSENTIEL

• Le mécanisme d’apparition de l’incontinence doit être recherché pour en optimiser la prise en charge.

• Traitement de l’incontinence urinaire d’effort :

– en 1re intention : mesures hygiénodiététiques et rééducation pelvienne.

– en 2e intention : chirurgie.

• Traitement de l’incontinence par hyperactivité vésicale :

– en 1re intention : rééducation périnéale ou anticholinergiques en cas d’échec de la rééducation.

– en 2e intention : neuromodulation sacrée ou injection de toxine botulique

VIGILANCE !

Certaines contre-indications sont à connaître :

• Anticholinergiques :

– tous : rétention urinaire, glaucome par fermeture de l’angle, myasthénie, allaitement, affections gastrointestinales sévères (dont mégacôlon toxique, rectocolite hémorragique sévère, occlusion intestinale, iléus paralytique, etc.) ;

– chlorure de trospium : tachyarythmie ;

– solifénacine : patient hémodialysé, insuffisance hepatique ou renale sévère ;

– fesoterodine : insuffisance hépatique sévère.

• Flavoxate : lésions obstructives gastro-intestinales ou iléus, hémorragies gastro-intestinales, achalasie, rétention urinaire, glaucome par fermeture de l’angle.

• Mirabégron : hypertension artérielle sévère non contrôlée (PAS ≥ 180 mmHg ou PAD ≥ 110 mmHg).

COMPLIANCE

Pression de remplissage de la vessie.

ACHALASIE

Anomalie de la motricité traduisant une anomalie à se relâcher.

QU’EN PENSEZ-VOUS ?

Mme G. demande une boîte de doxylamine car elle a du mal à dormir en ce moment. Le pharmacien peut-il lui délivrer ?

1) Oui

2) Non

Réponse : la doxylamine et la fésotérodine sont 2 molécules à effet atropinique qui ne doivent pas être associées au risque de voir leurs effets indésirables (rétention urinaire, crise aiguë de glaucome à angle fermé, constipation, sécheresse de la bouche, etc.) s’additionner. La deuxième proposition est la bonne.

QUESTION DE PATIENTE

« J’ai l’habitude de faire de la zumba. Mais avec mon incontinence, vaut-il mieux que j’arrête ? »

« Oui, la zumba au cours de laquelle vous faites de nombreux sauts risque d’aggraver votre incontinence urinaire. Vous devez de même éviter la course à pied. Il est cependant conseillé de continuer à pratiquer des activités sportives mais préférez les sports doux, sans à-coups et sans sauts tels que le yoga, le pilates ou le tai chi ou encore les sports à décharge comme la natation. »

L’ESSENTIEL

• Insister sur l’importance d’une consultation et l’encourager pour permettre la prise en charge la mieux adaptée. Insister sur l’intérêt de la rééducation périnéale.

• Pour limiter le risque de fuites urinaires, conseiller de limiter thé, café et alcool et de lutter contre la constipation.

• Être acteur lors de la vente de protections : ouvrir le dialogue, remettre des échantillons et donner des conseils d’utilisation et de toilette intime.

• Attention aux effets indésirables et aux interactions des anticholinergiques.

EN SAVOIR PLUS

Association française d’urologie

urofrance.org

Le site internet de l’Association française d’urologie propose des informations destinées au grand public sur ce qu’est l’incontinence, ses traitements et les différents types de chirurgie. Un calendrier mictionnel est également disponible en téléchargement.

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