Angine : du Trod à la prise en charge des patients - Le Moniteur des Pharmacies n° 3309 du 22/02/2020 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des pharmacies n° 3309 du 22/02/2020
 
SPÉCIAL

Cahiers Formation du Moniteur

Ordonnance

Auteur(s) : CAHIER COORDONNÉ PAR  ALEXANDRA BLANC,  PHARMACIENNE 

ÉDITO


OUVREZ LA BOUCHE ET DITES «   TROD   »

Ouvrez la bouche et dites « TROD »

Il faudra s’habituer désormais à entendre cette phrase dans l’enceinte de l’officine : ouvrez la bouche et dites « A ». A comme angine, comme streptocoque bêta-hémolytique du groupe A et comme antibiotique. Mais aussi, A comme « Avez-vous tous les éléments pour commencer sereinement cette nouvelle mission confiée aux pharmaciens ? ». Après la vaccination antigrippale, le remboursement de la réalisation par le pharmacien du test rapide d'orientation diagnostique (Trod) pour déterminer si une angine est d’origine virale ou bactérienne vient à nouveau bousculer la pratique officinale. Les conditions précises de prise en charge de cet acte n’ont, à l’heure où nous écrivons ces lignes, pas encore paru au Journal officiel. Mais nous ne manquerons pas de les décrypter, dans un second cahier Formation. Une chose est déjà sûre, il faudra être formé. Car gratouiller le fond de la gorge des patients demande une certaine dextérité. Le Moniteur des pharmacies sera également là pour vous accompagner. En attendant, il est utile de se préparer à répondre aux questions des patients. Car il y a fort à parier que, rapidement, ils vous sollicitent et, si les médecins acceptent de jouer le jeu, que cette activité prenne de l’ampleur.

Alexandra Blanc, directrice des formations

PATHOLOGIE 

LES ANGINES EN 4 QUESTIONS

Inflammation aiguë d’origine infectieuse des amygdales palatines, l’angine est le plus souvent une affection bénigne. Des complications graves nécessitant une hospitalisation sont cependant possibles : elles sont le fait d’angines bactériennes.

1 VIRALE OU BACTÉRIENNE ?


Dans la grande majorité des cas et quel que soit l’âge, l’infection de l’angine est d’origine virale (adénovirus, virus influenzae, para-influenzae, etc.).
Les angines bactériennes sont moins fréquentes (25 à 40 % des cas chez l’enfant et 10 à 25 % des cas chez l’adulte) et sont le plus souvent dues au streptocoque bêta-hémolytique du groupe A (SGA), ou Streptococcus pyogenes.
En fonction du germe responsable, plusieurs formes cliniques d’angines qui orientent le diagnostic sont à distinguer.


2   QUELLES SONT LES FORMES CLINIQUES ?


Le tableau clinique présente des caractéristiques communes à toutes les formes. Il associe une douleur pharyngée augmentée par la déglutition (odynophagie) et parfois d’autres signes infectieux : fièvre, rhinorrhée, toux, otalgie réflexe, adénopathies cervicales, douleur abdominale (notamment chez l’enfant).
L’examen clinique relève des anomalies de l’aspect de l’oropharynx permettant de distinguer 5 formes cliniques. Les angines érythémateuses (ou angines « rouges ») et érythémato-pultacées (angines « blanches ») sont les plus fréquentes.


ANGINE ÉRYTHÉMATEUSE

L’oropharynx est inflammatoire, les amygdales sont rouges avec un volume augmenté. Cette forme d’angine accompagne volontiers des infections virales (rougeole, varicelle) mais parfois aussi bactériennes comme la scarlatine, due à un SGA producteur d’une toxine et s’accompagnant d’une éruption cutanée.

Angine érythémato-pultacée
En plus des caractéristiques précédentes, les amygdales sont recouvertes par endroits d’un dépôt purulent blanchâtre. Cette forme d’angine peut être due au SGA ou à des virus.

ANGINE PSEUDOMEMBRANEUSE

Les amygdales sont recouvertes d’une fausse membrane (plaques confluentes nacrées ou grisâtres). Ce type d’angine évoque une diphtérie due à Corynebacterium diphtheriae, devenue rare grâce à la vaccination, ou une mononucléose infectieuse due au virus d’Epstein-Barr.


ANGINE VÉSICULEUSE

L’oropharynx présente des vésicules. Cette forme d’angine est due à un virus : primo-infection herpétique ou virus coxsackie responsable du syndrome pieds-mains-bouche touchant les jeunes enfants (lésions vésiculeuses aux extrémités associées à une angine vésiculeuse).

ANGINE ULCÉRONÉCROTIQUE

Les amygdales présentent des zones ulcérées et nécrosées. Cet aspect fait notamment évoquer une angine de Vincent, d’origine bactérienne survenant dans un condiv de mauvaise hygiène buccodentaire : la symptomatologie est souvent bruyante avec dysphagie importante et fièvre. Cette forme d’angine peut aussi être un symptôme d’une hémopathie ou d’un cancer de l’amygdale. Les autres diagnostics possibles sont liés à des infections sexuellement transmissibles (IST) : le chancre syphilitique et l’angine gonococcique (rare).

3 COMMENT SE FAIT LE DIAGNOSTIC ?

Il repose sur la présence de symptômes évocateurs et sur l’aspect clinique de l’oropharynx.
Cependant, ceux-ci n’ont qu’une valeur d’orientation et ne suffisent généralement pas à définir l’origine, virale ou bactérienne, de l’infection. Certains signes orientent donc vers une origine virale : pas ou peu de fièvre, existence d’une toux, d’un enrouement, d’une rhinorrhée, d’une conjonctivite ou d’une diarrhée, présence de vésicules au niveau de l’oropharynx ; d’autres vers une origine bactérienne, notamment une angine à SGA : caractère épidémique de l’infection (hiver, début du printemps), apparition brutale des symptômes, fièvre supérieure à 38 °C, douleur intense ou adénopathies douloureuses (présence de ganglions sensibles) ou encore absence de toux.
Ces données ont amené à développer le score clinique de Mac Isaac, utilisable chez l’adulte mais sans valeur chez l’enfant, les symptômes étant plus trompeurs (voir page 9).Un autre outil est utilisé pour aider à la démarche diagnostique : le test rapide d’orientation diagnostique de l’angine ou Trod oropharyngé (voir page 6).


4 QUELLES COMPLICATIONS ÉVENTUELLES ?

Les angines, y compris celles à SGA, évoluent généralement vers la guérison en 3 à 4 jours, même en l’absence de traitement médical. Cependant, les angines bactériennes peuvent parfois entraîner des complications.


INFECTIONS LOCORÉGIONALES

Ce sont actuellement les plus courantes. Elles peuvent être favorisées par un terrain immunodéprimé, un diabète ou la prise de corticoïdes ou d’anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS). Toutes nécessitent une hospitalisation : phlegmon péri-amygdalien (hypersialorrhée, œdème de la luette, trismus),abcès para- ou rétropharyngé (dysphagie importante, dyspnée, fièvre, torticolis), adénite cervicale suppurative (douleurs cervicales puis torticolis fébrile avec altération de l’état général) et cellulite cervicofaciale qui correspond à la diffusion de l’infection aux zones profondes de la face et du cou et constituant une urgence médicochirurgicale.


COMPLICATIONS GÉNÉRALES

Exceptionnelles dans les pays industrialisés grâce à l’antibiothérapie, elles sont dues à la formation de complexes immuns circulants qui se déposent dans certains organes.
Le rhumatisme articulaire aigu (RAA) débute 15 à 20 jours après l’angine. Il touche surtout les articulations mais des manifestations cardiaques et neurologiques, à l’origine de séquelles graves, sont possibles. Les facteurs de risque du RAA sont des antécédents personnels de RAA, des épisodes multiples d’angines à SGA, des séjours en région d’endémies du RAA (Afrique ou DOM-TOM) et la précarité.
La glomérulonéphrite aiguë apparaît 2 à 3 semaines après l’angine. Elle se manifeste par une hypertension artérielle et des œdèmes et peut conduire à une insuffisance rénale aiguë.
Le choc toxique à SGA est une réaction inflammatoire systémique aiguë d’évolution rapide (fièvre élevée, hypotension importante, parfois éruption cutanée diffuse) due à certaines toxines produites par la bactérie, engageant le pronostic vital.

POINTS CLÉS SUR L’ANGINE


- AGENTS EN CAUSE : UN VIRUS DANS 60 À 90   % DES CAS. PARMI LES BACTÉRIES RESPONSABLES, LE STREPTOCOQUE BÊTA-HÉMOLYTIQUE DU GROUPE A (SGA) EST LA PLUS FRÉQUENTE

- Epidémiologie : en France, 10 à 12 millions d’angines diagnostiquées chaque année (HAS 2012). Propagation toute l’année (pic hiverno-printanier pour l’angine à SGA)
- Mode de contamination : transmission par voie aérienne (toux, éternuements et postillons), par contact direct (baiser, mains souillées) ou indirect (objet récemment souillé)
Pour l’angine à SGA
- Incidence : pic entre 5 et 15 ans, rare avant 3 ans et exceptionnelle avant 18 mois (les amygdales palatines n’étant pas encore suffisamment développées) ; diminution de la fréquence à partir de 45 ans
- Incubation : 1 à 7 jours
- Contagiosité : jusqu’à 48 heures après le début de l’antibiothérapie et 2 à 3 semaines en l’absence de traitement

Mono-nucléose infectieuse
Les signes cliniques évocateurs, survenant dans un condiv d’asthénie marquée, sont un purpura pétéchial du voile (taches hémorragiques pourpres au niveau du voile du palais), une splénomégalie (augmentation du volume de la rate, palpable à l’examen clinique) ou encore un ictère conjonctival (lié à une cytolyse hépatique). Le diagnostic est souvent porté à la suite d’un rash cutané lors de la prise d’une pénicilline.
Trismus
Contraction involontaire des muscles de la mâchoire bloquant l’ouverture de la bouche.

les amygdales

Formations lymphoïdes constituant l’anneau de Waldeyer, les amygdales, ou tonsilles, jouent un rôle essentiel dans les défenses immunitaires. Trois types d’amygdales sont à distinguer :

- Les amygdales palatines, appelées simplement « amygdales », visibles depuis l’entrée de la bouche de part et d’autre de la luette, dont l’inflammation aiguë, d’origine bactérienne ou virale, définit l’angine. L’hypertrophie des amygdales palatines est liée chez l’enfant au processus de maturation immunitaire. Elle peut parfois être à l’origine d’angines récidivantes ou de difficultés respiratoires (ronflement, sommeil agité, fatigue diurne, etc.) nécessitant leur ablation ;

- Les amygdales pharyngées ou végétations adénoïdes (non visibles depuis la bouche), en arrière du voile du palais, avec prolongement tubaire à l’entrée de la trompe d’Eustache ;

- Les amygdales linguales (non visibles depuis la bouche), à la base de la langue.

LE TEST RAPIDE D’ORIENTATION DIAGNOSTIQUE (TROD) DE L’ANGINE

Contrairement à l’autotest qui est directement réalisé par le patient (autotest VIH, test de grossesse, etc.), le test rapide d’orientation diagnostique, ou Trod, nécessite l’intervention d’une tierce personne habilitée à manipuler le test et à interpréter le résultat. A partir d’un prélèvement pharyngé, le Trod de l’angine permet, grâce à une réaction immunochromatographique, de mettre en évidence l’antigène de paroi du streptocoque bêta-hémolytique du groupe A.

LES CONDITIONS DE RÉALISATION À L’OFFICINE

Depuis 2016, les pharmaciens sont autorisés à réaliser les Trod de l’angine selon certaines conditions fixées dans l’arrêté du 1er août de cette même année. En 2020, la réalisation de ces tests est rémunérée par l’Assurance maladie. L’arrêté de 2016 définit 3 conditions nécessaires à la réalisation du Trod de l’angine à l’officine.
Espace de confidentialité.
Afin de préserver le secret médical, le test doit s’effectuer à l’écart du comptoir dans des locaux adaptés.
Information au médecin.
L’article 2 de l’arrêté précise que « le professionnel de santé, qui réalise le test, en adresse, avec le consentement du patient, le résultat à son médecin traitant ou au médecin désigné par le patient ». L’information est idéalement transmise par messagerie sécurisée.
Procédure d’assurance qualité.
Une procédure d’assurance qualité doit être mise en place par le pharmacien qui réalise les tests en officine. Elle comporte 2 parties :

- UNE FICHE D’ASSURANCE QUALITÉ, À RÉDIGER AVANT DE COMMENCER L’ACTIVITÉ . CETTE FICHE PRÉCISE LA FORMATION SUIVIE PAR LE PHARMACIEN POUR POUVOIR PRATIQUER LE TEST, LE MODE D’EMPLOI DU TEST TEL QUE PRÉVU PAR LE FABRICANT, LES MODALITÉS DE COMMUNICATION DU RÉSULTAT DU TEST AU PATIENT, LA PRISE EN CHARGE DU PATIENT EN CAS DE POSITIVITÉ DU TROD AINSI QUE LES MESURES D’ÉLIMINATION DES DÉCHETS D’ACTIVITÉ DE SOINS À RISQUES INFECTIEUX (DASRI).


- UNE FICHE RÉCAPITULANT LES MODALITÉS DE TRAÇABILITÉ DE L’UTILISATION DU TEST POUR CHAQUE PATIENT (À INSCRIRE DANS LE DOSSIER PATIENT). DANS CETTE FICHE DOIT FIGURER LE RÉSULTAT DU TEST, LA MARQUE ET LE NUMÉRO DU TROD UTILISÉ, LA DATE ET L’HEURE DE RÉALISATION ET L’IDENTIFICATION DU PROFESSIONNEL DE SANTÉ AYANT RÉALISÉ LE TEST.



AUTRES MESURES

Non citées dans l’arrêté de 2016, certaines mesures peuvent également être mises en place. L’Union régionale des professionnels de santé (URPS) pharmaciens Ile-de-France a notamment recommandé aux officines participant à une expérimentation régionale en septembre 2014 de réaliser le test dans la même approche que les bonnes pratiques de laboratoire. Pour cela, le port d’une blouse fermée, d’un masque et de gants était recommandé. Il était aussi demandé de s’attacher les cheveux si nécessaire.


EN PRATIQUE


QUI EST CONCERNÉ ?

L’arrêté de 2016 ne précise pas la population ciblée par le Trod de l’angine à l’officine. Cependant, la Haute Autorité de santé (HAS), en novembre 2016, rappelle qu’il est recommandé d’effectuer un Trod de l’angine chez les enfants de plus de 3 ans (avant cet âge, les angines à streptocoque A sont très rares) et les adultes se présentant à l’officine avec un mal de gorge. Pour ces derniers, la pratique d’un Trod est subordonnée au résultat du test de Mac Isaac. Ce questionnaire attribue des points aux symptômes associés au mal de gorge, chaque point augmentant la probabilité d’une infection à streptocoque A. Le Trod est réalisé quand le score du test de Mac Isaac est égal ou supérieur à 2. A l’officine, il est préférable d’orienter les enfants de moins de 10 ans vers une consultation médicale car les maux de gorge peuvent être le symptôme de maladies infantiles qui nécessitent une prise en charge spécifique.
La rémunération de la réalisation du Trod de l’angine à l’officine serait, elle, prévue chez l’enfant à partir de 10 ans et chez l’adulte.


PRÉLÈVEMENT

Le prélèvement se fait à l’aide d’un écouvillon. Les amygdales, le pharynx et toutes les zones inflammatoires, ulcératives ou exsudatives doivent être écouvillonnés. Indolore, le prélèvement peut sembler désagréable pour le patient, notamment en raison du réflexe nauséeux qu’il peut susciter. Un patient détendu contractera moins le pharynx (d’où un accès facilité aux amygdales) et sera moins sujet aux nausées. Il est donc essentiel d’installer confortablement le patient, de le mettre en confiance avant de réaliser le test et de prendre le temps d’expliquer la manœuvre. Pour obtenir un prélèvement de qualité, une bonne visibilité de la gorge est nécessaire. Le recours à une source de lumière est recommandé.


LIMITES DU TEST

Les tests actuellement sur le marché ont déclaré avoir une sensibilité au streptocoque A au moins égale à 90 % et une spécificité de réaction supérieure à 95 %. Certaines situations peuvent néanmoins amener un résultat erroné :
- une mauvaise conservation du kit de test ou du prélèvement peut altérer la qualité du test (faux positif) ;
- la précision du test dépend de la qualité du prélèvement. Le pharmacien doit s’assurer de respecter les consignes de bon usage de l’écouvillon ;
- un résultat négatif n’exclut pas une infection à un streptocoque appartenant à un autre sérogroupe que le groupe A ou à un autre agent pathogène ;
- un résultat négatif peut être obtenu chez des patients au début de la maladie par concentration insuffisante en antigènes.
En cas de test négatif devant un tableau évocateur d’angine infectieuse, un nouveau prélèvement doit être réalisé et testé par les méthodes traditionnelles de culture, en laboratoire d’analyse médicale.


LA MISSION PRISE EN CHARGE

Afin d’augmenter le recours aux Trod pour le diagnostic des angines à streptocoque A et ainsi limiter les prescriptions inutiles d’antibiotiques, un avenant à la convention pharmaceutique a été signé le 18 septembre 2019 par l’Assurance maladie, l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) et la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). Ce div prévoit la prise en charge par l’Assurance maladie de la réalisation du Trod par les pharmaciens et fixe les rémunérations possibles en fonction du parcours du patient. 

Le TROD en officine : une histoire à rebondissements

Dès 2002, les Trod de l’angine ont été mis, gratuitement, à disposition des médecins généralistes pour améliorer le bon usage des antibiotiques et lutter contre l’antibiorésistance. Face à une utilisation relativement faible du Trod par les médecins, le 11 juin 2013, un arrêté est publié, autorisant sa réalisation par les pharmaciens d’officine. A la suite d’une plainte du Syndicat national des médecins biologistes qui dénonçait une procédure irrégulière, cet arrêté a été annulé par le Conseil d’Etat le 8 avril 2015.

Finalement, l’arrêté du 1er août 2016, paru au Journal officiel le 5 août 2016, autorise à nouveau les pharmaciens à réaliser le Trod pour la détection des angines à streptocoques A, au même titre que les Trod nasopharyngés pour la détection de la grippe et les tests capillaires d’évaluation de la glycémie dans le cadre d’une campagne de dépistage du diabète. En 2020, la réalisation du Trod de l’angine en officine est prise en charge par l’Assurance maladie.

Liste du matériel à prévoir pour la réalisation du test

 Blouse

 Gants à usage unique

  Dispositif lumineux (lumière frontale, lumière de bureau orientable, etc.)

  Kit de test (2 flacons de réactifs, tube d’extraction, portoir, écouvillon, bandelette réactive, abaisse-langue)

 Point d’eau ou solution hydroalcoolique

 Minuteur

 Sac de récupération Dasri

THÉRAPEUTIQUE 

PRISE EN CHARGE DES ANGINES

Seules les angines bactériennes, dans la grande majorité des cas dues au streptocoque bêta-hémolytique du groupe A, justifient une antibiothérapie. L’amoxicilline est recommandée en première intention.

STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE


OBJECTIFS

En cas d’angine bactérienne, l’antibiothérapie permet de diminuer la durée des symptômes et de prévenir la survenue de complications locorégionales ou générales. La mise en route d’un traitement antibiotique, même chez les patients à risque de rhumatisme articulaire aigu (RAA) lié au streptocoque bêta-hémolytique de type A (SGA), n’est jamais une urgence. Le risque de RAA est prévenu même en cas d’antibiothérapie tardive (jusqu’à 9 jours après le début des symptômes). Le traitement antibiotique vise aussi à diminuer le risque de dissémination du SGA.
En cas d’angine virale, le traitement est uniquement symptomatique.


ANTIBIOTHÉRAPIE



INDICATIONS

Avant 3 ans : les angines étant le plus souvent d’origine virale, le Trod n’est pas indiqué et le traitement n’a pas lieu d’inclure une antibiothérapie.
Chez l’enfant de plus de 3 ans : un Trod pharyngé dépistant le SGA est systématiquement réalisé et entraîne une antibiothérapie s’il est positif.
Chez l’adulte : l’antibiothérapie est indiquée en cas de score de Mac Isaac supérieur ou égal à 2 et de Trod positif. Les angines ulcéreuses ou ulcéronécrotiques justifient une antibiothérapie adaptée au germe suspecté ou retrouvé sur le prélèvement.


CHOIX DE L’ANTIBIOTIQUE

Angines à SGA
Chez l’enfant : l’amoxicilline est recommandée en première intention durant 6 jours. En cas d’allergie aux pénicillines sans contre-indication aux céphalosporines, le traitement repose sur le cefpodoxime pendant 5 jours. En cas de contre-indication aux bêta-lactamines, les macrolides sont préconisés : azithromycine, clarithromycine et josamycine.
Chez l’adulte : l’amoxicilline sur 6 jours est également le traitement de première intention. Céfotiam, cefpodoxime et céfuroxime sont indiqués en cas d’allergie aux pénicillines sans contre-indication aux céphalosporines. L’azithromycine, la clarithromycine et la josamycine sont recommandées en cas de contre-indication aux bêta-lactamines.
Eviction de la collectivité : en cas d’angine à SGA (dont la scarlatine), une éviction de la collectivité est recommandée les 2 premiers jours de l’antibiothérapie.
Evolution : en cas de persistance des symptômes (fièvre, dysphagie) après 3 jours, une réévaluation de la prise en charge est nécessaire.
Autres angines
Scarlatine : le traitement de cette angine due à un SGA est le même que celle d’une angine streptococcique.
Angine de Vincent : le traitement repose sur la prescription d’une pénicilline associée à des soins bucco-dentaires.
Diphtérie : l’isolement du patient (1 mois), la sérothérapie antidiphtérique et une antibiothérapie (amoxicilline ou macrolides en cas d’allergie aux bêta-lactamines) doivent être mises en place rapidement.


A DIRE AUX PATIENTS

Pour limiter les risques d’antibiorésistance, respecter les doses prescrites et la durée du traitement est essentiel, même si les symptômes ont disparu. Inversement, des durées de traitement trop longues sont inutiles et concourent également à favoriser des résistances bactériennes.


TRAITEMENTS SYMPTOMATIQUES

Antalgique/antipyrétique. Le paracétamol est la molécule de référence chez l’enfant et l’adulte. Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) et les corticoïdes sont à proscrire car ils peuvent masquer les premiers signes d’une infection sévère ou atypique et favoriser des complications locorégionales (phlegmon, cellulite cervico-faciale, etc.). Les corticoïdes restent cependant indiqués en cas de mononucléose infectieuse (confirmée par la sérologie) dans les formes avec hypertrophie majeure des amygdales et gêne respiratoire.
Traitements locaux(voir page 14). Ils sont proposés sous la forme de pastilles à sucer ou de collutoires, avec, toutefois, une efficacité modeste.


LES ANTIBIOTIQUES RECOMMANDÉS


AMOXICILLINE

Elle constitue le traitement de référence de l’angine à SGA à raison de 2 prises par jour sur 6 jours. Utilisée pour traiter une mononucléose infectieuse, l’amoxicilline peut induire un rash cutané, sans lien avec une réaction allergique mais probablement dû à une réplication accélérée du virus.
Effets indésirables : essentiellement des troubles digestifs (diarrhées, nausées), plus rarement des réactions d’hypersensibilité pouvant inclure œdème de Quincke, choc anaphylactique, syndrome de Steven-Johnson ou syndrome de Lyell. Des candidoses cutanéo-muqueuses sont rapportées.
Interactions : l’association au méthotrexate est déconseillée (risque d’augmentation des effets et de la toxicité hématologique de ce dernier). L’association à l’allopurinol augmente le risque d’éruption cutanée.


CÉPHALOSPORINES

Les céphalosporines sont indiquées en deuxième intention, en cas d’allergie aux pénicillines, car elles favorisent (plus encore que l’amoxicilline) l’émergence de bactéries productrices de bêta-lactamases. Chez l’enfant et l’adulte, le cefpodoxime, céphalosporine de 3e génération (C3G), est indiqué sur une durée de 5 jours. Chez l’adulte, sont également utilisables le céfotiam (C3G) pendant 5 jours et le céfuroxime (C2G) pendant 4 jours. Du fait d’une mauvaise acceptation, les suspensions buvables de céfuroxime (Zinnat) ne sont plus recommandées chez l’enfant. Des comprimés à 125 mg sont néanmoins utilisables à partir de 6 ans.
Effets indésirables : principalement troubles gastro-intestinaux (diarrhées, nausées, douleurs abdominales, etc.) et manifestations allergiques (urticaire, rash, etc.) pouvant inclure des réactions graves (œdème de Quincke, syndromes de Steven-Johnson et de Lyell).
Pas d’interactions majeures recensées.


MACROLIDES

L’azithromycine, la clarithromycine ou la josamycine sont recommandées en cas de contre-indications aux bêta-lactamines. L’azithromycine s’administre en 1 seule prise quotidienne sur 3 jours du fait d’une demi-vie prolongée (2 à 4 jours). La clarithromycine et la josamycine sont indiquées sur une durée de 5 jours. La télithromycine (Ketek) a une AMM à partir de 12 ans dans les angines à SGA lorsque les autres antibiotiques ne sont pas appropriés du fait d’un risque élevé de résistance bactérienne. En pratique, ce traitement n’est pas remboursé dans cette indication ni recommandé du fait de sa toxicité (vertiges, pertes de connaissance, troubles visuels, etc.).
Effets indésirables : les plus fréquents sont digestifs (diarrhées, nausées, vomissements et douleurs abdominales). Des anomalies de la fonction hépatique sont rapportées ainsi que des allongements de l’intervalle QT (pouvant être à l’origine d’arythmies et de torsades de pointes).
Interactions : les macrolides (sauf la spiramycine) sont contre-indiqués en association à l’ergotamine et à la dihydroergotamine (risque d’ergotisme) et à la colchicine (augmentation de ses effets indésirables). Leur association aux dérivés de l’ergot de seigle dopaminergiques (bromocriptine, cabergoline, lisuride) est déconseillée. Par ailleurs, l’association à des molécules donnant des torsades de pointes (cisapride, amiodarone, dompéridone, mizolastine, ivabradine, citalopram, etc.) est, selon le cas, contre-indiquée, déconseillée ou doit se faire avec précaution. La clarithromycine est également contre-indiquée avec l’alfuzosine et la simvastatine et déconseillée avec les immunosuppresseurs (ciclosporine, tacrolimus, etc.) et le rivaroxaban, entre autres.


AMÉLIORER LE CONFORT


DU PATIENT


MESURES NON MÉDICAMENTEUSES

Hydrater les muqueuses oropharyngées (boire suffisamment, sucer des bonbons sans sucres) aide à les lubrifier et à soulager temporairement la douleur. Il est également recommandé d’éviter les atmosphères surchauffées et enfumées qui augmentent l’irritation ; humidifier l’air est préférable ainsi que maintenir une température de 19 °C au maximum dans la chambre.
Eviter les aliments irritants (trop acides, trop épicés ou trop durs) pour ne pas exacerber la douleur.
Des gargarismes d’eau salée (une demi-cuillère à café de sel dans un verre d’eau) sont parfois proposés, l’action hypertonique contribuant à éliminer les pathogènes ou les molécules irritantes.


TRAITEMENTS SYMPTOMATIQUES



PARACÉTAMOL

C’est la molécule privilégiée au cours des angines chez l’enfant et chez l’adulte. La posologie est de 500 à 1 000 mg par prise chez l’adulte et l’enfant de plus de 50 kg (15 ans environ), à renouveler au bout de 4 heures au minimum et sans dépasser 3 g par jour, voire 4 g par jour en cas de douleurs importantes en l’absence de contre-indications (insuffisance rénale sévère ou insuffisance hépatique, alcoolisme chronique). Pour les enfants et les adultes de moins de 50 kg, la posologie est de 60 mg/kg par jour à répartir toutes les 4 ou 6 heures (au maximum 15 mg/kg par prise) sans dépasser 3 g par jour.
Effets indésirables : rares aux doses préconisées et en traitement court. Le principal risque est lié au surdosage (notamment par cumul de plusieurs spécialités) ou à l’association du paracétamol à l’alcool avec, comme conséquences, des atteintes hépatiques graves et, parfois, des atteintes rénales aiguës.


TRAITEMENTS LOCAUX

Leur intérêt est limité. Les pastilles et comprimés ne sont pas indiqués avant l’âge de 6 ans en raison d’un risque de fausse route. Les collutoires sont contre-indiqués avant 30 mois (risque de laryngospasme). A noter que beaucoup (y compris parmi les compléments alimentaires ou les dispositifs médicaux) renferment de l’alcool.
Les antiseptiques locaux (chlorhexidine, biclotymol, cétylpyridinium, etc.) peuvent provoquer des irritations locales et pourraient déstabiliser la flore microbienne locale lors de traitements prolongés. La chlorhexidine peut induire une coloration brune de la langue et des dents, réversible à l’arrêt du traitement.
Les anesthésiques locaux (lidocaïne, tétracaïne, etc.) calment la douleur mais leur efficacité est brève. En raison du risque de fausse-route, il est recommandé de ne pas les prendre avant un repas. Ils sont contre-indiqués avant 6, 12 ou 15 ans selon les références et s’utilisent dans tous les cas avec prudence chez les plus jeunes. Les déconseiller aux personnes ayant des troubles de la déglutition.
L’ambroxol a des propriétés anti-inflammatoires et anesthésiques locales. Il peut exposer (fréquence indéterminée ou rare) à des réactions d’hypersensibilité (dont choc anaphylactique) et à des réactions cutanées parfois graves.
Le corticoïde local tixocortol (dans Thiovalone notamment) expose à des réactions allergiques. Il est contre-indiqué en cas de candidose ou d’infection à Herpes simplex virus.
L’alpha-amylase (Maxilase) a une balance bénéfice-risque défavorable dans les maux de gorge. Cette enzyme à visée anti-inflammatoire peut être à l’origine de réactions d’hypersensibilité, généralement cutanées (urticaires, démangeaisons, etc.), parfois sévères (angio-œdèmes, bronchospasmes, etc.). L’apparition d’une éruption cutanée, de difficultés respiratoires ou d’un gonflement du visage implique l’arrêt du traitement et une consultation médicale rapide.
Le flurbiprofène (Strefen, à partir de 12 ans), AINS en pastilles à sucer sur prescription médicale, peut induire les mêmes effets indésirables que les AINS par voie générale. Toutes les contre-indications relatives à ces derniers sont de mises, notamment antécédents d’ulcère gastroduodénal, insuffisances hépatique, rénale et cardiaque sévères et grossesse à partir du 6e mois. Des récidives d’ulcère gastrique ont été signalées à la suite de prises de pastilles de flurbiprofène. Comme avec les autres AINS, il existe un risque potentiel d’extension locale de l’infection.
La propolis, utilisée pour renforcer les défenses naturelles et pour ses effets apaisants et protecteurs des muqueuses dans les maux de gorge, peut induire des réactions d’hypersensibilité tout comme la gelée royale. L’Anses recommande d’éviter la consommation de ces produits en cas d’allergie aux pollens ou de prédispositions aux allergies en général ou à l’asthme.
Les dispositifs médicaux : à base d’acide hyaluronique, de glycérol ou d’extraits végétaux, ils visent à former un film protecteur vis-à-vis des agents pathogènes ou irritants et à favoriser leur drainage via une action hyperosmotique. Certains dispositifs sont utilisables selon les indications du fabricant dès 1 an. Certaines références peuvent renfermer des huiles essentielles (à utiliser avec prudence chez certains patients ou les jeunes enfants) ou de la propolis.
Cellulite cervico-faciale
Infection des zones profondes de la face et du cou se développant à partir d’une infection banale pharyngée ou dentaire, et favorisée par un condiv d’immuno-dépression ou la prise d’un AINS ou de corticoïdes.
Syndrome de Steven-Johnson et Syndrome de Lyell
Encore appelées nécrolyses épidermiques toxiques, ces dermatoses aiguës et graves, potentiellement mortelles, se caractérisent par la destruction brutale de la couche superficielle de la peau et des muqueuses. Le syndrome de Lyell concerne les formes les plus étendues.
Anses
Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail.

Vigilance !

Attention à certaines contre-indications des antibiotiques.

Amoxicilline : hypersensibilité à la pénicilline ou antécédents de réaction d’hypersensibilité immédiate sévère à une autre bêta-lactamine.

Céfotiam, cefpodoxime, céfuroxime : allergie aux céphalosporines. Céfotiam : insuffisance rénale sévère.

Azithromycine, clarithromycine, josamycine : allergie aux macrolides. Clarithromycine : allongement de l’intervalle QT, hypokaliémie, antécédent de torsades de pointes. Azithromycine : insuffisance hépatique sévère.

L’amygdalectomie

L’ablation des amygdales a pour principales indications l’hypertrophie amygdalienne symptomatique (à l’origine d’obstruction des voies aériennes et notamment d’apnées du sommeil) voire les angines récidivantes (7 dans l’année ou 5 par an 2 ans de suite). L’amygdalectomie intracapsulaire, qui consiste à n’enlever que le tissu amygdalien obstructif, est de plus en plus réalisée : elle permet des suites opératoires moins douloureuses et semble diminuer le risque hémorragique.

- Prise en charge de la douleur. Chez l’enfant, l’ibuprofène (20 à 30 mg/kg par jour en 3 à 4 prises) est notamment indiqué en association au paracétamol dans la prise en charge d’une douleur modérée en post-amygdalectomie ; le tramadol ou la morphine sont indiqués en cas de douleur intense. La codéine est contre-indiquée après amygdalectomie (ou adénoïdectomie) en raison d’un risque de dépression respiratoire.

- Surveillance durant 15 jours ! Outre une douleur importante les premiers jours, pouvant persister 1 à 2 semaines, la principale complication est le risque hémorragique, rare mais grave, nécessitant une surveillance clinique les 2 premières semaines : tout saignement du nez ou de la bouche impose de contacter en urgence l’hôpital.

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